Femmes païennes. Redéfinir la spiritualité grâce à une divinité féminine

DOI : 10.57086/radar.934

p. 20-40

Résumés

Cet article explore la spiritualité dans l’art comme une forme d’empowerment pour les femmes marginalisées dans les cultes religieux occidentaux. Ce phénomène de marginalisation a été réinvesti lors de la seconde vague féministe des années 1960, et a donné lieu à l’émergence d’une nouvelle figure spirituelle féminine : la Déesse. Cette figure génère un mouvement à la fois spirituel et contre-symbolique, qui offre aux femmes croyantes et non croyantes un espace libéré des dynamiques religieuses patriarcales. Plus en accord avec leurs principes, ce courant permet aux femmes une liberté de leur corps et de leur sexualité, ainsi qu’une inclusivité qui n’était alors pas possible avec les religions monothéistes. Dans cet article, Marine Cortese étudie des artistes contemporaines des années 1970 à 1980 qui ont revalorisé les mythes, les rituels et le corps comme des espaces sacrés. Leur pratique entend construire une communauté spirituelle qui redéfinit la féminité et conteste les mécanismes oppressifs, liés à la prédominance masculine dans les religions monothéistes. En offrant aux femmes une alternative à la domination religieuse masculine, les artistes redéfinissent la spiritualité comme un espace d’expression artistique, de résistance et de transformation culturelle.

This article explores spirituality in art as a form of empowerment for women marginalized within Western religious traditions. This phenomenon of marginalization was revisited during the second wave of feminism in the 1960s, leading to the emergence of a new female spiritual figure: the Goddess. This figure gave rise to a movement that is both spiritual and counter-symbolic, providing both religious and non-religious women with a space free from patriarchal religious dynamics. More aligned with their values, this movement grants women bodily and sexual autonomy, as well as a level of inclusivity that was previously unattainable within monotheistic religions. In this article, Marine Cortese examines contemporary female artists from the 1970s to the 1980s who revalorized myths, rituals, and the body as sacred spaces. Their artistic practices aim to build a spiritual community that redefines femininity and challenges the oppressive mechanisms associated with male dominance in monotheistic religions. By offering women an alternative to male religious authority, these artists redefine spirituality as a space for artistic expression, resistance, and cultural transformation.

Plan

Texte

Dans les années 1970, alors que les mouvements féministes sont traversés par une deuxième vague de revendications, une nouvelle spiritualité féminine émerge, centrée sur la revalorisation d’une divinité féminine : la Déesse. Ce mouvement est initié par des femmes en quête d’une alternative aux religions monothéistes, perçues comme des outils de légitimation de la domination masculine et de l’exclusion des femmes des fonctions cléricales majeures. L’archéologue Marija Gimbutas joue un rôle clé dans la naissance de cette nouvelle spiritualité alternative, en avançant la théorie d’une société matriarcale paléolithique qui aurait vénéré une Grande Déesse. Son hypothèse repose principalement sur l’existence de statuettes féminines du néolithique découvertes au début du xxe siècle. Marija Gimbutas s’appuie notamment sur celles trouvées sur le site de Çatal Höyük, en Turquie actuelle, et de la Dormeuse, trouvée à l’Hypogée de Ħal Saflieni à Malte, souvent interprétées comme des représentations de divinités liées à la fertilité et à la nature, comme preuve d’un culte de la déesse-mère1. Cependant, cette vision d’un culte matriarcal originel suscite de vives controverses, en raison du manque de preuves archéologiques solides et du recours à un argument d’autorité historique contesté par la communauté scientifique2 : l’unique existence de statuettes.

D’autres chercheurs·euses, notamment des femmes, s’approprient et approfondissent l’hypothèse de Marija Gimbutas, comme l’historienne Carol P. Christ, dont la conférence donnée en 1978 à l’université de Santa Cruz, intitulée Great Goddess Re-emerging, marquera un tournant dans l’intégration de ces réflexions dans les discours académiques. Carol P. Christ y revendique l’importance, pour les femmes, de pouvoir s’identifier à une figure féminine religieuse. Les religions monothéistes sont fondées sur un ensemble de symboles qui ont une influence psychologique, même inconsciente, en raison de leur omniprésence dans notre culture occidentale3. La figure divine y est majoritairement construite autour d’un principe transcendant et masculin. Ce Dieu, extérieur au monde et maître absolu, incarne des valeurs d’autorité, de séparation et de commandement. Le divin, perçu comme un pouvoir qui vient « d’en haut », reproduit de manière symbolique une structure sociale hiérarchique où le masculin est associé à la domination, à la légitimité du savoir, à l’autorité morale. Or, disposer d’un ensemble symbolique uniquement référé à un divin masculin place les femmes dans une situation de dépendance psychologique face à l’autorité des hommes, dans la mesure où ce système religieux sous-entend que le pouvoir féminin ne peut jamais être entièrement légitime ou bénéfique. En l’absence de représentations sacrées qui les incarnent pleinement, les femmes, ainsi que les minorités de genre, se trouvent exclues du pouvoir spirituel et du rôle de médiatrices entre le divin et le monde. À l’inverse, la figure de la Déesse, en tant que principe immanent et féminin, propose un tout autre rapport au sacré. Elle n’est pas séparée du monde, mais présente dans la matière, dans la nature, dans les corps, dans les rythmes cycliques de la vie. Elle valorise les expériences liées à la fécondité, à l’intuition, à la sagesse du corps, à la transformation, et surtout, elle légitime un pouvoir féminin autonome et vital. Dans un tel système symbolique, le féminin n’est plus une altérité inférieure par rapport au divin, mais une expression pleine et entière du sacré. Ce renversement symbolique permet aux femmes de se reconnaître comme détentrices d’un pouvoir spirituel intrinsèque, et non dérivé du masculin ou conditionné par lui.

