Les paradoxes d’un réseau institutionnalisé : les jésuites français et la théologie morale ibérique et italienne au xviie siècle

  • A Paradoxical Institutionalized Network. French Jesuits and the Circulation of Italian, Spanish and Portuguese Moral Theology in the 17th Century
  • Paradoxe eines festgegliedertes Netzes: die französischen Jesuiten und die iberische und italienische moralische Theologie im 17. Jahrhundert

DOI : 10.57086/sources.461

p. 31-44

Cet article explore le rôle joué par les jésuites français dans la circulation des textes de théologie morale d’origine italienne ou ibérique et dans l’acculturation des nouvelles formes que prend la casuistique catholique à partir du Concile de Trente. Dans le conflit qui se joue au xviie siècle autour de la réception de cette théologie, la question du lien entre le caractère étranger de la casuistique et l’étrangèreté de la Compagnie de Jésus est clairement posée, signalant en creux la conscience d’un rôle particulier des jésuites dans cette circulation de textes. Cependant, si on essaie de penser les raisons de ce rôle, notamment à partir des tensions internes que les publications de ces textes peuvent susciter dans l’ordre, on se rend compte qu’il tient beaucoup plus à des formes de sociabilité et à l’existence de réseaux structurants dans l’ordre qu’à la force de sa structure institutionnelle ou à une éventuelle politique de publication.

This paper investigates the part that the French Jesuits played in the dissemination in France of Italian, Spanish and Portuguese texts of moral theology and in the familiarization with new casuistical norms from the Council of Trent onwards. In the conflict over the reception of high casuistry in 17th century France, the foreignness of both this theology and of the Jesuits were often laid out together. This is in some ways related to the actual part the French Jesuits played in the circulation of those texts. Yet, if one tries to understand the reasons and forms of their role as agents of those circulations, by paying attention to the conflicts that emerged around them inside the order, it is possible to realize that the dissemination of theological texts relied much more on the existence of particular forms of sociability and of social networks within the Society of Jesus rather than on the strength of the institutional structure or on any identifiable publication policy.

Jean-Pascal Gay is assistant professor of early modern history at the university of Strasbourg.

Dieser Beitrag erforscht die Rolle, die die französischen Jesuiten in der Verbreitung der aus italienischer oder iberischer Herkunft stammenden moralischen theologischen Schriften gespielt haben, sowie ihre Rolle in der Anpassung der neuen Formen, die die katholische Kasuistik nach dem Trienter Konzil nahm. In dem Streit, der sich um die Rezeption dieser Theologie im 17. Jahrhundert abspielte, wurde die Frage ob es einen Zusammenhang zwischen des fremden Charakters der Kasuistik und der Seltsamkeit der Societas Jesu gab, klar aufgeworfen, was das Erkenntnis einer besonderen Rolle der Jesuiten bei der Schriftenverbreitung zwischen den Zeilen hervorrief. Versucht man jedoch die Gründe dieser Rolle zu erläutern, besonders wenn man an die inneren Spannungen denkt, die die Veröffentlichungen dieser Texten im Orden verursachen können, wird es klar, dass diese Rolle mehr auf den Geselligskeitsformen und auf dem Vorhandensein strukturierender Netze als auf der Kraft der festgegliederten Ordensstruktur oder einer etwaigen Veröffentlichungspolitik beruhte.

Jean-Pascal Gay ist „maître de conférences“ für moderne Geschichte auf der Universität Strassburg.

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Text

Dans l’histoire des productions culturelles, le transfert de modes d’expressions et de productions intellectuelles de manière assez pure est finalement tout à fait rare. De ce point de vue, l’histoire française de la réception de la casuistique classique constitue peut-être une exception2. Les formes nouvelles de la théologie morale, qui apparaissent dans la seconde moitié du xvie siècle dans le monde catholique ibérique et italien vont apparaître sans trouver d’échos en France avant le xviie siècle, et même largement avant le second quart du xviie siècle et du coup la diffusion de cette théologie en France se fait dans un premier temps essentiellement sur la seule base d’une circulation de textes produits dans des contextes allogènes3.

De fait, la seconde moitié du xvie siècle est le temps d’un renouvellement profond des formes et des méthodes de la théologie morale catholique en lien direct avec à la fois les demandes des décrets tridentins sur le sacrement de pénitence mais aussi certainement la pratique rénovée des inquisitions4. La casuistique se fait plus détaillée, plus systématique dans son traitement des cas, et la forme générale de l’exposé de la théologie morale est réorganisée. Cette évolution est préparée par des textes comme la Summula Peccatorum de Cajetan (1525), ou surtout l’Enchiridion confessariorum de Martín Azpilcueta (1553) ou encore la Summa theologiæ Moralis d’Enrique Henriquez, (1595), le dernier texte moderne suivant encore les formes prémodernes de l’exposé de la théologie morale. Ce n’est cependant véritablement qu’au début du xviie siècle, avec la publication des Institutionum moralium du jésuite espagnol Juan Azor5, professeur de théologie morale à Rome, qu’on bascule vraiment dans ce qu’il est désormais convenu d’appeler la « casuistique classique ». L’auteur propose une division nouvelle de la théologie morale organisant son exposé autour des dix commandements, des sept sacrements, des peines ecclésiastiques et enfin des devoirs de chacun selon son état de vie. La théologie morale contemporaine, quand elle s’intéresse à son histoire, y signale en général un mouvement qui va de la morale de la vertu à la morale de l’obligation, requérant un savoir de type juridique et canonique6.

