Rêve du Nord et désir d’émancipation

En sommarsaga d’Anne Charlotte Leffler

  • Dreams about the North and Desire for Emancipation. En sommarsaga by Anne Charlotte Leffler

p. 145-159

Zusammenfassung

In this article, I seek to understand what the North, and more specifically Sweden, represents for the reader of the 1880s by highlighting various references to the Northern imaginary in a novel by Anne Charlotte Leffler, En sommarsaga (1886). My hypothesis is that Leffler, through folklore, does not intend to describe a real geographic territory, but rather an imaginary geography fabricated throughout the novel. Indeed, it is around the themes of nature, folklore and women’s emancipation that the North takes form through the heroine’s dreams of her homeland after spending many years in Italy. Using the outside look of the stranger, therefore, Leffler creates both a novel of feminine questioning and a poetic journey through which the author describes the mysterious landscapes of the Swedish summer and creates a new space, in which Utopias are not only allowed, but also put to the test of reality. Finally, the imagination of the North seems to be a means for the heroine to understand her own situation and her desire for emancipation.

Gliederung

Text

Anne Charlotte Leffler (1849-1892), l’une des plus importantes femmes de lettres de la Percée moderne scandinave, apporte avec En sommarsaga (Un conte d’été, 1886)1 une contribution importante au débat de l’époque sur la situation de la femme, aussi bien dans le mariage que dans la sphère sexuelle. Plus virulente que Victoria Benedictsson, sa critique de la société patriarcale se fait souvent plus explicite.

Les femmes de la Percée moderne, dont les écrits ont d’ailleurs été souvent minorés, prennent conscience qu’elles ne sont pas les égales des hommes. Elles aspirent désormais à être autant leurs camarades que leurs amantes. Leffler s’exprime sur ce point tout au long de son œuvre et elle se prononçe pour une égalité plus pratique que théorique : « l’émancipation de la femme n’est pourtant pas seulement une question d’égalité juridique parfaite et humaine entre les sexes, mais aussi la possibilité pour elle de se développer en une personne autonome ».2

Ainsi, dans un drame comme Sanna kvinnor (De vraies femmes, 1883) Leffler dénonce ouvertement deux obstacles majeurs à l’émancipation : le droit de la femme mariée à disposer de son propre bien et l’hypocrisie des hommes.3 Le titre est ironique et renvoie à ce que pensent le père et le frère dans cette pièce : une « vraie femme » doit être obéissante et savoir réfréner ses propres désirs pour satisfaire ceux des hommes. Leffler souhaite ici révéler les injustices d’une société moralisatrice et fait de l’écriture un acte de lutte. Avec Sanna kvinnor, elle déclare « la guerre à la société »4, pour reprendre le titre d’une de ses nouvelles : « la tâche de ma nouvelle pièce n’est pas d’éveiller les sympathies et de répandre le bonheur, mais d’engager la bataille, de déchirer, troubler et déranger le peuple dans sa quiétude ».5 Ses efforts seront récompensés et un an après la publication de sa nouvelle, une loi sera votée pour permettre aux épouses de disposer de leurs propres biens. Trente ans après Fredrika Bremer qui fut à l’initiative d’une loi sur le statut des femmes célibataires, Anne Charlotte Leffler, comme Victoria Benedictsson et Amalie Skram, conçoit donc son rôle à « l’avant-garde du modèle suédois ».6

Anne Charlotte Leffler intègre toutes ces questions dans En sommarsaga. Mais paradoxalement, dans ce roman, le thème si urgent de l’émancipation s’ancre dans une géographie imaginaire où se croisent les paysages naturels de la Suède et les créatures surnaturelles qui les habitent.

Le roman s’ouvre sur le retour en Suède d’Ulla, une artiste ayant passé de nombreuses années en Italie. À travers son regard exogène, le lecteur découvre une Suède où se mêlent les paysages réels et les souvenirs d’enfance du personnage. Nous voudrions donc voir dans cet article comment Anne Charlotte Leffler passe par le regard que pose Ulla sur un espace habité par une créature mystérieuse, Näcken, pour exposer sa vision de la condition féminine.

Pour répondre à cette question nous étudierons trois aspects qui façonnent l’image du Nord : la nature, le folklore et la question de l’émancipation féminine.

« Cahier d’un retour au pays natal »

En sommarsaga7 est un roman en deux parties qui aborde la question de l’émancipation de la femme. En montrant une femme sensible à son corps, d’une grande sensualité, Leffler semble se détourner ici du féminisme puritain suédois des années 1880 qui condamne les femmes de lettres qui décrivent l’érotisme féminin.8 David Gedin rappelle en outre que le critique littéraire Carl David af Wirsén (1842-1912), qui avait apprécié le fait que l’héroïne succombe à l’amour dans la première partie, a été choqué à la lecture de la deuxième partie beaucoup plus explicite, au point de remanier sa critique de la première livraison.9 La première partie du roman se déroule dans une ville balnéaire en Suède où une artiste peintre suédoise, Ulla Rosenhane, s’installe pour l’été après un long séjour à Rome, alors que dans la seconde partie elle n’est plus peintre mais mariée en Norvège.