Ainsi, la Déesse, en tant que divinité immanente, fluide et plurielle, offre-t-elle un modèle symbolique profondément identificatoire pour les genres minoritaires. Contrairement aux représentations divines masculines, fixes et normatives, elle incarne la transformation, la diversité des formes et l’acceptation des corps en dehors des normes. Elle devient un outil puissant contre l’essentialisme de genre, en montrant que le sacré peut s’exprimer à travers une multiplicité d’expériences identitaires. Les récits alternatifs offrent aux femmes et aux minorités un héritage pouvant leur être bénéfique ; ils véhiculent une autre forme de légitimité au pouvoir des femmes, qui est, selon Carol P. Christ, bienfaisant et indépendant4. Au-delà d’un simple réconfort spirituel, ce mouvement propose ainsi des moyens de lutte concrets, facilement identifiables et utilisables par les minorités de genre.

Le présent article s’attache à quelques femmes artistes qui, à partir des années 1970, se sont emparées du potentiel utopique de cette nouvelle spiritualité centrée sur le culte de la Déesse. Au sein de leurs performances, elles utilisent un nouveau système symbolique, qui va à l’encontre de ceux employés par les religions monothéistes en place depuis plus longtemps. Il s’agira d’analyser les symboles par lesquels l’imagerie de la Déesse se manifeste. Comment les artistes mettent-elles en scène un pouvoir féminin autonome, bienfaisant et empouvoirant, en rupture avec les modèles patriarcaux traditionnels ? Quelles formes cette nouvelle imagerie alternative prend-elle ? Dans quelle mesure est-elle émancipatrice pour les femmes, ainsi que les identités minoritaires ?

L’étude d’œuvres performantielles me semble particulièrement pertinente dans ce contexte spirituel, au sein duquel les célébrations religieuses s’incarnent souvent à travers des rituels et des cérémonies. De plus, dans les années 1960 et 1970, la performance émerge et devient un moyen d’émancipation, face au capitalisme, et de remise en question des normes sociales inculquées par l’éducation. Cette nouvelle forme d’engagement social dans l’espace public favorise l’émergence de nouvelles pratiques artistiques. Par la performance, le corps se trouve investi comme objet artistique, il crée ainsi « un débat contre la pensée dominante5 » en mettant publiquement en lumière l’intimité des femmes et ses « tabous ». Investir les espaces publics permet aux femmes d’occuper et de revendiquer des lieux qui, dans les mentalités, ne leur appartiennent pas et d’instaurer un dialogue entre l’intimité du corps et l’environnement urbain. Dans ce contexte, la performance se révèle être une « puissance cathartique et revendicative6 ». Par sa nature éphémère, elle participe activement à la construction du présent7. Elle revêt également une dimension populaire et pédagogique : en s’affranchissant du cadre muséal, la performance est accessible à un public plus large. En tant que véritable œuvre sociale, la performance féministe vise la transmission et le partage d’expériences communes aux femmes. Elle opère un passage du « je » au « nous », et offre à celui·celle qui regarde une lecture positive et collective du corps8.

Trois artistes utilisant la performance pour diffuser la nouvelle spiritualité liée au mouvement de la Déesse vont particulièrement nous intéresser. La première, Mary Beth Edelson (1933-2021), est considérée comme une figure pionnière dans l’émergence du mouvement spirituel de l’art féministe. La deuxième, Cheri Gaulke (1954), remet en question la place du christianisme et l’objectification du corps féminin, notamment à travers des performances publiques. Enfin, notre troisième artiste, Faith Wilding (1944), a pour sa part joué un rôle essentiel dans la transmission des savoirs artistiques féministes. À travers l’étude de leurs œuvres, nous chercherons à mettre en évidence l’ampleur prise par le mouvement de la Déesse dans l’art des années 1970 et 1980.

