Introduction
Cette contribution porte sur des cours de Français sur objectif universitaire (FOU), destinés à un public d’Ingénieurs et de mastérants de l’Institut supérieur d’informatique de Tunis Al Manar (ISI), dont la validation est diplômante. Dans ce contexte universitaire, les étudiants spécialisés en informatique sont amenés à produire des écrits académiques complexes en langue française. Or, l’usage croissant des outils TIC et plus récemment d’intelligence artificielle générative (IAG) bouleversent les pratiques et la manière dont les apprenants rédigent, révisent et valident leurs productions.
Les travaux de recherche dans le champ de l’IA en éducation (Saude & coll., 2024 ; Wang & coll., 2023 ; Dugan & coll., 2023 ; Unesco, 2019-2021 ; Holmes & Tuomi, 2022 ; Audran, 2024) décrivent le potentiel formatif des outils d’IAG, mais soulèvent des questions liées à l’idéalisation des outils jugés infaillibles, à la reconnaissance de la frontière séparant le texte humain du texte produit par l’IA, au risque de compromettre l’exercice de l’esprit critique et l’évaluation des contenus, à la propriété intellectuelle, aux restrictions de l’usage des IAG en situation d’évaluation, etc. De nombreux chercheurs sont interpelés par la concentration sur les aspects techniques de l’intégration de l’IAG, plutôt que sur les modèles pédagogiques pouvant sous-tendre leur utilisation dans l’éducation (González-Calatayud & coll., 2021) et se focalisent sur le développement d’activités soutenant les situations d’apprentissage, qu’ils considèrent comme une tâche exigeante (De la Higuera & Iyer, 2024).
Dans notre cas, de nombreuses questions se posent : Quels sont les impacts de l’IAG sur les discours (écrits et oraux) relevant de la formation du public concerné ? Comment adapter les actions d’encadrement et l’évaluation en contexte FOU et se positionner face à l’usage de l’IAG par ce public spécifique ? Quels modèles pédagogiques et quels critères d’évaluation permettront d’assurer l’acquisition des compétences linguistiques dans un contexte d’automatisation croissante ?
Nous avançons les hypothèses suivantes :
- La démarche FOU, centrée sur les besoins langagiers spécifiques de notre public permet d’adapter les actions d’encadrement des discours propres au métier d’étudiants, de concevoir des tâches linguistiques qui stimulent les niveaux supérieurs de la taxonomie de Bloom revisitée et de se positionner face à l’usage des outils d’IAG, par la hiérarchisation des objectifs d’apprentissage et l’intégration des dimensions métacognitives.
- L’usage de l’IAG modifie les standards de l’évaluation académique et nécessite la mise en place d’une triangulation de l’évaluation contextualisée.
Nous proposons dans ce qui suit la description du contexte et du public, puis de la méthodologie adoptée. Nous enchainons sur le déclenchement d’une réflexion critique, soutenue par les résultats d’actions menées avant et après l’émergence des outils de l’IAG. Nous clôturons avec de nouvelles pistes de réflexion et d’action.
1. Contexte et public concerné
Dans le contexte tunisien, le français est considéré comme langue étrangère privilégiée à l’école de base, puis en tant que médium des enseignements scientifiques et techniques au lycée et à l’université. Toutefois, Kadi-Ksouri & coll.. (2016) attestent que les compétences effectives en français pour un public, académique et professionnel non spécialiste de la langue, restent inférieures aux exigences associées au statut d’une langue seconde, du fait des systèmes d’apprentissage, des modèles d’évaluation, de l’effet des médias et des TIC, etc. Dans le secteur de l’informatique, la maîtrise du français constitue un atout distinctif bien que peu valorisé (Grin, 2016).
Les étudiants, dont nous avons la charge, évoluent dans un environnement académique où la maîtrise de la production écrite en français conditionne non seulement la validation de leurs parcours, mais aussi leur insertion professionnelle.
Dans le Tableau 1, est présentée une description synthétique des profils des étudiants, de l’organisation des parcours de formation et des modules de langue française.
Tableau 1 : Description des profils et des parcours1
| Niveaux | Profils | Modules de langue française |
| 1re année Ingénieur |
– Inscription sur concours |
Langue et méthodologie – Aide à la rédaction de mini-projets du domaine de spécialité – Deux semestres (en présentiel) |
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2e année |
Projet personnel et professionnel |
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| 3e année Ingénieur |
Littératie universitaire et TICE – Semestre 1 (en présentiel) – Validation du projet de fin d’année : rapport et soutenance (note sur 20 intégrée à la moyenne du semestre 2) – Préparation à la validation du Projet de Fin d’Études (PFE) – Stage de 3 à 6 mois en entreprise nécessitant la rédaction d’un rapport pour valider le PFE. |
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| Master de recherche |
– Procédure semblable à celle du cycle Ingénieur mais sur dossiers – Deux spécialités : SIIVA et GL |
Français – M1 semestre 1 (en présentiel) – Normes de rédaction d’un article et du mémoire de master |
| Master Sécurité des systèmes d’information et des infrastructures |
– Master en présentiel – Procédure semblable à celle du cycle Ingénieur mais sur dossiers |
Français sur objectif spécifique – M1 deux semestres (en présentiel/ en distanciel) – Accompagnement pour la validation du Mémoire de master – Préparation à la soutenance – Simulations de situations de communication en contexte professionnel |
| – Master en distanciel – Convention avec l’Institut de la promotion supérieur du travail (IPST) – Inscription à la charge de l’IPST – Public composé de professionnels du domaine informatique ou d’étudiants en voie de professionnalisation. |
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| Master professionnel en ingénierie du logiciel – open source |
– Co-diplomation : université virtuelle de Tunis (UVT) et l’ISI – Inscription à la charge de l’UVT. – Public composé de professionnels du domaine informatique |
Français sur Objectif Spécifique – M1 semestre 1 (en distanciel) – Accompagnement pour la validation du mémoire de master – Préparation à la soutenance |
| Master Systèmes intelligents et IOT (Internet des objets connectés) |
– Convention avec l’Institut de la promotion supérieur du travail (IPST) – Inscription à la charge de l’IPST – Public composé de professionnels du domaine informatique |
Français sur Objectif Spécifique – M1 semestre 1 (en distanciel) – Accompagnement pour la validation du mémoire de master – Préparation à la soutenance – Simulations de situations de communication en contexte professionnel |
Une responsabilité est dévolue aux enseignants de français et consiste à accompagner les étudiants pour la validation diplômante de leurs discours écrits et oraux. Ainsi, les pratiques d’enseignement et d’évaluation portent
sur l’importance à accorder à l’éthique dans l’enseignement/apprentissage des langues étrangères, en relation en particulier avec le travail collectif, […] avec la question du plagiat, une pratique trop courante actuellement parce que facilitée par Internet, et une pratique perçue différemment selon les cultures d’appartenance des apprenants (et des enseignants) (Richer, 2017, p.22).