Le statut de l’héroïne dans la première partie est intéressant. Elle est restée de longues années loin de son pays natal, une période au cours de laquelle son souvenir de la Suède s’est imprégné d’une idée du Nord qui s’éloigne de sa géographie réelle.

À son retour, le Nord se présente à elle sous l’aspect d’une nature grandiose. Elle jette sur le paysage nordique ce « regard extérieur, celui d’observateurs non nordiques pour qui le Nord se présente comme un tout homogène ».10 Ulla porte donc ce regard neuf, quasi étranger sur les paysages nordiques aux nuances froides et sur la société suédoise aux mœurs austères, habituée qu’elle est désormais aux couleurs chaudes de l’Italie. Aux souvenirs littéraires se mêlent les émotions des grands espaces, « miroir inversé de ce que le Sud n’est pas » :11

Les rochers gris, le ciel pâle si éthéré, si haut, avec ses couleurs un peu froides, les baies, les îlots et l’eau vert-de-gris – cela touchait des cordes qui ne vibraient pas souvent.12

Cette contemplation fait même naître en Ulla le rêve d’une vie simple et pure, hors des conventions sociales. En voyant un couple de jeunes paysans amoureux, elle se désole :

Ils sont heureux, ceux-là, pensa-t-elle. Ils ont gardé leur franchise. Ils s’aiment sans fiançailles et sans mariage. Nous détruisons tout avec la réflexion et les convenances et nous ne pouvons pas éprouver une seule joie simple et entière dans la vie.13

Elle semble regretter une vie rustique, antérieure au nouveau rigorisme qui s’est imposé à la bourgeoisie au cours du xixsiècle :

Un christianisme plus sombre donne désormais le ton à la vie publique. […] Le puritanisme marque toutes les manifestations de la vie sociale. […] Des préceptes religieux abusivement exploités faisaient de la femme une esclave soumise aux moindres volontés de son mari et aux plus futiles caprices du bon usage. Un christianisme étroit et pharisaïque lui imposait une seule vertu majeure, le renoncement. Il lui était interdit de manifester son originalité individuelle. Elle s’étiolait dans sa « maison de poupée ».14

C’est alors qu’elle tombe sous le charme de Ralf Falk, un homme beau et viril. La première partie du roman retrace ainsi une véritable idylle au sein d’une nature suédoise redécouverte. Mais une fois mariés, dans la seconde partie du roman, et installés en Norvège où Ralf dirige une école, les amants luttent entre eux pour plus de liberté et d’intégrité au sein du mariage.15 Les époux sont mal à l’aise dans leur nouveau rôle et la jeune femme regrette la chaleur et les couleurs vives des pays du Sud. Elle est tiraillée entre deux vies ; la vie de famille en Norvège et la vie d’artiste à Rome.

Mais plus encore, ce roman souligne la difficulté pour la femme artiste à se réaliser à une époque où la femme ne devait s’épanouir qu’au sein de son foyer. Dans ce sens, la seconde moitié de ce roman est un long tiraillement entre les ambitions des deux époux. Ulla, serait-elle une cousine éloignée de Nora, l’héroïne d’Une maison de poupée et de ses multiples sœurs en littérature ? En effet, le roman se termine comme le drame de Henrik Ibsen et Pengar16 de Victoria Benedictsson, sur le départ de l’épouse. Or, contrairement à ces deux œuvres, En sommarsaga laisse entrevoir une possible solution au conflit entre les époux. De fait, Ulla, qui a laissé un tableau inachevé dans son atelier à Rome, y retournera terminer son œuvre. Mais, il est important de souligner que le roman s’achève moins sur son départ que sur un échange épistolaire définissant le cadre d’une nouvelle union.

Finalement, la vie lui semblait simple en Italie. Une fois qu’elle est confrontée au puritanisme de la Suède - où il lui est interdit de faire une promenade en barque avec l’homme qu’elle vient de rencontrer - le beau paysage des contes populaires de son enfance lui vient à l’esprit comme le rêve d’un monde meilleur et plus libre. L’héroïne est un personnage en lutte contre les convenances dictées par la société bourgeoise. Est-ce pour cette raison que le neck (Näcken), l’homme nu vivant dans les eaux des croyances nordiques est évoqué dans le roman, comme pour tenir tête à ce monde ennuyeux et rigide ? Il nous semble que la description de la nature n’est finalement qu’un prétexte pour parler de la créature surnaturelle qui y demeure.

