« Il est impossible de souffrir plu lontems les ordures qui se font au presbitaire. » La paroisse entre tolérance et condamnation de la sexualité des gens d’Église (xvie-xviiie siècle)

“It is impossible to endure any longer the filthy things occurring at the rectory.” The parish, between tolerance and condemnation of the sexuality of the clergy (16th-18th centuries)

„Es ist unmöglich, das Dreckige, das im Pfarrhaus gemacht wird, länger auszuhalten.“ Die Kirchengemeinde zwischen Toleranz und Verurteilung der Sexualität der Kirchenvertreter (16.-18. Jahrhundert)

DOI : 10.57086/sources.256

p. 107-124

Résumés

Au regard des règles ecclésiastiques, depuis le Moyen Âge central, les prêtres sont censés ne pas avoir de vie sexuelle. Mais 451 procédures criminelles menées devant plusieurs officialités de France du Nord à l’époque moderne prouvent le contraire. Au travers de ces sources et en dépit de leur formatage, il est possible de saisir les représentations que les fidèles se faisaient de l’inconduite sexuelle des desservants. Les dépositions des témoins trahissent l’indifférence ou l’indulgence des fidèles à l’égard des prêtres concubinaires qui partagent leur quotidien. Le faible nombre d’actions collectives devant la justice traduit l’existence d’une régulation menée à l’intérieur même de la communauté paroissiale. Les rares cas de plaintes résultent d’une accumulation de griefs et d’un sentiment de mise en danger du groupe. Le discours des fidèles se conforme alors aux attendus de l’Église tridentine.

According to ecclesiastical rules, since the High Middle Ages priests were supposed not to enjoy any sexual life. But 451 criminal proceedings conducted in several ecclesiastical courts in the North of France in the modern period show the opposite. Despite their standardized forms, these sources can help grasp the ways the faithful envisioned the sexual misconduct of the priests. The testimonies of the witnesses betray their indifference or tolerance for the priests who lived in a non-marital relationship in their midst. The small number of collective actions brought to court show that there was a process of regulation led within the parish itself. The rare complaints resulted from an accumulation of grievances and a feeling that the group was being endangered. In these cases, the declarations of the faithful conformed to the principles of the Tridentine Church.

Sarah Dumortier holds a Ph.D. in modern history from the university of Lille.

Den kirchlichen Regeln entsprechend, hatten die Priester seit dem Hochmittelalter sexuelle Enthaltsamkeit zu pflegen. 451 Kriminalprozesse, die an mehreren Kirchengerichten im Norden Frankreichs geführt wurden, belegen jedoch das Gegenteil. Trotz ihrer Formatierungen ermöglichen diese Quellen einen Zugang zu den Vorstellungen der Gläubigen über das sexuelle Fehlverhaltens der Kirchenvertreter. Die Zeugenaussagen verraten die Gleichgültigkeit oder Nachsichtigkeit der Gläubigen gegenüber den Partnerschaften von Pfarrern, mit denen sie ihren Alltag teilten. Die geringe Anzahl von kollektiven Handlungen spricht für regulierende Vorgänge innerhalb der Kirchengemeinde. Die seltenen Fälle von Anklagen resultierten aus der Anhäufung von Vorwürfen und einem Gefühl der Gefahr für die Gruppe. Die Diskurse der Gläubigen stimmten dabei mit den Erwartungen der tridentinischen Kirche überein.

Sarah Dumortier hat an der Universität Lille in Geschichte der Neuzeit promoviert.

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La conjugalité et la sexualité des ecclésiastiques sont honnies et condamnées et ce, officiellement, depuis le concile de Latran en 1139, l’ordination devenant alors un empêchement dirimant de mariage. Or, force est de constater dans les fabliaux du Moyen Âge, dans les divers traités sur le célibat ecclésiastique1 qui émaillent les siècles de l’Ancien Régime ou dans les sources judiciaires, qu’une minorité dévoyée exerce dans les paroisses tout au long de l’époque moderne. Aborder la question du regard des paroissiens sur la vie amoureuse et/ou sexuelle de l’ecclésiastique, qu’il soit curé, prêtre habitué, chapelain ou vicaire2, nécessite de recourir, presque essentiellement, aux archives des officialités, c’est-à-dire des tribunaux ecclésiastiques3. Ces sources permettent au chercheur de découvrir un théâtre du quotidien où une sociabilité particulière règne entre le prêtre délinquant et ses fidèles. On constate dès lors que ces interactions sociales sont fort éloignées des exigences de perfection pastorale où le bon prêtre doit porter les marques de son état, se tenir à l’écart et faire rejaillir sa sainteté sur les fidèles. En effet, les différents conciles, synodes et ordonnances amenaient le prêtre à se conduire comme s’il n’était pas doté d’un corps, d’un sexe ou de pulsions ; il devenait l’époux et le père d’une paroisse, un père parfait accomplissant le devoir sacerdotal, se livrant tout entier à ses ouailles, sans rien devoir à une femme. Sa vie était consacrée à Dieu, il était l’homme juste, raisonnable, pilier de la sociabilité de l’Ancien Régime dont l’existence n’était faite que de labeur et de prières et dont le seul plaisir tenait à la Révélation.

Ce modèle de perfection n’apparaît pas dans les sources compulsées. En revanche, ce qui transparaît très clairement est que l’ecclésiastique délinquant est un notable, un proche, un voisin, qui partage un même mode de vie, des préoccupations communes et qui se place avant tout au cœur de la communauté villageoise. Ce vivre ensemble est alors perturbé par la ou les liaisons du prêtre et l’interrogation majeure est de savoir comment ce qui est un champ d’étude pour l’historien a été perçu par les paroissiens. Or, l’attitude des fidèles face aux réalités sexuelles des ecclésiastiques est difficile à définir tant les documents judiciaires sont formatés. En effet, dans quelle mesure les propos rapportés sont-ils ceux des paroissiens ou de l’institution ? Cependant, la teneur des reproches, les actions individuelles ou collectives relatées, les rumeurs et multiples ouï dire laissent entrevoir la matérialité de ces interactions et les avancées de la réformation catholique. On découvre alors les représentations que les fidèles ont de ce qui est « hors-normes » ; on peut établir les comportements acceptés, voire admirés, et les attitudes moquées et parfois condamnées même si, en fonction de nos sources répressives, toute normalisation reste impossible. Il s’agit en tout état de cause de distinguer les réactions qui ont pour cadre la paroisse de celles qui s’expriment face à la justice.

Le regard des fidèles : entre connivence et désapprobation

Dans le cadre du quotidien qu’est la paroisse, le premier point à souligner est que le prêtre « délinquant » est avant tout un voisin, un proche avec qui la communauté paroissiale vit et interagit. Un recrutement sacerdotal local, estimé à 30 % environ dans les territoires étudiés, favorise ce phénomène4 ; il n’est d’ailleurs pas rare, dans les sources, de découvrir que la famille de l’ecclésiastique vit dans la paroisse où il exerce et qu’elle partage avec les habitants les déconvenues sentimentales du fils, du frère ou du cousin5. L’enracinement de l’ecclésiastique au cœur de la paroisse fait davantage de lui un « pays », un local, un voisin, certes intercesseur avec les saints, qu’un homme à considérer avec une déférence particulière. Les paroissiens s’accommodent au reste très bien de ces familiarités et cette proximité.