Contre héritage : la création d’une nouvelle visualité féminine et féministe

Mary Beth Edelson était convaincue de l’importance du pouvoir des mythes et des croyances dans les luttes féministes. Selon elle, ces récits jouent un rôle crucial dans la construction d’une nouvelle visualité féminine, elle-même favorable à l’élaboration d’identités, qu’elles soient individuelles ou collectives. Elle a vécu plusieurs années dans la Womyn’s Land de Wolf’s Creek, en Oregon, et a également publié divers articles et interviews dans Woman Spirit9, la revue de la communauté. Ces nouveaux lieux de vie alternatifs, nommés Womyn’s Lands ou Terres de femmes, émergent aux États-Unis à partir des années 1970, dans le sillage des mouvements féministes et lesbiens de la deuxième vague. Ces communautés rurales, exclusivement féminines, sont créées par des femmes qui cherchent à s’émanciper du patriarcat en vivant de manière autonome, souvent en autogestion et en dehors des structures économiques et sociales dominantes. Ces lieux permettent une sanctification du corps et de la terre à travers divers actions et objets rituels : création d’autels, sculptures, talismans, cérémonies d’invocation et célébrations des cycles naturels. Traversées par ces préoccupations autour de la réappropriation d’une vision d’un corps légitime et libéré de la culture patriarcale dominante, les femmes se réapproprient ces symboles et rituels, pour redonner une dimension sacrée à leur expérience individuelle et collective.

De par sa pratique artistique et ses convictions personnelles sur le rôle de la spiritualité, Mary Beth Edelson tente de redéfinir l’image de la femme dans la culture en mobilisant l’imagerie de la Déesse. Sa série photographique Woman Rising/Sea, réalisée en 1973, illustre cette démarche. L’image est la captation d’une performance, dont elle assemble quatre prises. Mary Beth Edelson cherche à démocratiser un ensemble d’éléments symboliques, en utilisant notamment des poses sculpturales afin de créer une imagerie de la Déesse (voir fig. 1). Une fois les tirages argentiques développés, l’artiste a dessiné autour de son corps des lignes, des pointillés et des vagues qui symbolisent l’énergie de la terre, en navigation et circulation constante en elle et autour d’elle. Les éléments qui transitent à proximité d’elle traduisent une force vitale en perpétuel dialogue entre la terre et le corps. Mary Beth Edelson veut ainsi transmettre l’idée que cette énergie est omniprésente et accessible à toutes les femmes : le corps féminin se transforme en un catalyseur d’énergie spirituelle, en une source de pouvoir, de libération et de désir.

Fig.1 : Mary Beth Edelson, Woman Rising/Sea, 1973-1974, série photographique

Fig.1 : Mary Beth Edelson, Woman Rising/Sea, 1973-1974, série photographique

Courtesy of the Estate of Mary Beth Edelson and Accola Griefen Fine Art. Copyright held by the Estate of Mary Beth Edelson; preserved through a partnership with The Feminist Institute.

Dans le contexte des années 1970, la performance devient un médium privilégié par les artistes féministes pour explorer des thématiques liées au corps féminin, à la nudité, à la sexualité, au genre et à l’émancipation. Les performances de Mary Beth Edelson s’inscrivent dans cette dynamique : elles sont profondément politiques et visent à la réappropriation d’une liberté sexuelle et corporelle des femmes. Par une mise en scène lyrique et empouvoirante, l’artiste célèbre le plaisir et le pouvoir féminin. Son approche pose les bases d’un féminisme spirituel engagé, ancré dans des pratiques symboliques fortes. Ses performances rituelles se déroulent souvent dans des lieux naturels, pour renforcer l’idée d’une interconnexion profonde entre les femmes et la nature. Une approche qu’elle va hériter des convictions écologiques et spirituelles de l’époque, et qui résonne également avec les pratiques déployées dans les Womyn’s Lands. Mary Beth Edelson, comme d’autres artistes féministes, considère que la destruction de la nature et l’oppression des femmes relèvent de logiques de domination similaires, toutes deux issues du système patriarcal.

À la lumière de ce constat, des liens entre les oppressions subies par les femmes et celles infligées à la nature vont être établies dès le début des années 1970. Selon des théoriciennes féministes comme Carolyn Merchant, Vandana Shiva ou encore Val Plumwood, le patriarcat et l’exploitation des ressources naturelles relèvent d’un même système d’oppression, dans lequel la domination masculine s’exerce non seulement sur les femmes, mais aussi sur l’environnement. Il renvoie à une nouvelle forme de lutte, l’écoféminisme, apparue pour la première fois sous la plume de Françoise d’Eaubonne en 1974. Dans son livre Le féminisme ou la mort, elle souligne la pertinence d’allier les luttes féministes et écologiques. En effet, depuis des siècles les femmes sont associées à la nature en raison de leur lien supposé avec le sensible, le charnel et le cycle de la vie, tandis que les hommes sont rattachés à la culture, considérée comme le domaine de l’intellect et de l’immatériel. Cette hiérarchisation place la culture au-dessus de la nature, tout comme elle place les hommes au-dessus des femmes, justifiant ainsi leur domination. Ainsi, les luttes féministes et écologiques convergent-elles vers une volonté commune de renverser le paradigme dominant, en réhabilitant les liens entre les femmes et la nature, non pas dans une vision essentialiste, mais en les percevant comme un potentiel de résistance et de réappropriation. Dans ces cercles écologistes et féministes, l’invocation de la figure de la Déesse est utilisée stratégiquement, non pour enfermer le féminin dans une nature figée, mais pour affirmer une spiritualité inclusive, profondément connectée au corps, à la terre, et à la lutte contre les oppressions structurelles.

