L’utilisation des médias et l’iconographie des techniques dans l’œuvre d’Hannah Höch

Position de thèse

p. 191-200

Text

« [Höch] portait un regard critique sur le développement rapide des technologies et des sciences1 », se souvient Karoline Hille ; Ralf Burmeister, le directeur des archives Hannah Höch, souligne ses « constants intérêts […] en matière de développement technologique, plus particulièrement dans le domaine des sciences naturelles2 » ; l’artiste elle-même confie au couple de photographes Orgel-Köhne : 

La technique m’a toujours intéressée ! […] Aujourd’hui encore, je m’intéresse tellement aux nouveautés techniques ! Pourquoi ? Parce que depuis que je suis petite, tout cela me semble très beau. […] C’est stupéfiant, tout ce qu’il se passe. Les objets techniques m’ont toujours particulièrement impressionnée3.

Hannah Höch, essentiellement reconnue depuis les années 1960 comme ayant été la seule femme plasticienne du groupe dadaïste berlinois, mentionne régulièrement aux commissaires d’exposition, artistes, critiques et historiens d’art intéressés par son œuvre son intérêt constant pour l’actualité des sciences et des techniques4. Pourtant, cet aspect de son travail n’a jamais fait l’objet d’une étude approfondie.

Cela est à imputer aux biais inhérents à sa réception, qui se dessinent dès les années 1960. Dépositaire des archives les plus conséquentes sur le mouvement Dada et les avant-gardes qui lui furent contemporaines, Höch devint après la Seconde Guerre mondiale l’interlocutrice privilégiée des musées désirant consacrer au dadaïsme une rétrospective5. Cette première phase de sa réception, marquée par une série d’expositions d’envergure internationale, s’intéressa particulièrement, pour ne pas dire quasi exclusivement, à ses photomontages (négligeant ainsi ses productions picturale et graphique6) et à sa période dadaïste (omettant de manière significative sa carrière contemporaine7). Puis, l’intérêt que lui porta Linda Nochlin dès 1975 marqua son entrée dans le champ des études de genre8. Cette seconde phase de sa réception, reprise par plusieurs chercheuses anglo-saxonnes et allemandes9, est particulièrement marquée par l’étude des problématiques féministes et lesbiennes dans son œuvre et sa vie10.

Aujourd’hui, nos connaissances sur la carrière d’Hannah Höch sont encore caractérisées par un important contraste historiographique surexposant certains aspects de son travail (les photomontages, la période dadaïste et les problématiques liées au genre), tout en en laissant d’autres dans l’ombre – dont son intérêt pour les techniques. Étudier l’évolution de cette iconographie nous permit donc de rattacher l’artiste au « domaine (ostensiblement masculin) de la fantaisie technique11 » et de mettre ainsi son œuvre entière en perspective. Cette approche a néanmoins nécessité d’adjoindre à cet axe l’étude du rapport de Höch aux médias de son époque, auxquels elle est intimement liée : la presse illustrée, matière première des photomontages de l’artiste, mais également la radio et la télévision – trois objets éminemment techniques12. De plus, notre thèse a permis de prendre le contrepied de l’image de l’artiste recluse au jardin véhiculée dès sa première réception, et de dresser au contraire le portrait d’une femme en constante connexion avec les problématiques de son époque13.

Mettre en exergue le rôle du rapport d’Hannah Höch aux médias de son temps dans son utilisation de l’iconographie des techniques a requis une approche méthodologique rigoureuse, fondée sur l’étude des archives de l’artiste. Conservé à la Berlinische Galerie, ce fonds représente près de 12 000 numéros d’archives, certains rassemblant en réalité plusieurs documents. Dans le cadre de notre thèse, nous en avons consulté plus de 2 000. Nous avons axé notre exploration sur les agendas, dans lesquels l’artiste prenait quelques notes sur les évènements importants de ses journées, sur ses carnets de notes, ses photographies, ses travaux préparatoires, ses brouillons de textes, et enfin sur les magazines et journaux conservés intégralement ou partiellement, en portant une attention particulière aux coupures de presse d’après-guerre relatives aux médias et aux techniques14. Notre objectif était à la fois de trouver des témoignages directs de l’artiste concernant son rapport aux médias dans ses notes autographes, mais également d’étudier de manière concrète son rapport au magazine en tant qu’objet quotidien, vecteur d’information et support de création.