2. Approche méthodologique
Nous avons adopté une approche qualitative et avons collecté les données exploitées, grâce à des entretiens semi-directifs menés auprès d’une vingtaine d’étudiants nouveaux entrants (année universitaire 2024-2025) et de six enseignants/encadrants, et à des groupes de discussion en présentiel (60 étudiants en 1re année Ingénieur et 45 professionnels inscrits en M1 SSII et en M1 IOT). En outre, des scénarii pédagogiques antérieurs ont permis de réunir un corpus constitué de productions écrites et orales, d’observer les pratiques réelles des étudiants et d’étudier leurs perceptions et stratégies. L’expérimentation dont nous rendons compte dans le cadre de cet article, combine l’utilisation des outils d’IAG avec la cognition humaine et les processus métacognitifs, dans une optique critique.
Nos analyses intègrent d’une part, une comparaison entre deux phases, à savoir, avant et après l’apparition des IAG, et d’autre part, l’usage des outils de détection du plagiat et de l’IAG, intégrés aux pratiques d’enseignement/apprentissage/évaluation en contexte et pour finir la mise en avant du rôle structurant de la taxonomie de Bloom revisitée et adaptée au contexte.
3. Avant l’apparition des outils d’IAG
Une expérimentation menée de 2014 à 2017 (Bozhinova & coll., 2017 ; Zaouali, 2018) avait pour objectif d’aider les étudiants de la 3e année Ingénieur à produire des discours universitaires, à valeur certifiante. Le dispositif a été supporté par une plateforme technologique (Moodle) et étoffé par des outils complémentaires, tels que :
- Les correcteurs orthographiques et grammaticaux (Bonpatron/Antidote).
- Les outils d’écriture/réécriture collaborative (Google docs / Framapad).
- Les outils de traduction (Reverso / Google traduction).
- Les détecteurs de plagiat gratuits (Plagiarism) ou payants/institutionnels (Urkund).
- Les générateurs bibliographiques (Zotero).
Il a été noté un développement modéré et des difficultés persistantes, chez la majorité des étudiants qui font que la créativité et l’esprit critique étaient limités. De même, la duplication de la formation aux promotions d’ingénieurs et de mastérants des années suivantes (2018-2022) a débouché sur des productions révélant des taux élevés de plagiat et nécessitant une réflexion plus approfondie et des régulations pour aider ce public à exploiter le potentiel des outils disponibles et à produire des écrits complexes qui répondent aux niveaux de la correction linguistique, de l’originalité, de la variété et de la créativité exigés.
Deux actions ont été entreprises sur le plan institutionnel. Le guide de rédaction de l’ISI2 a été revu au cours de l’année universitaire 2021/2022, et en 2023, le conseil scientifique a instauré un seuil maximal de 15 % pour le plagiat dans les projets de fin d’études (Ingénieur). Les encadrants académiques sont, de fait, amenés à utiliser le logiciel PlagPrevent pour générer des rapports de plagiat, qu’ils envoient aux étudiants, dont ils encadrent les travaux, pour une reprise corrective avant la validation finale des rapports et la soutenance. À cette date, aucune mention des outils d’IAG n’a été faite, mais il est admis implicitement que « l’IA est dépourvue d’intentionnalité, ce serait plutôt l’humain qui, en ayant recours à l’IA, serait le responsable du plagiat, ou au minimum, de s’assister d’un agent conversationnel comme aide à l’écriture » (Roy & Lepage, 2023, p. 2).
4. Intégration des outils et des détecteurs d’IAG
L’observation des groupes de 3e année Ingénieur (promotion 2022-2023) lors des activités collaboratives de réécriture des PFA donnent à voir qu’ils intègrent naturellement les outils d’IAG. La prédominance de l’usage de ChatGPT gratuit n’empêche pas le recours à des outils d’extraction d’information, de planification, de reformulation, de traduction, de génération d’images ou de tableaux, etc.
Ces pratiques non raisonnées font l’impasse sur les processus d’assimilation indispensables au développement des compétences essentielles (disciplinaires, méthodologiques, rédactionnelles, informationnelles, de communication, de coopération, etc.) et ont dicté l’intégration combinée des outils d’IAG et de ceux utilisés pour la détection des contenus qu’ils génèrent.
Dès lors tout étudiant, qui prend les outils d’IAG pour substitut ou bien y recourt pour produire son texte préliminaire, est sanctionné et amené à corriger sa production. Au cours des séances d’écriture-réécriture des PFA (Ingénieur) et de celles consacrées à la correction d’extraits de mémoires ou de mini-projets (master), le groupe-classe est invité à exprimer des hypothèses sur les indices de plagiat et d’IAG observés dans les extraits sélectionnés, à consulter les résultats des outils de détection et à reprendre ensuite les textes plagiés en collaboration et de manière stratégique, en les adaptant aux critères d’évaluation formulés en début de formation3.
