Entre acquisition, transmission et tentatives d’adaptation des savoirs techniques : la stratégie des Houillères de Montrambert et de la Béraudière (1854-1940)

DOI : 10.57086/rrs.268

p. 109-129

Résumés

Les charbonnages sont bien souvent vus comme des entreprises peu innovantes dont la principale force de production est constituée par les masses ouvrières mobilisées. Or la réalité est à mille lieues de cela. Il s’agit d’une industrie dans laquelle l’innovation est centrale car chaque gisement possède ses propres particularités. Celles-ci engendrent donc des procédés techniques uniques. Ainsi, l’acquisition des savoirs est essentielle pour une houillère afin de mettre en place un outil de production adapté. Au fil du temps, les charbonnages tentent de rationaliser cette pratique destinée à acquérir et à gérer les savoirs techniques. Entre 1854 et 1940, les houillères de Montrambert et de la Béraudière construisent au fil de leur expérience une stratégie prenant en compte les différentes étapes de cette pratique : acquisition, transmission et adaptations des savoirs techniques.

Coalmines are often seen as uninnovative enterprises whose main production force is the mobilized mass of workers. However, the reality is far from this. It is an industry in which innovation is central because each deposit has its own particularities. This leads to unique technical processes. Thus, the acquisition of knowledge is essential for a coal mine in order to set up an adapted production tool. Over time, the collieries tried to rationalize this practice of acquiring and managing technical knowledge. Between 1854 and 1940, the Montrambert et la Béraudière coalfields developed a strategy that took into account the different stages of this practice: acquisition, transmission and adaptation of technical knowledge.

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À l’instar de Circulations techniques1, ouvrage collectif publié en 2004 et né d’une collaboration entre l’Université de technologie de Belfort-Montbéliard, le Conservatoire national des arts et métiers et l’Université Paris VIII, les chercheurs investissent pleinement depuis le début du xxie siècle le champ d’étude constitué par la circulation des savoirs techniques. Si cette recherche embrasse rapidement l’ensemble des périodes historiques, de nombreux travaux concentrent leurs efforts sur l’industrialisation des xviiie et xixe siècles à l’image des ouvrages précurseurs de Michel Cotte2. Si les historiens ont ainsi mis en lumière la phase précédant le transfert de technologie durant laquelle les savoirs techniques sont acquis, la recherche historique a su, ces dernières années, évoluer et mettre en lumière un personnage central en matière de circulation de l’information : l’ingénieur. Néanmoins, c’est surtout l’époque moderne qui bénéficie actuellement de cet éclairage à travers les travaux de Stéphane Blond, Liliane Hilaire-Pérez, Valérie Nègre et Michèle Virol3.

 

Le xixe siècle permet au chercheur d’observer et d’analyser des mutations en matière de circulation des savoirs techniques. Cette période voit, notamment, l’apparition de nouveaux acteurs comme les ingénieurs civils et l’affirmation de la grande entreprise capitalistique et de ses stratégies industrielles. S’ils reprennent des pratiques des périodes précédentes comme le voyage d’étude, ces acteurs complexifient et complètent la phase située en amont du transfert de technologie. Ainsi, l’étude de la stratégie d’un charbonnage en matière de gestion des savoirs techniques se révèle très féconde. En effet, si cela met en lumière des communautés et des espaces de circulation tout en confirmant une logique interactive et cumulative de la construction des savoirs, la spécificité des houillères apporte un éclairage tout particulier sur la transmission et surtout l’adaptation des connaissances techniques. Ainsi, les caractéristiques des gîtes font de chaque mine une entreprise unique qui ne peut faire l’économie de l’appropriation afin de mettre en place des processus de production propres à ses besoins.

 

Dans ce cadre-là, les Houillères de Montrambert et de la Béraudière constituent un exemple fort intéressant car celles-ci fondent leur réussite économique et technique sur l’innovation4 et par conséquent la capacité à gérer les savoirs techniques. Ce charbonnage situé à l’ouest de la ville de Saint-Étienne voit le jour en 1854 à la suite du fractionnement de la Compagnie des mines de la Loire qui a depuis 1846 réuni l’ensemble des concessions houillères5. Malgré les oppositions sociales, ce monopole instaure au sein des concessions stéphanoises une modernité technique dont héritent les quatre grandes compagnies qui naissent en 18546. Néanmoins, une continuité technique se met en place à travers l’action des ingénieurs. Ainsi, ceux travaillant pour la Compagnie des mines de la Loire œuvrent, après 1854, pour les charbonnages nés du fractionnement dont les mines de Montrambert. Dès leur fondation, celles-ci sont considérées comme le territoire le moins bien pourvu en matière de ressource minérale, c’est pourquoi les ingénieurs de la compagnie se sont toujours montrés très actifs lorsqu’il est question d’innovation. En effet, ces acteurs mettent rapidement au cœur de leur pratique l’acquisition des savoirs techniques en sillonnant la France et l’Europe afin d’étudier les solutions techniques mises en œuvre par d’autres charbonnages. Au fil des décennies et de leur développement, les houillères de Montrambert mettent au point une stratégie de gestion de l’information technique visant certes à acquérir les savoirs mais aussi à les diffuser auprès de leur personnel et de la communauté des ingénieurs. La grande crise métallurgique de la fin du xixe siècle et les conditions économiques qu’elle provoque poussent les mines de Montrambert à adapter les savoirs acquis afin d’investir de nouveaux marchés ou de modifier leur processus de production. De ce constat découlent de nombreuses questions quant à la stratégie de cette houillère : quelles sont les origines et les caractéristiques de cette stratégie ? Engendre-t-elle ou modifie-t-elle des pratiques professionnelles de certains acteurs ? Provoque-t-elle au sein de l’entreprise la naissance de services dédiés à la gestion de l’information ? Afin de lever le voile sur ces interrogations, nous analyserons le processus d’acquisition des savoirs techniques mise en œuvre par les mines de Montrambert. Puis nous nous pencherons sur les enjeux et les modalités de la transmission de ces savoirs. Enfin, nous achèverons notre étude en portant un regard sur les tentatives d’adaptation des savoirs techniques.

Acquérir les savoirs techniques en explorant l’espace de connaissance des ingénieurs civils des mines

Voyager à la recherche de références

Au cours du xixe siècle la notion d’enquêtes techniques commanditées par l’État se généralise. En effet, jusqu’au milieu du siècle les autorités françaises sont préoccupées par les techniques minières et sidérurgiques. Un renouveau d’intérêt se produit dans ces secteurs immédiatement après 1815 et s’accompagne d’une multiplication des voyages d’étude. De Gallois, par exemple, effectue un voyage en Angleterre, où il reste près de seize mois, en 1817-1818, pour observer les charbonnages, la sidérurgie et les chemins de fer7. Durant cette période, en 1816 plus exactement, l’École des mineurs s’installe à Saint-Étienne avec pour objectif de former les futurs maître-mineurs des houillères françaises. Les cours sont dispensés par des ingénieurs d’État, membres du Corps des mines, transmettant au travers de leur intervention la pratique du voyage d’étude. Celle-ci est d’ailleurs fortement ancrée au sein de ce corps technique qui sillonne la France et l’Europe depuis la fin du xviiie siècle tentant de faire la promotion des savoirs techniques8. C’est aussi une pratique accompagnant la politique énergétique de l’État qui se met en place depuis la Révolution et l’Empire visant à effectuer une transition énergétique en direction de la houille au détriment du bois et de l’eau9.

