Wenceslas IV et les signes distinctifs des juifs de Strasbourg (1386)

DOI : 10.57086/rrs.479

p. 147-162

Zusammenfassungen

Le 6 février 1386, le roi Wenceslas écrit au conseil de la ville de Strasbourg afin qu’il impose aux juifs y résidant le port d’attributs vestimentaires les identifiant, des bottes et le Judenhut. Cette première occurrence de signes distinctifs pour les juifs de la ville intervient dans un contexte troublé qui pourrait expliquer cette manifestation de l’autorité royale, en particulier le renforcement des ligues urbaines à la veille des guerres de 1386-1389.

On 6 February 1386, King Wenceslaus wrote to the council of Strasbourg asking them to impose regulation Jews residing there to wear clothing identifying them, boots and the Judenhut. This first occurrence of distinctive signs for the city’s Jews occurs in a troubled context that could explain this demonstration of royal authority, in particular the strengthening of urban leagues’ position on the eve of the 1386-1389 wars.

Gliederung

Text

Le 6 février 1386, le roi Wenceslas IV, roi de Bohême depuis 1363, élu roi des Romains en 1376 et qui règne seul depuis la mort de son père Charles IV du Luxembourg en 1378, adresse depuis Prague un mandement au conseil de la ville de Strasbourg : il explique regretter que les juifs de Strasbourg se mêlent aux chrétiens sans aucune distinction. En conséquence il demande à la ville de Strasbourg de faire respecter par les juifs le port d’accessoires vestimentaires particuliers, à savoir « des bottes et des chapeaux de juifs, comme ils ont l’habitude depuis de longs temps et de tout temps, si bien que l’on puisse reconnaître un juif, d’un chrétien, ce qui est justice »1. Le document est signalé depuis la fin du xixe siècle2 : si la réglementation du Judenhut semble assez courante dans l’espace germanique, bien que les couvre-chefs décrits ont des formes assez variées aux xiiie et xive siècles, l’attention prêtée à la nature du chaussant, en l’occurrence des bottes, est tout à fait exceptionnelle dans le corpus des signes distinctifs des juifs médiévaux.

Depuis le concile œcuménique de Latran IV (1215), lors duquel a été affirmée pour la première fois l’obligation de distinguer par le vêtement chrétiens et non-chrétiens dans l’espace public3, le développement de la législation sur les insignes et attributs vestimentaires des juifs a été progressif dans l’Europe médiévale. À l’exception de l’Angleterre où Henri III a imposé dès 1218 aux juifs du royaume le port de deux pièces de tissu blanc4, la prescription de Latran IV n’a pas été appliquée par les autorités séculières sur le continent avant la seconde moitié du xiiie siècle, où la rouelle a été notamment prescrite dans le royaume de France5. Dans l’Empire, ce sont d’abord les autorités ecclésiastiques qui ont été amenées, à partir de la seconde moitié du xiiie siècle à rappeler, lors de synodes diocésains ou de conciles provinciaux, l’obligation faite aux juifs de porter un signe distinctif. À partir de la seconde moitié du xive siècle, ce sont également les autorités urbaines qui commencent à statuer sur la question. À l’image de la fragmentation politique des territoires de l’Empire, les rares dispositifs normatifs ont été édictés généralement à l’échelle locale6. Le mandement de Wenceslas semble être la première intervention royale relative à l’insigne des juifs, ce qui amène à s’interroger sur les motivations du roi à exiger la régulation du vêtement de quelques dizaines de juifs autorisés à résider à nouveau à Strasbourg depuis une quinzaine d’années.

En effet, la communauté juive de cette ville d’Empire, parfois appelée la « seconde » communauté, est en pleine reconstruction après les massacres de 1349 qui ont anéanti la population juive dans le contexte de l’épidémie de la Peste noire7. Attestée depuis le xiisiècle, la première communauté juive de Strasbourg, qui a pu compter entre 250 et 300 personnes8, fut exterminée – dans son propre cimetière – le 14 février 1349 ; seules quelques personnes ont pu fuir hors de la ville pour essayer de se mettre à l’abri. À la suite de ces persécutions, décision avait été prise par les autorités strasbourgeoises de ne plus admettre de juifs dans la ville pendant deux cents ans. Néanmoins, vingt ans plus tard, quelques familles juives furent admises de nouveau à Strasbourg en août 13699. En 1386, le nombre de juifs établis dans ce carrefour économique dynamique reste très faible et ne retrouve pas le niveau démographique antérieur à 1349.

Le mandement de Wenceslas semble être l’occasion pour le souverain de réaffirmer ses droits sur ceux qu’il désigne comme ses « Kammerknechte ». L’imposition d’attributs vestimentaires (le Judenhut et des bottes) à quelques dizaines de juifs – seuls les hommes sont concernés – n’est peut-être pas le seul objectif du souverain et on peut y voir une manifestation de l’autorité royale, dans le contexte de crise politique que traverse l’Oberrhein dans la décennie 1380, alors que les ligues urbaines sont particulièrement actives.

Le statut des juifs de Strasbourg : « Kammerknechte » et « Bürger »

Le mandement de Wenceslas, rédigé en langue vernaculaire, est connu en raison de la mention, assez étonnante, des bottes. Quant au Judenhut (chapeau juif ou chapeau des juifs), ses occurrences sont plus fréquentes dans les dispositifs normatifs du vêtement des juifs à partir de la fin du xiiie siècle en Allemagne, tandis que la rouelle n’est pas mentionnée régulièrement comme insigne des juifs avant la seconde moitié du xve siècle10. Pourtant le début de la missive est tout aussi intéressant, sinon plus, car il explicite les enjeux de pouvoir entre le roi et les autorités municipales.