Nous nous attendions à ce que les interactions en classe, bâties sur les échanges et la co-construction des savoirs permettent à chaque apprenant de s’engager à mettre à découvert « le style » de ChatGPT (Compilatio, 2025) et à entreprendre une reprise corrective individuelle. Néanmoins, les postures et les pratiques étudiantes des promotions d’Ingénieurs 2023-2024 et 2024-2025 soulèvent un nombre d’interrogations : est-ce que les étudiants sont encore incapables de percevoir la distinction entre travail authentique et triche ? S’agit-il de représentations « fossilisées » des apprenants relativement à l’apprentissage de la langue française ? Est-ce une manifestation du rapport négatif à l’écrit ? Est-il question du manque de fiabilité, voire d’inefficacité des outils de détection de l’IAG ? Certains étudiants ont-ils recouru à des alternatives pour berner les détecteurs ? Ces détecteurs ont-ils stigmatisé des productions authentiques et valorisé des textes produits par l’IAG ?
Afin d’approfondir les réponses fournies par les étudiants à ces interrogations, il a fallu organiser des groupes de discussion en présentiel, pour stimuler la réflexion des participants.
Certes, le recours à PlagPrevent et aux outils de détection d’IAG a instauré les bases d’un palier additionnel de contrôle, apportant une réponse institutionnelle aux risques de plagiat et d’automatisation des productions, mais il a révélé l’insatisfaction des étudiants qui contestent leur fiabilité et dénoncent la stigmatisation des productions authentiques. Par conséquent, il s’est avéré nécessaire de dépasser la logique de sanction et d’établir un équilibre entre l’usage des potentialités de l’IAG et le renforcement des compétences rédactionnelles fondamentales (Bouchut, 2024), en adaptant les tâches d’apprentissage et les évaluations, afin de garantir que la compétence de l’IAG ne soit pas celle que l’enseignant évalue.
5. Régulation des pratiques d’enseignement et d’évaluation : adaptation de la taxonomie de bloom révisée
Nous nous appuyons sur une traduction libre de l’infographie originale de l’Oregon State University, réalisée par Stasse (2023), qui définit l’adaptation de la taxonomie de Bloom révisée comme étant un cadre de référence, permettant l’évaluation et l’ajustement des activités pédagogiques et d’évaluation et intégrant à la fois les potentialités de l’IAG et les spécificités des compétences humaines. Cette modélisation permet de repositionner l’usage des outils d’IAG en tant que levier et non pas en tant que finalité et de favoriser le développement de la pensée critique, de la créativité, de la communication, etc.
Dans le cadre de cet article, nous avons choisi de présenter un projet réalisé par des étudiants de première année Ingénieur. La macro-tâche consiste à présenter un module du domaine de spécialité selon le plan ESPRIT sous forme de carte mentale. Le choix des membres du groupe est libre, alors que les thèmes sont proposés par l’enseignante et renouvelés dépendamment de l’évolution du domaine de l’IT (Illectronisme, Cryptographie, Drones, Multicloud, Industrie 5.0, 5G, etc.). Les thèmes phares du semestre 1 2024-2025 sont ChatGPT, DevOps et Agents IA.
La première microtâche implique de réaliser une recherche sans recourir à l’IA et de valider la fiabilité des sources et des informations collectées. Elle renvoie au Niveau Mémoriser de la taxonomie. Le choix de la consigne se justifie par le fait que les étudiants ne sont pas motivés par une recherche sur les moteurs de recherche pour collecter et mémoriser des informations, car ils ne prévoient pas l’éventualité d’être privés d’accès à l’IA. De plus, ils considèrent que ces outils sont très performants et peuvent produire des réponses précises à des demandes d’informations en « un clin d’œil ».
La deuxième microtâche renvoie au Niveau Comprendre de la taxonomie. Nous avons chargé les étudiants de la présentation de l’état de l’art sur l’IAG, afin qu’ils comprennent les enjeux, les défis et les opportunités associés à ces outils. Les différents sous-groupes s’engagent donc à réaliser une recherche avec ou sans l’aide de l’IAG et à désigner un porte-parole pour partager les résultats obtenus et personnalisés. Ce porte-parole doit présenter, dans un premier temps, le travail réalisé (sans recourir à un support numérique) et répondre, dans un deuxième temps, aux questions de la classe et de l’enseignante. Les membres du sous-groupe sont alors invités à intervenir pour soutenir leur pair.
La troisième microtâche renvoie au Niveau Appliquer de la taxonomie et nécessite d’organiser les informations sélectionnées, selon un plan spécifique au domaine informatique, imposé par l’enseignante :
E = entrée/introduction
S = situation actuelle, l’existant, cas qui se rapportent au thème choisi
P = problème(s) relatif(s) au thème
R = résolution, solutions trouvées ou déjà appliquées et leurs limites
I = perspectives
T = terminaison/conclusion
La quatrième microtâche s’intègre à plusieurs niveaux de la taxonomie. L’utilisation des outils est autorisée pour toutes les activités, afin de soutenir la formation à une utilisation de l’IAG à la fois éthique, responsable, critique et innovante, en complément et non en substitution à l’effort intellectuel.
Pour le Niveau Appliquer, il est exigé que les étudiants expérimentent en situation réelle, en mettant en œuvre deux méthodes de reformulation.
La reformulation 1 s’effectue en plusieurs étapes : 1. Remplacer certains mots (noms, adjectifs, verbes, adverbes, etc.) par des synonymes. 2. Modifier la structure des phrases. 3. Changer/Déplacer les parties du discours. 4. Effectuer tout autre changement jugé pertinent. 4. Comparer la paraphrase à l’extrait original. 5. Faire une révision linguistique. 6. Indiquer la source.
La reformulation 2 inclut deux tâches : 1. Appliquer des structures privilégiées, à savoir rédiger des phrases nominales, infinitives, adjectivales sous forme de liste à puces. 2. Schématiser.
