Penser l’habitabilité pour définir la moyenne montagne dans les Vosges Mosellanes

DOI : 10.57086/rrs.575

p. 99-122

Abstracts

Le massif des Vosges du Nord constitue un territoire aux identités marquées, structuré autour du Pays de Bitche et des Vosges mosellanes du sud. L’étude souligne qu’au sein du massif vosgien, les Vosges du Nord constituent un territoire à part. Elle met en évidence les crises et transitions qui ont transformé ces espaces, notamment les déterritorialisations. Toutefois, loin d’être abandonnée, cette partie de la moyenne montagne vosgienne est aujourd’hui réinvestie par ses acteurs locaux, qui œuvrent à sa revalorisation par des projets d’ingénierie territoriale. L’habitabilité et l’interconnexion entre les acteurs apparaissent comme des leviers essentiels pour renforcer l’identité et l’attractivité de ces territoires. Ainsi, la moyenne montagne est un espace habité, identifié et porteur de dynamiques collectives contribuant à sa pérennité. Ce processus innovant, illustré notamment par le programme Avenir Montagnes, montre comment les crises, les dynamiques d’acteurs et les projets territoriaux recréent un espace vivable, viable et attractif, tout en renforçant son identité et sa résilience.

The Northern Vosges range is a territory with strong identities, structured between the Pays de Bitche and the Southern Moselle Vosges. The study reminds us that within the Vosges mountains, the Northern Vosges is a territory apart. It highlights the crises and transitions that have transformed these spaces, in particular deterritorializations. However, far from being abandoned, this lower part of the Vosges mid-mountain range is being reinvested by its local actors, who are working to redevelop it through territorial engineering projects. Habitability and interconnection between the actors appear to be essential levers for strengthening the identity and attractiveness of these territories. Thus, the mid-mountain area is an inhabited space, identified and the bearer of collective dynamics contributing to its sustainability. This innovative concept reveals how crises, dynamics of actors and territorial projects including the Avenir Montagnes programme recreate a liveable, viable and attractive space, strengthening identity and resilience.

Outline

Author's notes

Ce travail a bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence nationale de la recherche au titre du Labex DRIIHM, programme « Investissements d’avenir » portant la référence ANR-11-LABX-0010.

Text

Le massif des Vosges du Nord a été qualifié de « Basses Vosges » par René Frécaut1. Ce territoire se divise en deux entités bien différenciées, chacune marquée par une identité propre : d’une part, au nord, le Pays de Bitche ou Bitcherland et d’autre part les Vosges mosellanes du Sud2 aux altitudes plus marquées constituant les contreforts du massif du Donon. Certes, ce sommet remarquable n’est plus lorrain depuis 1871, mais il est un géosymbole visuel important3 du territoire lorrain et du département de la Moselle contribuant à forger leur identité4. Ces paysages et ressources nourrissent l’identité locale, suscitent l’attachement et favorisent l’appropriation du territoire par ses habitants. Le sommet du Donon, qui marque la charnière entre les « Vosges moyennes » et les « basses Vosges », mais aussi le rocher de Dabo, constituent des géosites, protégés et valorisés. Ils deviennent les éléments d’un géopatrimoine, autrement dit un ensemble d’éléments du patrimoine naturel ayant une valeur remarquable et reconnue. Cette notion s’inscrit dans une perspective de conservation, valorisation et transmission. Les Vosges du Nord forment un massif de basse et de moyenne montagne bordant au nord les Vosges cristallines. C’est un ensemble cohérent aux altitudes modestes (1 008 mètres pour les deux plus hauts sommets du Donon et du Rocher de Mutzig) qui se prolonge au nord avec les massifs rhénans du Pfälzerwald et du Hunsrück. En cela, les Vosges du Nord peuvent être liées à la Mittelgebirge5, c’est-à-dire un espace qui peut être qualifié de « presque-montagne » ou « plus tout à fait montagne »6. Ainsi, la moyenne montagne souffre d’un déficit de représentation et de dynamisme. C’est un entre-deux impensé entre la plaine et la haute montagne. Conceptuellement l’expression « moyenne montagne » renvoie à ce qui est intermédiaire, banal, quelconque, aux caractéristiques ordinaires, communes donc assez mal définies. « Ainsi, l’image qu’elle laisse, ancrée dans les représentations des sociétés européennes, renvoie à la montagne “moyenne”, autrement dit celle qui n’est guère attractive »7.

Massif aux faciès paysagers spécifiques, les Vosges du Nord forment des reliefs au réseau hydrographique incisé dans les formations de grès, notamment la Zorn, la Sarre rouge, le Blancrupt… Les sommets aplanis et ruiniformes sont habillés par des versants relativement abrupts. Ils bordent des vallées à fond plat. C’est un relief « en creux » qui domine dans l’ensemble du massif. Cependant, au sud, la masse du Donon donne une certaine vigueur au relief avec des versants plus marqués. Au nord, malgré des altitudes plus modestes, climat et végétation spécifiques soulignent le caractère montagnard qui a valu au Pays de Bitche le surnom de « Petite Sibérie ».

Comme le précisait Annie Reffay, la moyenne montagne est « une notion complexe pouvant s’appliquer soit à la tranche d’altitudes intermédiaires d’un quelconque massif montagneux, soit à des montagnes d’élévation modeste »8. C’est sur cette définition conceptuelle que s’appuient les travaux de Pierre Bozon et al., ainsi que ceux de Lucie Bettinger et Serge Ormaux9. Les Vosges mosellanes s’inscrivent dans cette double logique. Elles constituent un massif cohérent d’altitudes modestes et elles présentent également un étagement hérité d’activités constituant des tranches d’altitudes intermédiaires. L’approche géohistorique10 permet de reconstituer l’étagement des hommes et des activités au fil du temps. Ainsi, les vallées humides et marécageuses sont plus froides que les sommets et ont longtemps été répulsives et appelées pour cette raison « Frostlöcher » (trous de gel)11. Les sommets ont accueilli de multiples activités dont les traces se retrouvent dans les châteaux troglodytiques, les basses chaumes, des terrasses culturales, des verreries itinérantes, les carrières ou les villages d’altitude aujourd’hui disparus. Il faut attendre les xviie et xviiie siècles pour observer une réorganisation du peuplement avec des villages de colonisation (Philippsbourg, Meisenthal, Mouterhouse ou encore Baerenthal). Les cours d’eau sont domestiqués (étangs, moulins, forges, prairies irriguées), rendant habitable des lieux autrefois délaissés12. Cette inversion des activités entre sommets et vallées constitue une des transitions majeures au lendemain de la guerre de Trente Ans. Elle s’observe pour les deux territoires des Vosges mosellanes comme l’a souligné Denis Mathis pour les contreforts du massif du Donon13. Elle s’accompagne, comme l’a montré Xavier Rochel pour le Pays de Bitche, d’une organisation raisonnée de l’exploitation des bois valorisés sur place par des verreries ou des charbonnières (pour les forges) ou exportés (bois dits de Hollande)14.

