Alsatia Numerica

p. 185-188

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Un constat : l’éparpillement des données

L’orientation documentaire d’internet ces dix dernières années a grandement bouleversé les habitudes de recherche bibliographique. Qu’il s’agisse de catalogues en ligne, de documents numérisés et téléchargeables ou d’articles de chercheurs et doctorants directement ajoutés au web sans passer par la case papier, que ces initiatives soient privées ou publiques, collaboratives ou résultant d’une démarche isolée, payantes ou gratuites, les matériaux de l’historien, libérés de leur support originel, s’exportent hors de leur lieu de conservation et essaiment sur la toile. Désormais tout ou presque devient disponible à la demande, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’œuvres anciennes tombées dans le domaine public.

Si le mouvement, très en vogue, des bibliothèques numériques, offre la possibilité de consulter facilement et depuis chez soi un ouvrage qui en bibliothèque serait exclu du prêt, les limites se dressent très rapidement, notamment parce que l’organisation d’internet s’apparente plus à un magasin de brocanteur qu’à une réserve de musée. La multiplication des entreprises visant à numériser les fonds patrimoniaux des bibliothèques ou les archives ne s’inscrit pas dans une démarche réglementée et normalisée, même si les choses tendent à s’améliorer, et chacun doit constituer son propre inventaire pour se repérer dans ce fonds potentiellement illimité, mais non organisé, d’autant plus qu’à chaque ressource ou presque il faut appliquer un traitement différent.

Si l’on souhaite accéder à ce type de ressources, l’interrogation des métacatalogues est rarement fructueuse. Même s’ils permettent de référencer plusieurs millions d’ouvrages dans le monde, cela concerne avant tout les fonds matériels des bibliothèques, grâce à leur OPAC1. Le SUDOC, le CCFr, WorldCat ou dans le cas présent Alsatica23 ne nous permettent donc pas forcément d’accéder directement à une consultation en ligne.

Pour cela, il faut se tourner vers les bibliothèques numériques développées par les services d’archives, bibliothèques ou universités. Celles-ci offrent l’avantage de bénéficier du savoir-faire de spécialistes et de scientifiques qui ajustent leurs pratiques traditionnelles à un environnement informatique. Toutefois, les projets de ces établissements sont souvent limités par leurs propres fonds : malgré certaines tentatives fédératives permettant d’élargir le catalogue, il reste nécessaire de naviguer entre chacun de ces services, devenus nombreux. À titre d’exemple – et puisque c’est le thème qui nous intéresse – une recherche sur le Rhin Supérieur au Moyen Âge demande de jongler entre ecodices4, le Münchener Digitalisierungszentrum5, la version numérique de la Universitätsbibliothekde Fribourg-en-Brisgau6, Revues.org7, le site de la bibliothèque humaniste de Sélestat8ou encore les digitalen Monumenta Germaniae Historica9– pour n’évoquer que les principales – tout en suivant d’un œil attentif les projets, en cours, Numistral10ou Archivum Rhenanum11.

En dernier lieu, la recherche d’un document s’effectuera sur l’ensemble du web, par l’intermédiaire de moteurs de recherche type Google, Bing, ou Yahoo ! Nous revenons vers le magasin de brocanteur. En effet, ce sont ici les techniques et stratégies de référencement web qui sont à l’œuvre. Par Google par exemple, l’utilisateur trouvera pléthore de résultats renvoyant pour la plupart vers Google Books. Bien des documents peuvent être trouvés grâce à cette library, mais les surprises sont également au rendez-vous. Énormément d’ouvrages sont simplement listés, et pas forcément avec rigueur et précision. Dans le cas d’ouvrages effectivement numérisés, et s’ils le sont intégralement, Google Books offre son lot d’imprécisions, de ratés, et de qualités diverses.

Un autre site est fréquemment listé par ces moteurs de recherche, à savoir Open Library, sous-partie d’Internet Archive consacrée à la documentation. Malgré un nombre considérable d’ouvrages numérisés et la reconnaissance par l’État de Californie d’Internet Archive comme bibliothèque, les mêmes remarques d’imprécision peuvent lui être adressées.

Ceci n’est qu’une rapide esquisse, loin d’être exhaustive, des sites et outils sur lesquels il faut régulièrement lancer sa recherche, sans assurance quant au résultat.

Alsatia Numerica : un inventaire numérique de ressources numérisées

Proposer un inventaire thématique sur internet n’est pas une nouveauté en soi. Au-delà d’internet, cette démarche est un passage obligé dès lors qu’un certain type de ressources devient trop important pour être embrassé d’un coup d’œil : catalogues de bibliothèques, inventaires d’archives, revues listant l’ensemble des publications sur un sujet, etc.

Nommé en référence à l’œuvre de Jean Daniel Schoepflin (1694-1771)12, Alsatia Numerica est donc un projet d’inventaire visant le référencement des ressources documentaires numérisées et numériques13 concernant l’Alsace médiévale, et plus généralement le Rhin Supérieur, disponibles et en libre accès mais éparpillées, sur internet. Son objectif premier est de proposer à l’utilisateur, quel qu’il soit, un accès rapide et précis aux ressources dont il a besoin, en effectuant pour lui le travail de veille documentaire. Le cahier des charges peut être ainsi résumé :

Utiliser un nom simple et dédié.

Alsatia Numerica présente l’avantage d’être facilement mémorisable mais ne signifie pas pour autant qu’il faille se limiter à la rive gauche du Rhin. Par ailleurs, il facilite le référencement du site sur les moteurs de recherche puisque l’expression n’existe nulle part ailleurs.

Inventorier les documents eux-mêmes et non pas les sites qui les contiennent.