Cette nouvelle théologie est diffusée en France. En attestent, les catalogues de bibliothèques où un certain nombre d’ouvrages italiens, espagnols ou portugais deviennent des textes d’usage courant notamment sur les matières où n’existent pas de textes équivalents7. Si on examine par exemple les bibliothèques des maisons régulières, on constate leur présence massive dans les bibliothèques des couvents d’études chargés de la formation des religieux. Mais on retrouve aussi nombre de textes d’auteurs italiens, espagnols ou portugais dans les bibliothèques d’orientation pastorale dans lesquels des compendia de Navarre, Antonino Diana ou Manoel Sa sont très courants. Sur les questions matrimoniales, le traité De Matrimonio (1605) de Tomás Sánchez8, est d’usage presque universel. Ces manuels remplissent des fonctions que les textes antérieurs mais aussi ultérieurs semblent incapables d’assurer, et c’est la raison pour laquelle leur usage survit à la vive mise en cause d’un certain nombre de ces textes en France pour cause de laxisme.

Une théologie allogène ?

Cette théologie reste largement une théologie étrangère en France. Si les nouvelles formes de la casuistique ne sont pas ignorées de la génération des grands théologiens de Sorbonne du tournant du xvie et du xviie siècles (Philippe de Gamache, Nivolas Ysambert, André Duval), on ne trouve pas de véritable production théologique française sur ces matières. Les textes de casuistique proprement dite sont rares, et sont plutôt soit des ouvrages spécialisés, à l’exemple de la théologie morale du général des Chartreux, Dom Innocent Le Masson9(dont le texte vise essentiellement des questions concernant la vie monastique) soit des ouvrages en langue vernaculaire utiles pour l’enseignement ou visant l’appropriation des normes post-tridentines par des élites religieuses, régulières mais aussi laïques. Par contre, la production italienne, espagnole et portugaise connaît une diffusion sensible en France dans la première moitié du xviie siècle10.

Le caractère allogène de la casuistique est un lieu polémique de sa mise en cause en France dans les deux derniers tiers du xviie siècle11. Il est d’ailleurs de plus en plus allégué à son encontre. Au commencement de la polémique, il est rarement relevé, sinon à propos de la doctrine du tyrannicide. En 1644, la Requeste présentée à nosseigneurs de la Cour de Parlement, rédigée pour soutenir l’offensive de l’Université de Paris contre le collège des jésuites souligne bien le caractère étranger de cet enseignement, qui est le fait soit d’auteurs étrangers, soit d’auteurs chez lesquels « l’esprit de leur société a prévalu sur l’amour de leur patrie et sur le devoir et naturel françois ». Le texte contient un catalogue d’auteurs, qui inspirera plus tard Pascal, et qui vise à renforcer par l’accumulation ce sentiment d’étrangèreté12. À cette date cependant, et encore pour un certain temps, les autres textes polémiques contre la « morale relâchée » sont relativement silencieux sur le caractère allogène de la casuistique classique. La polémique fait volontairement l’impasse sur la réalité du transfert culturel qui s’opère alors en théologie morale.

Dans les années 1640 et 1650, ce sont plutôt les apologistes jésuites qui insistent alors sur le caractère étranger de la casuistique la plus laxiste et des erreurs que les libelles jansénistes leur imputent. Le P. Nicolas Caussin se plaint qu’on attaque les jésuites de France « pour les fautes d’un ou deux livres estrangers13 ». Au moment de la Théologie Morale des Jésuites d’Arnauld (1643), les jésuites français insistent sur leurs différences avec leurs confrères italiens ou espagnols. De manière tout à fait intéressante, pour défendre le casuiste parisien attaqué par l’Université et par Arnauld, le P. Caussin signale surtout l’attachement du professeur de cas du collège à une déontologie de l’enseignement qui discute l’ensemble des opinions d’une république des lettres théologiques qui est européenne et reconnaît qu’il a trop négligé l’importance des circonstances locales :

Il enseignoit les résolutions de conscience, il a crû par une simple franchise, qu’il pourvoit dire ce que disent les livres, et a produit les opinions de quelques Docteurs très célèbres, qui ne sont point Jésuites, […] ; il n’a pas pesé que quantité de questions que d’autres Casuistes des nations estrangères traictent communément sans scrupule, ne sont pas bonnes en ce lieu. Il n’a pas considéré qu’il y a des doctrines semblables à ces arbres qui ne font point de mal en un pays, et gastent tout lors qu’ils sont transplantés en un autre, et qu’il y a des disputes, lesquelles peut-estre, seroient trouvées bonnes en Italie, et en Espagne, qui des lors qu’elles viennent en ce Royaume prennent un tout autre visage, comme aussi certaines maximes, qui sont très bonnes en France, ne peuvent estre goustées des étrangers14.

Un autre apologiste jésuite, auteur d’un Manifeste apologétique pour la doctrine des Religieux de la Compagnie de Jésus 15mobilise alors à des fins polémiques les prescriptions des constitutions jésuites en faveur de l’adaptatio en l’étendant à la construction du savoir théologique. :

La règle donc qui veut que nous apprenions la langue des pays où nous vivons, veut aussi que hors des matières que l’Église a déterminées, nous suivions les plus probables opinions des Universitez establies aux lieux où nous sommes16.

À partir de la paix de l’Église, cependant, ce sont surtout les adversaires de l’indulgence en théologie morale qui mobilisent en leur faveur l’argument du caractère allogène de la casuistique classique. En 1703, l’abbé Ledieu, auteur d’un commentaire sur la censure de 121 propositions tirée des casuistes par l’Assemblée générale du clergé de France de 1700 reprend ce thème à l’envi :

Je parlerai d’un Castropalao célèbre compilateur de la théologie morale en Espagne, qui est le guide et le maître de tous les directeurs et confesseurs Espagnols, loüé et approuvé de toutes leurs Universitez, ses ouvrages quoiqu’en quattre grands in folio, sont d’un tel débit que depuis la dernière édition faitte à Lion en 1682 et déjà finie, il s’en vient de faire une à Venise et il s’en prépare encore, dit-on, une autre nouvelle à Lion, tant ce livre est d’un bon commerce, l’on ne s’étonnera pas qu’il soit à la mode en Espagne, où tous les relâchemens qu’il enseigne sont en usage : mais pourquoy faut-il que nos françois si zélés pour la vérité, et parmi lesquels les Casuistes sont dans un décrit universel, emploient leurs soins pour donner cours aux erreurs des Espagnols17 ?