Pour le Niveau Analyser, les étudiants doivent réfléchir aux implications de l’usage de l’IAG dans la production de leurs écrits et s’interroger sur la valeur du contenu qu’elle crée. Ils recourent à des outils de détection, de leur choix, pour relever et analyser des anomalies, comparer des données, contraster des informations et catégoriser des résultats. Ils interviennent ensuite, pour affiner l’analyse de l’IAG, mais aussi la vérifier et porter un regard critique sur la démarche et les résultats fournis par les outils. Les membres de chaque sous-groupe sont tenus à débattre et à confronter à la fois leurs stratégies et leur système de valeurs.
Pour le Niveau Évaluer, il est prévu que les étudiants tirent profit de l’apprentissage de la critique des résultats de l’IAG elle-même. Ils s’engagent dans une réflexion métacognitive pour évaluer les conséquences éthiques de leurs actions. Il ne s’agit pas à ce niveau d’utiliser l’IA pour élaborer des grilles d’évaluation ou encore de fournir des rétroactions aux apprenants, mais d’amener les membres de chaque groupe à évaluer leur travail et/ou celui de leurs pairs en fonction de critères définis en co-élaboration et à le reprendre.
La cinquième microtâche implique dans un premier temps d’élaborer une carte mentale collaborative sans recourir aux outils d’IAG (quoique le Niveau Analyser les autorise pour concevoir une visualisation des données, telles que tableaux, diagrammes, cartes mentales, graphiques, etc.).
Concernant le Niveau Créer, il met en avant la créativité en tant que trait humain, puisque les groupes collaboratifs appliquent un jugement qui englobe l’analyse et l’évaluation. Il est attendu qu’ils réalisent une représentation visuelle et synthétique des informations, recueillies et traitées tout le long du projet, sous la forme d’une arborescence et de les structurer en s’appuyant sur trois piliers : l’image, l’association et la catégorisation (Manceau, 2022) dans le cadre de processus bien structurés. Dans un deuxième temps, les sous-groupes doivent réaliser une présentation orale devant un public composé des pairs, de l’enseignante de français et d’un enseignant du domaine de spécialité.
6. Analyse des résultats
Avant l’introduction des outils d’IAG, les difficultés des étudiants se rapportaient aux représentations erronées sur le copier-coller, considéré comme une pratique acceptable, à la surcharge cognitive, au caractère chronophage de la reformulation, au non-respect des normes bibliographiques adaptées à la spécialité et au manque de recul face aux détecteurs de plagiat et aux traducteurs en ligne.
Nous relevons des risques de plagiat élevés (indiqués dans la troisième colonne du Tableau 2).
Tableau 2 : Taux de plagiat dans une sélection de travaux remis entre 2018 et 2023
| Années universitaires | Spécialités | Types | Taux de plagiat |
| 2018-2019 | ISEOC | PFA | 52 % |
| 2019-2020 | IDISC | PFA | 36 % |
| 2020-2021 | IDL | PFA | 25 % |
| 2021-2022 | IDISC | PFA | 43 % |
| 2022-2023 | IDL | PFA | 68 % |
| 2022-2023 | M2 SSII | Mini-projet | 39 % |
Les retours des apprenants, recueillis en cours ou à la fin de l’action menée, indiquent que les exigences de performance académiques constituent une pression et impactent leur motivation. En effet, certains remettent en question la valeur des tâches demandées, leurs propres chances de les réussir et leur capacité à en tirer profit pour développer leur compétence rédactionnelle.
À partir de 2023, la facilité d’utilisation des outils d’IAG (ChatGPT principalement) encourage les étudiants à soumettre des productions « formatées » où sont défavorisées, non seulement la créativité des scripteurs mais aussi l’intégrité académique, ce qui remet en question l’intérêt de l’évaluation (Dwivedi & coll., 2023), comme le montre l’exemple, ci-après, extrait de la page « Conclusion et perspectives » d’un mémoire de master.
Malgré ces limites, notre projet ouvre la voie à de nombreuses perspectives de recherche futures :
— Expansion à d’autres domaines : l’application de notre méthodologie à d’autres domaines de recherche permettrait de découvrir des schémas spécifiques à ces domaines et d’élargir la portée de l’analyse
— Exploration de nouvelles sources de données : l’intégration de données provenant de sources différentes de DBLP, telles que des données de réseaux sociaux académiques plus riches, pourrait améliorer la précision de la prédiction [?].
— Optimisation des modèles : l’optimisation des modèles de Machine Learning et de Deep Learning pour une exécution plus rapide et plus efficace est une avenue à explorer pour des projets ultérieurs
— Interprétation plus fine : une recherche plus approfondie sur l’interprétation des résultats qui influencent l’influence dans les réseaux pourrait contribuer à une meilleure compréhension des facteurs sociaux académiques
Malgré les limites de notre projet actuel, les perspectives futures sont nombreuses et promettent des avancées significatives dans la compréhension de l’influence dans les réseaux sociaux académiques et d’adapter cette approche à d’autres types de réseaux sociaux [?].
En effet, le texte ne comporte pas d’exemples spécifiques/contextualisés (texte surligné), affiche des sous-titres sous forme de liste à puces, intègre plusieurs comparatifs/superlatifs (texte souligné) et des répétitions (texte en gras). Aucune source n’est mentionnée ([?]). Toutefois, il est possible de relever des passages réécrits par l’étudiant et caractérisés par l’apport de modifications mineures et par des constructions syntaxiques maladroites (est une avenue à explorer, qui influencent l’influence dans les réseaux).
Il est à noter aussi que la divergence des résultats obtenus suite à l’analyse de l’extrait à l’aide d’outils de détection de l’IAG (ChatGPT zero 20.56 % IA, QuillBot 37 % IA et 63 % humain, Isgan.ai 100 % IA), érode la confiance des étudiants envers ces systèmes de détection, qui devraient, constituer d’une part, l’une des solutions possibles d’identification de la tricherie et d’autre part, une sensibilisation aux enjeux de l’intégrité intellectuelle doublée d’une mesure dissuasive pour protéger la validité des diplômes et la réputation de l’institution.