L’une des contributions majeures de Mary Beth Edelson réside dans son désir de créer de nouveaux symboles pour les luttes féministes10. Proposer une alternative à la figure d’un dieu masculin dominant revient à rompre avec la dépendance historique des femmes envers les hommes, en déconstruisant les représentations religieuses qui légitiment l’autorité du père ou du frère. Cependant, bien que ce système symbolique soit réformateur, par l’utilisation d’un nouveau système de représentation, le recours à l’imagerie de la Déesse reste relativement rare : dans les années 1970, peu d’œuvres traitant de la spiritualité de la Déesse sont réalisées hors des cercles encore restreint des Womyn’s Land. De plus, les photographies issues de la série Woman Rising sont des traces de performances rituelles souvent réalisées par l’artiste seule, ce qui peut créer une distance entre l’intention de construire un langage collectif et son effectivité dans les luttes féministes. Malgré ces limites, Mary Beth Edelson engage dans sa pratique la volonté de contribuer à une nouvelle culture et une nouvelle histoire, faite par et pour les femmes. Par la célébration du corps féminin comme un lieu de pouvoir spirituel et l’inscription de ses œuvres dans une perspective alliant écologie et féminisme, Mary Beth Edelson encourage à la création d’un espace symbolique et culturel dans lequel les femmes peuvent se réapproprier leur corps, leur désir et leur spiritualité, en dehors des cadres oppressifs patriarcaux.

Une mise en pratique de symboles spirituels alternatifs

Progressivement, ces pratiques issues des Womyn’s Land vont se diffuser au-delà des limites de ces zones en non-mixité, afin de rendre leur accès plus large au public et à un plus grand nombre de femmes. Au début des années 1980, le mouvement de la Déesse gagne ainsi progressivement en importance dans les milieux artistiques féminins et féministes. Il propose une nouvelle représentation du corps féminin, affranchie des tabous associés aux cycles naturels du corps – menstruation, grossesse, ménopause – ainsi qu’aux désirs sexuels. En opposition aux oppressions patriarcales et aux discours religieux souvent hostiles aux luttes féministes, ce mouvement réhabilite une vision libre et puissante du corps féminin.

C’est dans ce contexte que Cheri Gaulke rejoint en 1975 le Woman’s Building11 à Los Angeles, un espace collectif consacré à l’art et au féminisme. Elle va notamment faire partie du Feminist Studio Workshop12 où elle développera une pratique de la performance. Les principales thématiques qu’elle aborde sont le corps, la religion, l’identité sexuelle et l’environnement. Le Woman’s Building n’entretient pas de lien direct avec le mouvement de la Déesse mais plusieurs conférences sur ce thème ont lieu au sein de l’établissement. Ainsi, les artistes associées à ce centre culturel ont-elles une étroite connaissance des pratiques développées dans les Womyn’s Lands.

En 1982, Cheri Gaulke réalise pour la première fois This Is My Body, une œuvre qui cristallise ses thèmes de réflexion. La mise en scène de cette performance est épurée : elle se réduit à cinq étagères en bois d’inspiration médiévale et une échelle rustique, sur lesquelles sont projetées des reproductions de peintures servant de narration visuelle : Cheri Gaulke a choisi des œuvres constituées de symboles préchrétiens et chrétiens, qu’elle fait dialoguer avec des extraits audios, des lettres écrites à son père, ainsi que des textes féministes et patriarcaux. Grâce à l’association de ces différents éléments, l’artiste souhaite créer une tension entre l’identité personnelle et les croyances héritées, perpétuées par les attitudes sociétales et historiques à l’égard des femmes. Pour comprendre la forme de cette imagerie alternative, je vais m’intéresser à un moment précis de la performance, celui où apparaît le deuxième tableau : Le Diptyque de Vienne peint en 1470 par Hugo van der Goes. Cette peinture illustre le moment où Ève, accompagnée du serpent, réussit à tenter Adam avec le fruit défendu. Il s’agit de la scène biblique qui a historiquement attribué aux femmes la faute originelle et a ainsi justifié de multiples formes de misogynies.

Or dans sa performance, Cheri Gaulke réinterprète ce récit religieux. Debout sur l’étagère, elle incarne Ève : son corps nu, dont seul le sexe est couvert par des feuilles de vigne, est disposé au centre d’une structure qui évoque la croix chrétienne. Grâce à cette mise en scène, l’artiste endosse le rôle du Christ en martyr et subvertit les codes du christianisme, pour proposer une lecture religieuse alternative au sein de laquelle la volonté des femmes n’est plus synonyme de transgression. En mettant en œuvre une posture christique, Cheri Gaulke cherche à prouver que les femmes possèdent un pouvoir décisionnel égal à celui des hommes13. L’artiste, par sa gestuelle, incarne Eve. De sa main droite, elle croque une pomme, symbole du fruit défendu, traditionnellement associé, dans la religion chrétienne, à la connaissance, à la luxure et à la transgression. Cheri Gaulke s’approprie la signification peccamineuse de cette action et revendique la liberté d’action, de désir et de sexualité des femmes. Son action devient un acte de libération, où le corps féminin, souvent stigmatisé comme pécheur et source de tentation, est réinvesti comme un lieu de pouvoir et d’autonomie.