Caractériser le territoire des Vosges du Nord permet-il de définir la moyenne montagne ? Réciproquement, comment qualifier ce massif des Vosges du Nord dans le vocabulaire de la montagne ? Cette équation peut être résolue à partir de la question de l’habitabilité du territoire. L’habitabilité est, comme le soulignent Anne Barrioz et Lionel Laslaz15, une construction socialement et historiquement située, elle est liée au territoire. Ses caractéristiques (sociabilité, identité, proxémie, autonomie, durabilité…) s’établissent selon l’appréciation des individus, d’une communauté, d’une société, fixant ses propres normes qui peuvent être évolutives dans le temps. Elles relèvent tout à la fois des perceptions, d’un ressenti, mais aussi d’un attachement au territoire et au passé (réel ou sublimé) qui scelle une identité. Cette dernière permet alors d’innover et de construire des projets territoriaux. Le faible degré d’intégration du massif, isolé entre les anciennes régions Alsace et Lorraine, a fragilisé les formes d’organisation territoriale, entraînant des déterritorialisations qui peuvent être considérées comme des crises remettant en cause temporairement l’habitabilité du territoire. Cependant, c’est en puisant dans l’identité forte des territoires que s’organisent les transitions territoriales et que peuvent s’établir de nouvelles territorialités (reterritorialisations). Ce cycle « territoire – déterritorialisation – reterritorialisation » qui transparaît derrière la question de l’habitabilité questionne dans un contexte de marginalité et de fragilité des territoires (vieillissement, déclin démographique et économique), ainsi que dans le contexte de transitions des socio-écosystèmes. En changeant l’échelle spatiale, il questionne également les formes de gouvernance locale, régionale voire nationale. Cela concerne notamment les réponses apportées aux difficultés des populations pour trouver au sein de leur territoire des conditions satisfaisantes pour y habiter (travail, commerces, loisirs, déplacements, logements). Cette fragilisation du territoire et les difficultés d’habiter la moyenne montagne, apparaissent dans les travaux de Lucie Dupré qui souligne, pour le Pays de Bitche, les conséquences du désordre social de la nature16. Toutefois, ces territoires à la marge disposent de très fortes identités collectives (fond patrimonial riche) qui permettent tout à la fois d’établir le socle d’une identité présente et d’une néo-identité prospective et projective17. Aussi, ces deux territoires ont répondu au dispositif Avenir Montagnes pour faire face aux défis des transitions en cours. C’est à partir de ces entrées, relevant toutes de l’habitabilité, que nous allons chercher à caractériser ce territoire des Vosges mosellanes.

Les Vosges gréseuses : une moyenne montagne marginalisée et peu polarisée entre Alsace et Moselle

Les Vosges du Nord, une moyenne montagne à part… au sein du massif des Vosges

Le massif des Vosges est une chaîne hercynienne constituée de granites, de gneiss et de roches volcaniques. Comme le Massif central ou encore le Jura, il est qualifié de moyenne montagne. À sa périphérie ouest, de solides formations gréseuses bordent le massif et constituent un piémont qui s’étend du Pfälzerwald à la Vôge. Les Vosges du Nord constituent un sous-ensemble spécifique du massif vosgien et du piémont gréseux. Relief et paysage différencient les Vosges des Vosges du Nord. Marqués par de larges vallées glaciaires, les reliefs sommitaux des Vosges présentent des formes arrondies en croupes ou en ballons, qui contrastent fortement avec les tables bordées de falaises des sommets gréseux des Vosges du Nord. Bien qu’en reconquête forestière, les sommets vosgiens forment un paysage ouvert constituant les hautes-chaumes. Ces dernières sont les marqueurs d’un étagement végétatif anthropique et ont longtemps permis une économie pastorale. Le questionnement sur l’origine des hautes-chaumes a permis d’opposer les Hautes Vosges avec leur étage subalpin, au piémont et aux Vosges du Nord. L’altitude et les caractéristiques subalpines constituent pour les habitants et pour les acteurs du territoire un point de séparation et d’identification qui scindent deux populations, deux façons d’habiter et deux manières de concevoir le territoire montagnard, même si les Vosges gréseuses ont également eu des moyennes et basses-chaumes. Cette distinction entre les Hautes Vosges et les Vosges du Nord ne facilite pas la définition de la moyenne montagne et explique cette appellation de « basses montagnes ». Les Vosges du Nord se situent de surcroît dans un entre-deux (haute montagne vosgienne et plaines et plateaux lorrains ou alsaciens) et sont fragmentées en plusieurs entités telles que le Pays de Bitche, l’Alsace Bossue, le Pays de Sarrebourg… (figure 1). Les Vosges du Nord ne constituent jamais une entité territoriale en elles-mêmes. Elles sont toujours associées à des espaces de plaines, de plateaux ou de collines. Ces fragments du massif sont presque toujours en marge de petits pôles urbains (Wissembourg, Phalsbourg, Sarrebourg, Sarre-Union, Haguenau…) au débouché de routes qui traversent le massif. Cependant, malgré cette fragmentation, il existe une identité qui se manifeste à travers le cadre naturel, le mode de vie rural et leur tradition artisanale.

Figure 1. L’organisation des territoires de moyenne montagne dans les Vosges du nord

Figure 1. L’organisation des territoires de moyenne montagne dans les Vosges du nord

Conception, réalisation : Méplain Camille ; réalisation : Inkscape. Sources : IGN, PNRVN, RBMS, Avenir Montagnes.

Les Vosges mosellanes

Intégrées au massif des Vosges, les Vosges mosellanes totalisent 65 communes18. La Loi Montagne classe 10 communes dans le Pays de Bitche et 11 dans les Vosges mosellanes du Sud19. Structurellement entre les deux parties mosellanes du massif se trouve l’Alsace Bossue, parfois appelée l’Alsace d’Outre Vosges, rattachée après la Révolution à l’Alsace plutôt qu’à la Lorraine pour des questions confessionnelles.

L’appellation « Vosges mosellanes du Nord », initiée dans les années 1960-1970 en opposition aux Vosges mosellanes du Sud, ne parvient pas à se substituer au Pays de Bitche dont l’identité mémorielle, économique, culturelle, sociale est très forte. Certes, le Pays de Bitche n’est pas uniquement un territoire de montagne, il intègre à l’ouest une frange des plateaux sédimentaires. Il se subdivise en deux faciès paysagers avec une zone de transition. Le premier faciès, à l’Ouest, est dénommé pays ouvert (Imgau), en opposition avec le pays couvert (Wasgau). Le pays ouvert est un espace agricole au paysage hérité de l’openfield lorrain dont certaines communes (Rahling, Rimling, Obergailbach, Erching…) ont été intégrées au massif. La totalité du pays couvert se trouve en zone massif soulignant une délimitation relativement simple. La question de l’identité montagnarde est complexe dans la mesure où comme l’écrit Sophie de Ruffrey, le Pays de Bitche s’identifie comme un espace « mémoire”, car imprégné de tout un passé à la fois militaire et stratégique, ce qui explique la faible industrialisation de la frange frontalière […] ;terre lointaine” c’est-à-dire espace périphérique par rapport au sillon mosellan ; “espace vécu et perçu” comme un ensemble d’entités bien individualisées »20.