Cette première étape de notre travail nous a permis de constater la prépondérance de la presse écrite dans sa fréquentation des médias. En sus de la lecture régulière de la presse quotidienne, Höch conservait souvent la partie « programme » des radios puis des chaînes de télévision qui paraissaient dans la presse écrite et y signalait les émissions qui l’intéressaient. Parfois, et plus particulièrement lorsqu’il s’agissait d’émissions concernant l’art Dada ou d’un reportage auquel elle avait contribué ou qui lui était consacré, l’artiste découpait l’encadré et le collait dans son agenda à la date de sa diffusion. Évidemment, d’importantes disparités dans les habitudes de conservation de l’artiste, vraisemblablement dues aux aléas de l’Histoire15, ont dû être prises en compte au cours de notre étude. La liste des magazines utilisés dans ses photomontages et celle des revues conservées diffère néanmoins drastiquement, laissant supposer une disparition totale du matériau dans l’acte de création. Les travaux préparatoires où l’artiste utilise d’anciens magazines comme intercalaires pour organiser les photographies découpées ou les notes prises sur des fragments de papier par thématiques constituent une exception16. Pour cette période, les objets conservés correspondent davantage à une volonté d’ego-archives : il s’agit d’articles se référant à son travail ou aux expositions auxquelles elle participa. Parallèlement, la majorité des magazines intégralement conservés avant la Seconde Guerre mondiale sont des revues artistiques et littéraires telles De Stijl, a bis z ou encore Der Einzige17. Les journaux sont quant à eux rarement conservés de manière intégrale : les coupures de presse dominent et se rapportent à des thématiques qui intéressent particulièrement l’artiste, tels que l’actualité artistique et littéraire mais aussi scientifique et technique18. Au terme de cette analyse, nous avons pu montrer que Höch considérait la presse écrite à la fois comme source d’information et matériau artistique.

En rattachant ces observations préliminaires à l’œuvre d’Hannah Höch telle que nous la connaissons19, nous avons pu constater que l’évolution de la représentation des techniques dans ses photomontages était influencée par trois facteurs principaux : l’évolution de la photographie dans presse magazine, qui connaît au xxe siècle un essor significatif en qualité comme en style ; sa considération même du procédé du photomontage, qu’elle s’évertue dès le début de sa pratique à hisser au rang des beaux-arts20 ; et enfin l’introduction de nouveaux médias dans son quotidien, plus particulièrement de la télévision.

Le recours de Höch à une iconographie mécanomorphe varie fortement au cours de sa carrière. La période dadaïste est particulièrement riche en éléments mécaniques. Dès Coupe au couteau de cuisine21, rouages, roues, clés à molette et autres objets techniques servent à structurer l’image, à articuler les fragments épars qui constituent le photomontage et à en proposer un sens de lecture. Cette fonction structurelle se double d’une réflexion sur la manière dont la mécanisation grandissante entraîne une nécessaire réorganisation globale des instances sociétales. Dans d’autres photomontages légèrement postérieurs à la période dadaïste, que l’on peut qualifier de portraits composites de types sociaux, Höch concentre ses réflexions sur le rapport entre médias et techniques autour de thématiques plus précises : Couple bourgeois - Dispute22 (1919) les applique par exemple à l’espace domestique où les rôles genrés sont désormais renforcés par l’usage d’outils ménagers ; La jolie jeune fille23 (1920) interroge les attributs contemporains de la beauté féminine et leurs prescripteurs ; Haute finance24 (1923) montre le rôle des riches financiers sur l’évolution du paysage et des modes de vie urbains. Dans tous les cas, la photographie est utilisée pour sa surdétermination technique – il y a là, pour Höch, une mise en abîme de la nature technique de l’image photographique volontairement subvertie par les gestes perturbateurs et réorganisateurs de découpage et de montage. En nous appuyant sur la définition de la photographie en tant qu’image technique élaborée par Vilèm Flusser25, nous avons montré comment Höch, en réalisant ses photomontages au moyen de reproductions photographiques empruntées à la presse illustrée, s’approprie la fabrique sociale de l’image photographique.