Wenceslas commence par rappeler le statut des juifs de Strasbourg qui sont alors, comme beaucoup des juifs de l’Empire, ses « camerknechte ». Le statut de « Kammerknecht », ou en latin « servi camere nostre », place en effet les juifs et l’ensemble de leurs biens sous l’autorité directe et la protection du souverain. Une des manifestations les plus anciennes de ce droit a été formalisée dans le privilège accordé aux juifs de Worms en 1157 par Frédéric Barberousse ; en juillet 1236, Frédéric II a élargi par le privilège d’Augsbourg le champ de sa protection à tous les juifs d’Allemagne, en les désignant, pour la première fois, comme « servi camere nostre ». Ce statut a fait l’objet de nombreuses discussions depuis l’étude publiée en 1940 par Guido Kisch, dans laquelle il retraçait l’histoire de la protection accordée par le pouvoir impérial aux juifs et interrogeait la notion de « servitude »11. Si le privilège de 1236 reconnaît aux juifs notamment la liberté de circulation, le droit de propriété et d’héritage, l’autorité impériale pouvait être considérée comme la seule garante des modes d’insertion des juifs dans la société chrétienne, justement parce qu’ils relevaient de la Chambre impériale. La condition juridique des juifs évolue au siècle suivant, surtout après la Peste noire. Dans la seconde moitié du xive siècle, Charles IV et son fils Wenceslas ont disposé de ce droit régalien, le concédant en totalité ou en partie pour composer avec les princes et les villes d’Empire, accentuant un mouvement amorcé dès les premières années du siècle12. Les comtes d’Oettingen avaient reçu une partie de l’impôt impérial sur les juifs de Strasbourg en 1347, deux ans avant la disparition de la première communauté ; vingt ans plus tard, les conditions du retour des juifs dans la ville prévoyaient, sur le plan fiscal, le versement annuel de 10 marcs d’argent au comte d’Oettingen, en dédommagement sans doute des sommes qui n’avaient pu être perçues entre 1349 et 1369. Il est aussi exigé que l’évêque de Strasbourg perçoive 12 marcs annuels, sans doute une compensation du temps lointain – au xiiie et au début du xive siècle – où l’évêque avait des droits sur les juifs de la ville, avant de les perdre progressivement dans la première moitié du xive siècle13.

En effet, les juifs relèvent à Strasbourg essentiellement des autorités municipales qui exercent leur droit de protection sur eux, en les reconnaissant comme Bürger de la ville, comme les autres citoyens14. Ce statut juridique a été rappelé à plusieurs reprises, dès l’autorisation d’installation des six premières familles en 136915, ou encore le 13 janvier 137116, puis dans les Judenordnungen du 14 mai 137517 et du 25 septembre 138318. Ces dernières définissent les modalités de la présence juive dans la cité, établissent le droit de résidence et réglementent les activités économiques autorisées, en particulier, et avec une grande précision, le crédit. Certes l’altérité religieuse impose au conseil de la ville de prévoir des dispositifs spécifiques nécessaires à l’observance religieuse de cette minorité (synagogue, cimetière), ainsi qu’un cadre juridique en cas de conflit entre juifs et chrétiens. Mais il n’en reste pas moins que la population juive de Strasbourg est reconnue comme faisant partie du corps social de la ville, à la différence de juifs venus de l’extérieur dont le séjour est conditionné et limité. En novembre 1384, le juif Simon renonce à son droit de bourgeoisie, car il est désormais le juif du comte palatin Ruprecht l’Ancien19.

Les droits sur les juifs sont donc un enjeu important dans les relations entre le roi et les princes, mais aussi entre le roi et les villes, comme le confirmera en mai 1387 le rétablissement par Wenceslas de ses droits sur les juifs de trois cités de la Décapole, Colmar, Sélestat et Haguenau20. Pourtant, depuis la fin du xiiie siècle au moins, les autorités – impériales, ecclésiastiques, urbaines – ne sont plus en capacité de garantir en permanence la sécurité des populations juives, comme les massacres de la Peste noire l’ont tragiquement prouvé. Du point de vue économique, les exigences fiscales vis-à-vis des juifs sont de plus en plus élevées dans le dernier quart du xive siècle, en raison notamment des obligations militaires des villes engagées dans les ligues urbaines.

Distinguer les juifs des chrétiens : bottes et judenhut

La missive de Wenceslas semble être la plus ancienne mention d’un insigne des juifs à Strasbourg, et au-delà dans l’Oberrhein. Le début du mandement est consacré à la description d’un désordre social qui, selon le roi, ne concerne pas seulement Strasbourg, mais aussi d’autres villes de l’Empire. Cette dernière précision relève d’une généralisation assez systématique dans l’ensemble des législations ecclésiastiques et séculières. Le roi avance deux arguments essentiels pour justifier sa requête. Le premier est d’ordre moral. Les juifs sont accusés d’afficher leur orgueil (« Hoffart ») à travers leurs vêtements (« wate ») ou les étoffes de leurs vêtements (« gewannt ») ; ce comportement est une infamie pour les chrétiens et la foi chrétienne21. Cet orgueil – qui relève de la superbia – affiché soi-disant par les juifs pourrait s’expliquer à la fois par le luxe éventuel de leurs habits (à travers les tissus, les couleurs ou encore les ornements), mais aussi par le fait que les juifs se permettraient de porter des vêtements contraires à la morale, justement parce que ce sont des vêtements semblables à ceux des chrétiens.

Dans la société médiévale – comme dans toutes les sociétés d’ailleurs –, le vêtement a une fonction de marqueur social. La distinction vestimentaire est constitutive de l’ordre social : chacun doit être vêtu selon son état. Le développement des législations vestimentaires, tant dans la sphère ecclésiastique que dans la sphère laïque, contribue à la régulation d’une morale sociale22. Celle-ci est de plus en plus accentuée à la fin du Moyen Âge, notamment dans les villes de l’espace germanique où les préoccupations morales de l’Église rejoignent celles des autorités publiques : la multiplication des ordonnances vestimentaires (Kleiderordnungen) et des lois somptuaires (Luxusordnungen) à partir du xive siècle manifeste cette exigence d’ordonnancement social élaboré par les autorités. Ce type de sources a permis d’étudier, entre autres, les groupes sociaux, considérés longtemps dans l’historiographie comme marginaux, que ce soient les prostituées, les voleurs, les pauvres, mais aussi les juifs23. Dans cette perspective, les signes distinctifs imposés aux juifs ont longtemps été analysés dans la seule perspective d’une histoire de l’antijudaïsme, voire, dans la longue durée, de l’antisémitisme24. L’approche comparative permet de réévaluer la spécificité de l’insigne des juifs au sein d’un corpus de dispositifs assez variés, tout en prenant en compte les limites des sources normatives pour une étude du vêtement juif à la fin du Moyen Âge.