L’insertion des prêtres dans la vie locale

De surcroît, à côté de cet enracinement local, ajoutons que sous l’Ancien Régime, « existences et trajectoires se construisent et s’intègrent au sein d’un système de réciprocité et d’échanges qu’est le voisinage6 » ; si bien que la liaison sentimentale d’un prêtre ne peut rester secrète bien longtemps. Au sein de la paroisse, tout se sait, tout le monde s’observe et la notion de vie privée est étrangère à la communauté, ce qui est un frein à l’intimité de l’ecclésiastique dit déviant. Au quotidien, le voisin prête main-forte, pratique l’hospitalité, accueille et invite l’ecclésiastique, ce qui développe un sentiment très vif d’appartenance à une même communauté et crée une proximité forcée révélant au grand jour les comportements de l’homme d’Église. L’ecclésiastique délinquant est avant tout un membre du voisinage qui se retrouve donc soumis au regard vigilant et, parfois, moqueur des paroissiens. La curiosité que les ouailles témoignent pour la vie du curé est révélatrice de cette réalité communautaire.

De plus, le prêtre partage les mêmes lieux et occasions de sociabilité. En témoignent les soirées au cabaret qui peuvent dégénérer comme on l’apprend dans le dossier du curé Coust. Après avoir bu, fumé et chanté, il se retrouva « obligé de coucher sur le foin avec quelques paysans7 ». De même, à Renne, dans le diocèse de Reims, le curé s’enivre fréquemment avec ses fidèles et une fois la nuit bien avancée, ils rentrent retrouver femme et enfants8. Il est à propos de relever dans ce cas que nous sommes davantage dans le registre des solidarités masculines que dans celui de la hiérarchie laïcs-ecclésiastique. La présence de l’homme de Dieu dans les banquets de noces est également un indicateur de cette familiarité, surtout lorsque ce dernier se conduit comme un laïc et se laisse mener dans quelques danses ou ivrogneries. Ainsi, dans le diocèse de Beauvais, le curé de Bienville s’est « comporté avecq trop de liberté en certaines nopces faictes au village de Longueriel Sainte Marie, passé par dessus la table pour s’approcher de certaines filles et femmes et les baiser et caresser9. »

Les actes de la vie quotidienne sont d’autres indicateurs de cette proximité. Les travaux des champs amènent, à leur tour, une indistincion avec les paroissiens. Par exemple, à Muizon, dans le diocèse de Reims, en 1731, le curé conduit lui-même sa voiture pleine de fumier avant de rentrer au presbytère où l’attend sa compagne10. Les conflits de voisinage annihilent également les différences de statut entre l’ecclésiastique et ses fidèles. Le curé de Quarte-Pont, dans le diocèse de Cambrai, est en conflit permanent avec le « prévost dudit lieu » en raison de l’occupation d’un champ, ce qui provoque injures et joutes verbales, alors que des paroissiens tentent de jouer les médiateurs et de calmer le curé lorsqu’il s’emporte11. Nous sommes loin du curé médiateur magnifié par la réformation tridentine qui, avec discernement, incite les paroissiens à régler leurs différends ou à résoudre des affaires délicates où la morale familiale ou sexuelle a été bafouée12. Comment pourrait-il intercéder s’il est lui-même fautif ?

Ces relations de familiarité s’expliquent aussi parfois par les propos que l’ecclésiastique tient dans la paroisse et qui manquent totalement de retenue. Sans entrer dans le détail des chiffres, plus d’une soixantaine de fois, on peut lire que l’homme de Dieu confiait ses doutes, ses craintes conjugales ou sexuelles aux fidèles. Sans vouloir réaliser un catalogue, voici quelques cas permettant d’appréhender concrètement ces réalités qui se déroulent aussi bien au xvie siècle que longtemps après la réformation tridentine :

Dans le diocèse de Troyes, en 1515, le curé de Granges-sur-Aube s’inquiète de la possible grossesse de sa compagne auprès de six à huit femmes de la paroisse en ces termes : « pour une ou deux fois qu’on a cognu charnellement une femme, est-il possible d’engendrer génération13 ? » Gabriel de Vuailly, curé d’Armancourt dans le diocèse de Beauvais, se rend chez une paroissienne, Charlotte Careluy, et lui témoigne sa joie après que sa maîtresse, enceinte, est tombée d’un arbre, risquant ainsi une fausse-couche14. À Cambrai, le curé Lustin Marotte interpelle ses voisins car « il souffroit à la partie » et se renseigne ainsi sur son mal : « si ledit sieur estoit homme marié, il auroit cru que le mal qui souffroit seroit arrivé de ce qu’il se seroit trop eschauffé et fait un trop grand effort allentour de sa femme15. » Toujours dans le diocèse de Cambrai, le curé de Bertry confie à Estienne le Clercq, berger mais également fils spirituel du curé, son désarroi face aux scènes de jalousie de sa compagne Anne-Catherine Salingre à l’égard de Magdeleine Vallet, sa maîtresse16.

De fait, comment éviter la familiarité et le partage des solidarités lorsque l’ensemble des protagonistes est issu du même milieu et a des préoccupations similaires ? Pierre de Vaissière a montré les difficultés des curés de campagne au xviiie siècle ; seuls leur solide position, leur morale irréprochable et leur caractère sacré leur laissaient la possibilité de sortir des querelles17. Dans le cas présent, la morale du desservant est déficiente, ce qui conduit encore davantage les paroissiens à le considérer comme l’un des leurs, à ne plus faire de distinction entre temporel et spirituel, à le soumettre à la chose publique et à juger, finalement, de cette sexualité condamnable judiciairement.

Perception générale de la sexualité des prêtres

Quelle est la perception de la sexualité, interdite, de l’homme d’Église ? Quels sont les comportements des fidèles face à la sexualisation du curé ou du desservant ? En théorie, la réponse devrait être brève, puisque la sexualité ecclésiastique est hors normes. Or, la réalité est différente et de multiples comportements apparaissent dans les sources. Néanmoins, il faut préciser d’emblée que c’est, majoritairement, une indifférence teintée d’acceptation latente qui prédomine dès lors que le service divin est correctement effectué. Notons, d’ailleurs, que dans plusieurs dossiers criminels, où les offices sont déclarés satisfaisants, des paroissiens excusent le prêtre car « c’est une faulte des hommes18 ». La liaison de l’homme d’Église n’est ni bien ni mal perçue, elle s’intègre à la vie de la communauté. Cependant, force est de constater que les archives mettent également en évidence des ecclésiastiques admirés, réputés pour leur agilité amoureuse et d’autres moqués, décriés, critiqués.

À Étouy, dans le diocèse de Beauvais, en apprenant la nomination de leur curé Adrien Tallon à Angivillers, les paroissiennes s’exclament « que c’estoit un bon gaillard et que s’il y avoit de belles filles et de belles femmes audict Angivillers, qu’il les auroit19. » À Pleurs, dans la Marne, les prouesses du curé suscitent également l’admiration : en plus de vivre avec deux sœurs, d’avoir « fortz sobvent commerce charnel », il « auroit toutes les filles s’il le vouloit » comme un témoin le stipule20. Ces hommes suscitent une certaine admiration, ce qui fait ainsi passer au second plan le rapport entre célibat et sacerdoce. Après analyse des divers témoignages, cette bienveillance positive transparaît dans 21 dossiers de procédure. Les dépositions ou le truchement des propos rapportés donnent à voir des ecclésiastiques dont le comportement sexuel provoque l’envie. Toutefois, il est important ici de préciser qu’en grande majorité on admire un séducteur qui est doté d’une certaine morale. C’est-à-dire que le prêtre débauché, multipliant les liaisons, n’attire pas sur lui l’admiration de ses paroissiens et ce, malgré une sexualité qui devait faire bien des envieux. On admire l’homme de Dieu vigoureux mais fidèle, débauché mais sensible. On admire un homme de cœur, écartelé entre des aspirations contradictoires, entre l’office et le plaisir. Cet homme admiré est certes vu davantage comme un homme de pouvoir que comme un ecclésiastique, mais l’admiration n’est présente que si la morale et l’honorabilité de l’ecclésiastique sont sauves. Les prêtres qualifiés de « vils » ou d’« infâmes » ne sont pas loués pour leur réputation de séducteur.