La répétition de cette performance devant un public marque une volonté de partage et de revendication. Grâce à la réappropriation et la banalisation d’un geste condamnant les femmes à la honte et à la soumission14, l’artiste propose une alternative aux représentations patriarcales du corps féminin. Elle montre qu’il est possible d’engager une relation positive entre le corps, la sexualité et la tentation. Par l’intégration de symboles religieux dans son art, elle opère une inversion des stigmates : ce corps, autrefois objet de condamnation, devient un outil propice à l’exploration de soi. La démarche de l’artiste s’inscrit pleinement dans les objectifs du mouvement de la Déesse et des pratiques féministes des années 1970-1980. En réinterprétant des récits bibliques et en investissant la symbolique religieuse pour célébrer le corps féminin, Cheri Gaulke propose une critique radicale des idéologies oppressives. Le corps féminin est réimaginé en un lien de pouvoir et de transformation.

Cependant, malgré la volonté de l’artiste d’initier une forme d’émancipation du corps de la femme, This is my Body ne fournit pas explicitement les outils qui permettraient aux femmes d’investir ces revendications spirituelles et symboliques. La performance réalisée de manière individuelle, malgré un public, peut en effet limiter l’impact participatif de sa démarche. Bien que Cheri Gaulke veuille remettre en question les récits historiques et religieux, sa démarche reste en partie ancrée dans le domaine de la représentation plutôt que dans celui de l’expérience collective. Pour que ces revendications spirituelles trouvent une résonance plus large, il aurait été nécessaire de créer des espaces où les femmes puissent elles-mêmes expérimenter ces formes de réappropriation. Ainsi, le message de l’artiste aurait été non seulement visible, mais aussi directement vécu.

Le rituel comme moyen d’action communautaire

Faith Wilding, membre active du Women’s Building, explore cette dimension participative et communautaire à travers sa performance Invitation to a Burning, réalisée en 1980. De 1970 à 1973, elle occupe le poste d’assistante au sein du Feminist Art Program, un espace d’apprentissage en non-mixité fondé en 1970 par Judy Chicago et Miriam Schapiro. Grâce à son engagement dans ce programme, Faith Wilding contribue à offrir aux femmes un espace dans lequel elles peuvent développer leurs compétences artistiques en dehors de la culture masculine dominante. L’artiste utilise dans ses œuvres plusieurs symboles fondamentaux liés au culte de la Déesse : la mort et la renaissance, l’énergie de la nature et la communauté, ainsi que la connexion entre vie individuelle et collective. La performance s’organise en plusieurs étapes. Tout d’abord, Faith Wilding fabrique une momie composée de fil de fer, de mousseline et de cire, remplie de végétation séchée (voir fig. 2). Le corps ainsi créé incarne les oppressions subies par les femmes, de même qu’une version ancienne du soi, figée par les contraintes patriarcales. Lors d’une cérémonie aux chandelles, cette figure est ensuite mise à feu par un acte cathartique dans lequel les flammes symbolisent la destruction des oppressions et des cycles négatifs (voir fig. 3). Les femmes présentes participent activement à ce rituel : elles sautent par-dessus les flammes pour absorber symboliquement l’énergie libérée et s’affranchir des schémas oppressifs. Une fois les flammes éteintes, la momie carbonisée est remplie de terre et devient un contenant vivant : les participantes y plantent des graines choisies par l’artiste, telles que du lin, de l’orge, du blé et des coquelicots15. Ces graines, symboles de fertilité et de renouveau, matérialisent un nouvel espoir pour la condition des femmes et inaugurent une vie nouvelle, libérée des anciennes structures patriarcales. La momie transformée est ensuite installée au sein du Women’s Building, un lieu dans lequel les plantes peuvent pousser (voir fig. 4).

Fig.2 : Photographie de la momie préparée pour le rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

Fig.2 : Photographie de la momie préparée pour le rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

Performance/exhibition held at Woman’s Building, Los Angeles, CA.

Courtesy the artist and Anat Ebgi, Los Angeles / New York. © Faith Wilding.

Fig.3 : Photographie de la momie mise à feu lors du rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

Fig.3 : Photographie de la momie mise à feu lors du rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

Performance/exhibition held at Woman’s Building, Los Angeles, CA.

Courtesy the artist and Anat Ebgi, Los Angeles / New York. © Faith Wilding.

Fig.4 : Photographie de la momie après que les graines aient commencé à pousser. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

Fig.4 : Photographie de la momie après que les graines aient commencé à pousser. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

Performance/exhibition held at Woman’s Building, Los Angeles, CA.

Courtesy the artist and Anat Ebgi, Los Angeles / New York. © Faith Wilding.