Un imaginaire aquatique

L’attirance de l’héroïne pour le Nord semble d’abord relever d’un goût pour le folklore de son enfance mettant en scène un peuple de créatures sensuelles et libres.17 N’est-il pas significatif que l’héroïne « peignait toujours des figures nues, plus souvent des enfants, mais aussi des sirènes et des faunes et d’autres personnages étranges » ?18 Tout se passe comme si cette femme, si moderne par ses actes et pensées, était inévitablement attirée par un univers archaïque. Dans la première moitié du roman, un soir d’été aux côtés de Ralf, elle pense à trois poèmes ayant le neck pour héros.19 Ces poèmes répondent au goût du Nationalromatik,20 un mouvement qui ressuscite le folklore dans « une volonté d’exalter une identité nationale […] »21

Nous constatons que le décor est donc avant tout appréhendé par son pouvoir de suggestion. C’est lui qui réveille tout un monde imaginaire :

[…] ce bel été nordique réveilla en elle tous les souvenirs d’enfance et les rêves qu’elle avait oubliés pendant ses longs séjours dans le Sud. Les elfes dansaient encore en rond dans le brouillard doux des marais, le neck jouait de sa harpe dans les profondeurs.22

De retour dans son pays natal, Ulla éprouve une étrange et toute particulière attirance pour l’eau, le refuge de cet ondin, jusqu’à s’en effrayer elle-même :

Comme le vent caressait ses tempes telles les mains d’un amant, comme il soulevait folâtrement les cheveux et aspergeait de quelques gouttes fraîches et salées le creux de sa nuque de temps en temps. Il y avait quelque chose d’irritant et d’attirant en cela ; l’eau l’attirait, elle voulait être caressée par sa fraîcheur humide, tremper ses mains ne lui suffisait pas, et soudainement elle ôta son chapeau, se renversa en arrière, la nuque plongée dans l’eau. Ses cheveux se dénouaient et nageaient dans le courant. […] Elle se redressa tout d’un coup, et pâlit. […] Elle […] regarda timidement [Ralf] en soulevant ses cheveux en les secouant. Elle avait failli prendre peur. Quelles puissances l’avaient prise !23

Quelle est donc la puissance que l’héroïne ressent près de l’eau ?

[Il] leva ses yeux vers son visage avec son regard intense et imposant, étrange et énergique […] Elle ne pouvait résister à la puissance de ce regard, qui agissait sur elle comme un enchantement […]24

L’héroïne, au sein de cette nature, semble attirée pour le mystère que recèlent les profondeurs aquatiques. Mais en réalité, plus que la mort par noyade, la proximité de l’eau l’effraie par sa puissance érotique car, comme l’affirme Bachelard : « c’est de l’eau même que doivent naître les flammes de l’amour ».25

Précisément, Ralf est mis en scène pour la première fois dans l’eau, luttant dans les vagues sous les regards de la bonne société présente sur la terrasse au moment de dîner. Selon Bachelard, « l’être qui sort de l’eau est un reflet qui peu à peu se matérialise : il est une image avant d’être un être, il est un désir avant d’être une image ».26 Ici aussi le héros incarne le désir inavoué de toutes les femmes de la station balnéaire, même si Ulla est celle qui ose le rejoindre dans sa vision libre des relations amoureuses. Il la fait penser aux ondins et elle ne peut s’empêcher de parler en sa présence des elfes et du sentiment trouble qu’elle éprouve à la fois dans la nature et au contact du jeune homme, comme si celui-ci était à la fois une personnification de la nature et de l’état d’innocence de celle-ci avant la civilisation. Le lecteur voit alors l’image de l’instituteur se mêler à celle de la créature jusqu’à se demander qui, de l’homme ou de l’ondin, attire la jeune femme dans cette nuit d’été suédoise pleine de sortilèges :

[…] quelle merveilleuse atmosphère en cet été nordique ! Dans le sud, on devenait étrangement sobre ! Là-bas, la nature entière n’était pas peuplée d’êtres folkloriques ; là, ne vivaient pas de gnomes ; là, ne dansait aucun elfe ; là, la vague ne chantait pas ; là, le ruisseau ne murmurait aucune poésie ; là, la forêt et la montagne ne racontaient pas de contes de fées.27

L’attirance de l’héroïne pour le neck est manifestement d’ordre sexuel et ces créatures sont d’essence érotiques.28 Tous ces êtres sont en effet l’expression d’une forme d’angoisse face à la sexualité dans la mesure où, dans les ballades et dans les contes, ce sont toujours des jeunes gens, sur le seuil de la vie d’adulte, qui se trouvent aux prises avec ces créatures.