Il n’existe pas d’étude particulière sur l’histoire du vêtement à Strasbourg à la fin du Moyen Âge, mais une ordonnance vestimentaire (Kleiderordnung), édictée à la fin du xive siècle, permet d’appréhender quelques aspects des modes en usage dans la ville. Le document, signalé par L.C. Eisenbart dans son étude sur les ordonnances vestimentaires, a été partiellement publié à la fin du xixe siècle25 : l’édition, assez brève, compte cinq paragraphes qui traitent, pour trois d’entre eux, du vêtement féminin. Un quatrième concerne le vêtement masculin et vise à réguler l’usage de vêtements courts, qu’il s’agisse de manteaux (« rog ») ou de ceux couvrant le buste (« wambesche »), donc les vêtements alors à la mode dans la société médiévale, du moins chez certains. En effet, à partir du milieu du xive siècle, le pourpoint, vêtement court et ajusté pour les hommes, découvrant les chausses plus ou moins haut sur la cuisse, semble s’être diffusé au-delà des milieux curiaux à d’autres catégories de la population, notamment parmi les bourgeoisies urbaines. Ce phénomène de mode est attesté dans l’ensemble de l’Europe, de l’Angleterre à la Bohême26.

C’est seulement dans un second temps que Wenceslas rappelle l’obligation de distinguer juifs et chrétiens dans l’espace public, ce qui n’est jamais que la reprise du canon 68 du concile œcuménique de Latran IV (1215). Préoccupation constante de l’Église à partir du xiie siècle, la différence de l’habit ne concerne pas seulement les relations entre chrétiens et juifs : conciles et synodes statuent aussi régulièrement sur le vêtement ecclésiastique, afin que les clercs se distinguent des laïcs ; de même les femmes publiques (autrement dit les prostituées) doivent être identifiées comme telles, afin de ne pas être confondues avec d’« honnêtes » femmes. En 1233, dans une lettre adressée aux évêques d’Allemagne, Grégoire IX dénonçait la « confusio » régnant alors dans ces régions, parce que juifs et chrétiens ne pouvaient pas être identifiés par leur apparence, autrement dit par leur vêtement, contrairement aux exigences du concile œcuménique de Latran IV27. La dénonciation de Grégoire IX a été reprise au milieu du xiiie siècle au moins à trois reprises : d’abord, en 1254, par Innocent IV qui rappelle à l’ordre l’évêque de Constance au sujet des juifs de son diocèse qui ne portent pas l’insigne28 ; puis, lors des conciles de la province de Mayence – dont dépend le diocèse de Strasbourg – réunis à Fritzlar en 125929 et à Aschaffenbourg en 129230. Plus d’un siècle plus tard, à en croire Wenceslas, règne donc toujours cette « confusio » jugée scandaleuse aux yeux du pouvoir.

Les plus anciennes occurrences du pileus cornutus datent de 1267 lors des conciles de Breslau et de Vienne31. Les rédacteurs du canon sur le pileus cornutus justifient le recours à cette forme particulière de couvre-chef en expliquant que les juifs locaux (habitant ces régions) avaient eu l’habitude de le porter ; il est ensuite précisé dans la seconde partie de la phrase « qu’ils [les juifs] avaient eu l’audace d’abandonner » le pileus cornutus. Le mandement de Wenceslas reprend l’évocation de pratiques anciennes32. C’est souvent cet argument qui est retenu, dans les études sur le vêtement des juifs, pour justifier l’hypothèse du port d’un couvre-chef spécifique par les juifs, mais la formulation de la phrase suggère un usage local tombé en désuétude33. Cette remarque confirme que, d’une part, l’utilisation d’un tel chapeau, si elle a été effective, était loin d’être généralisée et que, d’autre part, elle n’est plus d’actualité à l’époque de la rédaction de ces canons conciliaires. L’argument d’une pratique vestimentaire singulière voulue par les juifs eux-mêmes est adapté du canon 68 du concile de Latran IV qui fait explicitement référence à la prescription biblique des franges rituelles aux quatre coins du vêtement (tsitsit)34.

Dans la société juive, l’affirmation de la différenciation entre juifs et chrétiens est présentée aussi comme une obligation ; les régulations les plus anciennes (les takkanot des villes SchUM [Spire, Worms et Mayence]) datent des années 1220, et sont donc contemporaines du concile de Latran IV35. Dans son étude sur la piété juive dans le monde ashkénaze, Elisheva Baumgarten s’interroge sur la manière dont les juifs ont pu, ou pas, respecter l’obligation du port des tsitsit, à propos desquels les sources rabbiniques (commentaires du Talmud, responsa) sont plus impérieuses entre la fin du xiiie siècle et le milieu du xive siècle36. Mais ces sources normatives ne permettent pas de déduire que tous les juifs les ont suivies scrupuleusement. De même, dans le judaïsme, se couvrir la tête est devenu progressivement une prescription religieuse pour les hommes au cours du Moyen Âge et, dans son analyse de l’apparence vestimentaire des juifs dans l’espace urbain, Elisheva Baumgarten s’interroge sur le respect éventuel de cette réglementation37. Le port d’un couvre-chef peut aussi être abordé sous l’angle de la mode et des usages vestimentaires : à une période où le chapeau est un élément du costume masculin, reflet aussi de l’appartenance sociale, les juifs, nécessairement influencés par les modes locales, en ont vraisemblablement porté, pas nécessairement d’ailleurs pour des raisons d’observance religieuse. Dans l’espace germanique qui nous occupe ici, quelle pouvait être la forme, de ce couvre-chef, chapeau « juif » ou pas ? La question du Judenhut, et surtout celle de son éventuelle utilisation par les juifs, reste ouverte.

L’achèvement de la rédaction du code de loi du sud de l’Allemagne, le Schwabenspiegel, est contemporain de la mention du pileus cornutus dans les conciles de l’Église. Le Schwabenspiegel, œuvre d’un frère franciscain d’Augsbourg, est généralement daté des environs de 1275 : il indique aussi l’obligation du port du Judenhut dans les villes où résident les juifs, sans que l’on puisse établir de lien direct entre les conciles de Breslau et Vienne et la rédaction du Schwabenspiegel38. Le recensement des occurrences de ce signe distinctif des juifs dans les réglementations des villes allemandes confirme que les plus anciennes datent du dernier quart du xive siècle (donc à la même période que l’ordre royal étudié ici) et que leur nombre reste limité.