Les Vosges mosellanes du Sud (Pays de Sarrebourg et Pays de Phalsbourg) ont des reliefs et des altitudes plus importantes que le Pays de Bitche, certains sommets atteignent les 900 mètres (1 008 m pour le Donon). Ce territoire compte 24 communes classées dans le massif des Vosges. C’est un relief en creux marqué par les vallées des Sarre blanche, jaune et rouge et par la Zorn. Les forêts sont omniprésentes, certaines communes comme Saint-Quirin, Walscheid, Abreschviller ont des taux de boisement dépassant les 80 %21, c’est pourquoi les habitants de ce territoire ont longtemps vécu de la sylviculture. Aujourd’hui, le changement climatique questionne le devenir des essences présentes dans les Vosges mosellanes22. Cependant, bien que les paysages y soient homogènes, chaque vallée a sa propre unité (patois, religion, récit). L’espace des Vosges mosellanes du Sud est marqué par un communautarisme qui constitue une identité et confère une singularité à chaque commune. Cet attachement territorial fort s’incarne dans des géosites et géosymboles identitaires (rocher de Dabo, grotte Saint-Léon, vallée des éclusiers…), qui sont à ce titre des sites valorisés tant par les habitants que par leurs élus.

Ces deux entités différentes ont cependant des caractéristiques communes qu’il est possible d’étendre à d’autres territoires de montagne. D’abord, il s’agit d’un espace de relief, d’altitudes faibles (entre 300 m et 1 000 m) mais marqué et récurrent. Les paysages ont des similitudes, notamment une part importante de territoire forestier, boisé. Enfin, il s’agit d’un territoire habité, approprié, dans lequel les populations ont créé une identité unique et un attachement fort, conduisant à une autonomie marquée, établie conceptuellement sur des héritages et des traditions inscrites dans des récits. Le fort enracinement des populations accentue l’attachement identitaire au territoire. Si dans un contexte de crises multiples, ces faits structurants sont remis en cause (disruption) conduisant à une phase plus ou moins longue de transitions, la déterritorialisation qui s’opère accentue parallèlement l’autonomisation du territoire et conduit à des transformations profondes.

… mais dont les communes de moyennes montagne connaissent des fragilités

Les Vosges mosellanes connaissent en effet un déclin économique, un long processus de déprise agricole23 et de désindustrialisation. Spécifiquement, dans le pays de Bitche, le déclin est lié à la démilitarisation. Territoire frontalier, le Pays de Bitche a longtemps été marqué par une forte présence militaire, notamment à travers la citadelle, le camp retranché, les régiments en garnison et la ligne Maginot (figure 2).

Figure 2. Citadelle de Bitche, vestige et géosymbole du passé militaire bitchois

Figure 2. Citadelle de Bitche, vestige et géosymbole du passé militaire bitchois

Cette surmilitarisation structurait la vie économique et sociale du territoire, donc son habitabilité car elle apportait sociabilité, emplois, dynamisme24. Avec la fin du service national et le départ successif des régiments, le territoire a subi une profonde rupture, entraînant un déménagement du territoire avec un désaménagement partiel et de nombreux espaces délaissés (friches). Cette démilitarisation a marqué une bifurcation territoriale. Pour accompagner cette transition, un Plan Local de Redynamisation (PLR) a été lancé en 2011, orientant le territoire vers une transformation de son activité vers le tourisme culturel et patrimonial. Cependant, les difficultés persistent : échec partiel de la reconversion de certaines infrastructures (par exemple l’écoquartier Teyssier), déclin démographique, fermetures de commerces, de services publics et d’établissements scolaires. Le territoire subit une décroissance urbaine et économique. Ces dynamiques interrogent directement l’habitabilité, entendue comme sa capacité à offrir des conditions de vie durables, attractives et fonctionnelles à ses habitants. Si la démilitarisation a ouvert la voie à une réinvention identitaire et paysagère, elle a aussi fragilisé les conditions concrètes de l’habiter, nécessitant une reconfiguration des fonctions urbaines et sociales pour assurer un avenir viable et enviable. Ainsi, le processus de transformation du Pays de Bitche s’analyse donc en quatre temps : désaménagement, délaissement, recyclage et réaménagement (figure 3).

Figure 3. Cycle territoire, déterritorialisation, reterritorialisation

Figure 3. Cycle territoire, déterritorialisation, reterritorialisation

Conception & réalisation : C. Méplain, D. Mathis, Inkscape.

Le déclin économique a eu d’autres conséquences visibles dans les paysages. Dans le Pays de Bitche, la déprise agricole est très marquée : le recensement général agricole de 1979 dénombrait 1 038 exploitations agricoles, alors qu’en 2022, l’actuel canton n’en compte plus que 249, pour l’essentiel en Pays ouvert. Pour l’ancien canton de Bitche (le plus montagnard des trois cantons), l’érosion est significative. En 1953, il totalisait encore 628 exploitations, 167 en 1980, 151 en 1988 et seulement 22 en 2020. Par ailleurs, la crise industrielle, qui a frappé la sidérurgie et les verreries, a conduit à la disparition accélérée des ouvriers paysans ou des verriers-paysans. L’absence de remembrement et la faible mécanisation ont entraîné l’abandon des terres agricoles et plus particulièrement à partir des années 1970, les prairies irriguées des fonds de vallée. Leur disparition a conduit à un enfrichement (phase de délaissement). Dès lors, le paysage s’est refermé, l’aulnaie s’est développée (temps de recyclage), transformant l’identité paysagère. Cependant, la faiblesse des prix du foncier a favorisé des processus de cabanisations et de résidences secondaires25, installées sur des terrains de loisirs dans une démarche d’un habiter motivé par la recherche d’un érème à forte valeur environnementale. Ce processus est bien connu des territoires d’eau en Lorraine26. Cependant, cette habitabilité fondée sur la valorisation récréative du territoire repose sur un équilibre délicat : si l’enfrichement a pu représenter une opportunité, le caractère désordonné et spontané de cette nature retrouvée peut freiner l’installation de nouveaux habitants. Aussi, le Parc naturel régional des Vosges du Nord (PNRVN) a favorisé l’installation de troupeaux de races Highland Cattle destinés à maintenir le paysage ouvert (temps de recyclage, figure 3). Aujourd’hui, 80 bêtes pâturent 150 hectares pour contenir la fermeture du paysage27. Ces vaches sont devenues le symbole des vallées du Pays de Bitche. Elles sont à l’origine d’une nouvelle filière alimentaire locale et donnent une image nouvelle bien valorisée à l’office du tourisme de Bitche. Cette expérience s’est diffusée dans l’ensemble des Vosges du Nord ainsi que dans les vallées du Blancrupt et de la Sarre28. Il s’agit du temps de recyclage débouchant sur le temps du réaménagement par l’émergence d’une filière viande, qui permet d’aboutir à la revalorisation de ce terroir (figure 3).