Quand les moqueries s’accumulent et les insultes fusent

Viennent ensuite les moqueries pour 46 ecclésiastiques. La conjugalité ou la sexualité de l’ecclésiastique sont tournées en dérision comme dans le cas du curé Jean Cuvelier, diocèse de Cambrai, dont les paroissiens évoquent les deux servantes en ces termes : « disant que l’une estoit pour les dimanches et l’autre pour les jours ouvriers, les autres disant qu’il avoit deux bonnes lepvrières21. » Des chansons publiques sur les mœurs dissolues du curé circulent dans l’ensemble des diocèses étudiés. On joue des tours à l’ecclésiastique, comme le vol de ses vêtements sacerdotaux lorsqu’il est couché avec sa maîtresse22. Cependant, ces railleries restent bon enfant et témoignent d’une forme d’attachement des fidèles à leur desservant. Il est du reste à noter que, dans aucun des dossiers de procédure évoquant ces moqueries, les paroissiens n’ont saisi la justice ; ils présentent les abus de leur desservant sans les condamner et, parfois même, les excusent.

La situation est différente lorsque de la moquerie naît l’insulte. Toutefois, les joutes verbales, quand elles éclatent, ne visent pas uniquement les mœurs du curé et rappellent bien souvent des conflits plus ancrés, une animosité durable de l’insulteur envers l’ecclésiastique. L’analyse des invectives adressées aux prêtres dévoyés sexuellement est difficile à établir tant elles relèvent de la proximité entre clergé et fidèles et abordent l’ensemble des points de discorde. Ces mots visent l’honneur clérical, puisqu’on traite le prêtre de « bougre », « coquin », « jean foutre » « putassier » ou « foutu bec », mettant ainsi en avant son statut d’ecclésiastique non respectueux de la chasteté, mais on le traite aussi « d’ivrogne », de « voleur », de « petit chien ». Ces offenses relatives aux mœurs du prêtre s’inscrivent dans un contexte plus global et visent surtout à piquer au vif un voisin avec qui on a des problèmes. Doit-on finalement considérer ces insultes comme une remise en cause des comportements sexuels des prêtres invectivés ? Oui, parce que ce faisant l’insulteur rappelle que l’homme de Dieu a franchi les limites de sa conduite et ne respecte pas la morale attendue. Oui, dans le sens où c’est « un outrage, une insulte, une parole injurieuse pour offenser quelqu’un, en lui reprochant quelque défaut, ou quelque vice vrai ou faux23 », mais aucun prêtre ne fut injurié uniquement pour ses débordements sexuels. Moqué, raillé, certes, mais très rarement insulté, tout au moins d’après les sources. Toutefois, aucun des 451 prêtres du corpus ne se porte en justice pour obtenir réparation de ces injures à caractère sexuel, craignant davantage l’official que quelques paroles douteuses.

Moqueries et insultes sont bien souvent liées à la jalousie des hommes envers ce prêtre qui leur vole des femmes. C’est une jalousie qui est bien compréhensible quand on pense au recul de l’âge au mariage et aux difficultés à se marier. Leur dépit transparaît par le truchement des témoignages, mais il prend parfois des formes très violentes, qui témoignent de l’exaspération et de l’aversion de ces célibataires. Dans le diocèse de Châlons-en-Champagne, un jeune homme, tellement aigri de constater que la demoiselle qu’il convoite lui préfère le curé de Vitry-le-François, n’hésite pas à insulter et à saisir par le col le curé pendant la messe24. Le tout dégénère presque en bagarre générale et on voit clairement ici que la sexualité du prêtre n’est plus acceptable. De même, en 1515, à Hancourt, dans le diocèse de Troyes, des jeunes hommes, exaspérés par la liaison du curé avec la jeune Jeanne qui refuse constamment leurs avances, vont finalement user de violence. Se regroupant, ils jettent des pierres sur le presbytère, l’assiègent, enlèvent Jeanne, insultent et frappent le curé… Cela débouche sur un bain de sang puisque le curé, son père et ses frères se rendent chez les provocateurs armés d’un épieu, de javelines et d’arbalètes en proférant « tue, tue, mort Dieu ! », et le curé atteint mortellement l’un d’entre eux25.

Les débordements du desservant peuvent également amener les paroissiens à jouer les médiateurs, à raisonner le clerc, à lui faire part des dangers de ses frasques sexuelles sans pour autant le dénoncer aux autorités. Ils sont mécontents mais agissent à l’intérieur de la communauté, utilisant ce qu’on appelle communément l’infra-justice26. Ils montrent souvent davantage d’inquiétude pour leur confesseur que de mécontentement. Ainsi, toujours à Hancourt, les paroissiens s’émeuvent, plus qu’ils ne s’offusquent, de la liaison du curé. Dans les témoignages du dossier de procédure, sur les 16 témoins auditionnés, 13 affirment qu’ils ont essayé de le prévenir « qu’il lui en viendrait du mal27. » Néanmoins, ces tentatives de rappel à la raison sont rares, puisqu’elles concernent en majorité des ecclésiastiques qui font correctement les offices, qui sont appréciés et dont la sexualité suscite davantage l’indifférence que l’émoi. S’agit-il d’un « trop c’est trop » ? Il n’y a pas lieu de le penser car cela correspond davantage à un conseil, à une volonté d’éviter des ennuis au prêtre. En effet, en l’absence d’une réprobation latente, les fidèles exercent un rôle infra-judiciaire en conseillant l’ecclésiastique et inversent de ce fait l’ordre attendu : ce n’est plus le curé qui, par sa dignité, contrôle les fidèles mais la communauté d’habitants qui, en l’absence de dignité, joue le rôle du médiateur.

Enfin, dans de rares cas, la sexualité ecclésiastique entraîne une déconsidération, voire une désacralisation qui se traduit par une perte des dévotions. Néanmoins, les sentiments religieux des fidèles apparaissent peu dans les sources judiciaires et en tenant compte de la nature versatile des témoignages, on peut affirmer que, pour la grande majorité des paroissiens, les expériences conjugales et sexuelles de l’ecclésiastique ne les amènent pas à se détourner de l’institution religieuse. De plus, le manque de confiance envers l’institution et la baisse des dévotions qui en découle correspondent aux comportements les plus scandaleux. Ils concernent ce que je nomme la « minorité marginalisée » : des hommes violents, agressifs qui violent, brutalisent, utilisent leur rang pour contraindre et attoucher les pénitentes. Ce sont du reste les femmes qui sont alors concernées, puisqu’elles refusent d’aller à confesse ou réclament un nouveau confesseur par crainte pour leur intégrité physique. Les fidèles sollicitant un nouveau confesseur en raison d’un cas de concubinage sont extrêmement rares. De surcroît, ils n’en font souvent la demande que lorsque l’ecclésiastique est déjà confronté à la justice.