Les témoignages de relations sexuelles illicites entre juifs et chrétiennes ou inversement, entre chrétiens et juives39, montrent que l’objectif avoué de les empêcher, qui semble avoir été la – sinon l’unique – motivation du canon 68 de Latran IV, n’a jamais abouti. Gerd Mentgen signale qu’à Bâle, le règlement judiciaire des infractions sexuelles entre juifs et chrétiennes prévoyait de soumettre pendant trois jours le juif, coiffé d’un Judenhut, à une peine d’exposition au pilori, avant d’être brûlé40. Comment expliquer l’usage d’un Judenhut dans le cadre d’une condamnation judiciaire ? On observe dans beaucoup de systèmes de châtiments (et pas uniquement à l’encontre de juifs) l’usage de marques (physiques, par exemple au fer rouge, ou vestimentaires) permettant d’afficher publiquement le nature de la faute. La mention du Judenhut dans ce règlement judiciaire pourrait relever de ce type de pratique, visant à souligner que l’appartenance religieuse du coupable est bien la circonstance aggravante de la relation sexuelle.

L’omniprésence du chapeau pointu dans l’art allemand, aussi bien dans l’illustration des manuscrits que dans le décor sculpté, est souvent considérée comme un indice de l’usage de ce couvre-chef parmi la population juive. Si le recours à l’iconographie est essentiel pour l’histoire du vêtement, il n’en demeure pas moins que l’image n’est pas une reproduction fidèle d’une réalité quotidienne : l’image est utilisée comme une source complémentaire et permet, par exemple, à des archéologues du vêtement médiéval d’éclaircir de nombreux aspects techniques de la fabrication. Autre biais à souligner à propos du recours aux représentations figurées du Judenhut, ce dernier est principalement un attribut de l’iconographie chrétienne, dont les types et les modèles sont fixés assez tôt et circulent largement. Enfin, du point de vue strictement quantitatif, les sources iconographiques chrétiennes sont bien plus nombreuses, ce qui contribue à surinterpréter ces représentations. La reprise du Judenhut dans quelques manuscrits hébraïques peut aussi être expliquée par des usages picturaux issus des échanges et des contacts entre artistes juifs et chrétiens.

En ce qui concerne l’obligation des bottes suggérée par le roi Wenceslas pour les juifs de Strasbourg, il est plus difficile d’en comprendre l’origine, puisqu’il s’agirait de la plus ancienne occurrence de ce type d’insigne et qu’il n’en existe quasiment pas d’autres41. La Kleiderordnung de Strasbourg, déjà évoquée, consacre un paragraphe aux chaussures pour interdire les poulaines, chaussures à pointes très en vogue à la fin du xive siècle, mais laisse libre d’utiliser des bottes pour monter à cheval42. Aucune autre indication n’est donnée. Cette forme de chaussant semble assez répandue dans la société médiévale, ne serait-ce que pour être protégé du froid et des intempéries en hiver ; dans plusieurs secteurs de l’artisanat, les bottes en cuir peuvent être aussi considérées comme des « chaussures de sécurité »43. En 1366, un règlement du conseil d’Erfurt avait interdit aux juifs de sortir sans bottes et sans chapeaux44 ; ces obligations vestimentaires de la population juive, hommes et femmes, de la ville ont été précisées en 1373, avant d’être renouvelées en 1393 : les hommes devaient porter de longs manteaux, mais aussi des bottes et un chapeau, quelle que soit la saison45. La précision apportée – en toute saison – n’est sans doute pas fortuite : porter des bottes en plein été peut être suffisamment incongru, pour que les juifs, parce qu’ils y seraient contraints, soient ainsi identifiables. Malgré les concordances entre une partie de la réglementation vestimentaire d’Erfurt, antérieure, et le mandement de Wenceslas pour Strasbourg, très peu d’indices permettent de suggérer un lien direct entre les deux. Wenceslas a certes séjourné à Erfurt en août 1375, mais onze années avant le mandement concernant les juifs de Strasbourg46. L’hypothèse d’un conseiller du roi, connaissant la situation locale des juifs d’Erfurt, n’est pas exclure, mais n’a pu aboutir.

Une affirmation de l’autorité royale ?

Ainsi, l’intervention de Wenceslas concernant l’insigne des juifs de Strasbourg pourrait être expliquée par le contexte politique régional, en raison de la crise qui oppose les ligues urbaines et le roi, et, du rôle de ces villes auprès des juifs au détriment du pouvoir central.

Depuis le xiiie siècle, le roi lève sur les juifs un impôt mais, à la fin du xive siècle, cette fiscalité a été régulièrement concédée soit à des princes soit à des villes et elle est souvent disputée au roi. Wenceslas a particulièrement usé de ce procédé rémunérateur pour le trésor royal, puisqu’il exigeait des bénéficiaires des impôts des juifs le reversement d’une somme importante, à charge pour ces bénéficiaires d’encaisser cet impôt auprès des juifs. Dans les années 1385-1386, plusieurs villes de l’Oberrhein refusent de verser au roi une partie importante de l’impôt des juifs : c’est par exemple le cas de Sélestat, qui fut mise au ban de l’Empire, avant d’être réintégrée en 138947. Pour compenser, le roi a créé de nouvelles ressources fiscales levées à son profit, ce qui alourdit le poids de la fiscalité pesant sur les juifs dans la seconde moitié du xive siècle.