A contrario, ses photomontages d’après-guerre semblent exempts de toute iconographie mécanique. Cette absence n’est toutefois qu’apparente. Elle s’explique par deux facteurs. Le premier est la prise de conscience, par l’artiste, d’un changement de paradigme dans l’art qui lui est contemporain. Elle est perceptible dans une série de toiles réalisée par Höch dans les années 1920, qui met en perspective la fonction de modèle que revêt désormais la technique pour l’art en remplaçant le rôle jadis endossé par la nature et son imitation26. En changeant de modèle, l’art change d’esthétique : l’artiste ressent cela de manière particulièrement accrue dans son utilisation de la photographie. Pour elle, le photomontage est né de et permis par l’évolution de la photographie27. En tant que tel, il exploite les possibilités de cette nouvelle vision mécanique autorisant, comme l’ont entre-temps montré les mouvements de la Nouvelle Objectivité et de la Nouvelle Vision, une infinie variation de focales et de points de vue, de l’infiniment grand à l’infiniment petit en passant par la photographie aérienne28. Selon elle, de ces nouvelles propriétés techniques de la vision émane une nouvelle beauté typiquement contemporaine29. L’augmentation de la qualité des reproductions photographiques des magazines, désormais en couleur et de plus grand format, permet à Höch de ne plus « détourer » les sujets des photographies qu’elle réemploie mais d’y prélever des effets de matière afin de rendre la source méconnaissable et de laisser le potentiel purement esthétique de la photographie s’exprimer pleinement. Une rapide comparaison entre deux photomontages datant respectivement de 1926-1927 et de 1960 et thématisant le point de vue en forte plongée montre comment cette nouvelle utilisation de la même matière première engendre de nouveaux effets plastiques30. La seconde raison de cet apparent retrait de l’iconographie technique après la guerre découle de son affirmation des valeurs purement esthétiques de la photographie et du photomontage. Afin de le dissocier clairement des arts appliqués qui le firent naître, Höch n’utilise par exemple jamais le photomontage dans ses travaux graphiques31. De plus, entre 1945 et 1947, elle contribua au mouvement d’art « fantasque » (ou « fantastique ») qui se développait à Berlin autour de la galerie Gerd Rosen32. Ce mouvement peut être assimilé à une version allemande du Surréalisme désirant proposer une voie intermédiaire entre figuration et abstraction, qui ferait fi des deux : la fantaisie. Dans la droite lignée d’un Jérôme Bosch, il s’agissait pour les artistes « fantasques » de créer des visions, des créatures surnaturelles en faisant jouer les ressorts de l’imagination. À partir de là et jusqu’à la fin de sa carrière, Höch mêla ainsi les registres, et cacha notamment l’actualité technique sous une iconographie naturelle. Ce constat nous a permis d’interpréter à nouveaux frais une partie de l’œuvre photomonté de l’artiste. Nous avons pu fournir une nouvelle analyse de Jolis filets33, un photomontage de 1946 généralement interprété, pour les aigrettes de pissenlits évoquant un feu d’artifice, comme une célébration de la fin du régime hitlérien. Pourtant, l’objet central, une bourrache en bois tressé repliée34, évoque nettement la forme d’une fusée – ce qui, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, n’est pas sans rappeler la course aux V2 menée par la Russie et les États-Unis. Il en va de même pour L’ange de la paix, un photomontage datant de 195835. Généralement interprété de manière similaire malgré sa datation plus tardive, le photomontage prend une toute autre signification une fois mis en relation avec son contexte immédiat : le lancement du premier Spoutnik l’année précédente, dont la population peut suivre les révolutions grâce aux ondes de radio transmettant, à certaines heures de la journée (annoncées dans les numéros du BZ am Abend que Höch conserve dans ses archives36), son légendaire « bip, bip ». La tête de l’ange entretient alors des ressemblances formelles frappantes avec les deux Spoutnik suivants, respectivement lancés le 3 novembre 1957 et le 15 mai 1958. Sa « robe », matérialisée par les câbles d’un pont suspendu, évoque davantage les ondes radio, seules témoins du succès de l’entreprise spatiale soviétique. Le titre se réfère alors aux débats présents dans la presse contemporaine sur l’utilisation future de cette technologie37.