 

Dès les premières années, les élèves sont confrontés à l’observation des méthodes d’abatage et des modes d’aménagement des gîtes en vigueur dans les mines stéphanoises. Cette situation s’accompagne rapidement de la levée des plans de la mine en question et d’observations critiques sur les avantages et les inconvénients du mode d’exploitation rencontré10. En 1851, des excursions sont instituées et se déroulent au sein des divers établissements industriels de la région stéphanoise. Durant ces tournées plusieurs exercices sont imposés aux élèves : levé de plans en extérieur, levé de plan souterrain et un levé de machines11. La méthodologie à appliquer lors des voyages futurs est ici mise en application et transmise aux élèves. L’invitation à l’observation, sur le terrain et par l’intermédiaire de littérature technique, est très présente en cours. Les professeurs cherchent à éduquer le regard. L’élève est ainsi introduit mentalement dans l’atelier et reçoit la description directe de ce qui s’y trouve, en même temps qu’il apprend à porter le regard là où il convient12.

La création de la Compagnie des Mines de la Loire en 1846, après une première phase de méfiance vis-à-vis des anciens élèves de l’établissement stéphanois, offre l’opportunité à ces jeunes ingénieurs de mettre en œuvre les compétences acquises quelques années auparavant sur les bancs de l’École. Malgré la durée de vie très limitée du trust houiller, les ingénieurs stéphanois ont l’occasion d’effectuer des voyages d’études. À la fin des années 1840, c’est en Belgique que les Mines de la Loire vont chercher leur inspiration. Des innovations techniques majeures découlent de ces observations comme la mise en place en 1850 au puits du pré du Gourd-Marin de la machine dite de Waroquié destinée à descendre et à remonter les mineurs du fond13. Le fractionnement de la Compagnie des Mines de la Loire ne met pas un terme à cette pratique. En effet, les sociétés héritières du trust minier demandent à partir de 1854 à l’École des Mines de Saint-Étienne l’intégralité de leurs cadres14. Ainsi, en l’espace de quelques décennies la culture et la pratique du voyage d’étude ont été transférées du Corps des Mines aux ingénieurs civils.

Les houillères de Montrambert et de la Béraudière ne font pas exception à l’image de leur premier ingénieur principal et futur directeur, Félix Devilaine. Celui-ci est formé à l’École des mines de Saint-Étienne, comme l’ensemble des ingénieurs de la compagnie, et assiste aux cours des ingénieurs Fénéon, Grüner et Philips15. Ceux-ci s’appuient abondamment sur des procédés industriels en place, ils les comparent, les mettent en résonnance en analysant avantages et inconvénients. De fait les élèves se constituent « une bibliothèque de situations » en mémorisant les différentes sortes de procédés de manière à pouvoir les mobiliser en temps utile16. L’observation constitue l’un des traits principaux de la pratique technique de Félix Devillaine et des ingénieurs qui l’entourent. La pertinence de l’action est donc synonyme de connaissance des procédés employés par les autres charbonnages voire les autres industries.

Ainsi, jusqu’aux années 1880, dans le sillage de Félix Devillaine, l’acquisition des savoirs techniques au sein des houillères de Montrambert se fait par le biais de voyages d’étude. Ceux-ci ont pour ambition d’enrichir « la bibliothèque de situations » de l’ingénieur principal. Dès sa prise de fonction, Devillaine se rend à l’exposition universelle de Paris en 1855, à un congrès à Liège en 1861 et à un second à Douai en 186917. Chaque déplacement est l’occasion d’acquérir des connaissances pouvant être réutilisées. En 1861, alors qu’il revient de Liège, il écrit à Thomas Hutter, directeur des mines de Montrambert à cette époque, pour lui faire part de ses impressions. Ce voyage, précise-t-il, l’a amené à visiter durant deux jours les houillères du Pas-de-Calais : bassin très intéressant, selon lui, car mis en valeur depuis peu. Il tient également sur le chemin du retour, à passer un ou deux jours à Commentry afin d’étudier un gîte semblable à celui de Montrambert18. Si Devillaine semble intéressé par la méthode d’exploitation et notamment l’organisation du travail des ouvriers, il ne recherche pas, dans ses excursions, à observer des procédés techniques en particulier. Plus qu’augmenter sa « bibliothèque de situation », il souhaite trouver des références19 sur lesquelles il peut s’appuyer afin de développer l’exploitation des mines de Montrambert. Jusqu’aux années 1880, il n’est donc pas question de solutions mais plutôt de sources d’inspiration. C’est la mort de Thomas Hutter, en 1879, et la nomination de Félix Devillaine comme directeur de la société qui changent la donne modifiant les objectifs assignés aux voyages.

Rechercher des solutions dans l’espace de connaissance des ingénieurs civils des mines

Les années 1880 sont marquées par la stabilisation du complexe technique des mines de Montrambert. Il faut désormais envisager des procédés techniques pouvant s’insérer dans cette organisation et répondre aux problèmes qu’elle rencontre. Les voyages ne sont donc plus destinés à rechercher des « références » mais des solutions techniques précises. Cela engendre également une pratique plus collective des voyages d’étude en impliquant plusieurs ingénieurs de la houillère.

Cette recherche de solution induit de nouvelles destinations. Il n’est plus question uniquement de visiter des charbonnages, désormais les usines, les ateliers peuvent constituer des lieux de missions pour les ingénieurs. Dès la fin des années 1880, les contraintes économiques dictent aux techniciens le thème de leur excursion. La crise métallurgique qui sévit à cette époque pousse la houillère à améliorer l’écoulement de ses produits. Ainsi, plusieurs ingénieurs se rendent en 1887 en Belgique et dans le Nord Pas-de-Calais, région dans laquelle la concurrence fait rage, afin d’analyser des installations destinées à traiter les houilles (triage et lavage des charbons, agglomération, etc.)20. Avec le xxe siècle, cette préoccupation s’amplifie et l’on voit de nouvelles ambitions apparaître. En 1906, Murgue, alors directeur de Montrambert, et l’ingénieur principal Rodde souhaitent mettre en valeur les charbons impurs de la concession qui sont généralement inutilisés. Cela déclenche une série de voyages assurée par plusieurs ingénieurs sous la direction de Francis Blache. Ceux-ci sillonnent la France, l’Allemagne et la Belgique entre 1913 et 1930 afin d’acquérir la connaissance nécessaire pour perfectionner la mise en valeur des sous-produits21.

La modernisation des installations est également au cœur des voyages effectués par les ingénieurs. Durant l’entre-deux guerres, les mines de Montrambert songent à édifier un nouveau siège d’extraction capable de concentrer et de rationnaliser la production. Pour cela, la société doit mécaniser ses installations et notamment les chantiers du fond. Ce sont d’abord les haveuses qui sont étudiées par Lavedrine à l’occasion d’un déplacement en Belgique en 192522. Puis, en 1929 et 1930, l’ingénieur Confraveux visite les trainages par locomotives et par câbles de la Grand’Combe ainsi que les trainages mécaniques des charbonnages d’Ensies-Pommereul et de Maurage23.

Plus prosaïquement, en 1896 les mines de Montrambert envisagent d’électrifier une partie de leurs installations du jour. L’objectif est d’installer dans certains puits de service des treuils électriques et notamment au puits Ferrouillat qui fournit aux chantiers les remblais. Afin d’acquérir des connaissances sur ce sujet, l’ingénieur Mazodier se rend à Oerlikon, près de Zurich, afin d’observer la construction et le fonctionnement des machines électriques24.

Les visites d’entreprises et de mines ne sont pas les seuls pans de l’espace de connaissance des ingénieurs civils qu’explorent les houillères de Montrambert. Afin d’acquérir les connaissances techniques nécessaires au développement de l’exploitation, les ingénieurs se rendent régulièrement à des congrès pour communiquer mais également pour prendre connaissance des nouveautés techniques mises en œuvre par leurs homologues français et étrangers. Ainsi, en 1902, Rodde et Clapier assistent aux communications de l’exposition métallurgique et minière ayant lieu à Düsseldorf25. Au cours de ces rassemblements s’exprime une grande solidarité entre les ingénieurs démontrant qu’il s’agit d’une véritable communauté scientifique et industrielle malgré la concurrence entre les différents charbonnages. À l’image de Plassard des mines de Saint-Éloy, il n’est pas rare que ces techniciens s’échangent lors des congrès, lors des visites ou tout simplement par courrier des rapports d’expérience sur une installation26.