Dans la décennie 1380, un autre facteur de tension avec le roi provient du renforcement des « ligues urbaines », ces réseaux d’alliance nouées entre les villes de l’Oberrhein notamment48. Strasbourg n’a jamais fait partie de la Décapole constituée dès 1354 à l’initiative de Charles IV et qui réunissait, sur la rive gauche du Rhin, Wissembourg, Haguenau, Rosheim, Obernai, Sélestat, Kaysersberg, Colmar, Munster, Turckheim et Mulhouse, sous l’autorité du Landvogt, représentant de l’empereur49. Mais Strasbourg se trouve engagée à partir du début des années 1380 dans un jeu politique complexe au sein de multiples alliances urbaines. Le roi Wenceslas renouvelle le 31 janvier 1381 les droits et libertés de la ville, qui intègre le 20 mars 1381 une nouvelle ligue réunissant pour trois ans sept villes (Mayence, Worms, Spire, Francfort, Haguenau, Wissembourg, et donc Strasbourg). Trois mois plus tard, le 17 juin 1381, celles-ci concluent un accord avec la ligue souabe50. Même après avoir rappelé que les ligues sont interdites par la Bulle d’Or promulguée par son père, Charles IV, en 135651, Wenceslas ne parvient pas à rétablir immédiatement son autorité sur les villes. Il crée alors en 1383 quatre circonscriptions dont les limites territoriales viennent fractionner les réseaux d’alliances constituées par les ligues urbaines. Ce n’est qu’en juillet 1384 que les ligues urbaines consentent à un accord avec le roi52.

L’ordre de Wenceslas, adressé au début de l’année 1386 à Strasbourg, intervient donc à un moment décisif dans les rapports de force entre le pouvoir royal et les villes53. En effet, les ligues urbaines ont placé les juifs sous leur autorité juridique directe, comme cela avait déjà été le cas en 1254, au moment où les cités rhénanes (dont les villes SchUM, mais aussi Cologne, Bâle) avaient conclu leur première alliance ; elles ont ainsi perçu à leur profit tout ou partie des impôts des juifs, au lieu que ceux-ci soient versés au roi. Ce sont aussi les ligues rhénane et souabe qui interdisent aux juifs, en septembre 1387, d’employer des servantes et domestiques chrétiens54. Le mandement de Wenceslas peut donc être compris comme un moyen de manifester son autorité non seulement sur « ses » juifs, ce qu’il dit explicitement au début du texte, mais, par là même et peut-être plus encore, aussi sur Strasbourg (parmi d’autres villes liguées), en rappelant ses droits sur les juifs qui y résident. L’ordre de Wenceslas vise moins les juifs de Strasbourg que les autorités urbaines.

Si l’intervention du roi Wenceslas peut être analysée comme une manifestation de l’autorité royale dans un contexte politique particulier, force est de constater que le choix des attributs vestimentaires ne répond pas forcément à l’objectif déclaré, à savoir établir une distinction vestimentaire entre chrétiens et juifs dans l’espace public. Comme dans nombre de règlements vestimentaires relatifs aux juifs, seul le vêtement masculin est envisagé ici, ce qui ne concerne qu’une partie de la population juive de la ville. En Allemagne, le vêtement féminin juif est très rarement codifié avant le xve siècle55. Pourtant les femmes juives ne sont pas confinées dans la seule aire domestique et elles sont actrices à part entière de la vie économique notamment56.

Par ailleurs, l’ordre de Wenceslas fut-il exécuté et les juifs de Strasbourg ont-ils ou non été contraints par le conseil de porter un Judenhut et des bottes à partir du printemps 1386 ? Dans l’état actuel de la documentation connue, il est impossible de répondre à la question57, d’autant plus que la fin de la décennie 1380 marque l’extinction progressive de la communauté juive de Strasbourg, dont la situation économique a été fragilisée par les exigences fiscales et des annulations des dettes dues aux juifs58. Ainsi, le nombre de contribuables juifs de la ville passe de vingt-deux au premier semestre 1387 à une douzaine à la fin de l’année 1389, avant leur départ – exil volontaire ou expulsion ? – estimé par Gerd Mentgen au cours du troisième trimestre de l’année 1390, entre la fin du mois de juin et le milieu du mois d’octobre. Les juifs ne furent plus jamais réadmis comme résidents à Strasbourg : ils avaient néanmoins la possibilité de venir en ville pour affaire ou autres59. Dans ces conditions, il est certain que la population de Strasbourg a vu à la fin du Moyen Âge davantage de chapeaux pointus sur le décor sculpté de la cathédrale que dans les rues de la cité.

Anmerkungen

1 J. Fritz (éd.), Urkundenbuch der Stadt Straßburg [UB Straßburg], t. 6 : Politische Urkunden von 1381-1400, Strasbourg, Trübner, 1897, no 300, p. 162-163 : « in stivallen und in judenhuten, als sie bey alden czeiten und von alters gegangen haben also, das man bey den cristen einen juden derkennen möge, als das billich ist ». Zurück zum Text

2 Élie Scheid, Histoire des juifs d’Alsace, Paris, Durlacher, 1887, p. 56, repris par Felix Singermann, Die Kennzeichnung der Juden im Mittelalter. Ein Beitrag zur sozialen Geschichte des Judentums, Berlin, Funk, 1915, p. 38. Plus récemment, Gerd Mentgen, Studien zur Geschichte der Juden im mittelalterlichen Elsaß, Hanovre, Hahn, 1995, p. 158-160. Sur la forme diplomatique du mandement, voir Ivan Hlaváček, Das Urkunden- und Kanzleiwesen des böhmischen und römischen Königs Wenzel (IV.) 1376-1419 : ein Beitrag zur spätmittelalterlichen Diplomatik, Stuttgart, Hiersemann, 1970, p. 53-55. Zurück zum Text

3 Concile de Latran IV, c. 68, in RELMIN, Le statut légal des minorités religieuses dans l’espace euro-méditerranéen (ve-xve siècle), notice no 30326, IRHT [En ligne : http://telma.irht.cnrs.fr/outils/relmin/extrait30326/] (consulté le 3 juillet 2023). Zurück zum Text

4 Mandat d’Henri III sur le port d’insigne par les juifs, in RELMIN, op. cit., notice no 252108, IRHT [En ligne : http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait252108/] (consulté le 12 décembre 2023). Zurück zum Text