Trop c’est trop

Peut-on dégager des comportements sexuels qui amènent davantage l’opprobre et conduisent les paroissiens à fustiger l’ecclésiastique ? La réponse est oui. On constate que les paroissiens ont défini leurs propres normes de l’acceptable. Si le prêtre concubinaire, exerçant correctement les offices, s’expose très peu à la vindicte populaire, si le « coureur de jupons » qui multiplie les amourettes suscite surtout des quolibets, les ecclésiastiques brutaux qui mettent à mal l’honneur des femmes de la paroisse, tout comme ceux qui s’en prennent aux enfants, sont beaucoup plus stigmatisés et décriés. C’est dans ces cas bien particuliers qu’on enregistre le plus de dédain à l’égard de l’institution, mais c’est également dans ces cas que les paroissiens sont les plus loquaces face à l’officialité lorsqu’un procès a été entamé contre leur desservant.

Cela ne signifie pas forcément que la communauté se porte en justice, mais lorsqu’un procès débute, les paroissiens sont plus enclins à décrier et à condamner l’attitude du prêtre que lorsque ce dernier se contentait d’un banal concubinage. En effet, le concubinaire suscite peu de passion face à la justice ; on témoigne de sa vie commune, des grossesses de la compagne, parfois on ajoute qu’il fait bien les offices. En revanche, la désapprobation est latente dans les procès qui mettent en scène un homme d’Église multipliant les frasques.

Évolutions

Enfin, ces perceptions évoluent-elles en fonction des avancées de la réformation catholique ? Les sources compulsées sont éparpillées chronologiquement28. De ce fait, il est difficile de donner une mesure globale de l’évolution du regard public porté sur l’ecclésiastique débauché. Toutefois, des tendances se dessinent comme l’indique le tableau suivant :

  xvie siècle xviie siècle xviiie siècle
Indifférence 46 % 42 % 41 %
Acceptations et « admiration » 34 % 30 % 19 %
Moqueries, injures 19 % 19 % 13 %
Déconsidération, désacralisation 1 % 9 % 27 %

Tab. 1. Un regard évolutif sur le temps long. Tous diocèses confondus.

Si les jugements sont prononcés tout au long de l’époque moderne, nous constatons une évolution des rapports entre prêtre défroqué et paroissiens. Durant le xvie siècle, les fidèles surveillent étroitement l’homme d’Église, s’amusent de ses frasques, parfois même avec lui, comme le font les paroissiens du curé de Ponte, dans le diocèse de Châlons-en-Champagne, qui épient les parties fines du curé et rient grassement tous ensemble29 ; situation qui perdure au xviie siècle. Bien sûr, on s’indigne devant l’official, on évoque le scandale public, on se montre choqué, mais ces amourettes ont suscité peu de remous au sein des paroisses. Dès la fin du Grand siècle, en revanche, le regard sur celui qui doit administrer les sacrements change, car les fidèles s’inquiètent du salut qu’il peut leur assurer. À Loivre, dans le diocèse de Reims, les ouailles de Jacques Masson guettent ses allers et venues chez une de leurs voisines mais leurs dépositions devant l’officialité révèlent qu’ils évoquent entre eux moins la liaison que leurs peurs et leurs angoisses face à l’incompétence du curé30. Ce phénomène doit être mis en relation avec le clivage qui s’esquisse au siècle des Lumières entre les paroissiens et le curé : celui-ci est devenu un notable instruit, qui se distingue par son niveau social, économique et intellectuel. Dès lors, tous les égarements amoureux conduisent les paroissiens à se détourner des hommes qui ne respectent pas le modèle attendu.

Il faut cependant introduire une nuance : ce phénomène se perçoit essentiellement dans des diocèses où l’épiscopat est fort et ce, depuis plusieurs décennies. Ainsi, si dans le diocèse de Beauvais, au xviiie siècle, on décrie le concubinage d’un curé, à la même période, dans le diocèse de Reims, ces pratiques sont encore considérées comme « normales » et n’influent pas sur la vie spirituelle.

Du village au tribunal : mœurs ecclésiastiques, paroissiens et justice

Quittons le cadre intimiste de la paroisse pour aborder celui de la justice, beaucoup plus formaté. Deux axes de recherche s’offrent à nous :

  • d’une part, les plaintes dites collectives qui émanent de plusieurs paroissiens et permettent de mesurer l’exaspération, le dégoût d’une paroisse ou tout au moins d’une partie de la communauté face à la sexualité d’un desservant31.
  • d’autre part, les témoignages des fidèles interrogés sur les abus d’un ecclésiastique lorsque le procès émane non d’une procédure ordinaire, consécutive à une plainte, mais d’une procédure extraordinaire dite ex officio. Ce qui permet au promoteur de l’officialité de se saisir d’une affaire sans qu’aucun plaignant ne se soit constitué partie civile.

Les actions collectives

Les recours collectifs en justice sont très faibles. En effet, les fidèles parlent et cancanent, mais dénoncent rarement les mœurs libertines de l’ecclésiastique. En décomptant les recours à la justice civile ou ecclésiastique effectués individuellement, nous ne recensons que 44 dossiers où les paroissiens se plaignent conjointement du comportement d’un ecclésiastique pour 451 dossiers de procédure des officialités. Les évolutions dans le temps sont ténues, comme le montre le tableau présent.

  xvie siècle xviie siècle xviiie siècle
% de dénonciation 7 % 10 % 16 %

Tab. 2. Un faible recours collectif à la justice. Tous diocèses confondus.

Cette faible évolution s’explique par une judiciarisation progressive : le droit public tient une place de plus en plus importante dans la vie des populations, et l’emprise des tribunaux civils va croissant, au détriment des officialités. Toutefois, dans certains diocèses, on observe une nette tendance à l’augmentation ; c’est le cas de Beauvais entre le xviie et le xviiie siècle où le taux de dénonciation triple, ce qui peut s’expliquer par l’influence janséniste. Néanmoins, de manière globale, la crainte de la justice domine.

Les réticences à dénoncer un prêtre concubinaire ou délinquant sexuel relèvent de plusieurs critères. Le premier d’entre eux est le souci de maintenir l’existence de la communauté en dehors d’une surveillance extérieure. Le prêtre concubinaire est décrié, mais son délit n’offense pas les paroissiens qui n’ont donc aucune motivation réelle pour recourir à la justice ecclésiastique ou civile et préfèrent régler le problème entre eux. Cet homme pèche, mais il ne fait encourir aucun risque spirituel ou physique à la communauté et bénéficie donc d’une forme d’impunité judiciaire. La seconde raison tient à la sacralité et au rôle prépondérant de l’ecclésiastique : il incarne le sacré dans la paroisse, il jouit d’une place à part, tient les registres, informe des conduites à tenir, joue un rôle très important dans le choix du maître d’école et impressionne les fidèles par son statut de « notable sacré ». De plus, dénoncer le prêtre déviant, c’est prendre le risque de voir la paroisse privée de secours spirituel pour une période plus ou moins longue, puisque le clerc devra permuter, sera envoyé au séminaire ou emprisonné. Dans la mesure où il est indispensable au salut des âmes, on lui pardonne beaucoup avant de songer à le traîner en justice et certains paroissiens appellent même les autres au pardon. À son épouse qui se plaint des avances incessantes du curé de Juvignies, au milieu du xviie siècle dans le diocèse de Beauvais, Nicolas Le Tellier répond « qu’il falloit pardonner puisque nous voulons que Dieu nous pardonne32. »

Une analyse des doléances collectives déposées auprès de l’officialité ou du baillage montre, de surcroît, que nous sommes en présence de dénonciations non représentatives de l’ensemble de la communauté. Les plaintes émanent d’un seul groupe d’habitants qui se présente, à tort ou à raison, comme le porte-parole de la communauté tout entière. Or, aucun procès-verbal dressé par un notaire royal ne vient étayer ce fait. L’exemple type de l’opposition d’un village au représentant du sacré se rencontre dans le diocèse de Cambrai à Erquenne. Le dossier de procédure comporte, d’une part, une plainte « des maieurs gens de loy et manans d’Erquenne » se plaignant du curé Le Lièvre, dénonçant son comportement et ses manquements. D’autre part, nous disposons d’un courrier des « soubsignez habitans du village d’Erquenne » attestant que le curé s’est toujours « acquitté de ses fonctions pastorales avec la diligence et le zèle que l’on peut souhaiter d’un bon pasteur33 ».