Au même titre que les voyages, l’écrit devient ainsi une ressource essentielle afin d’acquérir des connaissances techniques. Les revues d’ingénieurs sont lues et étudiées pour répondre aux difficultés rencontrées. Entre 1873 et 1933, ce travail est effectué par le secrétariat général qui compile d’abord des coupures de presses et des études sur la conjoncture économique. On trouve, par exemple, une étude datant de 1873 menée par le frère de Félix Devillaine ou encore des articles de presse sur le protectionnisme douanier de pays comme les États-Unis ou l’Espagne dans les années 1920. Néanmoins, ce sont les revues d’ingénieurs qui mobilisent le plus l’attention du secrétariat général. Celui-ci analyse et produit des notes à partir de revues de référence telles que Glückauf, L’écho des mines et de la métallurgie, la Revue de l’industrie minérale, etc.27.

Ce travail de compilation et de synthèse pouvant paraître anodin, est essentiel aux mines de Montrambert car il permet de transmettre à l’ensemble des ingénieurs les savoirs techniques acquis à l’extérieur de l’entreprise.

Entre rapports et notes : enjeux et modalités de la transmission des savoirs techniques

De l’homme-ressource à l’homme vecteur : le changement de statut de l’ingénieur dans la transmission des savoirs techniques

Depuis les années 1850, le voyage d’étude constitue pour les houillères de Montrambert la première phase du processus d’innovation. Au sein de celui-ci, l’ingénieur effectuant le voyage occupe une place importante voire centrale. Il est, en effet, jusqu’aux années 1880 au sein de son entreprise un « homme-ressource » partageant peu le savoir accumulé lors des voyages d’études. Cette attitude lui assure une place prépondérante au sein du charbonnage, l’innovation passant ainsi obligatoirement par ses seules compétences. Félix Devillaine est un adepte de cette pratique. Ainsi, il ne produit que peu de rapports, seule une correspondance est entretenue avec sa hiérarchie. Devillaine écrit, en effet, régulièrement à Thomas Hutter, alors directeur des mines de Montrambert, lors de ses excursions mais ses lettres ne contiennent aucun détail technique28. Il se contente de ses réflexions et ne fait pas circuler le savoir accumulé au sein de son entreprise.

Néanmoins, les circonstances poussent parfois Félix Devillaine à partager ses savoirs techniques notamment lorsqu’il souhaite convaincre sa direction quant aux choix à effectuer. Dans les années 1860, les mines de Montrambert désirent approfondir leurs travaux afin d’augmenter la production. Pour cela, il convient de proposer un système d’aérage permettant d’assurer la ventilation de ces nouveaux chantiers. Or à cette époque, c’est l’aérage naturel qui est en vigueur, aucun puits n’est équipé par des ventilateurs. S’il est conscient des avantages procurés par l’aérage naturel29, Devillaine estime que l’approfondissement ne peut être réalisé qu’en installant des moyens mécaniques de ventilation. Pour convaincre sa direction d’installer un ventilateur sur le puits Saint-Vincent, Devillaine rédige en 1866 une note. Celle-ci expose les connaissances techniques que l’ingénieur principal a collecté au sein des revues d’ingénieurs mais aussi au cours d’échanges et de discussions avec les exploitants utilisant déjà ce type de machine. Il évoque donc les expérimentations faites par d’autres houillères. Ainsi, il pense que le ventilateur Lemielle est le plus pertinent car il peut subir des modifications permettant une adaptation rapide à l’image de ce que réalisent les mines d’Anzin. Devillaine s’appuie aussi, dans son rapport, sur la mine de Boussu en Belgique. Mais il développe surtout dans son écrit l’exemple des houillères de Bezenet qui utilise depuis 1862 un ventilateur Lemielle. Il a pu recueillir cette information auprès de l’ingénieur Baure, ancien élève de l’École des mines de Saint-Étienne, qui travaille à Bezenet30.

Une nouvelle attitude s’installe dès les années 1880. Il n’est plus question de laisser la diffusion et la transmission des connaissances techniques au sein de l’entreprise au bon vouloir de l’ingénieur. Dorénavant, on ne se passe plus d’un rapport permettant aux autres ingénieurs de l’entreprise d’apprécier précisément ce qui a été analysé à l’occasion d’un voyage ou d’une lecture. La direction du charbonnage prend dans ce nouveau processus une place considérable. C’est elle qui, dorénavant, fixe les objectifs aux ingénieurs. Par exemple, en avril 1925 Lavedrine part en Belgique afin d’observer les différentes techniques de havage avec des indications très précises. Celles-ci lui sont fournies par l’ingénieur principal, Lavedrine a donc un véritable programme à suivre lors de son voyage.

Les ingénieurs sont désormais des « hommes-vecteurs » missionnés afin d’acquérir des connaissances techniques répondant aux besoins identifiés par la direction à l’image des objectifs qu’assigne, dans les années 1920, le nouveau directeur, André Pigeot, aux ingénieurs31. Ceux-ci doivent désormais accumuler les savoirs techniques et les transmettre à la direction afin d’alimenter les discussions et le processus de prise de décision. En effet, les informations glanées constituent un dossier à disposition des membres de la direction devant prendre une décision à l’image du projet de centrale électrique envisagé en janvier 191532. Ainsi la direction des mines de Montrambert prend l’habitude, après la Première Guerre mondiale, de se procurer des informations et de nombreuses études sur les projets qu’elle ambitionne par l’intermédiaire de ses ingénieurs.

Ce changement de statut de l’ingénieur en matière de transmission des savoirs techniques doit se lire à travers deux prismes. Le premier est constitué par l’évolution des mines de Montrambert et la place occupée par Félix Devillaine au sein de celles-ci. En effet, Devillaine prend en main la destinée technique de ce charbonnage dès sa création en 1854 alors qu’il n’en est pas le directeur mais l’ingénieur principal. Dans cette phase de mise en œuvre d’un nouveau plan d’exploitation Devillaine se charge d’effectuer en personne les voyages d’étude affirmant au passage son pouvoir au sein de l’entreprise33. Lorsqu’il accède à la direction, en remplaçant Thomas Hutter, il délègue cette charge mais veille à la transmission des savoirs acquis et modifie donc le statut de l’ingénieur au sein de l’entreprise qui devient un vecteur intermédiaire. Le second prisme de lecture est d’ordre plus général. À l’image des autres entreprises, les mines de Montrambert étoffent leur personnel de direction lorsqu’elles passent de la première à la seconde industrialisation. Ainsi, les voyages d’études qui dans les années 1850 étaient réalisés par l’ingénieur principal deviennent l’apanage des ingénieurs divisionnaires voire des simples ingénieurs. Désormais, les ingénieurs officiant dans les directions des charbonnages œuvrent de plus en plus, au cours du xixe siècle, en tant que gestionnaires abandonnant à leurs subordonnés certaines tâches comme les voyages d’étude34.

L’ingénieur, un transmetteur des savoirs techniques

Transmettre les connaissances acquises notamment lors des voyages d’études ou des congrès est un enjeu essentiel car cet acte permet à l’entreprise de se saisir des savoirs techniques afin de les adapter. Cette courroie de transmission s’incarne généralement dans le rapport que confectionne l’ingénieur et dont la pratique évolue au fil du temps et des exigences de la direction.