D’ailleurs, les résultats de l’analyse effectuée à l’aide du logiciel PlagPrevent font réagir les étudiants des promotions d’Ingénieurs 2023-2024 et 2024-2025, en raison des taux de plagiat/similitude et d’alertes IAG/ChatGPT principalement (présentés dans le tableau 3).
Tableau 3 : Validation des PFA des promotions d’ingénieurs 2023-2024 et 2024-2025
|
Années universitaires |
Types |
Taux de plagiat |
Alertes IAG |
|
2023-2024 et 2024-2025 |
PFA |
22 % |
12 % |
|
56 % |
19 % |
||
|
38 % |
11 % |
||
|
42 % |
21 % |
||
|
38 % |
0 % |
||
|
55 % |
0 % |
||
|
21 % |
1 % |
||
|
31 % |
5 % |
Les retroactions de l’enseignante ont porté sur le taux de plagiat et alertes IAG relevés, sur le recours à l’IAG pour structurer le rapport, rédiger intégralement de nombreuses sections, élaborer des figures et des tableaux, sur le haut niveau de correction linguistique dans certains passages, sur l’utilisation des outils d’IA de commandes vocales et dictée de documents sans reprise personnelle.
Les retours des étudiants confirment la « normalisation » de l’utilisation des outils d’IAG et donnent à voir les tâches pour lesquelles ils sont tentés de les utiliser :
– J’ai vu votre email sur le rapport et je voulais vous donner plus d’infos. J’ai utilisé GPT principalement pour corriger le français et reformuler certaines parties.
merci pour votre compréhension.
– Je ne comprend pas la remarque : il y a trop d’IA même si l’outil PlagPrevent ne le détecte pas.
La majorité remet en question la fiabilité des outils de détection et met en avant les efforts fournis pour présenter des rapports conformes aux normes :
– Concernant les extraits sans source ça je vais leur ajouté la source que j’ai oublié, aussi pour l’image de réseau ce n’est pas la mienne.
– Mais honnêtement je suis choquée de 40 % plagiat. Aussi j’ai déjà testé mon rapport sur un outil en ligne avant de le déposer sur moodle j’ai eu 18 %.
– Je souhaitais vous partager le rapport de détection d’IA généré via l’outil d’analyse de l’ISI pour mon rapport de SFE (Licence). Bien que j’aie entièrement rédigé ce rapport sans l’aide d’outils comme ChatGPT (puisqu’ils n’étaient pas disponibles à l’époque), le résultat indique un taux de 7 % de contenu détecté comme généré par IA. Cela m’a surpris et me laisse penser que l’outil pourrait produire des faux positifs assez élevés.
– Je pense que le fait que j’ai réalisé moi-même le test de plagiat avec des outils sur internet affecte le pourcentage que vous avez eu avec votre logiciel puisque forcément tout a été archivé.
– Je dois tout refaire sans tester dans ce cas.
Il faut noter que certains commentaires revoient à de nouvelles problématiques, telles que « la légalité […] de mobiliser des outils de détection pour des travaux d’étudiants geste qui pourrait lui-même alimenter l’IA pour de nouvelles détections » (Roy & Lepage, 2023, p. 3), ou encore des préoccupations en matière de droits d’auteur, concernant principalement les générateurs d’images d’IAG, qui s’inspirent d’images préexistantes, produites par d’autres personnes, sans les citer (Délégation régionale au numérique pour l’éducation, 2025).
Les réponses fournies par les interviewés, lors des entretiens menés pour sonder les nouveaux entrants (2024-2025), apportent un éclairage nouveau. La majorité des étudiants en M1 IOT, défendent « la légitimité » de l’utilisation des outils d’IAG :
– Où est le problème d’utiliser l’IA pour nous aider… on va consacrer notre temps et nos connaissances pour les vraies tâches et gagner le temps pour des tâches plus importantes.
– Copier/coller un texte existant et demander à l’IA de corriger les fautes et de reformuler c’est la solution optimale.
– L’IA utilise des mots des adjectifs mieux que les mots que j’utilise moi.
En réponse à la question « Quelles astuces utilisez-vous ? », les répondants inscrits en M1 et en 1re Ingénieur présentent les stratégies de contournement auxquelles ils recourent et sont convaincus qu’elles peuvent berner les outils de détection et les encadrants/évaluateurs. En outre, ils décrivent les caractéristiques des requêtes soumises à l’IAG :
– Utiliser des logiciels qui enlèvent de chaque mot une lettre à la fin par exemple (carré avec ?) les détecteurs ne peuvent pas trouver le taux de plagiat et IA.
– Ajouter des symboles au début du paragraphe et des points transparents entre les lettres.
– Nous fournissons la matière première, elle écrit, on vérifie que notre objectif est bien formulé.
– Fournir des idées correctes vérifiées fiables à l’IA… elle écrit un texte complet il est bon…français correct… je précise style formel/amical/académique
– Pour les sources, je les ajoute moi
– Les IAG outils payants citent les sources
– Les outils de correction on les utilise pas souvent… il y a Grammarly
– Utiliser des logiciels payants performants pour écrire à notre place et trouver le plagiat
Néanmoins, les réponses à la question « Vous arrive-t-il de relire vos textes ? » donnent un aperçu des pratiques étudiantes concentrées sur la révision effective des textes produits par l’IAG. Elle est dictée par la crainte d’iniquité, de sanction et de dévalorisation de leur diplôme et non par le respect de l’intégrité académique.
– C’est pas ça le style… le texte mérite une vérification personnelle… ma note personnelle dans mon propre style car les détecteurs peuvent détecter le style aujourd’hui
– Un processus complet…GPT, Smodin, etc. et reformulation personnelle en plus citer les sources
Du côté des enseignants, les réponses à la question « Tolérez-vous l’utilisation des outils IAG en contextes académique et professionnel ? » sont divergentes.