5 Ulysse Robert, « Étude historique et archéologique sur la roue des Juifs depuis le xiiie siècle », Revue des études juives, 6 (1883), p. 81-95 et 7 (1883), p. 94-102 ; Danièle Sansy, « Marquer la différence : l’imposition de la rouelle aux xiiie et xive siècles », Médiévales, 41 (2001), p. 15-36, ici p. 19-20 ; Eadem, « Paul Chrétien et la rota des juifs de France », in N. Gonthier, L’Exclusion au Moyen Âge [Actes du colloque international du Centre d’Histoire médiévale (EA 3710), Lyon, 26, 27 mai 2005], Lyon, université Jean Moulin – Lyon 3, 2006, p. 27-41 ; Eadem, « Saint Louis et la rouelle des juifs », in P. Salmona, J. Sibon, Saint Louis et les juifs. Politique et idéologie sous le règne de Louis IX, Paris, Éditions du Patrimoine, Centre des monuments nationaux, 2015, p. 75-85 ; Claire Soussen, « Les vêtements des juifs dans les royaumes hispaniques : des marqueurs identitaires ? », Rives méditerranéennes, 64 (2023), p. 83-102. Zurück zum Text

6 Pour une présentation générale de l’insigne des juifs au nord des Alpes, voir : Bernward Deneke, « Die Kennzeichnung von Juden. Form und Funktion », in H. Maué, Visualisierung städtischer Ordnung. Zeichen – Abzeichen – Hoheitszeichen. Referate der interdisziplinären Tagung, gefördet von der Volkswagen-Stiftung, des Forschungsinstituts für Realienkunde am Germanischen Nationalmuseum, Nürnberg 9.-11. Oktober 1991, Nuremberg, Germanisches Nationalmuseum, 1993, p. 240-252 ; Diethard Aschoff, « Judenkennzeichnung und Judendiskriminierung in Westfalen bis zum Ende des Alten Reiches », Ashkenas. Zeitschrift für Geschichte und Kultur der Juden, 1 (1993), p. 15-47 ; D. Sansy, « Identifier les juifs dans l’espace urbain : les signes distinctifs des juifs en terre d’Empire (xiiie-xve siècles) », in Rostros judíos del Occidente medieval. XLV Semana Internacional de Estudios Medievales, Estella-Lizarra, 17/20 de julio de 2018, Pampelune, Gobierno de Navarra, 2019, p. 167-192 [En ligne : https://www.culturanavarra.es/uploads/files/SM_45_web.pdf]. Zurück zum Text

7 La réinstallation des juifs dans les principales cités de l’Oberrhein s’échelonne entre 1354 (Haguenau), 1369 (Sélestat, Strasbourg) et le milieu du xve siècle (1454, Rosheim). Zurück zum Text

8 Z. Avneri (éd.), Germania Judaica, vol. II : Von 1238 bis zur Mitte des 14. Jahrhunderts, Tübingen, Mohr, 1968 [GJ II], p. 800. Zurück zum Text

9 H. Witte et G. Wolfram (éd.), UB Straßburg, t. 5 : Politische Urkunden von 1365 bis 1380, Strasbourg, Trübner, 1896, no 832, p. 647-648. G. Mentgen, Studien zur Geschichte der Juden… op. cit., p. 137-138. Zurück zum Text

10 D. Sansy, « Identifier les juifs dans l’espace urbain… », art. cit. Zurück zum Text

11 Guido Kisch, « Jewry-Law in Medieval German Law-Books. Part II. The Legal Status of the Jews », Proceedings of the American Academy for Jewish Research, vol. 10 (1940), p. 99-184, ici p. 130-151. Voir également J. Friedrich Battenberg, « Des Kaisers Kammerknechte. Gedanken zur rechtlich-sozialen Situation der Juden in Spätmittelalter und Früher Neuzeit », Historische Zeitschrift, 245 (1987), p. 545-600 ; Dietmar Willoweit, « Verfassungsgeschichtliche Aspekte des Judenschutzes im späten Mittelalter », Ashkenaz, 9 (1999), p. 9-30 ; Alfred Haverkamp, « “Kammerknechtschaft” und “Bürgerstatus” der Juden diesseits und jenseits der Alpen während des späten Mittelalters », in M. Brenner, S. Ullmann, Die Juden in Schwaben, Munich, Oldenbourg, 2012, p. 11-40 ; Amélie Sagasser, « Négocier et contractualiser la présence juive dans les espaces germaniques », Médiévales, 86 (2024), p. 71-91. Zurück zum Text

12 F. Battenberg, « Des Kaisers Kammerknechte… », art. cit., p. 564-57 ; D. Willoweit, « Verfassungsgeschichtliche Aspekte des Judenschutzes… », art. cit., p. 25-26. G. Mentgen, Studien zur Geschichte der Juden… op. cit., p. 309-320. Zurück zum Text

13 Ibid., p. 141. Zurück zum Text

14 A. Maimon, A. M. Breuer, Y. Guggenheim (éd.), Germania Judaica, vol. III, Teilband 2 : Ortschaftsartikel Mährisch-Budwitz – Zwolle, Tübingen, Mohr, 1995 [GJ III/2], p. 1420. Zurück zum Text

15 UB Straßburg, t. 5, no 832, p. 647-648. Zurück zum Text

16 Ibid., no 938, p. 725. Zurück zum Text

17 Ibid., no 1203, p. 880-883. Zurück zum Text

18 UB Straßburg, t. 6, no 147, p. 89-93. Zurück zum Text

19 Ibid., no 234, p. 134. Zurück zum Text

20 Ibid., no 368, p. 194-195. Zurück zum Text

21 Ibid., no 300, p. 162 : « die juden unser camerknechte […] mit wate, gewant und andern unordenlichen Sachen grosse hoffart und unpilde treiben den cristen und cristenlichen glawben zu smacheit ». Zurück zum Text

22 Neithard Bulst, « Kleidung als sozialer Konfliktstoff : Probleme kleidergesetzlicher Normierung im sozialen Gefüge », Saeculum : Jahrbuch für Universalgeschichte, 44/1 (1993), p. 32-46. Idem, « Les ordonnances somptuaires en Allemagne : expression de l’ordre social urbain (xive-xvie siècle) », Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 137/3 (1993), p. 771-784. Plus récemment, embrassant de manière large et éclairante l’historiographie du vêtement, Gil Bartholeyns, « Pour une histoire explicative du vêtement. L’historiographie, le xiiie siècle social et le xvie siècle moral », in R.C. Schwinges, R. Schorta, Fashion and Clothing in Late Medieval Europe, Bâle, Schwabe, 2010, p. 209-230. Zurück zum Text