Les premiers rapports confectionnés dans les années 1860 ont un aspect très littéraire. Ils sont à vrai dire très proches des descriptions généralistes des ingénieurs d’État du début du xixe siècle. En effet, ils rappellent les textes publiés au sein du Journal des mines à partir de 1794 ambitionnant de susciter des initiatives chez les premiers exploitants et d’orienter les complexes techniques naissants vers une mécanisation jugée alors comme salvatrice35. Au fil du temps, ces comptes-rendus se font plus précis incorporant des éléments plus « scientifiques », les descriptions n’omettent plus un seul mécanisme. Les notes produites par Rodde en 1887 sur son périple en Belgique sont éloquentes. Rien n’est oublié, toutes les étapes sont décrites dans le moindre détail, des plans sont également dressés à l’image de l’installation de triage de la fosse no 7 des Mines de Lens. Mais surtout apparaît, au sein de ces notes, l’homme. Il n’est plus question de descriptions centrées uniquement sur les machines. Rodde analyse la conduite des opérations, l’organisation des équipes de travail, le profil des remblayeurs et l’apprentissage du personnel36. Le xxe siècle marque aussi un tournant dans la composition des notes de voyage, nous assistons à une « mathématisation » de ces écrits. Les ingénieurs utilisent abondamment les notes et les croquis de terrain dans lesquels les relevés chiffrés tiennent une place centrale. Dès que l’opportunité se présente, ils introduisent dans leur discours des tableaux statistiques.

Dès la fin du premier conflit mondial, les ingénieurs abandonnent les descriptions techniques aussi précises soient-elles pour fournir des analyses industrielles. Dorénavant, le technicien ne se contente plus de décrire des machines et des installations, il commente également les résultats économiques, l’organisation administrative, les relations avec le personnel… La visite effectuée aux houillères de la Mûre, en novembre 1924, afin d’étudier les procédés de remblayage hydraulique est à cet égard exemplaire. Il n’est pas question de se limiter à une observation technique, l’ingénieur apprécie également des éléments tels que la consommation d’eau ou la formation du personnel37. Le prisme économique devient essentiel dans la lecture que fait le technicien des installations qu’il visite. Ainsi Francis Blache lors de son passage à Béthune en juin 1923 pour analyser la fabrication d’un gaz synthétique l’AZH3, termine son rapport en évaluant la rentabilité de l’installation si Montrambert venait à adopter le système. Il arrive, en effet, à chiffrer précisément le potentiel économique et avance un bénéfice de 1 800 000 francs par an38. Les rapports possèdent désormais une table des matières permettant leur utilisation rapide. Nous sommes ici loin des longs textes très littéraires des voyages généralistes du début du xixe siècle. Le regard critique du voyageur devient également essentiel dans cette littérature et l’avis de l’ingénieur est attendu par « ses lecteurs ». Il n’hésite pas à mettre en avant l’efficacité d’un procédé observé ou à le déconseiller à sa compagnie. Ainsi Clapier en 1922, visite aux mines de Bruay des chaudières chauffées par des déchets de charbons. Malgré le fait que l’on brûle des schistes à 70 % de cendres et des poussières de coke, Clapier pense que Montrambert n’a pas besoin d’installations aussi coûteuses pour exploiter ses sous-produits et déconseille donc l’édification d’une telle installation39.

Si les ingénieurs, dans la seconde partie du xixe siècle, ne fournissent généralement que quelques exemplaires de leur rapport au conseil d’administration, leur attitude est toute autre après la Première Guerre mondiale. Les années 1920 marquent le début d’une large diffusion de cette littérature au sein de l’entreprise. Le technicien effectuant un voyage d’étude est, lors de son retour, très préoccupé de l’audience de ses observations. Ainsi les comptes-rendus sont dorénavant produits en plusieurs dizaines d’exemplaires et sont largement distribués aux différents services de la houillère et aux ingénieurs. Les fonds d’archives démontrent d’ailleurs cette prolifération des notes de voyages.

Néanmoins, l’écrit n’est pas le seul moyen pour diffuser les informations collectées lors des déplacements, la communication orale est également un vecteur utilisé par les ingénieurs. En effet, les années 1930 voient une multiplication de conférences internes à Montrambert au sein desquelles tous les sujets pouvant intéresser les techniciens et leur démarche d’innovation sont abordés. Ces allocutions sont généralement assurées par des membres de l’entreprise ayant effectués récemment un voyage, il s’agit donc d’une opportunité de propager les connaissances techniques acquises lors de ces visites. Les voyages lointains sont souvent l’occasion de « conférences-échange » assez importantes entre l’ingénieur ayant effectué le déplacement et ses collègues. Ainsi, Clapier lors de son retour des États-Unis en 1930 compose un rapport de treize pages mais diffuse majoritairement les connaissances acquises par le biais de conférences40.

Au fil du temps, les pratiques de transmission des savoirs techniques se sont perfectionnés au sein des mines de Montrambert. Mais cela ne garantit pas le succès des processus de production observés au sein du complexe technique de la houillère qui doit bien souvent adapter ces connaissances.

Des essais au service de l’organisation rationnelle du travail : entre tentatives d’adaptation et normalisation de l’accès aux savoirs techniques

Les essais ou la volonté d’adapter un savoir technique

Être en capacité d’acquérir un savoir par le biais du voyage ou de l’étude des textes publiés ne constitue finalement qu’une étape menant à l’édification d’une machine ou à l’application d’une méthode d’exploitation. Ainsi, il faut être en mesure de l’adapter à son complexe technique. Cette volonté devient très prégnante au sein des mines de Montrambert au xxe siècle. Les essais se multiplient dans les différents services qui expérimentent les solutions mises en avant par le travail de veille. En mai 1929, le service électrique souhaite acquérir un nouveau type de lampe électrique pour le fond. Après avoir pris les renseignements nécessaires auprès d’autres houillères, le service met à l’essai deux types de lampe : ARRAS LD 10 à liquide alcalin et JORIS à liquide acide immobilisé. Un programme de mesures photométriques est mis au point pour évaluer l’efficacité des deux types de lampes. Malgré l’analyse et le chiffrage réalisés, l’ingénieur en chef du service électrique ne peut trancher et laisse ce soin aux ingénieurs du fond devant expérimenter les lampes en situation réelle41.

À l’instar de la corporation des ingénieurs civils des mines42, les houillères de Montrambert privilégient depuis la seconde moitié du xixe siècle l’expérimentation dans ces chantiers. D’ailleurs, depuis les premières années du xxe siècle, des usines destinées à mettre en œuvre des essais sont édifiées. Avec la crise métallurgique sévissant depuis la fin des années 1880 à laquelle s’ajoute une concurrence de plus en plus importante sur les charbons de forge, les mines de Montrambert décident d’investir massivement afin de produire de nouveaux combustibles à partir des déchets de la houille. Cette mission est confiée à Francis Blache qui, après avoir mené des essais en 1905, se retrouve à partir de 1909 à la tête d’une usine destinée à l’expérimentation. Dans cette tâche, Francis Blache est assisté par M. Beaudequin un ingénieur constructeur de gazogène mais également par un chimiste dont l’activité est intégralement dédiée à l’usine d’essai. Les analyses effectuées par cette équipe permettent donc d’identifier les différents problèmes à résoudre. Cependant les solutions expérimentées ne sont pas le fruit du hasard mais d’un important travail de veille technologique assuré par Francis Blache lui-même. En effet, lorsqu’un problème est ciblé, Blache n’hésite pas à effectuer des voyages d’étude afin de rechercher des sources d’inspiration. Ainsi dès 1913, il se rend à l’usine électrique de la Compagnie d’Orléans à Tours pour observer leurs gazogènes « Richée ». Ce voyage lui permet d’étudier un principe qui s’avère très judicieux en matière de dégoudronnage. Les premiers déplacements de Blache, en 1913 et 1914, sont généralement des prises d’informations sur les gazogènes employés par d’autres industries. Mais dans les années 1920, les voyages deviennent de véritables recherches de solutions à un problème très précis à l’image de sa visite effectuée à l’usine à gaz de Grenoble le 26 août 1924. L’objectif est ici de se renseigner sur le procédé de débenzolage du gaz par voie sèche qui y est appliqué. Il n’est cependant pas question pour lui de se contenter d’une seule source d’inspiration lorsqu’un problème est à résoudre. Ainsi il complète son voyage à Grenoble par une visite à l’usine à gaz de Chambéry pour observer l’installation de débenzolage43.