L’exemple le plus emblématique du lien entre le rapport aux médias et l’iconographie des techniques dans l’œuvre d’Hannah Höch ressort également de son intérêt pour les premiers pas sur la Lune. Sur le photomontage En hommage aux hommes qui ont conquis la Lune38, homme et Lune sont étonnamment absents. Une feuille de droséra recourbée assortie d’ailes de papillon flottent entre une photographie indistincte rappelant les traces du module lunaire sur la surface du satellite et un ciel au point du jour. La nature vient clairement remplacer la technique, pourtant capitale dans la réalisation et la retransmission de l’exploit. Höch croque pourtant le module lunaire et les détails des combinaisons des astronautes devant son poste de télévision à l’occasion des missions Apollo suivantes39, mais aucun de ces éléments n’apparaît sur l’hommage. L’analyse des retransmissions télévisées des missions Apollo que Höch a suivi montrent à la fois la faible qualité de l’image transmise, requérant une interprétation constante de la part des scientifiques intervenant dans l’émission et du téléspectateur, mais également la teneur politique des discours élaborés autour et entre les diffusions d’images captées sur la Lune. Bien que revendiqué par les États-Unis comme un évènement universel, le pays opère systématiquement un planté de drapeau rediffusé en direct. De forts enjeux nationalistes s’expriment aussi au regard de la technique, basée sur les recherches de l’ingénieur allemand Wernher von Braun, père des V2 dont l’expertise fut récupérée par les États-Unis en 1945. Les scientifiques allemands présents lors de la diffusion soulignent régulièrement l’importance du pays dans l’exploit américain. Ainsi, la feuille de droséra et le papillon peuvent d’abord être interprétés comme une volonté de l’artiste de dépolitiser l’événement. Ce passage « fantastique » de la technique à la nature traduit peut-être également la difficulté à « voir » l’évènement transmis par une image technique de piètre qualité, diffusée sur une boîte au fonctionnement abscons40. Dans ses croquis des missions suivantes, les annotations suppléant l’image montrent bien l’importance du discours pour conférer un sens à ces nouvelles images, récemment entrées dans son quotidien41.

Afin de soutenir cette approche novatrice du travail d’Hannah Höch, nous avons dû en parallèle mettre en lumière des aspects jusqu’alors inconnus de son travail et de sa réception. Sa production graphique des années 1930, ses photographies personnelles et son rapport à la pratique photographique elle-même, sa manière de gérer sa propre réception à travers les médias et ses relations avec les dadaïstes vieillissants sont autant de thématiques adjacentes et inédites qu’il nous a été nécessaire d’approfondir dans notre travail de thèse. Nous avons également traduit en français 16 textes de l’artiste rédigés entre 1918 et 1977. Notre thèse, fondée sur des sources inédites, parvient donc par sa problématique et sa méthodologie à enrichir l’état actuel des connaissances internationales sur l’artiste, et espère à ce titre être le point de départ de recherches complémentaires en France, où Höch a été relativement peu étudiée.

 

Cette thèse, réalisée sous la direction de Mme Valérie Da Costa, maîtresse de conférences HDR à l’université de Strasbourg, a été soutenue le lundi 4 avril 2022 devant un jury composé des membres suivants : la présidente du jury Mme Julie Ramos, professeure à l’université de Strasbourg, M. Guillaume Le Gall, professeur à l’université de Lorraine et Mme Marie Gispert, maîtresse de conférences HDR à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ce jury décerna suite à sa délibération le grade de docteure de l’université de Strasbourg à Mme Aurélie Arena.

Notes

1 Karoline Hille, « “…This never-ending evolution” reflected in her Art – Hannah Höch and the 20th Century » dans Juan Vincente Aliaga (éd.), Hannah Höch : Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia del 20 de enero al 11 de abril de 2004, Madrid, Aldeasa/Museo nacional Centro de Arte Reina Sofia, 2004, p. 322-331 et p. 329. Sauf mention contraire, toutes les traductions ont été effectuées par l’auteure. Return to text

2 Ralf Burmeister (éd.), Hannah Höch  : aller Anfang ist DADA!, Ostfildern/Berlin, Hatje Cantz/Berlinische Galerie, Landesmuseum für Moderne Kunst, Fotografie und Architektur, 2007, p. 184. Return to text

3 « Technik hat mich immer interessiert ! […] Noch heute bin ich an den neusten Dingen technisch soo interessiert ! Warum ? Weil ich von klein an dahin geführt wurde, dass mir das alles schon auffiel. […] Es ist erstaunlich, was alles passiert. Das sind alles Dinge, die technisch sind, was mich eben doch sehr beeindruckt hat. » : placards n° 7 et n° 21 (Inv. SammOrgelKöhneHöch7 et Inv. SammOrgelKöhneHöch21), Sammlung Orgel-Köhne, Museum Reinickendorf, Berlin. Return to text

4 Il est également souligné dans les catalogues d’exposition les plus récents : Hannah Höch : Revolutionärin der Kunst : das Werk nach 1945, Berlin, Braus, 2016, p. 191-192 ; Karoline Hille et al., Hannah Höch. FloraVitalis, Apolda/Thüringen, Kunsthaus Apolda Avantgarde, 2017, p. 118-119. Return to text