Écrivant à un moment où le thème du laxisme est devenu courant dans la polémique antijésuite française, Ledieu peut réinscrire le thème du laxisme dans la mémoire longue de l’antijésuitisme depuis la Ligue et le lier à nouveau avec le thème d’une Compagnie de Jésus foncièrement étrangère18.

Avant lui, le rédacteur des Nouvelles Ecclésiastiques manuscrites, dont la diffusion est restreinte à un réseau plus clairement janséniste, allait déjà plus loin en renvoyant la casuistique jésuite à une hypothétique « théologie du nouveau monde » et en la comparant à un « poison venu d’Italie ».

La déformité de ce dogme avec les empoisonnemens dont le monde est maintenant inondé fait croire au public que cette peste vient de la théologie du nouveau monde, et que comme les templiers s’estant rendus riches et puissans par leurs progrés en Sirie et en Égypte en raportèrent l’impiété et les maléfices d’une manière si incurable que pour les en guérir il falut les détruire aussy l’on soupçonne non sans raison vû l’acharnement des casuistes nouveaux pour des doctrines homicides que les ayant prises dans les Indes et autres pays idolâtres juifs et mahométans, il y faudra le même remède, et que le poison venant d’Italie, Rome aportera le véritable contrepoison en allant jusques à la source de la morale empoisonnée19.

Dans un moment comme dans l’autre en tout cas, que ce soit pour défendre ou attaquer la Compagnie de Jésus, ce thème de l’étrangèreté de la casuistique est fondamentalement lié à celui de l’éventuelle étrangèreté de l’ordre en France.

Produire de la casuistique, diffuser la casuistique ?

Si le thème est si présent dans la polémique, c’est aussi parce que la Compagnie de Jésus a joué un rôle majeur dans l’émergence de la casuistique classique mais aussi dans sa diffusion dans l’espace français. Pour toute une série de raisons, spirituelles, institutionnelles mais aussi pastorales et éducatives, la Compagnie de Jésus a joué un rôle important dans la redéfinition de la théologie morale à l’âge confessionnel en Europe. On ne reviendra pas ici sur ce lien particulier à la casuistique20. Rappelons simplement, que le premier manuel de théologie morale produit par un jésuite vient assez tôt dans l’histoire de la Compagnie. C’est dès 1554 que Juan de Polanco publie à Rome son Directorium breve ad confessarii et confitentis munus rite obeundum. L’auteur, on le sait, est le secrétaire d’Ignace de Loyola, et une des figures majeures de la période de fondation de l’ordre. Le manuel, par ailleurs, est composé à la demande d’Ignace lui-même. Surtout, dans la masse des auteurs de casuistique à l’époque moderne, en particulier dans la période qui va de 1550 à 1650, les théologiens jésuites dominent. Pierre Hurtubise compte sur 832 auteurs de casuistiques, 667 réguliers dont 204 jésuites (soit 24,42% du total), 144 franciscains, 96 dominicains et 46 carmes21. Ces chiffres traduisent de manière plus générale la domination jésuite dans le champ de la production théologique, mais sont particulièrement frappants dans le cas de la production casuistique proprement dite.

Il faut de même constater un rôle important joué par les jésuites en France dans la diffusion de la casuistique classique, à la fois en raison de leur engagement dans la mise en œuvre des nouvelles normes tridentines, et en particulier des nouvelles normes de la confession, et en raison aussi de l’insistance plus générale dans la Compagnie sur l’uniformitas et soliditas doctrinæ 22. À Paris par exemple, c’est Juan Maldonado qui introduit dans le collège la pratique des conférences de cas dans une logique qui semble bien être celle d’une uniformisation progressive des pratiques d’enseignement et des coutumes régissant la vie des différentes maisons jésuites23.

De ce point de vue, il est important de signaler le rôle très important joué par l’édition lyonnaise dans la diffusion de la théologie espagnole – d’ailleurs avec les transformations de l’édition religieuse en général laquelle voit progressivement l’affirmation de l’édition parisienne – et d’interroger le rôle joué par les jésuites français dans le maintien de cette tradition lyonnaise d’édition de la théologie espagnole. Marie-Ange Etayo-Piñol signale ainsi que l’imprimerie française édite la part la plus importante de la production d’ouvrages espagnols en Europe. Lyon à elle seule édite 18,3% de l’ensemble des livres d’auteurs espagnols contre 21,4% pour l’Espagne proprement dite24. Plusieurs casuistes importants sont édités pour la première fois à Lyon. C’est le cas pour les œuvres morales de Ferdinand de Castro Paolo en 1631, pour celles du portugais Etienne Fagundez dont le Tractatus in quinque Ecclesiae Praecepta y paraît 1626 et le De Iustitia et Contractibus en 1641. De même, la première édition complète des œuvres de Tómas Sánchez commence à Lyon en 1625. Bien sûr, une bonne partie de ce travail d’édition a aussi pour destination le marché espagnol lui-même. Le fait n’en est pas moins frappant. Si l’on prend, les 179 textes du xviie siècle en réalité visés par la censure du clergé de France de 1700, on constate que 109 ont été édités à Lyon25. Si d’ailleurs les auteurs italiens de casuistique de ce corpus sont plus rarement édités pour la première fois en France, leur première édition hors de la péninsule est le plus souvent une édition lyonnaise.