En effet, comme le montre Lucie Dupré29, dans les Vosges du Nord, la déprise agricole et industrielle sont concomitantes et ont eu des conséquences sur les aménagements. Les deux territoires mosellans ont connu une forte proto-industrialisation (verrerie, cristallerie, forges, moulins, scierie…) qui a façonné le territoire notamment aux xviiie et xixe siècles30. Ce tissu a été fragilisé lors du xxe et xxie siècle. La désindustrialisation a conduit aux fermetures d’usines (Meisenthal, 1969 ; Lemberg, 1997 ; Baerenthal, 2003 ; Hartzviller, 2004 ; Goetzenbruck, 2005 ; Vallerysthal, 2021…) bien que le secteur industriel reste actif, développé autour de groupes de luxe (Hermès à Saint-Louis-lès-Bitche) ou d’innovation (Centre international des arts verriers à Meisenthal).

La fragilité économique de ces territoires a accentué leur marginalisation conduisant ainsi à une forme d’autonomisation. Cette situation a questionné et questionne l’habitabilité du territoire car elle impacte la qualité du cadre de vie et la capacité du territoire à faire territoire. Cependant, par la mobilisation des ressources locales de la montagne à travers des projets innovants, émerge une nouvelle définition identitaire des Vosges du Nord et une reterritorialisation qui redonnent sens et viabilité à l’habiter dans ses espaces périphériques.

(Re)définir la moyenne montagne autour de la remobilisation des ressources du territoire pour reconstruire une identité spécifique

Quelles transformations pour le Pays de Bitche ?

Les temps de récupération, de reconstruction peuvent ainsi correspondre à une approche prospective et opératoire du territoire étudiée à travers le concept d’habitabilité. Au sein du réseau des Observatoires hommes-milieux, dont l’objectif est d’interroger les fonctionnements et les transitions des socio-écosystèmes complexes au sein d’un territoire marqué par une bifurcation majeure31, Nicole Mathieu avait cherché à questionner les modes d’habiter en recentrant ces derniers sur les lieux habités en tant qu’élément déterminant des pratiques résidentielles, des activités, des déplacements, du vivre ensemble. Cette proposition est construite pour permettre d’appréhender « l’ensemble des relations évolutives qui s’établissent entre ces deux pôles généralement pensés séparément : les lieux et les milieux d’une part, les individus et les “gens” de l’autre »32.

À l’inverse, Mathis Stock envisage les pratiques habitantes comme structurantes du territoire33, en retenant l’habiter dans ces deux définitions et en adoptant l’approche de l’habitabilité du territoire telle que définie par Adrien Balocco, Aurélien Calmettes, Romain Lajarge, comme une « convivialité protégée, comme lutte contre l’inhabitable et comme construction de compromis »34. Réaffirmer une identité mise à mal par les déménagements du territoire permet, à l’échelle locale du territoire, de conserver, préserver, consolider un cadre commun par et pour les habitants permanents ou temporaires. Cela permet de vérifier que « l’habitabilité n’est pas qu’une affaire d’aménités ou d’accessibilité des lieux, mais aussi un ressenti très différent d’une personne à l’autre, et fort variable dans le temps et l’espace en fonction des capacités des sociétés à surmonter les contraintes »35, un élément central dans le processus de reterritorialisation des territoires marginalisés.

Comme il a été rappelé précédemment, le Pays de Bitche a longtemps fondé son activité économique sur l’armée et les services accompagnant le camp militaire. Ainsi, après le départ du 57e régiment d’artillerie, élus, habitants, scientifiques ont tenté de construire une transition. La signature du PLR de la Moselle en 2011 a permis d’accompagner la reconversion fonctionnelle du territoire. Initiée en 2010, la création de l’office de tourisme intercommunal du Pays de Bitche trouve un relais financier avec le PLR. Ce projet devait permettre de construire une structure centrale en regroupant les trois offices de tourisme de Bitche, Baerenthal et Philippsbourg. Inauguré en novembre 2013, le bâtiment d’accueil de l’office est devenu une des vitrines de l’offre touristique du Pays de Bitche. Ce centre multiservice permet l’accueil, l’information et la promotion, faisant de la ville une des portes du territoire.

Ce lieu symbolise alors la transition fonctionnelle du territoire désormais en phase de transformation. Cette nouvelle centralité traduit également la transformation de la petite ville qui a subi la crise de la démilitarisation même incomplète et des déménagements de l’État. Elle permet d’assurer la promotion d’un territoire touristique complexe composé :

  • d’un axe militaire qui prend appui sur la citadelle de Bitche et les ouvrages Maginot (fort du Simmserhof, fort du Casso) et du MAUSA (musée d’art urbain et du street art) installé dans l’ancien quartier du 4e régiment des Cuirassiers. MAUSA on the Bitche est une résidence d’artiste qui a pour objectif de réveiller le patrimoine militaire « endormi ». Il s’agit ici du processus d’artialisation du territoire qui permet ainsi d’assurer la valorisation des héritages militaires à travers l’art et la culture36.
  • d’un axe touristique artistique et culturel des savoir-faire développé autour de la démarche cheminatoire des « Arts du feu » et notamment du site industriel de Saint-Louis-lès-Bitche et des sites hybrides de Meisenthal (Centre international des arts verriers) et de Soucht (musée de la Saboterie)37 (figure 1).
  • d’un axe loisirs de plein air qui repose sur le riche patrimoine identitaire, valorisé en bases de loisirs plus ou moins structurées (étang de Mouterhouse, étang d’Halspelschiedt, étang de Baerenthal…), en location individuelle et en résidences secondaires ; randonnées pédestres ou cyclistes, excursions notamment du géopatrimoine, escalades, pêche, chasses ou encore vélorail soulignent les multiples usages du massif. Ces derniers génèrent parfois des situations de conflits d’usage notamment lorsque la population ressent une trop forte présence touristique (départ des randonnées au Petit Colorado à Roppeviller, figure 4).

Ainsi, cette nouvelle instance, à la fois fonctionnelle et symbolique, participe à la redéfinition de l’habitabilité en restructurant l’offre de services, en renforçant l’attractivité et en donnant une cohérence à une offre touristique fragmentée. Cela contribue à recréer des conditions de vie et de séjours favorables, en soutenant une dynamique locale visant à rendre le territoire vivable, viable et enviable pour ses visiteurs avec un effet induit pour ses habitants.

Figure 4. Géosites et géosymboles du Pays de Bitche, Vosges du Nord

Figure 4. Géosites et géosymboles du Pays de Bitche, Vosges du Nord

Cette dynamique de consolidation touristique s’inscrit parfaitement dans la logique des réformes territoriales avec le redécoupage cantonal (fusion des cantons de Rohrbach-lès-Bitche, Bitche et Volmunster) et par application de la loi NOTRe avec le transfert de la compétence touristique aux EPCI. L’office de tourisme de Bitche a été labellisé en 2016 en recevant la marque « Qualité Tourisme », renouvelée en 2020. Ce service doit permettre de répondre aux besoins croissants des visiteurs et touristes qui pratiquent alors le territoire. En 2018, 482 770 visiteurs ont été recensés, générant 25,4 M€ de retombées économiques. Ces activités représentent 450 emplois. La crise de la Covid-19 a eu un impact non négligeable sur les activités touristiques de la communauté de communes du Pays de Bitche. L’année 2020 aurait dû être une année touristique grâce à la commémoration du siège de Bitche (8 août 1870–26 mars 1871). Cependant, les commémorations et l’attractivité étaient en berne du fait des restrictions sanitaires, conduisant à l’effondrement de l’attractivité touristique. De plus, il apparaît que certains des sites touristiques du Pays de Bitche ne parviennent pas à retrouver une situation d’avant Covid, ce qui inquiète les professionnels mais aussi les élus locaux, qui cherchent alors à redynamiser l’espace et l’offre touristique. Ainsi, la transition vers le tourisme durable pour développer l’attractivité des zones de montagne et moyenne montagne concourt à exposer ce territoire déjà fragile à un autre aléa. En effet, cette dépendance aux retombées touristiques affecte directement l’habitabilité du territoire car si le tourisme est capable de générer revenus et emplois, il expose aussi la population locale à une certaine précarité : vulnérabilités face aux crises, formes de spécialisation du territoire, conflits… Ainsi, le défi réside dans la capacité du territoire et de ses acteurs à articuler développement touristique et qualité de vie pour les habitants, afin de construire une habitabilité durable et résiliente.