5 D’après notre propre relevé, les archives de l’artiste recèlent 694 documents pour la période de 1915 à 1922 (correspondances, cartes postales, brouillons d’articles, revues, affiches, prospectus, tracts). Höch contribue, par le prêt de ses propres œuvres et d’objets issus de ce fonds, aux grandes rétrospectives consacrées au dadaïsme, organisées après guerre et jusqu’à sa mort : « Dada. Documente einer Bewegung » (à la Kunsthalle de Düsseldorf du 5 septembre au 19 octobre 1958) ; « Dada bis heute » (à la Neue Galerie der Stadt Line et au Wolfgang Gurlitt Museum d’Alpbach du 22 août au 8 septembre 1965) ; « Dada » (au Moderna Museet de Stockholm du 3 février au 23 mars 1966) ; « Dada : exposition commémorative du centenaire » (à la Kunsthaus de Zürich du 8 octobre au 17 novembre 1966) ; « Dada 1916-1966 : Dokumente der internationalen Dada-Bewegung » (au Goethe Institut et au Musée national d’art moderne de Tokyo en 1968, puis en tournée eu Europe de l’Est l’année suivante) ; « Dada and Surrealism Reviewed » (au Art Concil of Great Britain de Londres du 11 janvier au 27 mars 1978) ; « Dada-International » (au Goethe Institut de Paris du 16 février au 17 mars 1978). Les fréquentes visites de commissaires d’exposition et de critiques allemands, français et anglo-saxons durant cette période confirment l’importance des archives dadaïstes d’Hannah Höch pour l’historiographie du mouvement dada. Voir notamment : Hannah Höch : Eine Lebenscollage, t. III, vol. 1/2, Stuttgart, Hatje, 2001 et Idem, t. III, vol. 2/2, Berlin, Berlinische Galerie, 2001. Return to text

6 Une exception notable concernant la période d’avant 1945 : Ellen Maurer, Hannah Höch, jenseits fester Grenzen : das malerische Werk bis 1945, Berlin, Gebr. Mann, 1995. Return to text

7 Voir Aurélie Arena, L’utilisation des médias et l’iconographie des techniques dans l’œuvre d’Hannah Höch (1889-1978), thèse de doctorat soutenue le 4 avril 2022 sous la direction de Mme Valérie Da Costa, Université de Strasbourg, p. 59-64. Return to text

8 Le 17 juillet 1975, Linda Nochlin rend visite à Hannah Höch dans le cadre de sa préparation de l’exposition « Women Artists : 1550-1950 », qui eut lieu l’année suivante à Los Angeles. Höch en garde une trace dans son agenda de cette année-là et Nochlin rédigera un court texte relatant cette rencontre. Voir respectivement : Hannah-Höch-Archiv (désormais HHA), 75.126, agenda de l’année 1975, et Linda Nochlin, « How I Remember Her  : A brief Encounter with Hannah Höch », dans Cut and Paste um 1900. Der Zeitungsausschnitt in den Wissenschaften, Zürich, Diaphanes, 2002, p. 181-184. L’année suivante (1976), Karen Petersen et Inge Schumacher font de même en vue de l’exposition « Künstlerinnen International 1877-1977 » prévue au château de Charlottenburg. Voir Karen Petersen, « Ein Nachmittag mit Hannah Höch », dans Künstlerinnen international, 1877-1977. Gemälde, Grafik, Skulpturen, Objekte, Aktionen, Berlin, Neue Gesellschaft fur Bildende Kunst, 1977, p. 58-61. Return to text

9 Dans les années 1980 et 1990, Jula Dech, Hanne Bergius, Karoline Hille mais aussi Maud Lavin commencent à s’intéresser à l’artiste, réfléchissent sur les modalités du discours élaboré à son sujet par leurs prédécesseurs et publient leurs premières études d’envergure sur son œuvre. Return to text

10 Voir notamment les ouvrages et articles suivants, qui soulèvent de nombreuses problématiques dont découlent les articles parus aux catalogues d’expositions les plus récents, parfois rédigés par ces mêmes autrices : Hanne Bergius, « Hannah Höch – Künstlerin im Berliner Dadaismus/Hannah Höch – Femme artiste du Dadaïsme Berlinois » dans Barbara Dieterich et Peter Krieger (éd.), Hannah Höch : collages, peintures, aquarelles, gouaches, dessins : A.R.C. 2, catalogue d’exposition, (Musée d’Art Moderne de la ville de Paris, 30 janvier-7 mars 1976 / Nationalgalerie Berlin, Staatlichen Museen Preussischer Kulturbesitz, 24 mars-9 mai 1976), Berlin, Gebrüder Mann, 1976 ; Jula Dech, Hannah Höch : Schnitt mit dem Küchenmesser Dada durch die letzte Weimarer Bierbauchkulturepoche Deutschlands, Frankfurt am Main, Fischer Taschenbuch Verlag (Kunststück), 1989 ; Eadem et Ellen Maurer (éd.), Da-da zwischen Reden zu Hannah Höch, Berlin, Orlanda Frauenverlag, 1991 ; Karoline Hille, Hannah Höch und Raoul Hausmann : eine Berliner Dada-Geschichte, Berlin, Rowohlt, 2000 ; Maud Lavin, « Androgyny, Spectatorship and the Weimar Photomontages of Hannah Höch », New German Critique, n° 51, automne 1990, p. 62‑86 ; Eadem, Cut with the kitchen knife  : the Weimar photomontages of Hannah Höch, New Haven/London, Yale University Press, 1993 ; Julie Nero, Hannah Höch, Til Brugman, Lesbianism, and Weimar sexual Subculture, Case Western Reserve University, 2012. Return to text