C’est en effet l’un des travers que l’on peut retrouver sur de nombreux sites de référencement. Se contenter de renvoyer l’utilisateur vers Internet Archive ou vers e-codices ne fait que rajouter une étape. Ceci implique donc une veille régulière et approfondie.

Se concentrer sur la thématique.

L’objectif est de créer une interface simple mais efficace, en utilisant notamment dès la première page un menu qui cible rapidement le type de ressources recherché. Par exemple : « sources imprimées », « manuscrits », « périodiques ». Il est important d’effectuer un tri réfléchi dans les ressources proposées afin de ne pas perdre l’utilisateur dans un nouveau catalogue à rallonge.

Proposer des notices complètes, simples et uniformisées.

En utilisant, par exemple, Jean Daniel Schoepflin systématiquement, et non pas Johannes D. Shöpflin, J.-D. Schoepflin ou encore J.D. Schoepflini selon les cas, la recherche est améliorée. Pour cette raison, la réutilisation des notices bibliographiques disponibles sur les sites référencés est envisagée mais ne doit pas être automatique. Le cas échéant, il faut être en mesure d’en créer de nouvelles. Ces notices doivent être réalisées dans le respect des normes et formats internationaux. De même, elles doivent être compatibles au moins avec Zotero.

Viser l’exhaustivité.

Il s’agit d’un objectif double. D’une part, il faut être en mesure de proposer toute la documentation disponible correspondant à la thématique du portail. D’autre part, si plusieurs versions existent, il est nécessaire d’en proposer la liste à l’utilisateur : pour un ouvrage numérisé comme pour un ouvrage imprimé, il est essentiel de connaître l’institution productrice et conservatrice.

En somme, Alsatia Numerica n’a aucunement vocation à concurrencer ce qui existe puisque sa réalisation s’appuie justement sur l’existence de bibliothèques numériques et sur l’enrichissement régulier de leurs fonds. Il s’agit ni plus ni moins d’un outil.

Le projet existe déjà sous une forme « bêta » c’est-à-dire accessible mais en phase de test. Issue d’une initiative personnelle, il s’inscrit désormais dans le cadre de l’ARCHE, associant les médiévistes de l’équipe d’accueil 3400 qui travaillent sur l’espace germanique, ce qui ouvre de nouvelles perspectives. En effet, d’autres pistes seront à explorer dans un deuxième temps. Au-delà de la seule documentation ancienne, des travaux plus récents, de chercheurs et d’étudiants, peuvent y trouver une place. De même, la diffusion ou la création d’« applications » web destinées à l’historien sont envisagées.

Adresse : www.alsatianumerica.fr

Contact : postmaster@alsatianumerica.fr

1 Online Public Access Catalog.

2 Alsatica correspond au Portail numérique des Savoirs en Alsace lancé par la Région Alsace en

3 <http://www.alsatica.eu/> [consulté le 16 mai 2013]. Il veut être le point d’accès unique au plus grand nombre de ressources documentaires prése

4 <http://www.e-codices.unifr.ch/>

5 <http://www.muenchener-digitalisierungszentrum.de/>

6 <http://www.ub.uni-freiburg.de/index.php?id=dipro>

7 <http://www.revues.org/>

8 <http://www.ville-selestat.fr/bh/>

9 <http://www.mgh.de/dmgh/>

10 <http://www.numistral.fr/>

11 <http://archives-fr.hypotheses.org/>

12 Jean Daniel Schoepflin, Alsatia Illustrata, 2 tomes, Colmar, 1751-1761; Jean Daniel Schoepflin, Alsatia… diplomatica, 2 tomes, Strasbourg

13 Il faut distinguer numérisé, c’est-à-dire existant au préalable sur un support « en dur » avant d’être photographié ou scanné, de numérique, dont l

Notes

1 Online Public Access Catalog.

2 Alsatica correspond au Portail numérique des Savoirs en Alsace lancé par la Région Alsace en

3 <http://www.alsatica.eu/> [consulté le 16 mai 2013]. Il veut être le point d’accès unique au plus grand nombre de ressources documentaires présentes dans les bibliothèques municipales, départementales et universitaires, ou encore dans les centres de documentation et archives du territoire alsacien. Mais il reste tributaire de ce qui figure au catalogue des institutions partenaires: <http://www.alsatica.eu/a-propos/partenaires-contributeurs-alsatica.html>

4 <http://www.e-codices.unifr.ch/>

5 <http://www.muenchener-digitalisierungszentrum.de/>

6 <http://www.ub.uni-freiburg.de/index.php?id=dipro>

7 <http://www.revues.org/>

8 <http://www.ville-selestat.fr/bh/>

9 <http://www.mgh.de/dmgh/>

10 <http://www.numistral.fr/>

11 <http://archives-fr.hypotheses.org/>

12 Jean Daniel Schoepflin, Alsatia Illustrata, 2 tomes, Colmar, 1751-1761; Jean Daniel Schoepflin, Alsatia… diplomatica, 2 tomes, Strasbourg, 1772-1775.

13 Il faut distinguer numérisé, c’est-à-dire existant au préalable sur un support « en dur » avant d’être photographié ou scanné, de numérique, dont l’existence originelle repose sur l’utilisation d’un logiciel ou d’un programme informatique.

Citer cet article

Référence papier

Guillaume Porte, « Alsatia Numerica », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe, 2 | 2013, 185-188.

Référence électronique

Guillaume Porte, « Alsatia Numerica », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe [En ligne], 2 | 2013, mis en ligne le 14 mars 2024, consulté le 24 avril 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/sources/index.php?id=451

Auteur

Guillaume Porte

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