Le Programme Avenir Montagnes

Le programme Avenir Montagnes, instauré en 2021, a pour objectif de présenter un grand plan pour construire un (nouveau) modèle touristique plus diversifié, plus résilient et plus durable. Il s’adresse en premier lieu aux territoires de montagne concernés par le changement climatique et notamment le déclin de l’activité de sports d’hiver, en particulier les stations et infrastructures de moyenne altitude mais plus globalement l’ensemble des massifs. Il peut concerner l’ensemble des communes classées en zone de massif de montagne. Sept territoires du massif des Vosges (187 à l’échelle nationale) ont été retenus par l’Agence de la cohésion des territoires pour bénéficier du programme. Ces lauréats disposent d’un soutien financier assuré par la Banque des territoires et d’un accompagnement dans le cadre Avenir Montagnes Ingénierie pour donner aux collectivités territoriales des moyens de développer leurs territoires selon un cahier des charges précis. Pour les collectivités territoriales et les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux (PETR) du PNRVN, le programme permet de soutenir la politique locale au sein du massif. Bien que le programme soit national, la définition des projets relève d’abord du local. La communauté de communes du Pays de Bitche est intégrée pour les Vosges mosellanes du Nord et partiellement hors du périmètre du PNRVN ; le PETR Sarrebourg, qui prend appui sur la Réserve de Biosphère Moselle Sud (RBMS), est également lauréat pour les Vosges mosellanes du Sud. Dans les deux cas, il s’agit bien de conforter la spécificité du territoire de la moyenne montagne mosellane. Les acteurs des territoires se saisissent de ces opportunités nationales et collaborent afin de réaliser des projets. Il trouve un relais dans le cadre du Plan Interrégional État-Région 2021-2027.

Pour les Vosges mosellanes du Nord, en 2022, le soutien financier au titre d’Avenir Montagnes Investissement, assuré par le Commissariat au Massif, a financé l’extension et les aménagements extérieurs de la Maison Homme-Nature à Sturzelbronn et la requalification du camping du château du Fleckenstein. Cependant, dès 2023, la question de la requalification touristique de l’ouvrage militaire du Simserhof a occupé la collectivité territoriale. Le transfert de la gestion touristique de l’ouvrage à la Communauté de Communes, le contexte Covid et la forte concurrence des autres sites Maginot touristifiés, ont fait s’effondrer la fréquentation. Pour cette raison, la communauté de communes a saisi l’opportunité du projet Avenir Montagnes en 2023 afin de bénéficier d’une aide pour renouveler le site (réalisation de travaux) et redynamiser l’attractivité. Ce projet de restructuration a permis de mettre en collaboration plusieurs acteurs de la communauté de communes, le PNRVN, le commissariat des Vosges, l’association des Amis du Simserhof pour élaborer des propositions de développement. Un dossier est actuellement en cours de constitution afin de répondre au cahier des charges du projet Avenir Montagnes et bénéficier d’aides pour financer les travaux. L’objectif, pour la communauté de communes, désormais gestionnaire du site, est de retrouver des chiffres d’avant 2012 soit entre 30 et 40 000 visiteurs par an.

Cependant, c’est dans les Vosges mosellanes du Sud que le projet le plus intégrateur a été pensé et construit selon une approche cheminatoire. La création d’un chemin de grande randonnée (GR) de Pays Erckmann-Chatrian a pour objectif de promouvoir l’écotourisme sur un ensemble territorial composé de la communauté de communes du Pays de Phalsbourg, de Sarrebourg Moselle Sud ainsi que du PETR du Pays de Sarrebourg (figure 1). Bien que le projet Avenir Montagnes soit descendant, ce sont les collectivités territoriales qui ont les compétences territoriales afin d’animer le tourisme selon la loi NOTRe. Dès lors, les élus locaux se sont saisis du projet Avenir Montagnes pour construire leur projet et le mettre en pratique dans leurs territoires. L’objectif des élus était d’élaborer un projet d’itinérance afin de mettre en valeur l’espace et de générer des animations de territoire. Pour cela, un dossier de candidature a été réalisé afin que l’espace soit reconnu comme territoire pilote et donc bénéficier de subventions. Ce projet de GR de Pays doit se lire dans une approche globale qui inclut toutes les dimensions d’un territoire touristique qui superpose l’habitabilité résidentielle des habitants permanents et l’habitabilité récréative car il ne se borne pas à l’élaboration d’un itinéraire mais prend aussi en compte l’hébergement, l’animation de territoire, la communication, l’alimentation, l’acheminement… L’ensemble doit profiter au territoire afin de limiter la déprise. Ce projet s’insère dans une double volonté des acteurs locaux qui cherchent à valoriser le territoire (ses aménités et atouts) et à surmonter les contraintes territoriales (déprise, vieillissement, services manquants). C’est donc un entre-deux coopératif qui doit permettre au territoire de surmonter ses crises et de construire, en s’appuyant sur ses géorécits (constitués des ressources patrimoniales) d’établir une écomodernité38. Ces connexions d’acteurs ainsi que cette volonté de surmonter les crises montrent d’une part la capacité des habitants, qui surmontent la déterritorialisation d’un territoire en crise pour (re)faire un territoire viable et vivable, et d’autre part, l’objectif de durabilité, accentué par le contexte de changement et de réchauffement climatique.

Le territoire des Vosges mosellanes du Sud s’est saisi des enjeux de reterritorialisation pour réaménager son espace et assurer une meilleure cohésion entre deux territoires souvent opposés ; la « plaine » et la montagne. L’objectif est d’élaborer une transition vers un tourisme local attractif. Le projet de GR incarne cette volonté de nouvelles trajectoires et d’innovation territoriale. L’espace concerné par le GR fait preuve d’une réappropriation par les différents aménagements (par exemple le balisage du sentier et sa signalétique) et une mise en valeur (panneaux informatifs, communication…) par la rencontre des populations locales et des présidents d’associations de randonnées (Club Vosgien et Fédération française de randonnée).