11 Dorothea Dietrich, « Seen from above. Hannah Höch’s Lens on aerial photography », Art on paper [focus on photography], vol. 9, n° 3, janvier-février 2005, p. 62-65, p. 65. Return to text

12 Issus des mutations techniques de leur époque (liées à l’imprimerie, à la diffusion des ondes radio et à la transmission de l’image animée) tout autant qu’à la mise en place d’un marché exploitant ces techniques et motivant leur développement, les médias sont des objets techniques à part entière, privilégiés dans l’approche höchienne de la technique de par son utilisation de la presse écrite comme matière première de ses photomontages mais également de par sa consommation assidue des médias. Sur les notions de technique et de médias, voir notamment : Francis Balle, Les médias, Paris, Presses universitaires de France (« Que sais-je ? »), 2012 ; Marshall McLuhan, Pour comprendre les médias : les prolongements technologiques de lhomme, Paris, France, Mame/Seuil, 1977 ; Gilbert Simondon, Sur la technique (1953-1983), Paris, Presses universitaires de France, 2014 et Idem, Du mode dexistence des objets techniques, Paris, Aubier (« Aubier philosophie »), 2012. Return to text

13 Alma-Elisa Kittner a dressé avant nous les grands axes de cette étude, que nous avons approfondis ? : Alma-Elisa Kittner, « “Wie ich mich in meinem Garten auflöse”. Hannah Höch zwischen Künstlerinnenlegenden und Gartenmythen », dans Doris Berger et al. (éd.), Wahlverwandtschaften : Beiträge zu künstlerischen Selbstentwürfen , Berlin, Argobooks (« Kunst und Theorie », n° 1), 2007, p. 48-57 et Idem, « Hannah Höch vor der Kamera. Foto-Inszenierungen der 1960er- une 1970er-Jahre », dans Cornelia Gerner et al., Hannah Höch : von Heiligensee in die Welt, Cologne, Wienand, 2018, p. 101-120. Return to text

14 Dans cette optique, la vente aux enchères de la bibliothèque de l’artiste après sa mort représenta un obstacle à notre étude. Return to text

15 À partir de 1939, Höch s’installe dans le quartier d’Heiligensee à Berlin et ne déménage plus. Auparavant, elle a vécu dans différents quartiers de la capitale, et quelques années en Hollande. Pour un récapitulatif de ses adresses, voir Jula Dech, Sieben Blicke auf Hannah Höch, Hamburg, Nautilus (« Kleine Bücherei für Hand und Kopf », n° 52), 2002, p. 6. Return to text

16 Nous n’en avons trouvé que deux : HHA, 66.274, Material zum Vortrag Düsseldorf rausgesucht. Erinnerung-Notizen (Matériel pour la conférence de Düsseldorf trié, mémentos), 1966 et 70.162, Vorbereitung für neue große Collage (Préparation pour nouveau grand collage), 1970. Return to text

17 Höch en conserve par exemple respectivement 25, 16 et 14 numéros. Ces revues sont particulièrement importantes dans le paysage artistique de l’entre-deux-guerres. Animées par des artistes et amis d’Hannah Höch, elles constituent l’expression de l’avant-garde artistique et littéraire de l’époque. Return to text

18 Deux ensembles se distinguent par leur méthode de classement particulière : son carnet de jardinage (HHA, Ud. 654, Gartenbuch, non daté) où elle conserve plusieurs rubriques du Berliner Morgenpost et du Tagesspiegel donnant des conseils pratiques sur la culture de différentes plantes ; et une boîte de chocolats remplie de poèmes également découpés dans des journaux (HHA, Ud. 520, Gedichte nicht von mir (Poèmes qui ne sont pas de moi), non daté). Return to text