Le rituel, réalisé lors de l’équinoxe de printemps, s’enracine dans les pratiques de sorcellerie, telles que la Wicca, le druidisme ou encore la sorcellerie nordique16, et les traditions spirituelles qui marquent le passage des saisons. L’équinoxe, symbole de renouveau, de fertilité et d’abondance, est un moment propice pour célébrer la résilience et la puissance féminine. Après la performance, Faith Wilding prolonge ce lien entre femme et nature à travers la performance Seed Work (1980), au cours de laquelle des flyers, dans lesquels elle détaille le rituel et la démarche de Invitation to a burning, sont distribués par l’artiste Betsy Damon. La performance est réalisée à l’occasion de la deuxième Conférence mondiale de la Décennie des Nations Unies pour la femme, en juillet 1980 à Copenhague. Les flyers sont accompagnés de graines, issues des plantes cultivées dans la momie fabriquée au cours de Invitation to a burning, pour que les femmes recevant ces vestiges puissent à leur tour cultiver de nouvelles plantes. La démarche de Faith Wilding a été documentée dans le treizième numéro de la revue HERESIES : A Feminist Publication on Art and Politics17 (1981), intitulé Feminism and Ecology. Pour encourager les femmes à reproduire ce rituel de renouveau dans leur propre contexte, l’artiste invite les participantes à lui faire parvenir des vestiges de leurs plantations : graines, fleurs séchées, feuilles ou bulbes, accompagnés des récits de leurs expériences.

Invitation to a Burning dépasse la simple performance artistique : elle revendique une légitimité au pouvoir féminin et célèbre le lien entre les femmes et la nature18. L’œuvre insuffle aux symboles utilisés – le feu, la terre et les graines – une nouvelle portée politique et psychologique : ils renforcent les coalitions intérieures19 et favorisent une lutte collective plus audible et plus visible. Le rituel de Faith Wilding s’inscrit dans une démarche dite « écoféministe20 ». L’artiste, à travers ses œuvres, attire l’attention sur la dégradation de l’environnement et célèbre le rôle central des femmes dans sa restauration. Elle affirme que leur puissance créatrice est essentielle pour construire un avenir plus équilibré et harmonieux. Associer l’écologie et le féminisme à une dimension spirituelle apparaît d’autant plus pertinent que le dualisme nature/culture et la division femmes/hommes trouvent leurs racines dans la pensée judéo-chrétienne et occidentale21. Invitation to a Burning témoigne de la connexion spirituelle et écologique entre les femmes et la nature, ainsi que de leur engagement collectif à transformer les oppressions en force créatrice. À travers cette performance et Seed Work, Faith Wilding célèbre le rôle nourricier des femmes dans le monde. Elle met en lumière leur puissance transformatrice, ancrée dans la solidarité et le collectif.

Grâce à la création d’une iconographie féminine inclusive, le mouvement de la Déesse favorise donc une libération sexuelle et corporelle. Ces nouveaux symboles permettent de repenser le rôle de la femme dans la société, non plus limité à celui de mère ou d’épouse, mais en tant qu’être autonome, puissante et créatrice. De plus, ils offrent des repères spirituels qui accompagnent les femmes dans les moments de crise personnelle. L’un des aspects fondamentaux de ce mouvement est la possibilité de construire sa propre expérience spirituelle avec la Déesse22, enrichie par des rituels, des productions artistiques et des pratiques communautaires. Contrairement aux religions monothéistes traditionnelles, par lesquelles les dogmes imposent une vision unique et normative, la vaste imagerie associée à la Déesse s’adapte à la diversité des croyances et des pratiques. La dimension participative renforce l’autonomie et le pouvoir individuel, tout en maintenant un lien collectif à travers des valeurs partagées, telles que la connexion avec la nature, la solidarité féminine et la revalorisation du corps. Le mouvement de la Déesse a initié la fabrication ainsi que la réappropriation de symboles spirituels et culturels dans le but d’offrir aux femmes un héritage alternatif et féministe qui les soutienne dans leur quête d’émancipation. Au travers d’œuvres performées, les artistes ont pour finalité de revendiquer une lutte féministe libérée de l’objectification patriarcale de la femme afin de créer une « iconographie qui unifie23 ».

Cependant, malgré sa richesse symbolique et ses impacts sur le développement personnel et collectif, ce mouvement n’est pas sans défauts. Dans son article Le Mouvement de la déesse : controverses dans le champ académique féministe24 (2019), Patrick Synder souligne que les « représentantes féministes du monde universitaire critiquent particulièrement : l’utilisation des mythes anciens ; l’approche idéologique plutôt que scientifique de l’archéologique et de l’historique ; un retour de l’essentialisme ; ainsi que l’utilisation de l’art féministe et du tourisme à des fins idéologiques25 ». Il s’appuie notamment sur l’ouvrage La Femme des origines. Images de la femme dans la préhistoire occidentale (2003) de Claudine Cohen, selon laquelle la théorie d’un culte matriarcal primitif basé sur des statuettes féminines n’a pas de fondement scientifique. Ce dernier relèverait plutôt de représentations qui donnent à voir le quotidien des femmes et leurs activités artisanales. Le retour à un féminisme essentialiste est également l’une des critiques majeures du mouvement de la Déesse. Selon le philosophe Tudor Balinisteanu, « le Mouvement de la déesse incarne un repli identitaire religieux naturaliste qui n’aide en rien la lutte politique des femmes26 ». La théologienne américaine Radford Ruether critique également l’approche essentialiste du Mouvement de la déesse dans lequel les femmes sont dépeintes comme « naturellement sensibles, écologiques, égalitaires et pacifiques27 », tandis que les hommes sont perçus comme « des êtres naturellement aliénés, agressifs, brutaux et violents28 ».