Le lien entre un être imaginaire et la sexualité de la femme se dessine de fait clairement. L’évocation du surnaturel dans la première moitié du roman symbolise une aspiration à des relations plus simples entre l’homme et la femme où les sentiments sincères peuvent s’exprimer librement.29 C’est bien ce souhait qu’émet Ralf Falk accompagné de notre jeune peintre lors d’une promenade en barque :

C’est une nuit stupéfiante, dit-il. On a des pensées farouches. On trouve qu’on pourrait partir de plus en plus loin sur la mer – n’est-ce pas ? On croit qu’il y a certainement quelque part un pays où les relations sont plus libres, meilleures et plus saines que dans celui que l’on connaît.30

Notons que l’énonciateur a changé. Ici, c’est désormais Ralf qui caractérise les relations libres comme « meilleures » et « plus saines ». Comme le neck, Ralf invite à transgresser les interdits.

Entre Ralf et la créature tirée des croyances populaires, la frontière est donc volontairement floue. En adoptant le point de vue interne d’Ulla, le lecteur découvre l’instituteur comme un personnage charmeur, à l’instar de la figure mythique du neck qui attire les jeunes filles dans l’eau pour les noyer par la seule force de sa séduction et de son violon. La ressemblance de Ralf avec le neck est plusieurs fois suggérée. Élégant et agile, il évolue avec aisance dans l’eau telle une naïade. D’ailleurs, l’ambiguïté ne réside pas seulement dans la confusion qui se crée entre le réel et l’imaginaire, elle se retrouve dans la représentation des genres, dans une forme d’androgynie ou d’inversion. Ulla nous est présentée comme un être autonome, venu de l’extérieur tandis que Ralf, comme le neck, est montré dans sa nudité, objet des regards, et associé à une forme de fluidité, de douceur féminine.

Nous avons l’impression que Ulla sait vers quoi elle est attirée et qu’elle s’en inquiète délicieusement. Creuset des souvenirs et des légendes, la nature avertit aussi les hommes des dangers qui les guettent. Le neck lui permet alors d’exposer le dilemme auquel sont confrontées toutes les femmes artistes :

Pouvait-on scinder ainsi sa vie en deux aspirations contraires ? Oui, elle savait bien que toutes les femmes faisaient ainsi – qu’elles commençaient toutes une nouvelle page de leur vie en se mariant, que tout ce qu’elles avaient fait avant avait coutume d’être complètement mis de côté. Mais un homme le faisait-il jamais ? […] Mais si une femme faisait une telle infidélité à elle-même, c’était beau – non, c’était tout simplement son devoir.31

Leffler avait déjà su exploiter le symbolisme érotique des créatures aquatiques pour mieux briser les normes morales. Dans la nouvelle à scandale « Aurore Bunge » (1883), elle dépeint Aurore se baignant nue dans la mer, et la compare à une ondine. Plus tard, aux côtés du gardien d’un phare, Aurore se sent comme une nymphe dans les bras d’un faune :

Elle prit plaisir à ce moment-là, consciente de sa propre beauté. Ne ressemblait-elle pas à une Ondine avec ses cheveux épais et chatoyants et les reflets chauds du soleil, l’inondant de son ardeur ? […] Elle se rappela un vieux tableau dans le bureau de son père, qui représentait un jeune faune et une nymphe jouant entre les arbres […] On aurait pu, à ce moment même, la prendre pour une nymphe.32

Outre cet attrait pour la simplicité rustique, nous pensons qu’il y a encore autre chose dans cette idylle au sein d’un roman qui partout ailleurs fait surgir des questions sociales et politiques. L’imaginaire nordique dans un roman réaliste permet de mettre au jour certaines réalités que l’on ne pouvait aborder sans heurter la morale des lecteurs ni sans s’exposer à la vindicte des féministes puritaines. En effet, Ulla, près de l’eau, se retrouve face à ses pulsions érotiques et le neck représente d’abord les relations plus faciles qui sauront mieux convenir à une femme moderne et libre. Le désir d’Ulla de se fondre dans la nature traduit, en réalité, la volonté de se libérer de l’oppression et des interdits de son temps.

La promesse de l’eau

La question de la condition féminine est d’une grande actualité au moment de la publication du roman. En 1884, August Strindberg publie Giftas I, alors que la « bataille des mœurs ».33 fait rage et ébranle les pays nordiques. L’écrivain norvégien Bjørnstjerne Bjørnson, avec la pièce En hanske (Un gant, 1883), fut à l’initiative de cette bataille quand il souleva la question de la virginité de l’homme avant le mariage, soulignant l’iniquité qu’il y a à demander à la femme une moralité sans faille, tout en acceptant le libertinage des hommes.

Claudia Lindén souligne le fait que les héroïnes d’Anne Charlotte Leffler, notamment Ulla, non seulement ne meurent pas à la suite de leurs expériences amoureuses, comme dans tant d’œuvres écrites par des hommes, mais sont même plus heureuses :

Dans de nombreuses histoires, le tragique a une fonction critique. Dans de tels récits, les héroïnes succombent par manque de relations sexuelles ou parce qu’elles ont eu des relations sexuelles en dehors du mariage. Ailleurs, la vertu des femmes sert de ligne de conduite aux hommes.34

La quête du bonheur semble être l’objet véritable de la littérature féminine des années 1880. Les écrivaines mettent en scène des femmes non plus inconsistantes mais humaines, ayant des besoins physiques aussi bien que des aspirations artistiques. Selma, l’héroïne de Pengar de Victoria Benedictsson, fait elle aussi de la réalisation d’une carrière artistique une condition nécessaire à son épanouissement.