De nouveaux marchés s’ouvrent pour les mines de Montrambert grâce à l’apport de l’usine d’essai. Celle-ci va rapidement dans les années 1920 se transformer en usine de production en commercialisant les produits issus des déchets de la houille ainsi que le gaz fabriqué par la houillère et vendu à des sociétés telle que la Compagnie du gaz du Midi. Néanmoins, toutes les tentatives d’adaptation ne sont pas obligatoirement synonymes de succès. À cet égard, la tentative de conversion au remblayage hydraulique est éloquente.

Depuis leur création, en 1854, les houillères de Montrambert et de la Béraudière exploitent leurs couches en remblayant les vides laissés par l’extraction. Cette méthode est d’ailleurs une référence en Europe. Cependant, elle nécessite la mise en place d’un complexe technique comprenant une carrière, un chemin de fer interne, une descenderie voire un puits dédié. Cela nécessite aussi une escouade d’ouvriers spécialisés, les remblayeurs, greffant le prix de revient du charbon extrait. Au début du xxe siècle, les charbonnages peinent à recruter devant un phénomène d’évitement menant les ouvriers à œuvrer au sein des usines et moins facilement dans les mines. Montrambert devant cette difficulté songe à modifier sa méthode d’exploitation par remblais en passant au remblayage hydraulique. Dès 1908, des voyages d’études sont organisés aux mines de la Mure afin d’observer des charbonnages exploitant des couches épaisses par le biais de cette méthode44. Séduits par le procédé et jugeant celui-ci adaptable à leurs couches, les ingénieurs de Montrambert multiplient les visites notamment en 1917 aux houillères de Saint-Éloy afin d’analyser l’embouage qui est généralement un système utilisé pour lutter contre les feux mais qui semble capable de remblayer des vides importants avec un personnel limité. Cette excursion est complétée, après 1921, par une analyse du coût du remblayage hydraulique aux mines de Sarre et Moselle45. Dès 1922, le charbonnage se lance dans l’expérimentation en envisageant l’installation au puits Du Marais d’une colonne de remblayage hydraulique. Cet équipement constituerait une évolution majeure de la méthode d’exploitation car il permettrait de réaliser des économies de main d’œuvre, d’augmenter la sécurité des travaux et de réduire la consommation de bois de soutènement. Ainsi, en 1923, certains quartiers appliquent le remblayage hydraulique à l’image de ceux situés autour du puits Ferrouillat46. Après quelques années d’expérimentation au sein des chantiers, la nouvelle méthode ne soulève plus l’enthousiasme posant de nombreuses questions à l’ingénieur principal :

Le remblayage hydraulique depuis longtemps envisagé n’a pas été l’objet de nouveaux développements par suite de l’incertitude que laisse planer sur l’économie de ce procédé, la profondeur et l’éloignement de nos travaux. Toutefois nous sommes prêts à faire deux installations, l’une au puits Lyon, l’autre au puits Flotard pour parfaire les remblayages à la main.47

Ainsi, après quelques années d’expérimentation le remblayage hydraulique perd en crédibilité car il complique le problème de l’épuisement tout en résolvant très imparfaitement la question des dégâts de surface et ne paraît pas de nature à améliorer le prix de revient. En 1928, l’ingénieur principal note qu’il complique également le bon entretien des voies de roulage. Si les mines de Montrambert, sont conscientes qu’il faudra modifier à terme la méthode d’exploitation, elles prennent aussi acte, en 1928, que la solution ne peut être le remblayage hydraulique48. Les expérimentations menant à cette décision vont être désormais menées au sein d’un service centralisant le travail de veille et expérimentant les nouveautés observées ailleurs.

Centraliser et normaliser l’acquisition et l’adaptation des savoirs techniques : le service d’organisation rationnelle du travail

En France, au sein de plusieurs industries dont l’électrotechnique et la chimie, apparaissent dès les années 1900 et plus encore dans les années 1920-1930 des laboratoires de recherche de taille souvent modeste mais jouant un rôle moteur dans le développement de firmes comme Saint-Gobain. Ces laboratoires généralement localisés dans ou près des usines ont pour mission essentielle le perfectionnement des procédés et participent également à une recherche destinée à améliorer les produits49. À Montrambert, il ne s’agit pas uniquement d’un laboratoire mais d’un service intégrant le travail de veille et d’essai qui est fondé le 30 avril 1930. Le rôle du service d’organisation rationnelle du travail est immédiatement défini et concentre les fonctions d’acquisition, de transmission et d’adaptation des savoirs techniques :

Le rôle de ce service est de préparer par la documentation les statistiques, les essais, toutes les améliorations possibles dans les méthodes d’exploitation, dans les dispositifs de sécurité, dans les procédés de classement et de présentation du charbon, dans l’emploi rationnel des outils et des machines, dans la formation du personnel, dans les conditions de travail, dans le mode de rémunération du travail.50

Le positionnement initial de ce service démontre l’importance qu’il occupe au sein du charbonnage. De fait, il est directement sous l’autorité de l’ingénieur principal, troisième personnage de l’entreprise après le directeur et le sous-directeur51. Il ne s’agit pas d’un service d’exécution mais de documentation et d’essai. Pour cela, il s’appuie sur les revues françaises et européennes qu’il dépouille chaque mois et dont il tire des notes envoyées aux différents services du charbonnage. Ainsi, la Revue de l’industrie minérale, la Revue de la science du travail, le Colliery guardian ou encore Glückauf sont consultés régulièrement. Sur ces sujets, il organise aussi des conférences internes à destination des gouverneurs. Au-delà des notes issues des revues, les rapports confectionnés par les ingénieurs lors des voyages d’études complètent cette documentation. Finalement ce service officialise et centralise une pratique d’acquisition de l’information qui s’est construite depuis la fondation des mines de Montrambert en 1854. Il permet également de normaliser cette pratique en fournissant un cadre réglementaire ainsi qu’une position au sein de l’organigramme de la compagnie.

Au-delà de la veille, le service pilote et contrôle également l’ensemble des essais mis en œuvre au sein de l’entreprise à l’image des essais menés en décembre 1930 sur les câbles d’extraction. Il collabore et mobilise donc régulièrement le laboratoire de l’entreprise pour analyser et étudier les résultats des essais avec lequel il élabore des procédures de suivi afin d’apprécier sur le temps long les résultats obtenus. Malgré une documentation parfois limitée sur certains sujets, le travail de veille apparaît véritablement comme le socle immuable du travail de recherche à l’instar des essais menés sur les procédés d’agglomérations des houilles sans addition de brai. En effet, en 1931, le service d’organisation rationnelle du travail fonde ses essais sur les quelques articles parus au sein des revues techniques sur ce sujet52.

S’il est placé sous l’autorité de l’ingénieur principal, le service d’organisation rationnelle du travail répond également, en matière d’essai, aux doléances des autres services et des autres personnalités de l’entreprise. En 1932, le directeur technique de la houillère prend connaissance d’un article relatant un incendie de boisage provoqué dans une mine alsacienne par l’inflammation des vapeurs d’huile s’échappant des rhéostats de démarrage dont la température de l’huile atteint 370°. Il va saisir le service de l’organisation rationnelle du travail et le service électrique pour qu’ils mènent des essais afin d’installer des relais thermiques ou des fusibles agissant sur le disjoncteur des rhéostats dès que la température dépasse la valeur dangereuse du dégagement des vapeurs d’huile53.