Il apparaît que l’espace du massif des Vosges est un centre important pour la randonnée qui participe à la convivialité de l’espace. Outre l’utilisation d’une pratique socioculturelle propre à ce territoire, c’est aussi un pan culturel de l’espace qui a été mis en avant par le projet par son nom et son tracé. En effet, Émile Erckmann (1822-1899) et Alexandre Chatrian (1826-1890) sont deux auteurs lorrains mosellans qui ont formé un duo fusionnel faisant disparaître leurs individualités. Leurs ouvrages sont le fruit d’une collaboration (à l’image de ce GR) qui a saisi l’âme de la Lorraine, ses paysages et ses traditions mais aussi les tensions historiques et religieuses qui l’ont traversée. Les récits historiques et populaires qui en ont découlé, ont érigé les auteurs en figures littéraires régionales. C’est pourquoi les élus ont décidé de donner ce nom au GR qui traverse les villages natals des auteurs. Ce n’est pas le seul pan culturel du territoire mis en avant : le GR valorise les paysages, les vestiges (romains, médiévaux, industriels), les traditions, les savoir-faire et les éléments du géopatrimoine dont le rocher du Dabo. Ainsi, le territoire est restructuré par la valorisation culturelle et l’exploitation des ressources locales39. D’autre part, dans la mise en œuvre du GR, le PETR Sarrebourg a cherché à nouer des relations avec les territoires voisins et notamment le PNRVN. La démarche vise à mutualiser des retours d’expérience notamment sur l’accueil des touristes et des pratiques des sports de plein air. Ces collaborations renforcent l’unité du massif autour de problématiques communes.

La marginalisation des territoires de la moyenne montagne peut représenter une opportunité tout comme l’autonomisation car elle favorise l’émergence de nouvelles dynamiques. Ainsi, les Vosges mosellanes définies par des crises apparaissent comme des territoires d’innovation pour redevenir viables, vivables et enviables, autrement dit pour renforcer l’habitabilité du territoire. En effet, la création d’un GR appelle la structuration de services aux alentours (mobilités, restauration, accueil…) qui génèrent des retombées économiques pour les locaux (emplois saisonniers, ventes de produits locaux…). La moyenne montagne est donc une marge riche en potentialités et en devenir40. Le programme Avenir Montagnes permet aux Vosges du Nord de passer d’un territoire délaissé à un territoire (re)découvert.

Les coopérations transfrontalières

La moyenne montagne s’entend aussi à travers la coopération des acteurs (habitants, associations d’habitants, élus locaux, élus nationaux et parfois internationaux). En effet, les territoires des Vosges du Nord sont appropriés et leurs habitants en sont fiers. Investis, ils refusent de voir un pan de leur histoire s’effacer, ce qui s’observe dans la voix de leurs élus locaux, du PNRVN, des associations… Dans le cadre de la gestion du territoire montagnard des Vosges du Nord, des logiques de coopération par similarité voire par sympathie sont mises en œuvre telle que la Réserve de biosphère Vosges du Nord-Pfälzerwald (Réserve de biosphère transfrontalière, RBT) (figure 1), reconnue et labellisée par l’UNESCO en 1995. C’est la première réserve de biosphère transfrontalière en Europe. D’une superficie de 3 105 km² (1 800 km² sur le territoire allemand et 1 305 km² sur le territoire français), elle permet d’établir une coopération entre la réserve de biosphère du Pfälzerwald (1992) et celle des Vosges du Nord (1998). Les caractéristiques communes, qu’elles soient géologiques, liées aux patrimoines naturels, historiques et culturels, ou au niveau des paysages (notamment par le faciès forestier) de ce fragment de la Mittelgebirge constituent des similarités qui permettent une gestion concertée. Ainsi, la RBT est inscrite, au sein du programme scientifique (Man and Biosphere, MAB), dans une démarche durable et elle accompagne de manière prospective les changements et les interactions entre systèmes sociaux et écologiques, ce qui traduit finalement la question des modes d’habiter le territoire soit de manière permanente, soit de manière temporaire. Malgré des synergies encore fragiles, les caractéristiques qui définissent l’identité de cette zone de montagne, ont permis d’établir plusieurs projets phares : la réintroduction du lynx boréal initiée en 2016, la protection et gestion durable des forêts qui questionne aujourd’hui l’acceptabilité de la « libre-évolution » au sein du massif forestier, enfin la protection des cours d’eau et zones humides, en mettant en œuvre des biocorridors transfrontaliers (assurés dans le projet Life). Ces jalons constituent les premiers leviers de réflexions autour des éléments identitaires (géosites, géopatrimoines, gestion durable du tourisme, de l’habiter et de l’habitabilité récréative). En mettant en œuvre le projet INTERREG « Espèces animales en danger » et en développant le programme ECOSERV sur les services écosystémiques la RBT tend à créer un territoire durable. Afin d’assurer un territoire plus vivable, la RBT a développé son action dans la promotion d’un tourisme durable, ainsi que dans la connaissance et la reconnaissance de filières courtes mises en œuvre dans le cadre du projet LEADER, notamment en organisant des marchés transfrontaliers. Ces points ont été valorisés pour assurer la reconduite de la RBT en 2022. Ce territoire est structuré en trois zones interdépendantes :

  • les aires centrales aux écosystèmes strictement protégés (conservation des paysages, des écosystèmes, des espèces et de la variabilité génétique) ;
  • les zones tampons accompagnent les aires centrales, limitent les activités humaines aux pratiques écologiquement viables ;
  • la zone de transition régule les activités dans une logique de développement soutenable.

Ainsi, la coopération entre la réserve de biosphère du Pfälzerwald (1992) et celle des Vosges du Nord (1998) montre l’importance de l’interconnexion des territoires de moyenne montagne au nom d’un même objectif : garantir l’habitabilité d’un territoire fragilisé et fragile en organisant par des projets coopératifs de nouvelles territorialités.

Conclusion

Cette étude a permis de caractériser pleinement ce que sont les moyennes montagnes des Vosges du Nord incarnées dans les communes de montagne du Pays de Bitche et de la Moselle Sud. Loin de l’image d’espace d’entre-deux, marginalisé et peu enviable, elles constituent un territoire à l’identité affirmée et approprié par ses habitants. L’analyse des disruptions a mis en évidence les crises qui ont traversé et traversent encore ces territoires en s’appuyant sur le triptyque territoire déterritorialisation – reterritorialisation. Elles ont fragilisé la moyenne montagne sans pour autant entacher son identité. Enfin, les exemples du Pays de Bitche et de la Moselle Sud ont montré que la moyenne montagne est un territoire investi par ses acteurs (élus, habitants, associations). Ces acteurs, grâce à leurs dynamiques collectives, créent des interconnexions au service de la (re)valorisation du territoire. Ces projets d’ingénierie territoriale mobilisent l’identité spécifique et contribuent à renforcer son habitabilité.

L’habitabilité de la moyenne montagne se manifeste différemment dans le temps et dans l’espace, en fonction des lieux, des individus, des activités et de leur capital spatial (ressource, mobilités, convivialité, accessibilité). Elle est particulièrement visible dans ce territoire car elle est le fruit et le germe d’une logique qui fait de l’espace une capacité41 toujours dans une dynamique de valorisation de son identité propre. Ce sont ces connexions entre les acteurs qui permettent de faire de l’espace marginal une potentialité. Dans les Vosges du Nord, l’espace de moyenne montagne périphérique n’est plus seulement un cadre, mais devient une capacité en perpétuelle (re)valorisation, portée par une identité locale réaffirmée. Comme nous l’avons montré, ce territoire valorise et construit une habitabilité récréative, fondée sur l’engagement des habitants, des associations et des élus. Ces derniers s’appuient sur le potentiel du patrimoine culturel et du milieu naturel ainsi que sur des structures administratives permettant de concrétiser les projets et d’accompagner les processus de reterritorialisation. Ainsi, la moyenne montagne, longtemps perçue comme un « entre-deux » n’est plus à envisager comme une marge répulsive, mais comme un espace riche en potentialités attractives et résilientes.