Ainsi donc, contrairement à ce qu’affirme Alva Uddenberg, la figure du neck ne reflète pas seulement le désir sexuel d’Ulla.35 Le neck semble également signifier quelque chose d’aussi précis et primordial pour Anne Charlotte Leffler et ses consœurs que le renoncement à la réalisation de soi. Une fois qu’elle a succombé à l’instituteur, la dualité de son être se fait sentir cruellement. Quelle autre créature pourrait aussi bien montrer les dangers de la passion que ce personnage ambigu de l’imaginaire nordique ?

En effet, comme en témoigne La Nouvelle Heloïse, la pensée occidentale a fait de l’amour une partie prépondérante de l’âme féminine, ce qui rendait difficile son émancipation hors des liens tissés parfois par les femmes elles-mêmes.36 Ainsi, selon Mary Wollsonecraft, l’amour comme passion affaiblit la volonté de la femme.37 Il faut donc essayer de le combattre dans un premier temps. Cette lutte constante est celle qui, dans le roman, oppose Ralf et Ulla, comme si tous les deux essayaient de ne pas céder au plaisir charnel uniquement par amour de leur travail :

En fait, ils menaient tous deux un dur combat contre une attirance croissante, qui, si elle prenait le dessus, menaçait de déséquilibrer leur vie ou de se poser au milieu de la route comme un obstacle à la satisfaction des buts que chacun poursuivait de son côté, un penchant donc, qui mènerait à des tensions et non à l’harmonie, et ils s’en protégeaient mutuellement.38

Ainsi, non seulement, cet imaginaire permet d’aborder la sexualité, mais également les conséquences de celle-ci, c’est-à-dire la réification et l’oppression de la femme dans le mariage. Le surnaturel dans le roman donne donc une forme figurée à la critique de la société patriarcale et anticipe sur la réflexion sur la condition féminine qui sera développée dans la seconde partie de l’œuvre. Les évocations surnaturelles cacheraient aussi le danger des sentiments qui peuvent conduire la femme vers des choix irréversibles : le neck serait le symbole du sacrifice de son art. La créature tire donc Ulla, inévitablement, vers l’abandon de la peinture, sa passion, une sorte de mort. Ressent-elle, près de l’eau, cette mort qui lui est inévitablement liée selon Bachelard : « Contempler l’eau, c’est s’écouler, c’est se dissoudre, c’est mourir »39 ? Ulla va voir mourir les occasions de se donner à l’art auquel elle était pourtant destinée.

Néanmoins, Ulla parvient à faire comprendre à son époux qu’elle n’est pas la seule à devoir faire des concessions dans la vie de couple. Après une séparation de trois mois, elle demande à son mari comment il envisage leur union et celui-ci répond qu’il s’installera dans la capitale pour changer de métier, se déclarant prêt à être celui qui, désormais, sacrifiera ses aspirations professionnelles. De ce fait, dans l’avenir, Ulla n’aura peut-être plus à choisir entre l’amour et sa vocation artistique. Il est vrai qu’elle a abandonné mari et enfants pour terminer sa toile à Rome. Mais ce départ est-il définitif ou vont-ils partager leur avenir entre Kristiania (l’actuelle Oslo) et Rome comme Falk semble l’espérer ?

Ainsi, Leffler sauve l’héroïne de la mort que les auteurs réservent traditionnellement aux héroïnes40 et le roman se clôt sur une réconciliation entre les sexes sous le signe de l’amitié. L’œuvre porte ainsi un regard très moderne sur la conjugalité, mais aussi sur la maternité. En effet, cette dernière ne saurait combler la vie d’Ulla au point de la faire renoncer à son travail, et ce message s’interprète également comme une réponse aux attaques de Strindberg qui, dans la préface de Giftas I, deux ans auparavant, affirmait que les femmes sans enfants étaient dénaturées et sans connaissance de la vie de famille.41 Paradoxalement, c’est donc par la fuite dans l’univers archaïque du folklore que s’expriment les revendications émancipatrices les plus modernes.