Bien que ces critiques soient à prendre en considération, Carol P. Christ souligne que, même si nous ne pouvons pas prouver l’existence d’un culte matriarcal originel, il est essentiel de comprendre les effets psychologiques et politiques que cette hypothèse permet d’exercer sur les féministes en quête d’une nouvelle spiritualité29. Les pratiques artistiques inspirées par ce mouvement jouent un rôle clé dans la redéfinition des espaces spirituels et culturels pour les femmes. À travers des rituels et des œuvres collectives, les artistes proposent un contre-discours aux représentations patriarcales. Elles valorisent une spiritualité féminine qui célèbre le lien entre le corps, la nature et le sacré tout en dénonçant les oppressions sociales et environnementales. Ces nouvelles pratiques offrent aux femmes un espace d’expérimentation et de résistance, dans lequel elles peuvent réinvestir le sacré avec leurs propres codes et symboles, tout en contribuant à une transformation culturelle qui alimente les luttes féministes.

Bibliographie

Ouvrages

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Articles

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Notes

1 Patrick Snyder, « Le Mouvement de la déesse : controverses dans le champ académique féministe », Nouvelles questions féministes, vol. 38, 2019, p. 71. Retour au texte

2 Ibid, p. 79. Retour au texte

3 Carol P. Christ, « Why Women Need the Goddess: Phenomenological, Psychological, and Political Reflections », Carol P. Christ & Judith Plaskow, (dir.), Womanspirit Rising: A Feminist Reader in Religion (1979) San Francisco, HarperOne, 1992, p. 71-86. Retour au texte

4 Ibid. Retour au texte

5 Anne-Julie Ausina, « La performance comme force de combat dans le féminisme », Recherches féministes, vol. 27, no 2, 2014, p. 83. https://doi.org/10.7202/1027919ar. Retour au texte

6 Ibid., p. 82. Retour au texte

7 Ibid., p. 91. Retour au texte

8 Ibid., p. 93 Retour au texte

9 Woman Spirit une revue féministe et spirituelle fondée en 1974, et publié jusqu’en 1984, par Ruth Mountaingrove et Jean Mountaingrove, deux militantes lesbiennes féministes engagées dans le mouvement des Womyn’s Lands aux États-Unis. Elle sert de plateforme pour partager les expériences de ces espaces utopiques où les femmes cherchent à vivre en autarcie, à cultiver la terre et à redéfinir leur rapport au pouvoir, au travail et à la spiritualité. Retour au texte

10 Ibid. Retour au texte

11 Le Woman’s Building (1973-1991) était un centre culturel féministe à Los Angeles, fondé par Judy Chicago, Arlene Raven et Sheila Levrant de Bretteville. Il servait de lieu d’apprentissage, de création et d’activisme pour les femmes artistes. Le centre accueillait également des expositions, performances et ateliers. Il a joué un rôle clé dans le développement de l’art féministe aux États-Unis. Retour au texte

12 Le Feminist Studio Workshop est une école d’art féministe fondée en 1973 à Los Angeles par trois figures majeures du féminisme artistique : Judy Chicago, Arlene Raven et Sheila Levrant de Bretteville. Il s’agit de l’une des premières institutions éducatives entièrement dédiées à l’art féministe, visant à offrir aux femmes un espace d’apprentissage, de création et de collaboration en dehors des structures académiques dominées par les hommes. Retour au texte

13 Carol P. Christ, « Why Women Need the Goddess: Phenomenological, Psychological, and Political Reflections», op. cit., p. 72. Retour au texte

14 Julia Tissot, Féminisme spirituel dans les arts visuels : réappropriation des pratiques et symboles cultuels dans les œuvres de Mary Beth Edelson entre 1972 et 1981, mémoire de master, université Grenoble Alpes, 2021, p. 49. https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-03448313. Retour au texte

15 Ibid., p. 74. Retour au texte

16 Dans les religions païennes, le cycle des saisons occupe une place centrale, car il reflète le rythme sacré de la nature et la relation intime entre l’humain et son environnement. Chaque saison marque une étape essentielle dans le cycle de la vie, de la mort et de la renaissance. Le printemps symbolise la fertilité, le renouveau et l’éveil de la terre ; l’été célèbre l’abondance, la lumière et la puissance du soleil ; l’automne évoque la récolte, mais aussi la transition et le lâcher-prise ; l’hiver, enfin, est le temps du repos, du silence et de la gestation intérieure. Ces cycles sont souvent célébrés à travers des fêtes rituelles, comme celles du calendrier de la roue de l’année dans les traditions néopaïennes ou wiccanes. Honorer les saisons, c’est reconnaître la sagesse de la nature et s’accorder au rythme du vivant. Retour au texte