Un seul répondant décrit des pratiques professionnelles qui soutiennent l’intégration d’un outil d’IAG :
– On introduit beaucoup d’info pour que sa réponse concorde avec ce que nous faisons généralement. (Prompt)
– C’est bluffant. Mais sa réponse correspond à ce que nous faisons pour la rédaction des courriers officiels.
Quant aux cinq autres enseignants, ils déclarent avoir détecté l’usage des outils d’IAG et observé même des cas d’insertion de pseudo sources dans les textes remis pour évaluation. Ils n’admettent pas le fait que les étudiants ignorent les limites et les enjeux de ces outils et qu’ils dédaignent tous les aspects éthiques, écologiques, juridiques, etc.
En outre, deux répondants rapportent que les entreprises partenaires de l’institution déplorent la dépendance des stagiaires à ChatGPT, leur manque de créativité, la standardisation des solutions qu’ils proposent et évoquent des problèmes liés à la sécurité et à la divulgation des données confidentielles.
L’ensemble des données recueillies souligne l’indispensabilité de la régulation pédagogique, mise en œuvre dans le cadre de l’expérimentation menée, qui intègre la taxonomie de Bloom revisitée, favorise la mobilisation des compétences humaines distinctives et donne à voir que les outils d’IAG ont été mis au service d’un apprentissage de haut niveau.
Pour réaliser la première microtâche, exigeant l’application du processus habituel de recherche et interdisant l’utilisation de ChatGPT, Perplexity, TextCortex, etc., les étudiants se sont engagés à chercher des documents multimodaux et à retenir des sources récentes et fiables (pas de Wikipédia). Ils ont réussi à sélectionner des données en copiant-collant, en surlignant, en traduisant des ressources en anglais, mais la prise de notes et la citation des sources (en respectant le style APA) sont à revoir.
Article : MultiCloud
Le multicloud se produit lorsque les entreprises utilisent des services cloud de plus de deux fournisseurs différents, combinant souvent des clouds publics et privés. Cette approche permet de créer une stratégie plus flexible, adaptée aux besoins de l’entreprise, tout en réduisant la dépendance à l’égard d’un fournisseur unique.
Source Google. Multicloud. cloud.google.com. Consulté le 16 Septembre 2023, à l’adresse https://cloud.google.com/learn/what-is-multicloud?hl=fr.
Vidéo : Mieux comprendre le Cloud AWS : Stratégie multicloud
Liberté dans utilisation du cloud -des solutions qui permettent de bénéficier de la technologie d’AWS sans enfermer dans un modèle.
Source Amazon Web Services France. (2022, Mars 14). Mieux comprendre le Cloud AWS : Stratégie multicloud [Vidéo]. YouTube. https://youtu.be/RIFfGJXFwWg.
Image : Entreprise Cloud strategy
Source Multicloud. (2021, Mars 11). cloud-computing.developpez.com. https://cloud-computing.developpez.com/actu/313375/92-pourcent-des-entreprises-ont-desormais-une-strategie-multi-cloud-contre-82-pourcent-pour-une-strategie-de-cloud-hybride-selon-une-etude-de-Flexera/.
La deuxième microtâche a conduit les étudiants à utiliser des outils d’IAG pour définir ChatGPT ou autres IAG, les détecteurs de plagiat/IA, les outils de reformulation, de traduction, de présentation, etc. Certains sous-groupes ont démontré leur capacité à mettre des éléments saillants en avant et à fournir des exemples adaptés à leur contexte et à leur spécialité disciplinaire. Néanmoins, les présentations observées révèlent souvent un manque d’objectivité, de par la valorisation des outils au détriment d’une réflexion approfondie sur les dimensions éthiques, juridiques, environnementales, etc.
La troisième microtâche a impliqué d’organiser des données, de les illustrer, de les compléter et de restructurer le plan de la carte mentale. Cette activité a stimulé la motivation des apprenants et leur a offert la possibilité de créer pour réinvestir des modèles du domaine du génie logiciel (appris dans les cours de spécialité) dans une nouvelle situation. Les outils d’IAG ne leur sont d’aucune aide à ce niveau, car ils sont dépourvus de capacité de contextualisation.
Pour répondre à la consigne de la quatrième microtâche, les étudiants ont dû démontrer leur capacité à instruire l’IAG. L’exemple que nous présentons, ci-après, consiste en une requête adressée à ChatGPT.
Reformule ce texte portant sur le repérage de l’illectronisme d’une manière succincte et brève en gardant la même structure comprenant 3 parties, la première qui introduit l’illectronisme, la deuxième qui traite les constats et la troisième qui traite les personnes concernées par ce fléau. Cet article est écrit par Annie Ripon-Serre et a pour titre "comment repérer une situation d’illectronisme" paru en 2019 dans le livre blanc de l’illectronisme, page 35.
Le texte produit par l’outil en réponse à cette requête (à lire en Annexe 1) devrait répondre aux exigences linguistiques, méthodologiques et déontologiques spécifiques à cette activité d’application. Or, les étudiants ne se sont pas arrêté sur la qualité du prompt. Ils se sont focalisés sur l’analyse du texte à l’aide d’outils de détection de plagiat/IA et les ont qualifiés de « non fiables » : Smodin 12 % IA et GPTZero 39 % IA. Ils ont enchainé sur une étude « humaine », critique relevant les imperfections du « style » de ChatGPT.
Avis du groupe d’étudiants sur la reformulation de GPT :
– La taille du texte reformulé est la même que celle du texte original.
– Cette reformulation n’est pas concise et n’a pas une grande utilité pour quelqu’un cherchant à saisir rapidement l’idée de l’article.
– La reformulation a principalement recours aux synonymes et garde les mêmes structures et tournures de phrases.
– Le sens est par contre toujours le même.
– Certains adjectifs employés dans la reformulation font preuve d’une exagération et de subjectivité.