Nous constatons dès lors que le folklore n’a pas uniquement pour rôle de traduire l’appréhension face à la sexualité, mais est aussi un outil nouveau dans la lutte pour l’émancipation des femmes. En effet, le fait de placer une créature surnaturelle en face de la jeune femme, focalise l’attention sur la réalité féminine. La femme est réelle, tandis que l’homme, ici proche du surnaturel, perd la place de celui qui impose sa vérité. À l’inverse, le fait de comparer l’objet de ses désirs à une créature imaginaire permet un autre regard sur l’homme. C’est désormais à lui d’être présenté comme un objet sensuel.42

Conclusion

Pour le lecteur des années 1880, le Nord, et plus spécifiquement la Suède, représente davantage une géographie imaginaire qu’un espace réel. En effet, c’est autour des thèmes de la nature, du folklore et d’une émancipation féminine avant-courrière que le Nord se rappelle à l’héroïne, rêvant à son pays natal après de longues années en Italie. Il s’agit ainsi à la fois d’un roman sur la condition féminine et d’un voyage poétique à travers lequel Leffler, utilisant le regard exogène de l’étranger décrit les paysages mystérieux de l’été suédois et crée un espace nouveau dans lequel les utopies sont non seulement permises, mais aussi mises à l’épreuve du réel. À travers l’imaginaire du Nord, Leffler permet à l’héroïne de comprendre sa propre situation et son désir de liberté. La créature surnaturelle et sensuelle est l’instrument choisi par la romancière pour critiquer non seulement l’hypocrisie des hommes, mais aussi le puritanisme de la sphère féministe. Leffler ne se range donc pas parmi des figures comme Sophie Adlersparre qui renoncent au plaisir féminin en luttant contre l’immoralité des hommes. En revanche, elle ose se battre pour une troisième voie, celle d’une liberté totale.

Ce n’est pas la première fois que Leffler fait appel au monde folklorique pour prôner une liberté nouvelle, mais à travers cet imaginaire, c’est d’abord de la réalité du mariage qu’il est question ; un aspect de l’oppression sociale voulant que la femme se consacre entièrement au foyer et délaisse ses propres intérêts. Leffler préféra une existence simple et égalitaire dans laquelle la femme est l’amie de l’homme et partage son goût pour la vie, les plaisirs de la chair également. L’œuvre de notre romancière en garde des traces nombreuses. Cette idée de liberté naturelle prenant sa source dans les paysages vastes et mystérieux des contrées du Nord est mise en service d’un projet plus vaste encore : la création d’un mythe nouveau, celui du folkhem.

Anmerkungen

1 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, Ur lifvet IV, Stockholm, Hæggström, 1886, (lu dans l’édition Atlas vintage, Stockholm, 2010).

2 Sylvan, Maj, Anne Charlotte Leffler. En kvinna finner sin väg, Stockholm : Biblioteksförlaget, 1984, p. 7. Texte original : « Kvinnans frigörelse är emmellertid inte bara en fråga om fullkomlig jämlikhet mellan könen juridiskt och männskligt utan också om rätten för henne att utveckla sig till en sjelfständig menniska ».

3 Sanna kvinnor annonce une loi de 1884 qui permettait à une femme mariée de disposer de ses biens et de son héritage.

4 Leffler, Anne Charlotte, « I krig med samhället », Ur Lifvet II, 1883.

5 Texte original : « Mitt nya styckes uppgift är icke att väcka sympatier och göra lycka, utan att väcka strid, rifva upp, oroa och störa folk i sitt lugn. », cité par Sylvan, Maj, Anne Charlotte Leffler. En kvinna finner sin väg, p. 58.

6 Briens, Sylvain, Kylhammar, Martin, Battail, Jean-François, Poétocratie : les écrivains à l’avant-garde du modèle suédois. Paris : Ithaque, 2016, p. 94.

7 La première partie est publiée en 1885 dans Saga pour Nordiska museet.

8 Voir la lettre du 19 juillet 1883 de Sophie Adlersparre à Leffler, citée par Lindén, Claudia, « Emancipationens erotik », Att skapa en framtid. Kulturradikalen Anne Charlotte Leffler, op.cit., p. 82. Sophie Adlersparre (1823-1895), fut une militante féministe, journaliste et écrivain. Elle est reconnue comme l’une des trois plus importantes figures du féminisme en Suède aux côtés de Fredrika Bremer (1801-1865) et de Rosalie Roos (1823-1898).

9 Gedin, David, « I hennes ögon », Att skapa en framtid. Kulturradikalen Anne Charlotte Leffler. Redaktör ; David Gedin & Claudia Lindén. Halmstad : Rosenlarv förlag, 2013, p. 75.

10 Briens, Sylvain, « Boréalisme. Pour un atlas sensible du Nord », in Études Germaniques, Paris : Klincksieck 2018/2, no 290, p. 158.