La question du rôle joué par les relations internes dans l’ordre jésuite dans ce processus demeure difficile à éclairer. Il ne fait aucun doute que les éditeurs qui publient les textes de casuistiques espagnols ou portugais sont aussi des éditeurs qui travaillent avec les jésuites de France et particulièrement avec les auteurs lyonnais. Ce qui est vrai à Lyon, de ce point de vue, l’est aussi à Paris. Par exemple, on doit l’édition parisienne du de sacramentis du Portugais Mascarenhas à Cramoisy qui fait partie des réseaux laïcs proches de la Compagnie de Jésus26. Pour autant les conditions précises d’inscription dans le réseau jésuite sont difficiles à éclairer. Les Archives Départementales du Rhône conservent une procuration du 23 septembre 1639 passée par Luis de Ribas, recteur du collège de Valence en Espagne, en faveur du P. Hughes Manbrun recteur de Lyon, qui charge ce dernier de veiller à l’impression des disputes théologiques du premier par Pierre Pillehotte27. Si on peut supposer ce type de procuration courantes, il est difficile de savoir si elles se fondent sur des liens institutionnels ou sur des liens amicaux. En mai 1658, au moment des débats en France autour du commentaire du décalogue par l’italien Tommaso Tamburini, la province de Lyon demande au généralat jésuite l’interdiction des éditions qui ne portent pas des facultés d’imprimer accordées par les provinces françaises. Cette demande d’une censure locale « de crainte que l’ignorance d’auteurs étrangers aux choses françaises ne nous suscite dangers et troubles28 » – que, par ailleurs le général refuse de concéder – pourrait laisser penser que les jésuites étrangers s’appuient plus sur des contacts personnels pour traiter avec les imprimeurs lyonnais que sur la structure institutionnelle de l’ordre.

En raison de cette incertitude, mais aussi en raison d’un manque de sources sur la gestion concrète des éditions de livres d’auteurs étrangers, on est conduit pour mieux évaluer le rôle des jésuites français dans la diffusion des textes étrangers à s’intéresser aux conflits internes autour de la publication d’ouvrages de théologie morale. De ce point de vue, on peut noter à la fois un conflit structurel entre une centralité locale (parisienne sur l’ensemble de la France, provinciale sur l’ensemble des maisons d’une province donnée à une échelle plus locale) et une centralité romaine, qui se manifeste par des difficultés fréquentes. Ainsi, dès 1646 c’est le général qui écrit au P. Charlet provincial de France pour s’étonner que, malgré les menaces d’excommunication et les préceptes formels à ce sujet, des pères publient encore des ouvrage attentatoires à la majesté des Rois et même favorables au tyrannicide29. Dans ce cas, on voit clairement que le processus de contrôle de la publication par le centre romain se heurte aux solidarités et aux relations à l’intérieur de l’ordre et au niveau local. Un des épisodes les plus intéressants de ce point de vue concerne la publication d’un texte français de défense de la tradition casuistique, la célèbre Apologie pour les Casuistes du P. Georges Pirot30. Après la publication de ce pamphlet, le général limoge le supérieur provincial, le P. de Lingendes et exile le P. Pirot de Paris. Le rôle joué par l’Assistant de France présent à Rome aux côtés du général demeure obscur mais le plus probable est qu’il a été informé. La publication de ce texte signale en tout cas la difficulté de la censure centrale de l’ordre à maîtriser la politique de publication en théologie morale, et ce en raison à la fois de solidarités idéologiques mais aussi amicales à l’intérieur de l’ordre, la logique des sociabilités internes pouvant prendre le pas sur celle de l’obéissance verticale.

De fait, on peut constater en plusieurs occasions que des liens personnels ou idéologiques troublent les règles canoniques de la publication. En 1670 paraît ainsi à Lyon chez Chevalier mais sans nom d’auteur un traité antiprobabiliste, intitulé De opinione probabili pro Sennichio contra Caramuelem, composé en fait par un jésuite espagnol, le P. Miguel de Elizalde31. Les réviseurs généraux à Rome avaient auparavant censuré ce texte que le général Gian-Paolo Oliva qualifiait d’« intempestif et imprudent32 ». Quand le même Oliva apprend qu’une édition lyonnaise est en cours, dont il n’est pas exclu qu’elle se soit faite par l’entremise d’un jésuite lyonnais, il met tout en œuvre pour l’arrêter. Il demande au père de la Chaize de recourir à l’archevêque de Lyon33et au P. Gras, recteur du Collège de la Trinité de recourir à tous les moyens possibles, en faisant pression par des amis sur l’imprimeur, ou en lui rachetant les livres, pour récupérer tout ce qui a pu être imprimé34. Tandis que l’archevêque semble être intervenu auprès de l’imprimeur35, les jésuites de Lyon déclenchent alors une véritable chasse aux exemplaires déjà envoyés vers l’Espagne ou vers l’Italie et 750 exemplaires sont saisis dans la province36. En septembre 1670, Oliva reconnaît cependant l’échec de l’entreprise de suppression, l’ouvrage s’est répandu en Europe37. Même s’il est difficile d’avoir des certitudes à ce sujet, le plus vraisemblable est qu’un certain nombre de jésuites, hostiles à la tradition théologique de l’ordre ou proche d’Elizalde, ont joué un rôle dans la diffusion de cet ouvrage.

Une crise révélatrice ?