– Bibliographie : style non adapté Ripon-Serre, Annie ; Comment repérer une situation de l’illectronisme ; in Le Livre Blanc de l’illectronisme, 2019, p.35
À la décision commune de reprendre le texte « notre équipe a décidé de délaisser cette reformulation et procéder à une reformulation humaine » succèdent de nouvelles activités collaboratives ayant pour objectifs de modifier, vérifier et valider le texte co-produit, tout en consignant les étapes-clés de la démarche du groupe de travail.
Reformulation 1 : Pour cette première reformulation, on a d’abord souligné les mots clés et les informations (chiffres, sources) pertinentes du texte original, puis on a construit des phrases et fait la liaison entre ces phrases avec des connecteurs logiques.
Reformulation 2 : Aucune aide de l’IA
Schéma — Paragraphe 2 : personnes concernées par l’illectronisme [1]
Bibliographie :
[1] RIPON-SERRE A., 2019, Comment repérer une situation d’illectronisme, dans Le livre blanc contre l’illectronisme, Agence Nationale de Lutte contre l’Illettrisme, consulté le 17 octobre 2023 sur
http://www.anlci.gouv.fr/Mediatheque/Outils-ANLCI/Livre-blanc-contre-l-illectronisme
La réflexion critique du public porte aussi sur les correcteurs linguistiques, comme le donnent à voir les commentaires à lire dans la Figure 1. Il faut noter que les étudiants se focalisent sur les limites des correcteurs linguistiques, mais ne remettent pas en question leur fiabilité, à l’opposé des outils et des détecteurs d’IAG.
Figure 1 : Limites des correcteurs linguistiques
De même, nous relevons des indices de l’implication des apprenants dans la tâche, puisqu’ils comprennent son utilité et cherchent à aboutir à des textes qui ont du sens pour eux, comme le donnent à voir les commentaires, ci-après.
– Nous avons utilisé un outil de reformulation qui s’appelle QUILLBOT. Cet outil est spécialisé dans la reformulation et ne nécessite pas de requêtes, ce qui ne permet pas de spécifier le style de reformulation qu’on veut.
– La différence entre les taux de détection de GPTZero (0 % IA) et Scribbr (87 % IA) s’explique par leurs algorithmes et méthodes d’analyse distincts. GPTZero se focalise principalement sur l’identification des modèles d’IA tels que GPT, tandis que Scribbr prend en compte un ensemble plus large de critères, incluant la syntaxe et le style. En outre, chaque outil applique des seuils de tolérance différents pour reconnaître un texte généré par IA, ce qui explique l’écart dans leurs résultats.
– Le résultat montre que le travail est aussi fait par un humain mais avec, bizarrement, un plus haut pourcentage de l’IA que le texte écrit par une IA (6 % =/= 4 %) ce qui confirme le fait que ce détecteur n’est pas fiable.
– En plus GPT zéro a mémorisé l’extrait dans le premier test.
– 2 % généré par l’IA. Ce pourcentage peut être engendré par l’enceinte d’IA utilisée dans le texte original.
– Reformulation faite à la main ; passage de forme active à passive et inversement, changement de synonyme, élimination de redondance… Réduction de texte à travers le repérage des mots clés, des idées principales et des points importants et passage à des phrase nominales.
Cependant, nous remarquons l’impact des textes générés par des outils d’IAG sur le référencement naturel, analysé par Abbou (2024), qui affirme que selon Google, il importe peu que le contenu soit généré par une IAG ou un humain, l’essentiel est qu’un texte apporte une réelle valeur ajoutée aux utilisateurs. En effet, un premier groupe d’étudiants a retenu une source récente qui affiche l’IAG comme co-autrice.
[1] Généré par l’IA et la communauté LinkedIn. Quels sont les défis auxquels vous êtes confronté lors de la conversion des données pour la Business Intelligence ? consulté le 21/10/2024 sur https://www.linkedin.com/advice/3/what-challenges-do-you-face-when-converting-data-business-yrpzf?lang=fr&originalSubdomain=fr
Quant au deuxième groupe, il a cité les outils d’IAG en tant qu’auteurs et nous notons un manque de recul relativement aux tics de langage caractérisant ces outils et à la qualité du texte produit, sur le plan énonciatif principalement.
Former vos collaborateurs à la sécurité informatique
Ces mesures ne peuvent être pleinement efficaces que si l’ensemble de vos collaborateurs est correctement formé et sensibilisé à la cybersécurité. Il est donc essentiel de prévoir des formations régulières en sécurité informatique pour tous les membres de l’entreprise. (OpenAI, 2024).
Former vos collaborateurs à la sécurité informatique
Il est crucial que toutes ces précautions soient accompagnées d’une formation adéquate pour vos collaborateurs. Sensibiliser et former votre équipe à la sécurité informatique est essentiel pour garantir la mise en œuvre efficace de ces mesures. (Quora, 2024).
Concernant la cinquième microtâche, l’élaboration des cartes mentales en groupe sur Coggle, Xmind, Mindmaster, etc., et la co-évaluation par l’enseignante et les pairs, ont permis de briser le processus de l’évaluation formative suivie de l’évaluation sommative, parce que le contexte institutionnel le permet. En effet, pour le parcours Ingénieur, l’évaluation des acquis d’apprentissage entre dans le cadre du contrôle continu, à l’opposé du master professionnel. Ainsi, les séances de rétroactions correctives ont intégré des propositions de correction des erreurs « humaines » de divers types : uniformité des constructions dans les branches de la carte, orthographe lexicale, références et normes bibliographiques, etc.
Il faut préciser que la régulation des pratiques d’enseignement et d’évaluation a permis le développement de compétences qui correspondent, certes, « au niveau linguistique minimum [en français] à valider dans toutes les compétences pour obtenir le titre d’ingénieur diplômé […] le niveau B2 du […] CECRL » (Commission des titres d’ingénieur, 2024, p.26), mais ne se limitent pas au contexte purement académique. Elles sont transférables dans le contexte professionnel, comme le stipule la description des profils métiers dans les référentiels des métiers, des compétences et des certifications spécifiques au domaine de l’informatique, tels que le Référentiel des métiers et des compétences, Digital Talent (2020).