11 Ibid., p. 162.

12 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 21. Notre traduction. Texte original : « […] de grå klipporna, den bleka himlen med sina något kalla toner, så eterlik, så högvälvd, vikarna och skären och det gröngrå vattnet – det rörde vid strängar, som ej ofta sattes i dallring. »

13 Ibid., p. 77. Notre traduction. Texte original : « De äro lyckliga de, tänkte hon. De ha ännu omedelbarheten kvar. De älska varandra utan förlovning och giftermål. Vi fördärva allt för oss med reflexion och konvenans och förmå inte taga en enda glädje i livet enkel och hel. »

14 Gravier, Maurice, Le Féminisme et l’amour dans la littérature norvégienne 1850-1950, (d’Ibsen à Sigrid Undset), Paris : Lettres modernes, 1968, p. 14-15.

15 Pour créer ce personnage, Anne Charlotte Leffler s’est inspirée à la fois de Grundtvig, initiateur des écoles populaires danoises (højskole) et de son ami intime, et amant platonique, l’instituteur danois, Adam Hauch.

16 Benedictsson, Victoria, Pengar, 1885 / L’Argent, Paris : Cupidus Legendi, 2019, trad. de Vincent Dulac.

17 Schön, Ebbe, Älvor, troll och talande träd. Folktro om svensk natur, Sundbyberg, Semic, 2000, p. 73 et Carl-Herman Tillhagen, Vattnens Folklore. Sägen och folktro kring bäckar, älvar, sjöar och hav, Carlssons, 1996, p. 152.

18 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 16. Notre traduction. Texte original : « målade alltid nakna figurer, mest barn, men också skogsnymfer och fauner och dylika tvivelaktiga personligheter. »

19 Ibid., p. 74. Il s’agit des poèmes célèbres : « Näcken » de Erik Johan Stagnelius, « Djupt i havet » de Arvid August Afzelius et « Sommarnatten » de Johan Ludvig Runeberg.

20 Nordin, Svante, Romantikens filosofi, Svensk idealism från Höijer till hegelianerna, Lund : Doxa förlag.

21 Toudoire-Surlapierre, Frédérique, L’Imaginaire nordique. Représentations de l’âme scandinave (1870-1920), Paris : L’Improviste, 2005, p. 30. Ce Nationalromantik suédois prend sa source dans l’humiliation nationale ressentie par la perte de la Finlande. Plus tard, le mépris de Napoléon pour l’autonomie de chaque nation réveilla le patriotisme suédois. C’est alors qu’un nouveau nationalisme prit son essor, notamment avec la création de Götiska förbundet (association götique) qui se caractérise par son engouement pour l’histoire scandinave ancienne.

22 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 74. Texte original : « […] denna fagra, Nordiska sommarnatt och väckte till livs alla de barndomsminnen och drömmar, som hon glömt under sin långa vistelse i södern. Älvorna dansade åter sin ringdans i den mjuka dimman på kärret, Näcken spelade på sin harpa i djupet. »

23 Ibid., p. 75. Texte original : « Hur vinden smekte tinningarna som älskande händer, hur den lekfullt lyfte på håret och stänkte något vått och friskt och salt i nackgropen ibland. Det var något retande och lockande i detta; vattnet liksom drog henne till sig, hon längtade efter att beröras av dess fuktiga kyla, att doppa händerna var henne icke nog, och så strök hon plötsligt av sig hatten och böjde sig bakåt med nacken helt ned i vattnet, så att håret löstes upp och simmade på vågen. […] Hon reste sig med ett ryck och hade blivit blek. […] Hon såg halvt skyggt på [Ralf] medan hon lyfte på håret och skakade det. Hon hade nästan blivit rädd. Vad var det för makter, som fått fatt i henne! »

24 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 122. Notre traduction. Texte original : « [Han] såg upp i hennes ansikte med sin egendomligt innerliga, energiskt tvingande blick […] Hon kunde icke motstå makten av denna blick, den verkade som en förtrollning på henne […] »

25 Bachelard, Gaston, L’Eau et les rêves, Paris : J. Corti, 1981, p. 83.

26 Ibid., p. 45.

27 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 74. Notre traduction. Texte original : « Nej, vad det var för en förunderlig stämning över Nordens natt! Hur underligt nykter man blev i södern! Där bestod icke hela naturen av levande väsenden, där bodde inga tomtar, där dansade inga älvor, där sjöng icke vågen, där diktade icke forsen visor, där berättade icke skogen och bergen sagor. »

28 Cf. Häll, Mikael, Skogsrået, näcken och djävulen. Exotiska naturväsen och demonisk sexualitet i 1600- och 1700-talens Sverige, Malört förlag, Stockholm, 2013.

29 Cette promenade en bateau et ces réflexions sur l’égalité entre les sexes nous font penser à l’œuvre précurseur de Almqvist, Carl Jonas, Det går an, 1839 / Sara, Aix-en-Provence : Pandora, 1981, trad. de Régis Boyer.