19 Un relevé de plus de 600 peintures, dessins, photomontages et estampes, effectué en début de thèse, nous a permis de faire un état de son œuvre : de constater celles, souvent exposées, autour desquelles notre connaissance de l’artiste s’est construite, mais aussi de mettre au jour des travaux moins étudiés. Enfin, notre analyse des catalogues d’exposition en musée et en galerie d’Hannah Höch nous a également permis de prendre l’ampleur des œuvres disparues. Return to text

20 Höch a dès le départ l’ambition d’utiliser le photomontage de manière différente de ses confrères dadaïstes. Elle cherche à hisser cette technique issue des arts appliqués au rang des beaux-arts, en réalisant ce qu’elle appelle des « photomontages de forme libre » (Hannah Höch, « Quelques mots sur le photomontage », Stredisko, vol. 4, n° 1, 1934) : « Dès le départ, j’ai pensé que l’on ne devait pas s’en servir uniquement à des fins de propagande ou dans les arts appliqués comme le fit le groupe [rassemblé] autour de la maison d’éditions Malik, mais que l’on pouvait aussi le considérer comme un moyen d’expression en soi et en arriver à réaliser des travaux purement esthétiques. […] Jusqu’à aujourd’hui, je cherche à exploiter la photographie en conséquence. Je m’en sers comme de la couleur, ou comme le poète se sert du mot. » (d’après une lettre d’Hannah Höch à Walter Mehring d’avril 1959, citée dans Walter Mehring, Berlin Dada, Zurich, Verlag der Arche, 1959, p. 91-92. Return to text

21 Hannah Höch, Schnitt mit dem Küchenmesser Dada durch die letzte Weimarer Bierbauchkulturepoche Deutschlands (Coupe au couteau de cuisine Dada à travers la dernière époque culturelle du ventre à bière weimarien d’Allemagne), 1919-1920, collage et photomontage de journaux sur papiers colorés collés, 114 × 90 cm, Berlin, Staatliche Museen, Nationalgalerie. Return to text

22 Eadem, Bürgerlisches Brautpaar - Streit (Couple bourgeois - Dispute), 1919, photomontage, 38 × 30,6 cm, collection particulière. Return to text

23 Eadem, Das schöne Mädchen (La jolie jeune fille), 1920, photomontage, 35 × 29 cm, collection particulière. Return to text

24 Eadem, Hoch Finanz (Haute finance), 1923, photomontage sur papier, 36 × 31 cm, Berlin, Galerie Berinson. Return to text

25 Notamment dans Vilèm Flusser, Pour une philosophie de la photographie, Belval, Circé, 2004 et Idem, La civilisation des médias, Belval, 2006. Return to text

26 Nous avons nommé cet ensemble de 6 toiles mettant en scène la mécanisation du végétal des « Jardins mécaniques », à partir du titre donné par Höch à la principale d’entre elles : Hannah Höch, Mechanischer Garten (Jardin mécanique), 1920, aquarelle, gouache et encre de Chine sur papier, 75 × 48,3 cm, collection particulière. Return to text

27 « Le photomontage est basé sur la photographie et s’est développé à partir d’elle » : Eadem, « Quelques mots sur le photomontage », op. cit., n.p. Return to text

28 Une utilisation de la photographie dans ses photomontages conforme à son ambition esthétique, exprimée dès sa première exposition monographique à Brno en 1929, dans un texte repris tel quel, bien que légèrement augmenté, 20 ans plus tard à l’occasion d’une rétrospective à la galerie Franz à Berlin : « Je veux montrer que le petit peut être grand, et le grand, petit, que c’est seulement le point de vue à partir duquel nous émettons nos jugements qui change, et que tous les concepts ou gestes humains perdent alors leur validité. Je veux aussi montrer qu’il y a des millions et des millions d’autres points de vue justifiables, hormis le vôtre et le mien. Aujourd’hui, je représenterais le monde du point de vue d’une fourmi et demain, tel que la lune le voit peut-être, et ensuite à la manière dont de nombreuses autres créatures pourraient l’appréhender. » (Eadem, « Avant-propos du catalogue de la Kunstzaal de Brno », dans Hannah Höch, eine Lebenscollage, op. cit., t. II, p. 365). Return to text