En connaissant les écueils de la documentation, il reste possible d’analyser la place de la sexualité ecclésiastique dans ces plaintes. La première instruction est que plus de 90 % de ces plaintes, soit 40 sur 44 concernent de nombreux reproches : des fréquentations féminines mais aussi des manquements pastoraux, des menaces, des conflits, un absentéisme chronique, des délits d’ivrognerie… La délinquance sexuelle n’est qu’une récrimination parmi d’autres et la liste des griefs est souvent longue : en moyenne, ce sont neuf motifs de plainte qui sont exposés. Cette multiplication des doléances montre clairement le seuil de tolérance des paroissiens face aux manquements de leur pasteur : avant de se porter en justice, ils le laissent agir en dépit de sa fonction pendant de longues années. Mais cette accumulation a aussi une visée stratégique : prouver au juge que leur demande n’est pas irréfléchie, qu’elle n’est pas née après une unique querelle, qu’elle mérite toute l’attention de l’official et qu’une instruction doit être ouverte car leur salut est en danger.

La place de la sexualité dans les plaintes collectives

Dans ces récriminations, quelle place est donnée à la sexualité ecclésiastique ? Le constat est sans appel : très faible. En priorité, la plainte collective insiste sur les négligences spirituelles et le péril que l’ecclésiastique représente pour d’honnêtes chrétiens. On dénonce son absentéisme, la non-administration des sacrements, on évoque les malades décédés sans avoir pu, ni se confesser ni recevoir l’extrême-onction, ce qui donne parfois lieu à la longue énumération de tous ceux qui sont morts sans assistance. On déplore les négligences du desservant pendant l’office… Les plaintes insistent également sur la fébrilité des fidèles obligés de recourir à un prêtre étranger aussi bien pour la messe que pour l’octroi des sacrements. Viennent ensuite l’absence de catéchisme et d’instruction faite aux enfants, les difficultés de la confession puis tous les manquements aux offices, les profanations du sacré comme les blasphèmes… Ce n’est qu’après tous ces griefs, soit la description de l’incompétence de l’ecclésiastique, que la question de ses mœurs est évoquée. Et cela, au même titre qu’un alcoolisme ou des propos injurieux. Les infractions au célibat ecclésiastique ne représentent qu’un argument supplémentaire visant à discriminer le prêtre et à attirer l’attention des autorités.

Il est important de signaler que les doléances émises sur la sexualité d’un homme d’Église restent floues et qu’aucune plainte ne donne de détails précis sur sa vie amoureuse. Ainsi, les plaignants se montrent choqués par le manque de respect témoigné par le curé envers le sacré mais ils indiquent, par ce même procédé, qu’ils respectent le statut de l’ecclésiastique. Aucune plainte ne dresse un catalogue de ribauderies alors que ces mêmes signataires se montrent bien plus incisifs lors de leur déposition. Les habitants de Beaurepaire, diocèse de Cambrai, dénoncent « la mauvaise vie » de leur curé par écrit mais ce n’est que face au promoteur, qu’ils rapportent les détails de son « commerce honteux » avec une femme chassée d’Avesnes34. Il en va de même dans le diocèse de Paris où les habitants de Courcouronnes mettent l’accent sur l’absentéisme du curé, ses blasphèmes, ses négligences pendant l’office et n’abordent qu’en dernier lieu le fait qu’il « sollicitoit au crime » quelques femmes de la paroisse ; or, pendant l’information, c’est une véritable vie de débauche qui est dépeinte35.

Stratégie des fidèles qui souhaitent obtenir une respectabilité ou réel désintérêt pour la vie sexuelle du prêtre ? En se référant aux plaintes et aux témoignages, nous sommes frappés par l’assimilation des attentes tridentines dans la population, par la capacité des plaignants à utiliser des arguments qui attireront l’attention sur l’ecclésiastique décrié et par la nécessité d’émettre une plainte qui ne se veut pas belliqueuse mais objective. Dépeindre de façon excessive les mœurs douteuses de l’homme d’Église ôterait une part du sérieux de la plainte et les déposants usent donc de périphrases pour faire comprendre aux autorités que le prêtre ne respecte pas le vœu de célibat. On recense parmi les plaintes 16 mentions de « commerce honteux », neuf « mauvaise conduite » ou « mauvaise vie », quatre « sollicitations » ; deux plaintes affirment que le « sieur curé aime le sexe féminin ». Dans les requêtes où davantage de détails apparaissent, les faits restent très succincts : en 1729, les habitants d’Everbecq, diocèse de Cambrai, se contentent d’expliquer que le curé va de kermesse en kermesse avec sa servante36 ; en 1706, ceux de La Berlière, diocèse de Beauvais, rapportent que le curé fréquente des femmes et des filles et qu’il les invite à boire et à manger37. Aucune plainte n’expose directement la sexualité du desservant. Tout porte à croire que les fréquentations féminines de l’ecclésiastique laissent les paroissiens indifférents. Mais associés à de nombreuses négligences aux conséquences néfastes pour eux, ces abus sont décriés, narrés et permettent de dépeindre un prêtre dont le comportement est loin d’être un modèle d’édification. Mais, là encore, il est difficile de savoir si dénoncer les manquements au célibat tient ou non d’une stratégie qui veille à mettre en corrélation les prescriptions synodales et les difficultés des paroissiens, afin de s’attirer la bienveillance des autorités. Comment ne pas supposer qu’il s’agit avant tout d’une argumentation élaborée quand ces mêmes paroissiens vivent et subissent la délinquance sexuelle de leur desservant pendant de nombreuses années, sans jamais s’en plaindre ?

Des plaintes particulières

En plus des plaintes qui font de la sexualité un indice supplémentaire de l’incompétence du desservant, quatre plaintes ne concernent que les fréquentations féminines. Pourquoi ces quatre hommes d’Église méritaient-ils davantage une dénonciation officielle de leurs mœurs que leurs homologues dénoncés, avant tout, pour négligences ?