30 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 76. Notre traduction. Texte original : « Det er en vidunderlig nat, sade han. Man kommer på vilde tanker. Man synes, man vilde sejle laengere og laengere bort – ikke sandt, man synes der måtte findes ensteds et land, hvor forholdene er friere og skjönnere og sundere end i det gamle, kjendte. »

31 Ibid., p. 146. Notre traduction. Texte original : « Kunde man på detta sätt klyva sitt liv i två hälfter med två alldeless skilda strävanden? Ja, hon visste ju, att alla kvinnor gjorde detta – att de alltid begynte ett nytt skede i sin tillvaro då de gifte sig, att allt vad de förut arbetat för då plägade skjutas helt åt sidan. Men gjorde någon man det? […] Men om en kvinna beginge en sådan otrohet mot sig själv vore det vackert – nej, det vore helt enkelt hennes plikt. »

32 Leffler, Anne Charlotte, « Aurore Bunge ». Texte original : « Hon njöt av medvetandet om sin egen skönhet i detta ögonblick. Liknade hon icke en Undine med sitt rika, skimrande hår och de varma reflexerna av solen överhjutande hela gestalten med sin glöd. », p. 201. « […] Hon kom att tänka på en gammal tavla i hennes fars arbetsrum, som föreställde en ung faun och en skogsnymf lekande mellan träden […] Man kunde gärna tagit henne för en skogsnymf i detta ögonblick. », p. 215.

33 Bredsdorff, Elias, Det store Nordiske krig om seksualmoralen, Copenhague : Gyldendal, 1973, p. 364.

34 Lindén, Claudia, « Emancipationens erotik. », Att skapa en framtid. Kulturradikalen Anne Charlotte Leffler. op. cit., p. 80. Notre traduction. Texte original : « I många av dessa berättelser fungerar tragiken som en kritik. I sådana berättelser går huvudpersonerna under av brist på sex, eller för att de haft sex utanför äktenskapet. Eller så får kvinnornas dygd stå som ett rättsnöre för männen. » p. 80.

35 Uddenberg, Alva, « Kvinnlighet och konstnärsskap. Anne Charlotte Lefflers roman En sommarsaga », Bakom maskerna. Det dolda budskapet hos kvinnlig 1880-tals författare, Karlstad : 1997p. 81. Notre traduction : « Son choix repose sur une pure attirance physique. Cela est évident dans la scène où elle le compare au neck […]. Selon les croyances populaires, le neck est dangereux […]. Ulla exprime donc son désir en comparant l’homme convoité à la figure du mythe, le neck. » Texte original : « Hennes val grundar sig på en ren fysisk attraktion. Detta framkommer tydligt i den scen där hon jämför honom med Näcken […]. Näcken är enligt folktron farlig […]. Ulla ger således uttryck för sin lust genom att jämföra den åtrådda mannen med mytens gestalt, Näcken. »

36 Lindén, Claudia, Om kärlek Stockholm : Stengag : B. Östlingsförlag Symposion, 2002, p. 79-87.

37 Wollstonecraft, Mary, A Vindication for the Rights of Woman, 1792, cité par Cavallin, Anna, « Patriarkens position och det dotterliga motståndet », Att skapa en framtid. Kulturradikalen Anne Charlotte Leffler, p. 52.

38 Leffler, Anne Charlotte, En sommarsaga, op.cit., p. 88. Texte original : « Det var tvärtom två, som kämpade en hård strid mot en växande böjelse, vilken, om den fick övertaget, hotade att rycka deras liv på sned, att ställa sig hindrande i vägen för de mål, de var på sitt håll fullföljde, en böjelse, som skulle leda till slitningar och ej till harmoni, och som de därför båda gick ur vägen för. »

39 Bachelard, Gaston, op.cit., p. 59.

40 Cf. Lindén, Claudia, « Emancipationens erotik », Att skapa en framtid. Kulturradikalen Anne Charlotte Leffler.

41 Gedin, David, « I hennes ögon », op.cit., p. 75. Texte original : « Skildringen av hur moderskapet inte kan dominera Ullas liv eller stå i vägen för hennes arbete fungerar också som ett skarpt svar på Strindbergs angrepp i förordet till Giftas I två år tidigare, där han hävdade att barnlösa kvinnor var onaturliga och utan kunskap om familjelivet. »

42 En 1890, les hommes prennent leur revanche sur les tentatives d’émancipation féminine en comparant la femme à leur tour à un monstre. Cf. Ahlund, Claes, Medusas huvud, Dekadensens tematik i svensk sekelskiftesprosa, Uppsala, 1994.

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gedruckte Quellen

Maria Hansson, « Rêve du Nord et désir d’émancipation », Deshima, 14 | 2020, 145-159.

Elektronische Referenz

Maria Hansson, « Rêve du Nord et désir d’émancipation », Deshima [Online], 14 | 2020, online gestellt am 04 décembre 2025, aufgerufen am 05 décembre 2025. URL : https://www.ouvroir.fr/deshima/index.php?id=678

Autor

Maria Hansson

Docteure et lectrice de suédois. Sorbonne Université, REIGENN.

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