23 Tel était déjà le projet d’U. Robert, Les signes d’infamie au Moyen Âge. Juifs, sarrasins, hérétiques, lépreux, cagots et filles publiques, Paris, Honoré Champion, 1891 ; Robert Jütte, « Stigma-Symbole. Kleidung als identitätsstiftendes Merkmal bei spätmittelalterlichen und frühneuzeitlichen Randgruppen (Juden, Dirnen, Aussätzige, Bettler) », Saeculum, 44 (1993), p. 65-89. Zurück zum Text

24 Outre l’étude de Guido Kisch, « The Yellow Badge in History », Historia Judaica, 19 (1957), p. 89-146, voir également : D. Aschoff, « Judenkennzeichnung und Judendiskriminierung… », art. cit. Zurück zum Text

25 J. Brucker (éd.), Strassburger Zunft- und Polizei-Verordnungen des 14. und 15. Jahrhunderts, Strasbourg, Trübner, 1889, p. 292 ; Liselotte Constanze Eisenbart, Kleiderordnungen der deutschen Städte zwischen 1350 und 1700, ein Beitrag zur Kulturgeschichte des deutschen Bürgertums, Göttingen [et al.], Musterschmidt, 1962, p. 166. Zurück zum Text

26 Françoise Piponnier, Perrine Manne, Se vêtir au Moyen Âge, Paris, Adam Biro, 1995, p. 107-110. Sur le pourpoint, voir également Françoise Piponnier, « Une révolution dans le vêtement masculin au xive siècle », in Le vêtement. Histoire, archéologie et symbolique vestimentaires au Moyen Âge, Paris, Éditions du Léopard d’Or (Cahiers du Léopard d’Or, 1), 1989, p. 225-242. Zurück zum Text

27 S. Simonsohn (éd.), The Apostolic See and the Jews, Documents : 492-1404, Toronto, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, 1988, no 4, p. 141-143. Datée du 5 avril 1233, la lettre reprend des griefs généralement formulés par les autorités ecclésiastiques à l’encontre des juifs, en dénonçant toute forme de supériorité des juifs sur les chrétiens, l’emploi par des juifs de nourrices et servantes chrétiennes et en interdisant aux juifs de mener toute disputation religieuse avec des chrétiens. Zurück zum Text

28 Ibid., no 203, p. 209. Zurück zum Text

29 J. Aronius (éd.), Regesten zur Geschichte der Juden im fränkischen und deutschen Reiche bis zum Jahre 1273, Berlin, Leonhard Simion, 1902, no 646, p. 271-272. Zurück zum Text

30 J. F. Schannat, J. Hartzheim (éd.), Concilia Germaniae, t. 4 : Concilia 1290-1400, Cologne, Typo Viduæ Joan. Wilhelmi Krakamp, Et Hæredum Christiani Simonis, Bibliopolarum, 1761, p. 14, col. b. Repris lors du concile de la province de Mayence de 1310 (ibid., p. 208, col. b). Zurück zum Text

31 J. Aronius (éd.), Regesten zur Geschichte der Juden… op. cit., no 724, p. 302 et no 725, p. 304. Zurück zum Text

32 UB Straßburg, t. 6, no 300, p. 162 : « […] als sie [die Juden] bey alden czeiten und von alters gegangen haben also […] ». Zurück zum Text

33 Voir, par exemple, Raphael Straus, « The “Jewish Hat” as an Aspect of Social History », Jewish Social Studies, 4/1 (1942), p. 59-72. Zurück zum Text

34 Claire Soussen, « Les objets rituels des Juifs à la fin du Moyen Âge, catalyseurs des sentiments antijuifs ou fédérateurs des identités ? », Revue de l’histoire des religions, 231/4 (2014), p. 681-698 (ici p. 685). Zurück zum Text

35 Elisheva Baumgarten, « Minority Dress Codes and the Law : a Jewish-Christian Comparison », in N. Berend, Y. Hameau-Masset, C. Nemo-Pekelman, J. Tolan, Religious Minorities in Christian, Jewish and Muslim Law (5th-15th Centuries), Turnhout, Brepols, 2017, p. 288-299. Zurück zum Text

36 Elisheva Baumgarten, Practicing Piety in Medieval Ashkenaz : Men, Women, and Everyday Religious Observance, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2014, voir ici chapitre 4, p. 138-171. Zurück zum Text

37 Ibid., chapitre 5. Zurück zum Text

38 Christine Magin, « Wie es umb der iuden recht stet ». Der Status der Juden in spätmittelalterlichen deutschen Rechtsbüchern, Göttingen, Wallstein, 1999, p. 144-163 (ici p. 160). Zurück zum Text

39 Plusieurs exemples sont étudiés par Jörg R. Müller, « Sexual Relationships between Christians and Jews in Medieval Germany, According to Christian Sources », in G. Bacon [et al.], Iggud. Selected Essays in Jewish Studies, t. 2 : History of the Jewish People and Contemporary Jewish History, Jérusalem, World Union of Jewish Studies, 2009, p. 19-32. L’auteur reprend la peine de mort pour le juif de Bâle (p. 24), indiquant d’ailleurs qu’il s’agit du seul cas connu de peine de mort. Zurück zum Text

40 G. Mentgen, Studien zur Geschichte der Judenop. cit., p. 284, note 1026. La femme chrétienne était bannie temporairement de la ville. La peine de mort pour l’homme est discutée. Il pourrait s’agir, selon Hans-Jörg Gilomen (« Kooperation und Konfrontation : Juden und Christen in den spätmittelalterlichen Städten im Gebiet der heutigen Schweiz », in M. Konradt, R. C. Schwinges, Juden in ihrer Umwelt : Akkulturation des Judentums in Antike und Mittelalter, Bâle, Schwabe, 2009, p. 157-227, ici note 71, p. 171) d’une erreur de lecture (verbrannt au lieu de verbannt) : le bannissement à vie est en effet la peine indiquée, pour l’homme juif, par Hans-Rudolf Hagemann, Basler Rechtsleben im Mittelalter, t. 1, Bâle, Helbing & Lichtenhahn, 1981, p. 265. Zurück zum Text

41 Un ordre identique à celui pour Strasbourg aurait été expédié le même jour au conseil de la ville de Bâle : voir G. Mentgen, Studien zur Geschichte der Judenop. cit., p. 159, d’après Moses Ginsburger, « Die Juden in Basel », Basler Zeitschrift für Geschichte und Altertumskunde, 8 (1909), p. 391 ; A. Maimon (éd.), Germania Judaica, t. III, vol. 1, Aach-Lychen, Tübingen, Mohr, 1987 [GJ III/1], p. 83 et note 74, p. 88. Zurück zum Text