Un épisode tout à fait intéressant de ce point de vue est celui des conflits internes autour de la théologie morale durant le dernier généralat jésuite du xviie siècle, celui de Tirso González de Santalla38. Rappelons-en ce qui est essentiel à la compréhension de notre propos. González est choisi pour succéder à Charles de Noyelles, lors de la 13e congrégation générale à la demande du pape Innocent XI et en raison de son antiprobabilisme. Après un long conflit avec Louis XIV, il s’engage dans la publication du traité de théologie qu’il avait composé entre 1677 et 1679 et que la censure de l’ordre avait fermement refusé et dénoncé comme contraire à la tradition théologique jésuite. Les Assistants, c’est-à-dire les conseillers romains du général en charge des groupes nationaux des provinces et élus eux aussi par la congrégation générale, avertis de sa tentative de publication subreptice en Allemagne s’y opposent clairement et mettent l’affaire dans les mains du pape. Gonzalez de son côté prétend pouvoir passer outre au nom des privilèges qui lui appartiennent en tant que général. La question théologique se double alors d’une question de politique interne qui met en jeu la culture du gouvernement jésuite, qui est alors un lieu de débat entre les jésuites et singulièrement entre les jésuites français39. Le conflit atteint un tel point de tension, que les congrégations provinciales préparant la congrégation des procureurs de novembre 1693 tournent essentiellement autour de la possibilité de la convocation d’une congrégation générale, ouvrant explicitement la voie à une destitution de Gonzalez et à une revanche des partisans du probabilisme sur l’élection imposée d’un antiprobabiliste militant. Un décret de convocation est voté mais cassé par une congrégation ad hoc de cardinaux. Cependant les tensions demeurent dans l’ordre jusqu’au décès et au remplacement de González par Michelangelo Tamburini.

Cet épisode révèle des modes de fonctionnement qui éclairent rétrospectivement les circulations de textes dans l’ordre au xviie siècle. De fait, dans sa stratégie de défense González s’appuie sur un réseau mêlant affinités idéologiques et fonctionnement clientélaire dans le cadre de réseaux égocentrés. C’est relativement clair dans la province de Lyon qui semble la plus déstabilisée par l’action du général et celle de ses relais. Regroupés autour d’un théologien, Jean-François Malatra, les partisans de González semblent même constituer une sorte de mouvement. Le P. Malatra apparaît dans la correspondance avec le général à partir de 1683, date à laquelle on lui impose de rétracter une série d’opinions non précisées mais dont on peut penser rétrospectivement qu’elles sont ou cartésiennes ou rigoristes ou les deux tout ensemble40. Ce n’est cependant qu’à partir de l’accession au généralat de Tirso González qu’il s’impose comme une figure centrale et controversée de l’enseignement de la théologie dans la province. Malatra et González se sont rencontrés en 1687 lorsque ce dernier s’arrête dans la province de Lyon, alors qu’il voyage vers Rome pour la congrégation générale qui voit son élévation au généralat41. C’est alors que tous deux tissent un lien d’amitié fondé sur leur affinité idéologique, c’est-à-dire leur refus commun de la tradition probabiliste de l’ordre.

Chronologiquement, c’est dans la continuité de la crise suscitée par la tentative du général de publier son traité sur l’usage des opinions probables que Malatra voit sa position dans la province mise en cause. En 1694, un recueil de propositions tirées de son enseignement est envoyé au général42, qui de son côté essaie de protéger son affidé. Il fait retirer à celui qui est vraisemblablement le rival de Malatra, le P. Julien Dubousquet, sa chaire de théologie scolastique à Lyon43. En janvier 1695 il doit cependant transmettre au P. Violet, préfet des études du collège de la Trinité, la censure des propositions tirées des cahiers de Malatra, mais demande qu’elle ne soit pas publiée et qu’on se contente de demander à Malatra de faire retirer de son cours les points controversés44. Au printemps de l’année 1695, Malatra est envoyé par ordre du Roi à Roanne. Une lettre écrite le 8 juin 1696, par le P. de la Chaize au P. González signale cependant que le cas de Malatra est certainement surtout lié au caractère central de Malatra dans le réseau qui défend la théologie du général. De la Chaize écrit à son propos : « Notre excellent Roi aime que règne partout la paix et la tranquillité, en particulier dans Notre Compagnie et il a pour habitude d’isoler les perturbateurs du repos public45 ». En réalité, la protection de González est certainement la cause de l’hostilité du roi et du confesseur à son égard.

À ce moment, Malatra est engagé dans la composition de son Specimen Theologiae Moralis46 ,une des défenses les plus théologiquement élaborées de la position théologique singulière du général. De fait, González a lancé une entreprise générale de défense et d’illustration de son propos. Il essaie de susciter dans les différentes provinces de la Compagnie des textes exposant et justifiant sa position. Cependant le cas de Malatra est pour González particulièrement important. Dans un texte apologétique faisant l’histoire des conflits suscités dans la Compagnie par sa position, González revient d’ailleurs sur la relation particulière qui le lie à Malatra47. Plus que les autres traités écrits pour le défendre, celui de Malatra propose au fond de revisiter complètement la théologie morale catholique à partir des principes théologiques probabilioristes de González. Surtout le contenu de l’ouvrage a été discuté directement entre González et lui et a été approuvé à Rome48. Malatra se plaint cependant du retard dans la réception des autorisations et la communication des avis des réviseurs, qu’il attribue à la « procrastination de la province49 ». Indiquant qu’il a reçu des lettres de Paris dans lesquelles on lui raconte que son ouvrage est diffamé, il rappelle au général la nécessité d’obtenir la bienveillance du P. Confesseur, « sans l’accord duquel le privilège royal a peu de chance d’être accordé ». En mars 1696, il évoque les vexations qu’on lui fait subir mais encore le soutient qu’il reçoit du P. Billet, recteur de la Maison Saint Joseph de Lyon, en ajoutant à son propos qu’il est un des plus fermes défenseurs du général50.