Les plaintes à l’encontre de Pierre Mouille-Farine38, diocèse de Troyes, et du curé de Haute-Épine39, dans le diocèse de Beauvais, appellent une réponse sans équivoque : le premier, vicaire de Saint-Pouange, s’est vu affermer la cure pour trois ans par le curé Claude Gaillard mais il est atteint du mal de Naples. Les paroissiens écrivent donc à l’officialité afin que le curé reprenne la direction de la paroisse : ils ne veulent pas que le desservant administre les sacrements, surtout le sacrement de baptême dans lequel il est nécessaire de donner aux enfants le souffle et la salive. Le second se voit dénoncé à cause du comportement de sa concubine, Marguerite, qui elle-même confesse dans un courrier au promoteur avoir utilisé diverses manœuvres pour inciter le curé « à lever des grains et des dimes sur le peuple […] si bien que tout le peuple est réduit à une telle pauvreté qu’il ne peut plus vivre40 ». La plainte vise davantage la compagne que le curé, et si plainte il y a, c’est parce qu’elle s’est mis la communauté tout entière à dos. De surcroît, les doléances concernent des questions matérielles : le curé, influencé par sa concubine, a outrepassé ses fonctions et a fait passer son intérêt personnel avant celui de ses fidèles, ce qui est très mal perçu par les villageois. Ces deux exemples sont donc loin d’exprimer la condamnation de la sexualité et de la conjugalité, mais ils touchent de près la peur et l’exaspération.

Les deux autres plaintes suscitent plus d’interrogations. En 1708, douze habitants de Faux et Vésigneul « supplient humblement » l’official de Châlons-en-Champagne de leur envoyer un nouveau curé. L’argumentaire de leur plainte repose, en premier lieu, sur les attentats à la pudeur que le curé leur fait subir depuis plusieurs années ; s’ensuivent quatre exemples de femmes qui ont dû faire face à ces impudicités, à l’instar de Jeanne Millat devant laquelle le curé a relevé sa soutane. Le deuxième point abordé concerne le harcèlement des femmes et filles de la paroisse, puis ses multiples tentatives de viol ; là encore, les signataires donnent plusieurs exemples afin de corroborer leurs dires. Aucun concubinage n’est mentionné et les auteurs de la plainte insistent sur les violences sexuelles et les décrivent avec moult détails afin, très certainement, d’attirer l’attention des autorités. Le comportement de ce prêtre ne diffère guère des multiples déboires sexuels rencontrés dans les dossiers de procédure, de sorte que l’objectif de la plainte interpelle. S’agit-il d’accusations mensongères, d’exagérations, de la volonté de se débarrasser d’un prêtre dérangeant ? Ce n’est qu’à la fin du courrier qu’une réponse semble s’esquisser : les signataires écrivent « en telle sorte que les habitants de Faux croient que maitre Manière, leur curé, estoit tombé en démence41 ». En comparant la requête des paroissiens et les interrogatoires réalisés durant l’instruction du procès, on constate que les délits sexuels ne sont finalement que la conséquence d’un désordre mental. Tous s’accordent sur « ses airs de folie », ses « signes de fou » et le promoteur conclut que le curé « est tombé en démence » et qu’il faut donc agir avant que les scandales ne s’aggravent. Ce n’est donc pas tant son comportement sexuel qui pose problème aux paroissiens que sa folie. Ces derniers n’ont plus confiance en ses prescriptions.

La dernière plainte à étudier laisse le lecteur dans la confusion. Antoine Hertoux, ancien vicaire de Morvillers, se voit accuser par les habitants de ce village d’une liaison avec une jeune fille42. La plainte expose trois points : en premier lieu, le scandale qu’a suscité dans le village la relation du prêtre avec cette demoiselle ; en second lieu, le départ du vicaire pour Hodencq, « proche de Malval et non loin de Beauvais » ; enfin, les signataires rapportent que « la fille avec laquelle s’est ensuivi le scandal a estée quelques temps à Amiens aux filles repenties et après par la sollicitation d’un sien parent ecclésiastique de Paris ». Aucune mention de négligences, de blasphèmes, de menaces ou d’injures n’apparaît dans la plainte et elle concerne un ecclésiastique qui ne réside plus avec les villageois. Quel est donc le but de ces doléances ? Attirer l’attention sur la défection du vicaire à Morvillers ? Dénoncer la jeune fille alors qu’elle n’est jamais nommément citée ? La plainte n’a pas été poursuivie par une instruction, ce qui prive d’éclairages supplémentaires sur le mécanisme de sa motivation. Toutefois, nous pouvons envisager une vengeance de paroissiens à l’égard du vicaire ou un conflit d’intérêts qui a conduit certains habitants à dénoncer le départ de l’homme d’Église.

Ces plaintes dénoncent certes la sexualité de l’ecclésiastique mais en définitive leur motivation ne tient pas au comportement sexuel. Les plaignants craignent pour leur santé, pour leurs biens matériels, leur salut lorsque le desservant est dépeint comme fou. Les fréquentations féminines sont au centre des doléances, mais la finalité réelle de la plainte est tout autre et les suppliques adressées, en dehors de notre dernier exemple, témoignent de la nécessité de révéler au grand jour des actes qui ont des conséquences fâcheuses. Ainsi, dans la paroisse de Saint-Pouange, les habitants sont « contraincts » de dénoncer le vicaire ; à Faux et Vésigneul, le curé leur « faisoit peur » ; à Haute-Épine il leur est « impossible de souffrir plu lontems les ordures qui se font au presbitaire »43. Ces paroissiens n’exigent pas que des sanctions soient prises, ils dénoncent des abus sexuels qui nuisent à leur vie spirituelle et attendent des autorités un remède pour leur salut.

Lorsque les paroissiens déposent

En dernier lieu, intéressons-nous aux réactions des paroissiens lorsqu’ils sont interrogés par le promoteur lors du procès, qu’il soit ordinaire ou ex officio. Au total, 2 622 témoignages lors de la phase cruciale de l’information ont été recensés. Méthodologiquement, il est très difficile de différencier les récits révélateurs du regard des paroissiens de ceux qui montrent la résurgence des attentes de l’Église et l’instrumentalisation des témoignages à la fois par les témoins et la justice. En rapportant ce qu’il sait sur l’objet de la plainte, le témoin oriente son discours ; on voit d’ailleurs que les premiers témoins sont bien moins loquaces que les derniers. Ensuite, c’est un greffier qui retranscrit les propos au style indirect. Ce faisant, il insère un vocabulaire et des tournures de phrases spécifiques. Il gomme les idiomes patois et les hésitations, afin de donner une cohérence au discours même si un certain respect de l’oralité subsiste comme en témoignent les incises dans le texte.

Ce qui ressort avant tout des témoignages, ce sont les attentes de l’Église. Les témoins se disent offusqués, scandalisés, alors qu’au fil des dépositions, on comprend aisément que jusqu’à l’information, la situation matrimoniale de l’ecclésiastique les intéressait peu et suscitait au pire des quolibets. Face à ce constat, dix dossiers ont été échantillonnés, soit 96 témoignages, afin de mettre en évidence l’appropriation des termes et du discours de la réformation catholique par les laïcs comme le montre le tableau suivant :

  Occurrences
« Scandale » ou « scandaleusement »* 71
« Impuretés » 31
« Mauvaise conduite » (ou « vie », « édification ») 26
« Commerce honteux » 17
« Désordre » et « Excès » 14

Tab. 3. Analyse des termes propres à la sexualité ecclésiastique dans 96 témoignages. Tous diocèses et tous siècles confondus.