Les thèmes d’investigation du service correspondent aux préoccupations de Montrambert mais aussi à celles de l’industrie des années 1930. N’oublions qu’à partir de 1926, un engouement pour les méthodes américaines s’empare du patronat français préparant ainsi le terrain pour le mouvement de rationalisation qui s’exprime dans l’industrie des années 1930. Si les progrès du taylorisme et plus généralement de l’organisation scientifique du travail s’affirme avant tout dans les industries mécaniques c’est bien l’ensemble des entreprises françaises qui tentent de réorganiser leur appareil productif54. Montrambert n’est d’ailleurs pas le seul charbonnage à s’engager dans cette voie-là, les mines d’Anzin à la fin des années 1920 mettent en place une rationalisation du travail dans leurs chantiers55.

Le service d’organisation rationnelle du travail de Montrambert multiplie les études sur le rendement et le prix de revient des salaires à l’abatage et au chargement. Des statistiques sont élaborées chaque mois. À côté de cela, on trouve également des notes sur le mode de fixation des salaires aux mines de la Sarre ou encore sur le chronométrage à front de taille. Les études ergonomiques attirent également l’attention des ingénieurs en charge du service. Il en va de même pour l’organisation des travaux du fond. Plus généralement, toutes les pratiques liées au mouvement d’organisation scientifique du travail interpellent les mines de Montrambert à l’image du chronométrage, de la standardisation ou du mode de fixation des salaires56.

Comme le fait remarquer l’ingénieur Confavreux à son directeur André Pigeot, le 30 avril 1930, le service d’organisation rationnelle du travail permet d’uniformiser des pratiques professionnelles propres à chaque division qui découlent d’une longue tradition prenant racine avec la création de l’entreprise en 1854.

Conclusion

Entre 1854 et 1940, les Houillères de Montrambert et de la Béraudière développent des pratiques les menant sur les chemins de l’acquisition, de la transmission et de l’adaptation des savoirs techniques. Pas à pas, au fil des décennies, l’entreprise passe d’une pratique liée à la culture de ses ingénieurs à une institutionnalisation en son sein à travers le service d’organisation rationnelle du travail. Celui-ci offre ainsi une structuration formelle au sein de laquelle les ingénieurs uniformisent et normalisent leurs habitudes de travail.

Cet exemple est riche d’enseignements. D’abord il éclaire une pratique ancienne, celle des charbonnages, en matière d’acquisition des savoirs techniques et il pose la question de la circulation et de l’adaptation de ces connaissances dans le cadre de l’entreprise. Il démontre qu’une pratique d’acquisition des savoirs techniques peut être transférée d’un Corps technique d’État à une corporation en pleine structuration, les ingénieurs civils, par le biais d’une institution de formation. Cela est d’autant plus remarquable car les ingénieurs d’État ne poursuivent pas les mêmes objectifs que les ingénieurs civils : les premiers œuvrant pour l’Administration et le bien public et les seconds travaillant pour l’industrie en recherchant l’efficacité économique. Il est également intéressant de remarquer l’adaptation de cette pratique du voyage d’étude aux buts poursuivis. En effet, les motivations initiales sont mues par la recherche de références afin d’édifier un plan d’exploitation qui en se complexifiant et en se stabilisant modifie les objectifs des voyages. Désormais, avec la seconde industrialisation, il faut apporter des solutions à un problème précis. Au tournant des années 1880, le cas des mines de Montrambert met également en lumière l’intégration de cette pratique d’acquisition des savoirs techniques au sein d’un processus interne à l’entreprise destiné à transmettre l’information à l’ensemble des acteurs. Les hommes s’effacent devant le système et les ingénieurs deviennent des vecteurs intermédiaires chargés de récolter et de diffuser les savoirs dans l’entreprise selon un mode opératoire défini. En filigrane, la direction de la houillère joue un rôle essentiel en associant le travail de veille à une politique d’expérimentation destinée à adapter les savoirs techniques venus de l’extérieur. Enfin, cet exemple nous rappelle l’influence, dans les années 1930, des mouvements d’organisation scientifique du travail qui bien souvent font irruption dans les organigrammes. À cet égard, les mines de Montrambert manifestent une certaine originalité en associant cette volonté de rationalisation à sa culture d’acquisition des savoirs techniques.

Suivre durant près d’un siècle une entreprise dans sa volonté d’acquérir, de transmettre et d’adapter les savoirs techniques, c’est aussi croiser une multitude de questionnements que soulève l’industrialisation : l’évolution de la place de l’ingénieur, le lien entre science et industrie, la « scientisation » des pratiques et de l’industrie à partir de l’après Première Guerre mondiale, etc. Autant de champs d’investigations que l’étude des circulations des savoirs techniques permet d’éclairer.

1 Michel Cotte (dir.), Circulations techniques, Besançon, Presses Universitaires de Franche-Comté et Université de technologie de Belfort-Montbéliard

2 Michel Cotte, Le choix de la révolution industrielle. Les entreprises de Marc Seguin et ses frères (1815-1835), Rennes, Presses Universitaires de

3 Stéphane Blond, Liliane Hilaire-Pérez et Michèle Virol (dir.), Mobilités d’ingénieurs en Europe, xve-xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires

4 Luc Rojas, L’intelligence technique des ingénieurs civils des mines. Pratiques techniques des ingénieurs des houillères de Montrambert et de la

5 Pierre Guillaume, La compagnie des mines de la Loire, Paris, Presses Universitaires de France, 1966.

6 Luc Rojas, Histoire de révolution technologique. De l’exploitation artisanale à la grande industrie houillère de la Loire, Paris, L’Harmattan, 2008.

7 M. Cotte, De l’espionnage à la veille technologique, op. cit., p. 30-31.

8 Isabelle Laboulais, La Maison des mines, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 264-279.

9 Serge Benoît, D’eau et de feu : forges et énergie hydraulique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2020, p. 195-214.

10 Pierre Baché, De l’École des Mineurs à l’École des Mines, Montbrison, Éd. La Diana, 2001, p. 59-60.

11 Ibid., p. 113-115.

12 Anne-Françoise Garçon, Entre l’État et l’usine. L’École des Mines de Saint-Étienne au xixe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2004

13 Archives Départementales de la Loire (désormais ADL), 1 ETP 964, Archives de la Compagnie des Mines de la Loire, Analyse des lettres reçues et

14 Pierre Guillaume, « Note sur les ingénieurs des charbonnages de la Loire au xixe siècle », in Charbon et sciences humaines, La Haye, Éd. Mouton

15 Archives municipales de Saint-Étienne, 118 S 330, classement de sortie des élèves ingénieurs (1846).

16 A.-F. Garçon, Entre l’État et l’usine. L’École des Mines de Saint-Étienne au xixe siècle, op. cit., p. 159-160.

17 ADL, 45J235, fonds Thomas Hutter, correspondance des ingénieurs de la compagnie ou les concernant (1855-1878).

18 ADL, 45J235, fonds Thomas Hutter, correspondance des ingénieurs de la compagnie ou les concernant : lettre de Félix Devillaine à Thomas Hutter (

19 Pour la notion de « référence » voir Luc Rojas, « Transfert de technologie et circulation de l’information technique. Les rubaniers stéphanois et

20 ADL, 1ETP3269, stages d’instruction et visites d’entreprises françaises : notes de voyages dans le Nord, le Pas-de-Calais et la Belgique (1887).