42 J. Brucker (éd.), Strassburger Zunft- und Polizei-Verordnungenop. cit., p. 292-293. Zurück zum Text

43 Il n’existe pas beaucoup d’études sur la fabrication et l’usage des bottes au Moyen Âge. Bien que ces articles concernent des bottes portées par des mineurs, ils apportent quelques informations générales : Liane Albrecht, Rengert Elburg, « Stiefel und Lersen als Bergmannsbekleidung aus dem späten 13. Jahrhundert », ArcheoMontan, 29 (2014), p. 229-237 ; Bernd Päffgen, Christian Schumacher, Martin Strassburger, « Stiefel und halbhoher Schuh als Arbeitsbekleidung der Zeit um 1400 aus dem Bergwerk Teufelsgrund im Münstertal bei Freiburg », Archäologisches Korrespondenzblatt, 40 (2010), p. 441-456. Zurück zum Text

44 Theodor Kroner, Die Geschichte der Juden in Erfurt, Erfurt, Koenig, 1884, p. 25 ; GJ III/1, p. 311. Zurück zum Text

45 Ibid., note 238, p. 235 ; Adolph Jaraczewsky, Die Geschichte der Juden in Erfurt, Erfurt, 1868, p. 37 et p. 41. Gerd Mentgen (Studien zur Geschichte der Judenop. cit., p. 159, note 212) mentionne l’ordre donné aux juifs d’Erfurt en 1389, mais sans proposer d’explication particulière. Le port de bottes est signalé aussi pour les juifs de Mulhouse dans GJ III/2, p. 895 et note 36, p. 897, d’après Simon Adler, Die Geschichte der Juden in Mülhausen i. E., Mulhouse, Ernest Meininger, 1914, p. 24. Or, S. Adler mentionne explicitement dans son texte l’ordre envoyé à Strasbourg, sans évoquer un document concernant Mulhouse. Zurück zum Text

46 I. Hlaváček, Das Urkunden- und Kanzleiwesen… op. cit., p. 399. Zurück zum Text

47 GJ III/2, p. 1318. Zurück zum Text

48 Bettina Fürderer, « Bündniskonstellationen am Oberrhein im 14. Jahrhundert aus Straßburger Perspektive », in L. Buchholzer-Rémy, O. Richard, Ligues urbaines et espace à la fin du Moyen Âge, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2012, p. 71-90 ; Duncan Hardy, « Reichsstädtische Bündnisse im Elsass als Beweise für eine “verbündende” politische Kultur am Oberrhein (ca. 1350-1500) », Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, 162 (2014), p. 95-128. Zurück zum Text

49 Odile Kammerer, Entre Vosges et Forêt-Noire. Pouvoir, terroir et villes de l’Oberrhein. 1250-1350, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2001, p. 311-313. Concernant l’historiographie de la Décapole, voir Olivier Richard, « La Décapole dans l’historiographie du Rhin supérieur », in L. Buchholzer-Rémy, O. Richard, Ligues urbaines et espace… op. cit., p. 105-119. Sur les relations entre Charles IV et les villes, voir Pierre Monnet, Charles IV. Un empereur en Europe, Paris, Fayard, 2020, p. 138-198. Zurück zum Text

50 UB Straßburg, t. 6, no 10, p. 5-6 ; no 18, p. 10-14 ; no 27, p. 17-20. L’accord avec les villes souabes est étendu à neuf ans le 15 octobre 1382 (ibid., no 107, p. 64-67). Zurück zum Text

51 P. Monnet, Charles IVop. cit., p. 72 et 194. Zurück zum Text

52 UB Straßburg, t. 6, no 212, p. 124. Francis Rapp, Le Saint Empire romain germanique. D’Otton le Grand à Charles Quint, Paris, Tallandier, 2000, p. 276-277. Zurück zum Text

53 Sur les relations entre les villes et l’empereur, voir, entre autres, Dominique Adrian, « Effets d’échelle : les villes d’Empire et la souveraineté », Histoire urbaine, hors-série no 2 (2022), p. 88-116. Zurück zum Text

54 UB Straßburg, t. 6, no 388, p. 205. Zurück zum Text

55 D. Sansy, « Identifier les juifs dans l’espace urbain… », art. cit., p. 184-186. Zurück zum Text

56 Avraham Grossman, Pious and Rebellious. Jewish Women in Medieval Europe, Chicago, The University of Chicago Press, 2004. Zurück zum Text

57 Max Ephraïm (« Histoire des juifs d’Alsace et particulièrement de Strasbourg depuis le milieu du xiiie siècle jusqu’à la fin du xive siècle », Revue des études juives, 77 [1923], p. 164, note 2) signale que la ville de Strasbourg aurait émis une ordonnance en 1387, mais la référence donnée (K. Hegel [éd.], Chroniken der oberrheinischen Städte, Strassburger Stadtchronik, Leipzig, Hirzel, 1870, t. II, p. 983) renvoie en réalité à une édition du mandement de Wenceslas. Zurück zum Text

58 G. Mentgen, Studien zur Geschichte der Judenop. cit., p. 169-179. Zurück zum Text

59 Ibid. Zurück zum Text

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gedruckte Quellen

Danièle Sansy, « Wenceslas IV et les signes distinctifs des juifs de Strasbourg (1386) », Revue du Rhin supérieur, 6 | 2024, 147-162.

Elektronische Referenz

Danièle Sansy, « Wenceslas IV et les signes distinctifs des juifs de Strasbourg (1386) », Revue du Rhin supérieur [Online], 6 | 2024, online gestellt am 16 décembre 2024, aufgerufen am 03 décembre 2025. URL : https://www.ouvroir.fr/rrs/index.php?id=479

Autor

Danièle Sansy

Maîtresse de conférences en histoire médiévale à l’université Le Havre Normandie, UMR 6266 (IDEES). Ses axes de recherche portent actuellement sur le vêtement et les marques vestimentaires de plusieurs groupes (juifs, hérétiques, prostituées) à la fin du Moyen Âge.

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