17 Heresies était une revue trimestrielle publiée de 1971 à 1977. Elle explorait l’art et la politique sous un prisme féministe. Structurée comme un collectif de féministes – incluant des socialistes, marxistes, féministes lesbiennes et anarchistes – elle couvrait divers domaines tels que la peinture, la sculpture, l’écriture, l’anthropologie, la littérature, la performance, l’histoire de l’art, l’architecture et le cinéma. Chaque numéro abordait un thème distinct, adoptait une forme visuelle spécifique et était dirigé par une équipe éditoriale différente. Retour au texte

18 Carol P. Christ, « Why Women Need the Goddess: Phenomenological, Psychological, and Political Reflections», op. cit., p. 75. Retour au texte

19 Gloria Feman Orenstein, Anne-Marie de Vilaine, Maud Bendal. « La réémergence de la Grande Déesse dans l’art féminin contemporain », dans : Sorcières : les femmes vivent, « La nature assassinée », no 20, 1980, p. 32. https://femenrev.persee.fr/doc/sorci_0339-0705_1980_num_20_1_4703. Retour au texte

20 Bien que ce terme ait été inventé en 1974, il a très peu été utilisé lors de sa création. Ce n’est qu’avec le regard et la connaissance du terme que nous avons aujourd’hui que nous pouvons trouver une corrélation entre les revendications féministes et écologiques à l’écoféminisme. Retour au texte

21 Julia Tissot, Féminisme spirituel dans les arts visuels : réappropriation des pratiques et symboles cultuels dans les œuvres de Mary Beth Edelson entre 1972 et 1981, op. cit., p.68. Retour au texte

22 Téa Nicolae, « The Western Revival of Goddess Worship », in Feminist Theology, vol. 31, n°2, 2023. p. 130-142. https://doi.org/10.1177/09667350221135089. Retour au texte

23 Gloria Feman Orenstein, « La réémergence de la Grande Déesse dans l’art féminin contemporain », op. cit, p. 32-36. Retour au texte

24 Patrick Snyder, « Le Mouvement de la déesse : controverses dans le champ académique féministe », op. cit, p. 70-85. Retour au texte

25 Ibid., p. 77. Retour au texte

26 Ibid., p. 80. Retour au texte

27 Ibid., p. 80. Retour au texte

28 Ibid., p. 80. Retour au texte

29 Constance Rimlinger, « Féminin sacré et sensibilité écoféministe. Pourquoi certaines femmes ont toujours besoin de la Déesse », in Sociologie, 2021, no 1, vol. 12, p. 77-91. https://doi.org/10.3917/socio.121.0077. Retour au texte

Illustrations

  • Fig.1 : Mary Beth Edelson, Woman Rising/Sea, 1973-1974, série photographique

    Fig.1 : Mary Beth Edelson, Woman Rising/Sea, 1973-1974, série photographique

    Courtesy of the Estate of Mary Beth Edelson and Accola Griefen Fine Art. Copyright held by the Estate of Mary Beth Edelson; preserved through a partnership with The Feminist Institute.

  • Fig.2 : Photographie de la momie préparée pour le rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

    Fig.2 : Photographie de la momie préparée pour le rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

    Performance/exhibition held at Woman’s Building, Los Angeles, CA.

    Courtesy the artist and Anat Ebgi, Los Angeles / New York. © Faith Wilding.

  • Fig.3 : Photographie de la momie mise à feu lors du rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

    Fig.3 : Photographie de la momie mise à feu lors du rituel. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

    Performance/exhibition held at Woman’s Building, Los Angeles, CA.

    Courtesy the artist and Anat Ebgi, Los Angeles / New York. © Faith Wilding.

  • Fig.4 : Photographie de la momie après que les graines aient commencé à pousser. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

    Fig.4 : Photographie de la momie après que les graines aient commencé à pousser. Faith Wilding, Invitation to a Burning, 1980

    Performance/exhibition held at Woman’s Building, Los Angeles, CA.

    Courtesy the artist and Anat Ebgi, Los Angeles / New York. © Faith Wilding.

Citer cet article

Référence papier

Marine Cortese, « Femmes païennes. Redéfinir la spiritualité grâce à une divinité féminine », RadaЯ, 10 | 2025, 20-40.

Référence électronique

Marine Cortese, « Femmes païennes. Redéfinir la spiritualité grâce à une divinité féminine », RadaЯ [En ligne], 10 | 2025, mis en ligne le 05 juin 2025, consulté le 03 décembre 2025. URL : https://www.ouvroir.fr/radar/index.php?id=934

Auteur

Marine Cortese

Étudiante en master écriture critique et curatoriale de l’art et des cultures visuelles à Strasbourg. Les recherches de Marine Cortese portent sur les imaginaires écologiques dans l’art contemporain.

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