29 « Et quand, aujourd’hui, la physique atomique nous ouvre à tant de mondes nouveaux, et qu’en même temps nous faisons nos premiers pas dans l’espace – comment cela peut-il ne pas influencer l’art ? Je pense aussi à l’immense richesse des formes qui se sont développées et qui deviennent visibles à partir des événements primitifs, du monde atomique et à travers la photographie d’électrons. Des formes qu’aucun œil humain n’avait encore jamais vues auparavant. De minuscules petits bouts de matière, que nous pouvons tant grossir que nous pouvons maintenant les voir, et qui nous donnent le frisson devant tant de nouvelles beautés, jusqu’à présent jamais vues et inconnues, et de stimulations possibles – car là gisent de grandes possibilités pour l’avenir, et le peintre saura les utiliser. » : Eadem, « Exposé devant les écoliers de l’école de Reinickendorf », 1963, traduit d’après HHA, 63.168, Referat bei Schuelern der Schule Reinickendorf, 1963. Return to text

30 Eadem, Von oben (D’en haut), 1926-1927, photomontage sur papier marouflé sur carton, 30,5 × 22,5 cm, Des Moines (Iowa), Des Moines Art Center, et Eadem, Von oben gesehen (Vu d’en haut), v. 1960, 23 × 20 cm, localisation inconnue. Return to text

31 Nous l’avons montré dans notre thèse en constituant et analysant un corpus inédit de couvertures de livres réalisées par Höch de sa formation aux années 1930. Voir notamment parmi nos sources : Thomas Hatry, Z.A.G. Hannah verdient sich ihre Brötchen. Bibliografie der im Zeitschriftenverlag A.G. Erschienen Romane Berlin 1931-1942, Heidelberg, Antiquariat Thomas Hatry, 2015. Return to text

32 Voir Markus Krause, Galerie Gerd Rosen : die Avantgarde in Berlin, 1945-1950, Berlin, Ars Nicolai, 1995. Return to text

33 Hannah Höch, Schöne Fanggeräte (Jolis filets), 1946, photomontage, 30 × 22 cm, Berlin, Landesbank AG. Return to text

34 Ou « bourriche » : ustensile notamment utilisé dans la pêche à l’anguille. Return to text

35 Eadem, Friedensengel (L’ange de la paix), photomontage, 22,2 × 17,5 cm, Berlin, Berlinische Galerie. Return to text

36 Höch conserve dans ses archives 29 numéros de BZ am Abend, le seul tabloïd quotidien de Berlin-Est à être également diffusé à l’Ouest. Parmi eux, 14 ont pour sujet Sputnik 1. Ils font état jour après jour des horaires et des ondes auxquelles le « bip, bip » du satellite pourra être entendu par les amateurs de radio. Voir A. Arena, L’utilisation des médias…, op. cit., p. 144-147. Return to text

37 Sur l’analyse du débat qui parcourt la presse contemporaine, vu depuis les archives Hannah Höch, voir : Ibid., p. 147-150. Return to text

38 Hannah Höch, Den Männern gewidmet, die den Mond eroberten (En Hommage aux hommes qui ont conquis la Lune), 1969, photomontage, 25,7 × 26,4 cm, Düsseldorf, collection particulière. Return to text

39 HHA, 69.280, Der Mond. Notizen gemacht als die Männer auf dem Mond waren, vor dem Fernsehschirm. Hannah Höch (La Lune. Notes prises pendant que les hommes étaient sur la Lune, devant l’écran de télévision. Hannah Höch), 11 feuilles volantes, 1969 et Hannah Höch, Apollo 14. Skizzen zur Mondlandung der Apollo 14 (Apollo 14. Esquisses à l’occasion de l’alunissage d’Apollo 14), 1971, crayon sur papier, 29,7 × 21 cm, Berlin, Berlinische Galerie. Return to text

40 Höch en explore parallèlement les effets visuels et plastiques au travers d’un dessin effectué à l’occasion d’un dysfonctionnement : Eadem, Ein Schräubchen hat sich gelockert am Farbfernseher (Un petit bouton s’est coincé sur la télé couleur), n.d., esquisse au feutre sur papier, 21 × 29,7 cm, Berlin, Berlinische Galerie (HHA, 6760/93). Return to text

41 Notre analyse des agendas de l’artiste suggère que Höch acquiert très vraisemblablement un téléviseur personnel à la fin de l’année 1968. Return to text

References

Bibliographical reference

Aurélie Arena, « L’utilisation des médias et l’iconographie des techniques dans l’œuvre d’Hannah Höch », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe, 20 | 2022, 191-200.

Electronic reference

Aurélie Arena, « L’utilisation des médias et l’iconographie des techniques dans l’œuvre d’Hannah Höch », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe [Online], 20 | 2022, Online since 26 juin 2023, connection on 11 décembre 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/sources/index.php?id=778

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Aurélie Arena

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