L’habitabilité et l’interconnexion apparaissent ainsi comme des éléments clés pour redéfinir et repenser les territoires de moyenne montagne car elles font de la moyenne montagne un territoire habitable, identifié, identifiable et investi par les habitants permanents comme temporaires.

Notes

1 René Frécaut (dir.), Géographie de la Lorraine, Nancy/Metz, Presses Universitaires de Nancy/Éditions Serpenoise, 1983. Return to text

2 La dénomination géographique et opératoire peut être attribuée à Pierre Messmer, Premier ministre (1972-1974), député de Moselle (1974-1988) et maire de Sarrebourg (1971-1989). Return to text

3 Joël Bonnemaison (1981) définit le géosymbole à partir de ses travaux sur les espaces mélanésiens comme « un lieu, un itinéraire, une étendue qui, pour des raisons religieuses, politiques ou culturelles prend aux yeux de certains peuples et groupes ethniques, une dimension symbolique qui les conforte dans leur identité ». Joël Bonnemaison, « Voyage autour du territoire », L’Espace géographique, no 4 (1981), p. 249-262. Return to text

4 Bernard Debarbieux, « haut lieu », in Jacques Lévy et Michel Lussault (dir.), Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés, Paris, Belin, 2003 (nouvelle édition revue et augmentée 2013), p. 448-449. Return to text

5 Herbert Liedtke, Michel Deshaies, Patrice Gamez, Dominique Harmand, Hubertus Preusser, Die Oberflächenformen in der Grenzregion Saarland – Lothringen – Luxemburg / Les formes de relief dans la région frontaliere Sarre – Lorraine – Luxembourg, Sarrebruck/Leipzig, Institut für Landeskunde im Saarland/Deutsche Akademie für Landeskunde, 2010. Return to text

6 Anne Sgard, Sylvie Duvillard, Cécile Fauvel, Romain Lajarge, « La moyenne montagne n’est plus ce qu’elle était. Le PNR de Chartreuse face à la pression urbaine », in Alain Berger, Pascal Chevalier, Geneviève Cortes et al. (dir.), Héritages et trajectoires rurales en Europe, Paris, L’Harmattan, 2009. Return to text

7 A. Sgard, S. Duvillard, C. Fauvel, R. Lajarge, « La moyenne montagne n’est plus ce qu’elle était… », art. cit. Return to text

8 Annie Reffay, Les Montagnes de l’Irlande septentrionale : contribution à la géographie physique de la montagne atlantique…, thèse ès lettres, Université de Grenoble I, 1972. Return to text

9 Pierre Bozon, Max Derruau, Annie Reffay, Bernard Valadas, « La moyenne montagne. Essai de définition, milieux physiques, typologie (Middle moutain, as a whole) », Bulletin de l’Association de géographes français, 57e année, n° 468-469 (mars-avril 1980), p. 157-172 [En ligne : https://doi.org/10.3406/bagf.1980.5174] ; Lucie Bettinger et Serge Ormaux, « La moyenne montagne européenne, approche d’un concept-problème à partir de l’exemple français », Insaniyat / إنسانيات, p. 17-39 [URL : https://doi.org/10.4000/insaniyat.12942]. Return to text

10 La géohistoire est comme l’écrit Nicolas Jacob-Rousseau « une tentative de restituer à la fois la dynamique et la structuration des milieux ou des territoires sur le temps long » ; Nicolas Jacob-Rousseau, « Géohistoire/géo-histoire : quelles méthodes pour quel récit ? », Géocarrefour, vol. 84/4 (2009), mis en ligne le 15 février 2010 [En ligne : https://doi.org/10.4000/geocarrefour.7598]. Return to text

11 René Engel, Edouard Kapp, « Les Vosges du Nord », Bulletin de la Société Botanique de France (1959), p. 105-111. Return to text

12 Denis Mathis, Xavier Rochel, Pierric Calenge, Laurent Jalabert, Stéphane Cordier, Camille Méplain, Anne Mathis, « What could be the future of abandoned forges in the Bitche Country? », International Symposium of LabEx DRIIHM 2025, juin 2025, Brest, France. Return to text

13 Denis Mathis, « Dynamique des paysages du massif du Donon et de ses périphéries mosellanes », in Andrée Corvol et al. (dir.), Forêt et montagne, Paris, L’Harmattan, 2015, p. 383-398. Return to text

14 Xavier Rochel, « Une biogéographie historique. Forêts et industries dans le comté de Bitche au xviiie siècle », Histoire & Mesure, vol. XXXII/2 (2017), p. 9-38. Return to text

15 Anne Barrioz et Lionel Laslaz, « Habitabilité : tour d’horizon d’une notion et de ses limites », Géoconfluences (janvier 2025) [En ligne : https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-thematiques/epistemo/articles/habitabilite]. Return to text

16 Lucie Dupré, « Des friches : le désordre social de la nature », Terrain, 44 (2005) [En ligne : https://doi.org/10.4000/terrain.2488]. Return to text

17 Stéphane Héritier, « Le patrimoine comme chronogenèse. Réflexions sur l’espace et le temps », Annales de géographie, n° 689/1 (2013), p. 3-23 [DOI : https://doi.org/10.3917/ag.689.0003]. Return to text

18 Le massif englobe, non seulement les zones de montagne, mais aussi les zones qui leur sont immédiatement contiguës : piémonts, voire plaines si ces dernières assurent la continuité du massif. La notion de massif permet d’avoir une entité administrative compétente pour mener à bien la politique de la montagne. Return to text

19 La loi no 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne modifiée par la loi no 2016-1888 du 28 décembre 2016, définit les zones de montagne en fonction de handicaps significatifs entraînant des conditions de vie plus difficiles et restreignant l’exercice de certaines activités économiques. Les critères retenus sont soit l’altitude et/ou les conditions climatiques très difficiles se traduisant par une période de végétation sensiblement raccourcie ; soit une altitude moindre, mais de fortes pentes qui limitent la mécanisation ; soit la combinaison de ces deux facteurs. Chaque zone de montagne est délimitée par arrêté interministériel et rattachée par décret à un massif. Return to text

20 Sophie De Ruffray, « Contribution à l’élaboration d’une méthodologie de développement local et à la conception d’un outil d’aide à la décision : application au pays de Bitche », Revue Géographique de l’Est, t. 36, no 3-4 (1996), p. 291-313, citation p. 300 [DOI : https://doi.org/10.3406/rgest.1996.2317]. Return to text

21 Le taux moyen en Moselle est de 25 %. Return to text

22 Jean-Pierre Renaud, « Les forêts et la filière bois dans le Grand Est face aux conséquences des changements climatiques : menaces et perspectives », Annales des Mines – Responsabilité & environnement, no 115/3 (2024), p. 117-123 [En ligne : https://stm.cairn.info/revue-responsabilite-et-environnement-2024-3-page-117]. Return to text