L’acculturation ne fait aucun doute. L’utilisation poussive du terme « scandale » est par exemple représentative de cette mentalité d’Ancien Régime marquée par les idéaux tridentins. En comparant les procès qui se déroulent au xviie ou au xviiie siècle à ceux qui eurent lieu avant le concile de Trente, on constate que le terme est rarement employé par les témoins au xvie siècle. En revanche, les autorités l’utilisent constamment comme en témoigne le dossier de procédure de Jean Perret, prêtre chapelain aux Essarts, diocèse de Troyes, dans lequel le promoteur affirme à trois reprises qu’il entretient des « relations coupables et scandaleuses » ou « qu’au grand scandal » des habitants, il a une liaison44. Ce concept était avant tout utilisé par l’institution ecclésiastique, pour laquelle le scandale était dangereux car il ébranlait les consciences chrétiennes et pouvait inciter au péché45. Le terme était alors un standard juridique ecclésiastique, légitimant l’intervention de l’institution religieuse. Or, ce concept a largement évolué au fil de la réforme catholique puisqu’en plus des autorités qui condamnent le scandale, les témoins en viennent à définir à leur tour la réalité du scandale. Ils sont conscients des connotations du terme et se font, à leur tour, écho des attentes de l’Église. Les autres substantifs employés tels que « désordre et excès » ou « impuretés » soulignent également les réminiscences du discours catholique dans la parole des fidèles. Là encore, en comparant les dépositions du xvie siècle à celles des siècles suivants, on s’aperçoit de l’évolution du discours des témoins : si les paroissiens du diocèse de Troyes décrivent assez crûment le comportement de leurs desservants et n’hésitent pas à les qualifier de « paillard » devant le juge d’Église, aux xviie et xviiie siècles, ces qualificatifs laissent place à l’évocation d’une « mauvaise conduite » peu édifiante, à des « impuretés » ou « impudicités », à un « commerce honteux ». Avant de rapporter diverses anecdotes moins correctes sémantiquement, les fidèles se bornent à un discours que l’on pourrait qualifier de convenu.

L’ecclésiastique dévoyé n’apparaît pas isolé dans sa paroisse. Il appartient pleinement à la communauté et ses incartades font davantage de lui un voisin qu’un personnage du sacré. Il pratique les mêmes jeux, a les mêmes attentes, se comporte comme un notable et s’insère entièrement dans les mentalités et sociabilités de l’Ancien Régime. Par son intégration dans la communauté, par ses appuis familiaux et amicaux, le concubinaire ou le chargé d’âmes attaché à une seule femme bénéficie de l’indulgence des fidèles. Le regard des paroissiens est différent, plus sombre, lorsque ce dernier se conduit avec violence et ne respecte pas une certaine stabilité sentimentale. Dès lors, il devient source de mécontentement, ce qui peut conduire un groupe de paroissiens à dénoncer ses méfaits.

L’impact de la conjugalité et de la sexualité ne transparaît que rarement dans les doléances des paroissiens : la vie amoureuse du prêtre n’entraîne qu’à de rares reprises un détournement des fidèles de la foi et de l’Église. Au reste, les plaintes communes ne concernent jamais un simple concubinage et mettent en exergue les réels dangers pour le salut plus que la délinquance sexuelle de l’ecclésiastique. La sexualité « normalisée » de l’ecclésiastique n’a pas d’effets sur la dévotion contrairement à d’autres délits comme l’ivrognerie, le blasphème ou les négligences pastorales. Ce constat laisse présumer que les paroissiens disposaient de leurs propres normes face aux comportements amoureux des ecclésiastiques de l’époque moderne.

1 Je citerai en exemple le pamphlet d’Urbain Grandier : Traité du célibat des prestres, Paris, Pincebourde, 1856, réédition sous le titre Traité du

2 L’échantillon présenté dans cet article concerne exclusivement le clergé séculier et plus spécifiquement paroissial. L’objectif est de réaliser une

3 Sur la question du rôle et du fonctionnement des officialités au Moyen Âge et à l’époque moderne, voir les ouvrages, certes anciens mais toujours d

4 D’après les 451 procédures criminelles entamées contre des ecclésiastiques sexuellement actifs dans les diocèses de Beauvais, Cambrai

5 Ainsi, en 1692, à Dimont, dans le diocèse de Cambrai, la déploration des frasques amoureuses auprès des femmes de la paroisse et la dénonciation, à

6 Christophe Regina, « L’intrusion de la justice au sein du foyer. La violence conjugale jugée devant la Sénéchaussée de Marseille au siècle des

7 A.D. Nord, 5G 519, Michel François Coust, 1717.

8 A.D. Marne, 2G 1924, Nicolas Robert, 1717.

9 A.D. Oise, G 4542, Roch Roussel, 1667-1671.

10 A.D. Marne, 2G 1930, Nicolas Hourblin, 1731.

11 A.D. Nord, 5G 513, Martin Cambier, 1684.

12 Sur le sujet, voir Yves Durand, « Le curé médiateur social aux xviie et xviiie siècles » dans Bernard Barbiche, Jean-Pierre Poussou et Alain

13 A.D. Aube, G 4192, Victor Perrin, 1515.

14 A.D. Oise, G 4587, Gabriel de Vuailly, 1655-1667.

15 A.D. Nord, 5G 514, Lustin Marotte, 1687.

16 A.D. Nord, 5G 515, Jacques Dubray, 1692.

17 Pierre de Vaissière, « L’état social des curés de campagne au xviiie siècle d’après la correspondance de l’agence du clergé aux Archives Nationales

18 A.D. Marne, 2G 1945, Jean Henri Bourgeois, 1770.

19 A.D. Oise, G 4559, Adrien Tallon, 1643-1662.

20 A.D. Marne, G 4198, Ponthus de Montrégnier, 1527-1528.

21 A.D. Nord, 5G 510, Jean Cuvelier, 1637.

22 A.D. Oise, G 4540, Jean Rohart, 1651-1653. À Vauroux, dans le diocèse de Beauvais, Noël Maisnel se moque du curé en volant ses vêtements alors qu’

23 Traité des matières criminelles, suivant l’Ordonnance du mois d’août 1670, & les Édits, Déclarations du Roi, Arrêts & Réglemens intervenus jusqu’à

24 A.D. Marne, G 937, Étienne Majot, 1707.

25 A.D. Aube, G 4193, Pierre de Montigny, 1515.

26 Sur le sujet, voir Benoît Garnot (dir.), L’infrajudiciaire du Moyen Âge à l’époque contemporaine, Dijon, EUD, 1996.

27 A.D. Aube, G 4193, Pierre de Montigny, 1515.

28 Pour le diocèse de Troyes, la quasi totalité des cas étudiés se situe au xvie siècle alors que pour le diocèse de Reims, le corpus concerne le

29 A.D. Marne, G 933, Claude Guburg, 1527.

30 A.D. Marne, 2G 1953, Jacques Masson, 1786.

31 J’ai volontairement écarté les plaintes individuelles avec constitution de partie civile. Elles émanent essentiellement de femmes violées, de pères

32 A.D. Oise, G 4219, Pierre Carveaux, 1649-1653.

33 A.D. Nord, 5G 516, André Le Lièvre, 1694.

34 A.D. Nord, 5G 511, Anthoine de Forest, 1672.

35 A.N.F., Z/1o/225A, Hiacinthe Marin de la Chenière, 1741.

36 A.D. Nord, 5G 521, Adrien Thomas, 1729.

37 A.D. Oise, G 4195, Louis de Bourges, 1706.

38 A.D. Aube, G 4200, Pierre Mouille-Farine, 1530.

39 A.D. Oise, G 4469, Nicolas Maillard, 1643-1652.

40 A.D. Oise, G 4469, Nicolas Maillard, 1643-1652.

41 A.D. Marne, G 937, François Manière, 1708.

42 A.D. Oise, G 4375, Antoine Hertoux, 1657.

43 A.D. Oise, G 4469, Nicolas Maillard, 1643-1652.

44 A.D. Aube, G 4194, Jean Perret, 1516-1517.

45 Corinne Leveleux-Teixeira, « Le droit canonique médiéval et l’horreur du scandale », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, n° 25, 2013, p

Notes

1 Je citerai en exemple le pamphlet d’Urbain Grandier : Traité du célibat des prestres, Paris, Pincebourde, 1856, réédition sous le titre Traité du célibat des prêtres, Paris, édition Hors Commerce, 1995.