Le lien qui unit le P. Malatra au général est un lien fort et personnel, construit dans l’entreprise commune de lutte contre le probabilisme. C’est ainsi toujours Malatra qui se fait le conseiller du général pour obtenir l’édition à Lyon de son livre sur l’usage des opinions probables. Au témoignage du P. Billet51, par ailleurs en faveur auprès du général sur la recommandation de l’exilé de Roanne, le même Malatra est ainsi l’auteur d’une Responsio ad Romanorum Censorum Iudicium écrite pour contester l’avis de 1677 des réviseurs généraux romains contre la parution du traité antiprobabiliste de González. Malatra joue bien un rôle de secrétaire et de conseiller théologique du P. Gonzalez dans les débats théologiques qui agitent la Compagnie dans la décennie 1690. Tous deux ont d’ailleurs entretenu une correspondance nourrie en 1694-169552et perçoivent leur amitié comme providentielle et utile à la réforme de l’ordre.

Surtout, Malatra est au coeur des divisions profondes dans la province de Lyon suscitées par leur action conjointe. De fait, une des spécificités du généralat de González, est que, à partir de la crise théologique de 1693, le général s’appuie sur un réseau structuré par des affinités idéologiques53. Le sous-réseau lyonnais centré autour de Malatra est à la fois le mieux documenté et celui qui éclaire le mieux le réseau que González parvient à mobiliser. González s’appuie sur Malatra pour gouverner la province. Il n’hésite pas ainsi à lui demander de lui envoyer secrètement la liste de ceux sur lesquels il sera possible de s’appuyer54, contournant ainsi volontairement la collecte institutionnellement régulée des informationes ad gubernandum.

Surtout le réseau malatriste est construit dans une logique d’oppositions partisanes. Dans une lettre au général datée du 12 octobre 1696, Antoine Billet, identifié par Malatra comme un des partisans de la réforme de González, propose un état des dissensions dans la Compagnie55. Il constate d’abord que le P. Malatra, à la fois à cause de son ingéniosité et de son enseignement probabilioriste, a des adversaires « nombreux et puissants » parmi les anciens de la province, parmi lesquels un grand nombre d’enseignants en théologie, au premier rang desquels il nomme le socius du Provincial, le recteur du collège d’Avignon, un conseiller provincial, un professeur de théologie, le recteur de Chambéry, le recteur du Collège de la Trinité à Lyon et le provincial lui-même. Il rapporte une rumeur selon laquelle les députés de la Province à la 14e congrégation générale se préparent à y demander une censure du P. Malatra et rappelle la liste des pères coalisés contre le principal relais du général dans la province. La profondeur de la division partisane des jésuites de la province de Lyon mais aussi de l’influence de Malatra dans la province, apparaît clairement après la mort de González. La 15e congrégation générale qui remplace González par Tamburini est l’occasion d’une véritable revanche des adversaires du général et en particulier des adversaires lyonnais de Malatra. Le P. Daugière, délégué de la province à Rome, présente au général un document sur les rapports internes dans la province56. Le P. Billet, devenu provincial dans l’intervalle, y est présenté comme une créature de Malatra, qui a gouverné la province par l’intermédiaire d’amis et de clients. Malatra, Billet et un autre père, Matthieu Jacoz auraient constitué une association pour gouverner la province. Ce sont les malatristes qui ont poussé à l’exclusion par González du P. Jacques Gérard de sa charge de provincial. Surtout Daugières reproche en particulier aux disciples de Malatra d’avoir gouverné en se fondant non sur le mérite mais sur leurs affections privées et d’avoir constitué et utilisé un réseau d’amitié et de clientèle, donnant d’ailleurs au groupe et à sa doctrine le nom de « Malatrisme57 ». Cependant si on lit le mémoire de Daugières, on constate que selon ce dernier le réseau malatriste, relais lyonnais du réseau gonzalézien, n’est pas seulement construit sur une base idéologique. Selon lui, il cacherait aussi une affinité sociale et régionale, la plupart des membres significatifs du réseau qui s’empare du gouvernement de la province, à l’exception de Malatra lui-même, seraient originaire du même pays, autour du village de La Pacaudière aux confins du Roannais, du Bourbonnais et de l’Auvergne. Le cas des « malatristes » indique donc d’une part que l’affinité théologique est un des lieux autour duquel peuvent exister des réseaux en conflit dans l’ordre jésuite ; mais aussi, et d’autre part, que cette affinité théologique peut être aussi mobilisée par des réseaux pré-existants construits autour d’autres logiques sociales.

 

Pourquoi ces tensions partisanes éclairent-elles en retour l’histoire de la circulation des textes dans la Compagnie de Jésus ? Elles signalent l’existence de réseaux ennemis et exclusifs, mais encore que ces réseaux passent par des individus amplificateurs. Elles signalent aussi que ces réseaux à la fois structurent les relations à l’échelle semi-locale de la province et peuvent être ouverts sur des réseaux plus vastes à l’échelle de l’ordre. Surtout ces réseaux égocentrés constituent des canaux de transferts finalement plus efficaces et peut-être plus importants que les canaux institutionnels et se montrent capables de dépasser la capacité des institutions à contrôler les circulations de textes. Ces circulations en retour se révèlent aussi essentielles à la construction de réseaux de sociabilité à l’intérieur de l’ordre, lesquels apparaissent du coup aussi formellement politiques.

Bien sûr la crise qu’on vient d’évoquer a certainement un effet d’accélération et de radicalisation, pour ne pas dire d’hystérisation de dynamiques à l’œuvre à l’intérieur de l’ordre. On peut cependant tout de même penser que les formes pratiques qu’elle prend ne sont possibles que dans la mesure où préexistent déjà des relations de même type en son sein à une double échelle locale et internationale. Si c’est bien le cas, on comprend alors mieux pourquoi des textes italiens, espagnols et portugais, au delà de leur valeur théologique et de leur utilité pastorale, ont largement circulé malgré les problèmes suscités par leur publication et l’absence de véritable politique organisée de diffusion et de circulation à l’échelle européenne de l’ordre. Le dynamisme de la circulation des textes reposerait peut-être tout autant – sinon plus – sur les formes informelles du réseau européen que constitue l’ordre jésuite que sur sa dimension institutionnelle.