21 ADL, 1ETP3270, voyage d’étude à l’étranger : rapport Blache sur l’usine Moll en Belgique (1924), rapport Coing sur l’usine à gaz de Tegel en

22 ADL, 1ETP3270, voyage d’étude à l’étranger : haveuses, voyage de Lavedrine en Belgique mars-avril 1925 (15 mai 1925).

23 ADL, 1ETP 3269, voyage d’étude en France : rapport sur les trainages par locomotives et par câbles à la compagnie des mines de la Grand’Combe (21 

24 ADL, 1ETP5822, électrification de l’exploitation : étude en vue de l’installation d’un treuil électrique (8 mai 1896).

25 ADL, 1ETP819, voyage d’ingénieur : notes de voyage en Westphalie (1902).

26 ADL, 1ETP3269, voyages et visites : compte-rendu de visite aux houillères de Saint-Éloy, note sur l’embouage utilisée dans cette compagnie (15 mai

27 ADL, 1ETP, études économiques (1873-1933).

28 ADL, 45J235, Fonds Thomas Hutter, Directeur des Mines de Montrambert et de la Béraudière, correspondance avec les ingénieurs : lettres de Félix

29 Luc Rojas, « Félix Devillaine (1823-1913) ou la figure de “l’ingénieur praticien” », Cahiers de RÉCITS, no 9 (2013), p. 93-111.

30 ADL, 1ETP5823, aérage installation d’un ventilateur : note sur l’installation d’un ventilateur pour l’aérage des mines de la Béraudière (6 décembre

31 ADL, 1ETP3229, rapport du directeur au conseil d’administration : rapports de 1924 à 1928.

32 ADL, 1ETP5822, avant-projet d’une centrale électrique (10 janvier 1915).

33 Luc Rojas, « L’innovateur et la mise en récit de l’innovation : les puits jumeaux des houillères de Montrambert par Félix Devillaine », Journée d’

34 Marco Bertilorenzi et Anne-Françoise Garçon, « De la pratique à une science ? La nouvelle doctrine d’Henri Fayol dans son contexte conceptuel »

35 I. Laboulais, La Maison… op. cit., p. 264-274.

36 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : notes de voyage dans le Nord, le Pas-de-Calais et la Belgique (août 1887).

37 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : visite aux mines de la Mure (12-14 novembre 1924).

38 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : visite de l’installation de la compagnie des mines de Béthune pour la fabrication de l’AZH3 synthétique (2 juin

39 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : visite de l’installation de chaudières aux mines de Bruay (mars 1922).

40 ADL, 1ETP3270, comptes-rendus des visites et voyages : note de voyage de M. Clapier en Amérique (1930).

41 ADL, 1ETP5748, matériel et installations électriques : essais de photométrie sur les lampes électriques de mine ARRAS et JORIS (27 mai 1929).

42 Luc Rojas, « Construire et diffuser le savoir des ingénieurs civils des mines : le Bulletin de la société de l’industrie minérale (1855-1914) »

43 Luc Rojas, « Francis Blache et la fabrication des sous-produits de la houille : entre veille et expérimentation », Technologie et innovations [en

44 ADL, 1ETP3269, voyages et visites : étude sur remblayage hydraulique aux mines de la Mure (mars 1908).

45 ADL, 1ETP3269, voyages et visites : note sur l’embouage aux houillères de Saint-Éloy par Plassard (15 mai 1917) et le remblayage hydraulique du

46 ADL, 1ETP5751, rapport de l’ingénieur principal : exercices 1922 et 1923.

47 ADL, 1ETP5751, rapport de l’ingénieur principal : exercice 1927.

48 ADL, 1ETP5751, rapport de l’ingénieur principal : exercice 1928.

49 François Caron, Les deux révolutions industrielles du xxe siècle, Paris, Albin Michel, 1997, p. 172-175.

50 ADL, 1ETP4517, service d’organisation rationnelle du travail : circulaire de création du service (30 avril 1930).

51 ADL, 1ETP4539, appointements des ingénieurs : état nominatif des ingénieurs de la société de Montrambert (1er juin 1930).

52 ADL, 1ETP4517, service d’organisation rationnelle du travail : rapport de l’ingénieur principal exercice 1931 (1932).

53 ADL, 1ETP5748, matériel et installations électriques : note de service du directeur technique (14 octobre 1932).

54 Aimée Moutet, Les logiques de l’entreprise. La rationalisation dans l’industrie française de l’entre-deux guerres, Paris, Éditions de l’École des

55 Odette Hardy-Hémery, « Rationalisation technique et rationalisation du travail à la compagnie des mines d’Anzin (1927-1938) », Le Mouvement social

56 ADL, 1ETP4517, service d’organisation rationnelle du travail, fonds documentaire (1930-1940).

Notes

1 Michel Cotte (dir.), Circulations techniques, Besançon, Presses Universitaires de Franche-Comté et Université de technologie de Belfort-Montbéliard, 2004.

2 Michel Cotte, Le choix de la révolution industrielle. Les entreprises de Marc Seguin et ses frères (1815-1835), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2007 ; Michel Cotte, De l’espionnage à la veille technologique, Besançon, Presses Universitaires de Franche-Comté et Université de technologie de Belfort-Montbéliard, 2005.

3 Stéphane Blond, Liliane Hilaire-Pérez et Michèle Virol (dir.), Mobilités d’ingénieurs en Europe, xve-xviiie siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017 ; Stéphane Blond, Liliane Hilaire-Pérez, Valérie Nègre et Michèle Virol (dir.), Les ingénieurs des intermédiaires ? Transmission et coopération à l’épreuve du terrain (Europe, xve-xviiie siècle), Toulouse, Presses universitaires du Midi, 2022. Voir également David Pretel, Lino Camprubi, Technology and Globalisation : Networks of Experts in World History, Cham, Springer International Publishing-Palgrave Macmillan, 2018 (Palgrave Studies in Economic History) ; John Krige, How Knowledge Moves : Writing the Transnational History of Science and Technology, Chicago-Londres, The University of Chicago Press, 2019.

4 Luc Rojas, L’intelligence technique des ingénieurs civils des mines. Pratiques techniques des ingénieurs des houillères de Montrambert et de la Béraudière (1854-1945), Berlin, Éditions universitaires européennes, 2017.

5 Pierre Guillaume, La compagnie des mines de la Loire, Paris, Presses Universitaires de France, 1966.

6 Luc Rojas, Histoire de révolution technologique. De l’exploitation artisanale à la grande industrie houillère de la Loire, Paris, L’Harmattan, 2008.

7 M. Cotte, De l’espionnage à la veille technologique, op. cit., p. 30-31.

8 Isabelle Laboulais, La Maison des mines, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 264-279.

9 Serge Benoît, D’eau et de feu : forges et énergie hydraulique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2020, p. 195-214.

10 Pierre Baché, De l’École des Mineurs à l’École des Mines, Montbrison, Éd. La Diana, 2001, p. 59-60.

11 Ibid., p. 113-115.

12 Anne-Françoise Garçon, Entre l’État et l’usine. L’École des Mines de Saint-Étienne au xixe siècle, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2004, p. 162-165.

13 Archives Départementales de la Loire (désormais ADL), 1 ETP 964, Archives de la Compagnie des Mines de la Loire, Analyse des lettres reçues et envoyées : lettres du 27 octobre 1849, 29 mai 1850 et 14 août 1850.

14 Pierre Guillaume, « Note sur les ingénieurs des charbonnages de la Loire au xixe siècle », in Charbon et sciences humaines, La Haye, Éd. Mouton, 1963, p. 221-232.