2 L’échantillon présenté dans cet article concerne exclusivement le clergé séculier et plus spécifiquement paroissial. L’objectif est de réaliser une étude centrée sur des hommes vivant dans le siècle, au cœur de la communauté des fidèles, là où s’organise la vie quotidienne.

3 Sur la question du rôle et du fonctionnement des officialités au Moyen Âge et à l’époque moderne, voir les ouvrages, certes anciens mais toujours d’actualité, de Paul Fournier, Les officialités au Moyen Âge : étude sur l’organisation, la compétence et la procédure des tribunaux ecclésiastiques ordinaires en France, de 1180 à 1328, Paris, E. Plon, 1880 ; Anne Lefebvre-Teillard, Les officialités en France à la veille du concile de Trente, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1973.

4 D’après les 451 procédures criminelles entamées contre des ecclésiastiques sexuellement actifs dans les diocèses de Beauvais, Cambrai, Châlons-en-Champagne, Paris, Reims et Troyes, entre 1500 et 1789, 121 ecclésiastiques ont un ancrage local.

5 Ainsi, en 1692, à Dimont, dans le diocèse de Cambrai, la déploration des frasques amoureuses auprès des femmes de la paroisse et la dénonciation, à grands cris, des présents et cadeaux qu’il offre à sa maîtresse, viennent de la mère et la sœur du curé Antoine Lefebvre : Archives Départementales du Nord [désormais A.D. Nord], 5G 515, Antoine Lefebvre, 1692.

6 Christophe Regina, « L’intrusion de la justice au sein du foyer. La violence conjugale jugée devant la Sénéchaussée de Marseille au siècle des Lumières », Annales de démographie historique, n° 118, 2009, p. 53-75, ici p. 53.

7 A.D. Nord, 5G 519, Michel François Coust, 1717.

8 A.D. Marne, 2G 1924, Nicolas Robert, 1717.

9 A.D. Oise, G 4542, Roch Roussel, 1667-1671.

10 A.D. Marne, 2G 1930, Nicolas Hourblin, 1731.

11 A.D. Nord, 5G 513, Martin Cambier, 1684.

12 Sur le sujet, voir Yves Durand, « Le curé médiateur social aux xviie et xviiie siècles » dans Bernard Barbiche, Jean-Pierre Poussou et Alain Talllon (dir.), Pouvoirs, contestations et comportements dans l’Europe moderne. Mélanges en l’honneur du Pr. Yves-Marie Bercé, Paris, PUPS, 2006.

13 A.D. Aube, G 4192, Victor Perrin, 1515.

14 A.D. Oise, G 4587, Gabriel de Vuailly, 1655-1667.

15 A.D. Nord, 5G 514, Lustin Marotte, 1687.

16 A.D. Nord, 5G 515, Jacques Dubray, 1692.

17 Pierre de Vaissière, « L’état social des curés de campagne au xviiie siècle d’après la correspondance de l’agence du clergé aux Archives Nationales », Revue d’Histoire de l’Église de France, tome 19, n° 82, 1933, p. 23-53.

18 A.D. Marne, 2G 1945, Jean Henri Bourgeois, 1770.

19 A.D. Oise, G 4559, Adrien Tallon, 1643-1662.

20 A.D. Marne, G 4198, Ponthus de Montrégnier, 1527-1528.

21 A.D. Nord, 5G 510, Jean Cuvelier, 1637.

22 A.D. Oise, G 4540, Jean Rohart, 1651-1653. À Vauroux, dans le diocèse de Beauvais, Noël Maisnel se moque du curé en volant ses vêtements alors qu’il est couché avec sa maîtresse et il se présente à lui « avecq les habitz dudit curé et lui dit vous voila Monsieur Le Galand » avant de se sauver, ce qui oblige l’ecclésiastique à sortir en chemise dans la paroisse pour récupérer son bien.

23 Traité des matières criminelles, suivant l’Ordonnance du mois d’août 1670, & les Édits, Déclarations du Roi, Arrêts & Réglemens intervenus jusqu’à présent… par M. Guy Rousseaud de la Combe, Paris, 6e éd., Bailli, 1769, p. 73.

24 A.D. Marne, G 937, Étienne Majot, 1707.

25 A.D. Aube, G 4193, Pierre de Montigny, 1515.

26 Sur le sujet, voir Benoît Garnot (dir.), L’infrajudiciaire du Moyen Âge à l’époque contemporaine, Dijon, EUD, 1996.

27 A.D. Aube, G 4193, Pierre de Montigny, 1515.

28 Pour le diocèse de Troyes, la quasi totalité des cas étudiés se situe au xvie siècle alors que pour le diocèse de Reims, le corpus concerne le xviiie siècle.

29 A.D. Marne, G 933, Claude Guburg, 1527.

30 A.D. Marne, 2G 1953, Jacques Masson, 1786.

31 J’ai volontairement écarté les plaintes individuelles avec constitution de partie civile. Elles émanent essentiellement de femmes violées, de pères et d’époux voulant réparer l’honneur de leurs fille ou épouse. On a également quelques plaintes d’époux trompés, de femmes demandant des droits de gésine… Ces doléances relèvent de règlements d’intérêts personnels et ne permettent pas de percevoir un sentiment conjoint et partagé sur les mœurs de l’ecclésiastique.

32 A.D. Oise, G 4219, Pierre Carveaux, 1649-1653.

33 A.D. Nord, 5G 516, André Le Lièvre, 1694.

34 A.D. Nord, 5G 511, Anthoine de Forest, 1672.

35 A.N.F., Z/1o/225A, Hiacinthe Marin de la Chenière, 1741.

36 A.D. Nord, 5G 521, Adrien Thomas, 1729.

37 A.D. Oise, G 4195, Louis de Bourges, 1706.

38 A.D. Aube, G 4200, Pierre Mouille-Farine, 1530.

39 A.D. Oise, G 4469, Nicolas Maillard, 1643-1652.

40 A.D. Oise, G 4469, Nicolas Maillard, 1643-1652.

41 A.D. Marne, G 937, François Manière, 1708.

42 A.D. Oise, G 4375, Antoine Hertoux, 1657.

43 A.D. Oise, G 4469, Nicolas Maillard, 1643-1652.

44 A.D. Aube, G 4194, Jean Perret, 1516-1517.

45 Corinne Leveleux-Teixeira, « Le droit canonique médiéval et l’horreur du scandale », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, n° 25, 2013, p. 193-211.

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Sarah Dumortier, « « Il est impossible de souffrir plu lontems les ordures qui se font au presbitaire. » La paroisse entre tolérance et condamnation de la sexualité des gens d’Église (xvie-xviiie siècle) », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe, 11 | 2017, 107-124.

Référence électronique

Sarah Dumortier, « « Il est impossible de souffrir plu lontems les ordures qui se font au presbitaire. » La paroisse entre tolérance et condamnation de la sexualité des gens d’Église (xvie-xviiie siècle) », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe [En ligne], 11 | 2017, mis en ligne le 22 septembre 2023, consulté le 25 avril 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/sources/index.php?id=256

Auteur

Sarah Dumortier

Sarah Dumortier est docteur en histoire moderne de l’université de Lille.

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