Notes

1 Ce texte reprend une intervention proposée lors de la journée d’études « Réseaux et transfert culturels » organisée par l’EA 3400 sous la direction de Damien Coulon à Strasbourg, le 9 novembre 2007. Return to text

2 Sur l’utilisation de l’expression de « casuistique classique » pour désigner le type de théologie morale produite dans l’Europe catholique à l’époque moderne, en particulier dans la période allant du milieu du xvie siècle au milieu du xviie siècle, voir Serge Boarini, La casuistique classique : Genèse, formes, devenir, Saint-Étienne, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2009, p. 13-17. Return to text

3 Sur l’histoire de la réception de la casuistique classique en France à l’époque moderne, on se permet de renvoyer à Jean-Pascal Gay, Morales en conflit. Théologie et polémique au Grand Siècle (1640-1700), Paris, Cerf, 2012. Return to text

4 Pour un premier aperçu des tendances de l’histoire de la théologie morale à l’époque moderne, la meilleure référence demeure le cours dactylographié du P. Louis Vereecke, Storia della teologia morale moderna, Rome, Accademia Alfonsiana, 1972. Voir aussi Pierre Hurtubise, La casuistique dans tous ses états : de Martin Azpilcueta à Alphonse de Liguori, Ottawa, Novalis, 2006. Return to text

5 Juan Azor, Institutionum Moralium in quibus universae quaestiones ad conscientiam recte, aut prave factorum pertinentes breviter tractantur, Rome, 1600-1611. Sur l'importance d'Azor dans l'histoire de la théologie morale, voir l'article « Teología : V Moral » dans le Diccionario Histórico de la Compañía de Jesús, Rome, Institutum Historicum S.I., 2001, t. 4, p.  3739-3740. Return to text

6 Sur la juridicisation de la théologie morale moderne, voir John Mahoney, The Making of Moral Theology. A Study of the Roman Catholic Tradition, Oxford, Clarendon Press, 1988, et surtout Pierre Legendre, «  L’inscription du droit canon dans la théologie : remarques sur la Seconde Scolastique » dans Proceedings of the 5 th international Congress of Medieval Canon Law, Cité du Vatican, 1980, p. 443-454 ainsi que John Bossy, « Moral Arithmetic : Seven Sins into Ten Commandments », dans Edmund Leites (dir.), Conscience and Casuistry in Early Modern Europe, Cambridge/Paris, Cambridge University Press/Éditions de la MSH, 1988, p. 214-234. Return to text

7 Sur ce point, Jean-Pascal Gay, Morales en conflit, op. cit., p.  793-816. Return to text

8 Sur ce texte, Fernanda Alfieri, Nella camera degli sposi. Tómas Sánchez, il matrimonio, la sessualtà (secoli xvi - xvii ), Bologne, Il Mulino, 2010. Return to text

9 Innocent Le Masson, Theologia Moralis Practica per tabulas distincta et exposita, in tres partes distributa, Paris, G. Josse, 1662. Return to text

10 Jean-Pascal Gay, Morales en conflit, op . cit., p. 784-788. Return to text

11 Ibid., p. 472-475. Return to text

12 « Jean Mariana, Carolus Scribianus, sous le nom de Claus Bonarscius, Robert Bellarmin, Grégoire de Valence, Jean Asorius, Jean Guignart, Jacques Gretser, Alphonse Salmeron, François Suarés, Léonard Lessius, Jean Ozorius, Pierre Rybadeneyra, Andreas Eudaemon Ioannes, Louis Richeome, Pierre Coton, Martin Bécan, Franois Tolet, Sebastien Heissius, Louis Molina, Emmanuel Sa, Gabriel Vasqués, Heribert Rosvueidus, Cornelius a Lapide, Antoine Santarel, François Garasse, Cosme Magalianus, et les nouveaux Casuistes Estienne Bauni et Héreau », Bibliothèque Nationale de France (BNF), Ms. Morel de Thoisy 479, f° 71-95, Requeste présentée à nosseigneurs de la Cour de Parlement par l’Université de Paris pour joindre à celle du 5 mars. Return to text

13 N.Caussin, Apologie pour les Religieux de la Compagnie de Jésus à la Reyne régente, Paris, 1644. Return to text

14 Ibid., p. 172-174. Return to text

15 Pierre Lemoine, Manifeste apologétique pour la Doctrine des Religieux de la Compagnie de Jésus. Contre une prétenduë Théologie Morale, et d’autres libelles diffamatoires publiez par leurs ennemis,Paris, 1644. Return to text

16 Ibid., p. 64. Return to text

17 BNF. Ms fr 13808, Clef de la censure faite contre les casuistes par l’Assemblée Générale du Clergé de France à Saint Germain en Laye, le 4 septembre 1700. Pour servir à la nouvelle édition de cette censure jointe au procez verbal de la même assemblée, f° 265. Return to text

18 Sur la tradition antijésuite française depuis la Ligue, voir Luce Giard, « Le "Catéchisme des Jésuites" d’Étienne Pasquier, une attaque en règle » dans Pierre-Antoine Fabre et Catherine Maire (dir.), Les Antijésuites. Discours, figures et lieux de l’antijésuitisme à l’époque moderne, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2010, p. 73-90. Return to text

19 BNF, Ms. fr., 23507, f° 216. Return to text

20 Jean-Pascal Gay, Morales en conflit, op. cit., p. 520-533. Return to text

21 Pierre Hurtubise, La casuistique dans tous ses états, op. cit. Voir en particulier le chapitre 2 « L'univers des casuistes », p. 62-84, en particulier p. 63. Return to text