15 Archives municipales de Saint-Étienne, 118 S 330, classement de sortie des élèves ingénieurs (1846).

16 A.-F. Garçon, Entre l’État et l’usine. L’École des Mines de Saint-Étienne au xixe siècle, op. cit., p. 159-160.

17 ADL, 45J235, fonds Thomas Hutter, correspondance des ingénieurs de la compagnie ou les concernant (1855-1878).

18 ADL, 45J235, fonds Thomas Hutter, correspondance des ingénieurs de la compagnie ou les concernant : lettre de Félix Devillaine à Thomas Hutter (juin 1861).

19 Pour la notion de « référence » voir Luc Rojas, « Transfert de technologie et circulation de l’information technique. Les rubaniers stéphanois et la “référence” bâloise xviiiexxe siècles », Traverse, 3 (2010), p. 55-68.

20 ADL, 1ETP3269, stages d’instruction et visites d’entreprises françaises : notes de voyages dans le Nord, le Pas-de-Calais et la Belgique (1887).

21 ADL, 1ETP3270, voyage d’étude à l’étranger : rapport Blache sur l’usine Moll en Belgique (1924), rapport Coing sur l’usine à gaz de Tegel en Allemagne (1930). ADL, 1ETP3269, voyage d’étude en France : rapport Bernard sur l’usine électrique de Tours (1913), rapport Clapier sur les installations des mines de Bruay (1922), rapport Blache sur les installations des mines de Béthune (1923), rapport Coing sur les usines de Mouche et de Gerland (1926).

22 ADL, 1ETP3270, voyage d’étude à l’étranger : haveuses, voyage de Lavedrine en Belgique mars-avril 1925 (15 mai 1925).

23 ADL, 1ETP 3269, voyage d’étude en France : rapport sur les trainages par locomotives et par câbles à la compagnie des mines de la Grand’Combe (21 juin 1929) ; visite effectuée aux charbonnages d’Ensies-Pommereul et de Maurage (13 janvier 1930).

24 ADL, 1ETP5822, électrification de l’exploitation : étude en vue de l’installation d’un treuil électrique (8 mai 1896).

25 ADL, 1ETP819, voyage d’ingénieur : notes de voyage en Westphalie (1902).

26 ADL, 1ETP3269, voyages et visites : compte-rendu de visite aux houillères de Saint-Éloy, note sur l’embouage utilisée dans cette compagnie (15 mai 1917).

27 ADL, 1ETP, études économiques (1873-1933).

28 ADL, 45J235, Fonds Thomas Hutter, Directeur des Mines de Montrambert et de la Béraudière, correspondance avec les ingénieurs : lettres de Félix Devillaine.

29 Luc Rojas, « Félix Devillaine (1823-1913) ou la figure de “l’ingénieur praticien” », Cahiers de RÉCITS, no 9 (2013), p. 93-111.

30 ADL, 1ETP5823, aérage installation d’un ventilateur : note sur l’installation d’un ventilateur pour l’aérage des mines de la Béraudière (6 décembre 1866).

31 ADL, 1ETP3229, rapport du directeur au conseil d’administration : rapports de 1924 à 1928.

32 ADL, 1ETP5822, avant-projet d’une centrale électrique (10 janvier 1915).

33 Luc Rojas, « L’innovateur et la mise en récit de l’innovation : les puits jumeaux des houillères de Montrambert par Félix Devillaine », Journée d’étude Mises en récit d’innovations (INSA Lyon), septembre 2019, Lyon, France, hal-02426031.

34 Marco Bertilorenzi et Anne-Françoise Garçon, « De la pratique à une science ? La nouvelle doctrine d’Henri Fayol dans son contexte conceptuel », Entreprises et histoire, no 83 (juin 2016), p. 13-15.

35 I. Laboulais, La Maison… op. cit., p. 264-274.

36 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : notes de voyage dans le Nord, le Pas-de-Calais et la Belgique (août 1887).

37 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : visite aux mines de la Mure (12-14 novembre 1924).

38 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : visite de l’installation de la compagnie des mines de Béthune pour la fabrication de l’AZH3 synthétique (2 juin 1923).

39 ADL, 1ETP3269, Voyages et visites : visite de l’installation de chaudières aux mines de Bruay (mars 1922).

40 ADL, 1ETP3270, comptes-rendus des visites et voyages : note de voyage de M. Clapier en Amérique (1930).

41 ADL, 1ETP5748, matériel et installations électriques : essais de photométrie sur les lampes électriques de mine ARRAS et JORIS (27 mai 1929).

42 Luc Rojas, « Construire et diffuser le savoir des ingénieurs civils des mines : le Bulletin de la société de l’industrie minérale (1855-1914) », Philosophia Scientiæ, 22-1 (2018), p. 185-201.

43 Luc Rojas, « Francis Blache et la fabrication des sous-produits de la houille : entre veille et expérimentation », Technologie et innovations [en ligne], vol. 21-6 (2021), http://www.openscience.fr/Francis-Blache-and-the-manufacture-of-coal-by-products-between-intelligence.

44 ADL, 1ETP3269, voyages et visites : étude sur remblayage hydraulique aux mines de la Mure (mars 1908).

45 ADL, 1ETP3269, voyages et visites : note sur l’embouage aux houillères de Saint-Éloy par Plassard (15 mai 1917) et le remblayage hydraulique du siège V de Sarre et Moselle (après 1921).

46 ADL, 1ETP5751, rapport de l’ingénieur principal : exercices 1922 et 1923.

47 ADL, 1ETP5751, rapport de l’ingénieur principal : exercice 1927.

48 ADL, 1ETP5751, rapport de l’ingénieur principal : exercice 1928.

49 François Caron, Les deux révolutions industrielles du xxe siècle, Paris, Albin Michel, 1997, p. 172-175.

50 ADL, 1ETP4517, service d’organisation rationnelle du travail : circulaire de création du service (30 avril 1930).

51 ADL, 1ETP4539, appointements des ingénieurs : état nominatif des ingénieurs de la société de Montrambert (1er juin 1930).

52 ADL, 1ETP4517, service d’organisation rationnelle du travail : rapport de l’ingénieur principal exercice 1931 (1932).

53 ADL, 1ETP5748, matériel et installations électriques : note de service du directeur technique (14 octobre 1932).

54 Aimée Moutet, Les logiques de l’entreprise. La rationalisation dans l’industrie française de l’entre-deux guerres, Paris, Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 1997, p. 59-101.

55 Odette Hardy-Hémery, « Rationalisation technique et rationalisation du travail à la compagnie des mines d’Anzin (1927-1938) », Le Mouvement social, no 72 (juillet-septembre 1970), p. 3-48.

56 ADL, 1ETP4517, service d’organisation rationnelle du travail, fonds documentaire (1930-1940).

Citer cet article

Référence papier

Luc Rojas, « Entre acquisition, transmission et tentatives d’adaptation des savoirs techniques : la stratégie des Houillères de Montrambert et de la Béraudière (1854-1940) », Revue du Rhin supérieur, 4 | 2022, 109-129.

Référence électronique

Luc Rojas, « Entre acquisition, transmission et tentatives d’adaptation des savoirs techniques : la stratégie des Houillères de Montrambert et de la Béraudière (1854-1940) », Revue du Rhin supérieur [En ligne], 4 | 2022, mis en ligne le 01 novembre 2022, consulté le 29 mars 2024. URL : https://www.ouvroir.fr/rrs/index.php?id=268

Auteur

Luc Rojas

Luc Rojas est chercheur associé à l’UMR CNRS 5600 (EVS-ISTHME) et enseignant à l’université Jean Monnet (Saint-Étienne). Il est également co-rédacteur en chef de la revue en ligne d’histoire des techniques e-Phaïstos (université Paris I et université technologique de Prague). Ses champs d’investigation portent sur les pratiques et les pensées des ingénieurs civils, les traces et mémoires de la civilisation industrielle ainsi que les pensées organisatrices et leur mise en œuvre.

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