23 Fabien Knittel, Marc Benoit, « Paysages et systèmes agraires dans les Vosges depuis le xixe siècle : changements majeurs », in Le paysage d’aujourd’hui à hier, d’hier à aujourd’hui. Actes du 135e Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, « Paysages », Neuchâtel, 2010, Paris : Éditions du CTHS, 2011, p. 57-66 [En ligne : https://www.persee.fr/doc/acths_1764-7355_2011_act_135_1_2055]. Return to text

24 Fabien Hein (dir.), Le Pays de Bitche, un territoire en mutation, Presses universitaires du Bitcherland, 2024 [En ligne : https://hal.science/hal-04500258]. Return to text

25 Claire Labrue, « Le massif, ses marges et la préoccupation d’enfermement de l’habitat. Exemple des Vosges du Nord », Revue géographique de l’Est, vol. 49, no 2-3 (2009) [En ligne : https://doi.org/10.4000/rge.2007]. Return to text

26 Denis Mathis, « Quelles trajectoires pour les territoires ruraux d’étangs en Lorraine (1970 à nos jours) ? », Belgeo, 4 (2016) [En ligne : https://doi.org/10.4000/belgeo.20254]. Return to text

27 Camille Méplain, Anne Mathis, « Tasting the landscape: From abandoned lands to the dinner table », International Symposium of LabEx DRIIHM 2025, juin 2025, Brest, France. Return to text

28 D. Mathis, « Dynamique des paysages du massif du Donon… », art. cit. Return to text

29 L. Dupré, « Des friches : le désordre social de la nature », art. cit. Return to text

30 Camille Méplain, Denis Mathis, Laurent Jalabert, « Géohistoire des savoir-faire du Pays de Bitche », in Aurélie Michel, Nadège Mariotti, Simon Edelblutte, Denis Mathis (dir.), Les territoires des savoir-faire, Éditions Le Bord de l’Eau (à paraître). Return to text

31 Robert Chenorkian, « Les Observatoires Hommes-Milieux : un nouveau dispositif pour une approche intégrante des interactions environnements-sociétés et de leurs dynamiques », Sud-Ouest européen, 33 (2012) [En ligne : https://doi.org/10.4000/soe.159]. Return to text

32 Nicole Mathieu, « Mode d’habiter : un concept à l’essai pour penser les interactions hommes-milieux », in Robert Chenorkian et Samuel Robert (dir.), Les interactions hommes-milieux, [Versailles], Éditions Quæ, 2014, p. 97-130 [DOI : https://doi.org/10.3917/quae.cheno.2014.01.0097]. Return to text

33 Mathis Stock, « L’habiter comme pratique des lieux géographiques », EspacesTemps.net, 2004 [En ligne : https://www.espacestemps.net/articles/habiter-comme-pratique-des-lieux-geographiques/]. Return to text

34 Adrien Balocco, Aurélien Calmettes, Romain Lajarge, « Les sciences territoriales et la question de l’habitabilité ». CIST 2014 – « Fronts et frontières des sciences du territoire », Collège international des sciences du territoire (CIST), mars 2014, Paris, France, p. 12-17. Return to text

35 A. Barrioz et L. Laslaz, « Habitabilité : tour d’horizon d’une notion et de ses limites », art. cit. Return to text

36 Denis Mathis, Emmanuel Chiffre, Tanguy Niederlander, Anne Mathis, « Le tourisme militaire : une forme de reterritorialisation », in F. Hein (dir.), Le Pays de Bitche…, op. cit., p. 162-166 [En ligne : https://hal.science/hal-04542736]. Return to text

37 C. Méplain, D. Mathis, L. Jalabert, « Géohistoire des savoir-faire du Pays de Bitche », art. cit. Return to text

38 Jean Corneloup, « Conclusion de partie. L’écomodernité, un référentiel transitionnel », in La montagne récréative. Une transition en chemin, Fontaine/Grenoble, Presses universitaires de Grenoble/UGA éditions, 2023, p. 205-206. Return to text

39 Richard Laganier, Yvette Veyret, « Introduction à une géographie de l’environnement », Bulletin de l’association de géographes français, 101/4 (2024), mis en ligne le 31 décembre 2024 [En ligne : https://doi.org/10.4000/13cv8]. Return to text

40 Brigitte Prost, « Marge et dynamique territoriale », Géocarrefour, vol. 79/2 (2004), p. 175-182. Return to text

41 Alberto Corsin Jimenez, « On Space as a Capacity », Journal of the Royal Anthropological Institute, no 9 (2003), p. 137-153. Return to text

Illustrations

  • Figure 1. L’organisation des territoires de moyenne montagne dans les Vosges du nord

    Figure 1. L’organisation des territoires de moyenne montagne dans les Vosges du nord

    Conception, réalisation : Méplain Camille ; réalisation : Inkscape. Sources : IGN, PNRVN, RBMS, Avenir Montagnes.

  • Figure 2. Citadelle de Bitche, vestige et géosymbole du passé militaire bitchois

    Figure 2. Citadelle de Bitche, vestige et géosymbole du passé militaire bitchois

  • Figure 3. Cycle territoire, déterritorialisation, reterritorialisation

    Figure 3. Cycle territoire, déterritorialisation, reterritorialisation

    Conception & réalisation : C. Méplain, D. Mathis, Inkscape.

  • Figure 4. Géosites et géosymboles du Pays de Bitche, Vosges du Nord

    Figure 4. Géosites et géosymboles du Pays de Bitche, Vosges du Nord

References

Bibliographical reference

Camille Méplain and Denis Mathis, « Penser l’habitabilité pour définir la moyenne montagne dans les Vosges Mosellanes », Revue du Rhin supérieur, 7 | 2025, 99-122.

Electronic reference

Camille Méplain and Denis Mathis, « Penser l’habitabilité pour définir la moyenne montagne dans les Vosges Mosellanes », Revue du Rhin supérieur [Online], 7 | 2025, Online since 15 décembre 2025, connection on 16 décembre 2025. URL : https://www.ouvroir.fr/rrs/index.php?id=575

Authors

Camille Méplain

Doctorante en géographie au sein du laboratoire LOTERR de l’université de Lorraine et professeure certifiée d’histoire-géographie. Ses recherches portent sur l’habitabilité dans le massif des Vosges, explorant comment ces territoires peuvent s’adapter aux changements climatiques et surmonter les crises actuelles en valorisant leur identité locale. Elle s’intéresse particulièrement aux savoir-faire traditionnels et à leur rôle potentiel dans la reterritorialisation et la revitalisation économique de ces régions.

Denis Mathis

Maître de conférences en géographie à l’université de Lorraine. Ses recherches actuelles se concentrent sur les transitions des paysages, des géosystèmes et des anthroposystèmes, adoptant une approche de géographie historique et rétrospective. Il s’intéresse notamment aux hydrosystèmes, à la géographie militaire, ainsi qu’à la géographie rurale et agraire. Denis Mathis est le directeur de l’OHM Pays de Bitche.

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