22 Ugo Baldini, « Uniformitas et soliditas doctrinæ. La Censura Librorum e opinionum » dans id., Legem Impone Subactis. Studi su filosofia e scienza dei Gesuiti in Italia, 1540-1632, Rome, Bulzoni Editrice, 1985, p 19-67. Return to text

23 Monumenta Historica Societatis Iesu. Monumenta Pædagogica, t. 4, p. 429. Return to text

24 Marie-Ange Etayo-Piñol, « Lyon, plaque tournante de la culture espagnole en France » dans Marie Roig-Miranda (dir.), La transmission des savoirs en Europe (xvie-xviie siècles), Paris, Honoré Champion, 2000, p. 451-469. Return to text

25 Jean-Pascal Gay, Morales en conflit, op. cit., p. 790. Return to text

26 Manoel Mascarenhas, Tractatus de sacramentis in genere, baptismo confirmatione, eucharistia, nec non de sacrificio missae nunc primum in lucem prodit, Paris, S. et G. Cramoisy, 1656. Return to text

27 Archives Départementales du Rhône, D. 6, pièce 5. Return to text

28 « ne ignorantia rerum Galiccarum Externi Authores Periculum nobis et turbas moveant », Archivum Romanum Societatis Iesu (ARSI), Cong. 70, f° 300. Return to text

29 ARSI, Franc. 6-I, f° 275. Return to text

30 Georges Pirot, Apologie pour les casuistes contre les calomnies des Jansénistes, Paris, 1657. Sur ce texte, sa réception et les conditions de sa publication, voir Jean-Pascal Gay, op. cit., p. 210-241. Return to text

31 ARSI, Lugd. 9-II, f° 240. Lettre au P. de la Chaize du 4 mars 1670. Le traité mentionné dans la lettre et que le général identifie avec raison comme étant de la main du P. Elizalde est connu sous le titre, De recta Doctrina morum, quatuors libris distincta. Quibus accessit : De natura opinionis appendix. Auctore Antonio Celladei, Lyon, P. Chevalier, 1670. Return to text

32 ARSI, Lugd. 9, f° 240. Return to text

33 ARSI, Lugd. 9, f° 238. Return to text

34 ARSI, Lugd. 9, f° 240. Return to text

35 ARSI, Lugd. 9, f° 242. Return to text

36 ARSI, Lugd. 9, f° 243, lettre du 1er avril 1670. Return to text

37 ARSI, Lugd. 9, f° 259, lettre du 16 septembre 1670. Return to text

38 Sur ces conflits, voir Jean-Pascal Gay, Jesuit Civil Wars. Theology, Politics and Government under Tirso González, Farnham, Ashgate, 2012. Return to text

39 Ibid., p. 240-252. Return to text

40 ARSI, Lugd. 10, f° 19, lettre du 28 avril 1683 au P. Daugères, recteur de Dôle, et f° 33 lettre du 7 décembre 1683 à Malatra, dans laquelle le général le remercie de sa « généreuse rétractation ». Return to text

41 Sur le cas de Malatra, voir Jean-Pascal Gay, Jesuit Civil Wars, op. cit., p. 263-275. On ne reprend ici que ce qui éclaire le propos de cet article. Return to text

42 ARSI, Lugd. 10, f° 279, lettre du 10 août 1694 au P. Viollet à Lyon. Return to text

43 ARSI, Lugd. 10, f° 283, lettre du 21 septembre 1694 au P. G. Jacques, provincial. Gonzalez précise dans sa lettre qu’il faut retirer Dubousquet et « non Malatra », ce qui laisse supposer que Jacques était de l’avis contraire. Return to text

44 ARSI, Lugd. 10, f° 288, 10 janvier 1695. Return to text

45 « Amat Rex optimus ubique pacem et tranquillitatem praesertim in Societate Nostra et quietis publicae perturbatores coercere solat », ARSI Gal. 72, f° 173-174. Return to text

46 Jean-François Malatra, Specimen Theologiæ Moralis duodecim libris comprehensæ quibus ad calecem accedent aliqui tractatus ad Universam Theologiam pertinentes, Lyon, 1698. Return to text

47 ARSI, Cong. 34, 206-217. Return to text

48 ARSI Lugd. 11, f° 259-260. Return to text

49 ARSI Lugd. 11, f° 256. Return to text

50 Ibid. Return to text

51 ARSI Lugd. 11, f° 270. Return to text

52 Voir les nombreuses lettres soli scripta à Malatra dans ARSI, Epp. NN. 41. Return to text

53 Jean-Pascal Gay, Jesuit Civil Wars, op. cit., p. 253-262. Return to text

54 ARSI, Epp. NN. 41, f° 209. Return to text

55 ARSI, Lugd. 11, f° 272-273. Return to text

56 ARSI Lugd. 11, f° 303-304, « Praesens status et forma Provinciae Lugdunensis ». Return to text

57 « ita enim vocatur illorum ut ita dicam secta qui auspice et magistro patre Malatra student novitatibus ». Return to text

References

Bibliographical reference

Jean-Pascal Gay, « Les paradoxes d’un réseau institutionnalisé : les jésuites français et la théologie morale ibérique et italienne au xviie siècle », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe, 1 | 2012, 31-44.

Electronic reference

Jean-Pascal Gay, « Les paradoxes d’un réseau institutionnalisé : les jésuites français et la théologie morale ibérique et italienne au xviie siècle », Source(s) – Arts, Civilisation et Histoire de l’Europe [Online], 1 | 2012, Online since 22 septembre 2023, connection on 11 décembre 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/sources/index.php?id=461

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Jean-Pascal Gay

Jean-Pascal Gay est maître de conférences en histoire moderne à l’université de Strasbourg.

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