7. Réflexion critique
Il s’avère que combiner l’utilisation des outils d’IAG avec la cognition humaine et la métacognition dans une optique critique permet une expérience d’apprentissage améliorée qui soutient les processus de réflexion de haut niveau, dans lesquels les étudiants s’engagent parallèlement ou après le recours à ces outils. En effet, les différents sous-groupes sont convaincus que les outils les aident à trouver rapidement de l’information mais, ne remplacent pas une analyse humaine complète.
Une telle démarche devrait préserver la validité académique et valoriser les compétences humaines distinctives. Mais, il faut souligner que nous avons réuni peu de données empiriques pour pouvoir évaluer l’efficacité de notre action à long terme, surtout que les capacités de l’IAG continuent à évoluer.
Il n’est plus question de dissuader des étudiants spécialistes en informatique de recourir à l’IAG, alors que des guides orientant le processus d’amélioration du style d’écriture de ChatGPT fleurissent sur le Net, et nous ne citons ici que celui publié sur le site de Justasking.ai. (2023).
En outre, le développement de modèles avancés et de systèmes intégrant une dimension d’intelligence émotionnelle, comme les interactions orales instantanées avec ChatGPT, risque de réduire le temps consacré par les apprenants à la réflexion et à l’analyse et de générer des illusions de compréhension et de fiabilité qui dépassent de loin la réalité.
Plus spécifiquement, l’intégration de l’extension Writefull pour l’éditeur collaboratif Overleaf, (exigé à l’ISI) annonce de nouveaux défis à surmonter par les apprenants et les enseignants.
Il s’avère primordial, dans notre cas, d’engager une automatisation des processus, mais nous devons préserver les compétences favorisant la réflexion critique, de crainte que cette automatisation n’induise l’uniformité et ne fasse perdre et/ou ne fragilise certaines aptitudes de communication déjà acquises ou en cours d’acquisition chez les étudiants en informatique. Les recommandations de ne pas utiliser Perplexity aux cycles supérieurs ou en recherche, lues sur site de l’Université de Sherbrooke, nous interpellent puisque cette institution a paradoxalement opté pour une approche proactive soutenant l’intégration de l’IAG, dans les premiers cycles. Nous soutenons, au contraire, qu’un intérêt particulier doit être porté aux étudiants en début de parcours pour établir un continuum d’apprentissage et pour éviter de simplement réagir par des sanctions, en fin de parcours.
De fait, nous maintenons que la priorité doit être donnée au travail collaboratif, centré sur l’humain et à la triangulation pour évaluer les travaux (Davies, 2008, cité par Duguay & coll.., 2024). Diversifier les formats d’évaluation en combinant une évaluation de l’écrit et de l’oral à un volet additionnel en classe (discussions, suivi de projets, travaux de groupe, etc.) permet de minimiser la dépendance aux outils automatisés, car une telle évaluation mixte crée un contexte, dans lequel l’effort personnel reste central.
En guise de conclusion
La démarche FOU contextualisée pour laquelle nous avons opté, se focalise sur la conception de tâches qui s’appuient sur les niveaux de la taxonomie de Bloom revisitée, nécessitant ainsi un positionnement affirmé face à l’IAG et impliquant la mise en place d’une triangulation de l’évaluation afin de pouvoir relever les défis d’une automatisation croissante. Ainsi, avons-nous engagé un renouvèlement de nos pratiques pédagogiques, privilégiant le déclenchement de la réflexion des étudiants et le développement des compétences humaines distinctives en intégrant une approche centrée sur la métacognition.
En perspective, nous nous appuyons sur des objectifs d’apprentissage et d’évaluation définis et adaptés aux besoins de nouveaux échantillons, en intégrant de nouvelles adaptations de la taxonomie de Bloom revisitée et en considérant les évolutions technologiques et le développement de l’intelligence émotionnelle.
Ainsi, de nouvelles actions sont mises en œuvre lors du Semestre 2 de l’année universitaire 2024-2025, en fonction du niveau académique.
Pour les élèves ingénieurs en première année, il s’agit de réaliser une activité typique, qui consiste à rendre compte oralement d’une expérience personnelle ou collective, en rapport avec la participation à l’événement organisé par l’établissement et intitulé Semaine de rayonnement de l’ISI. Il comprend des conférences, des ateliers, des certifications (Microsoft, Cisco) et des rencontres avec des recruteurs. Les étudiants sont invités à exprimer leurs appréciations, à formuler des critiques constructives et à proposer des pistes d’amélioration pour les éditions futures.
En deuxième année Ingénieur, nous proposons aux différents groupes de travailler dans une classe ré-inversée. Ils sont amenés à élaborer une carte mentale récapitulative des normes de rédaction des rapports de PFA/PFE, en se basant sur le guide institutionnel, sans recourir aux outils d’IAG, puis à effectuer des reprises correctives d’extraits de rapports ou de projets personnels.
Nous comptons aussi réguler les activités orientées vers la préparation au stage en intégrant l’IAG dans la création des dossiers de candidature et les simulations d’entretiens d’embauche et amener notre public à considérer les critères de formulation des prompts et la sobriété numérique (Mollick & Mollick, 2023).
Il est question aussi de faire travailler le public professionnel ou en voie de professionnalisation, inscrit en M1 SSII, sur les simulations de situations de communication professionnelle pour développer leur réflexion sur les processus analytiques que l’IAG ne peut pas remplacer totalement.
De notre côté, nous nous engageons à maintenir une veille active sur les évolutions technologiques, liées à l’IAG, et à mener des expérimentations systématiques des outils, ainsi que des analyses plus approfondies de certains tests, que nous avons entrepris, pour vérifier les capacités et les limites d’outils, tels que ChatGPT, Mapify et Canva.


