Usage comparé du théâtre par les présidents de Gaulle et Pompidou (1959-1974)

  • Comparative use of the theater by French presidents de Gaulle and Pompidou (1959-1974)

DOI : 10.57086/lpa.1265

Abstracts

Si l’hypothèse générale ne peut être posée que mieux un gouvernant fréquenterait le théâtre et les œuvres théâtrales (au sens des « réjouissances intenses » selon Brecht), mieux il gouvernerait, il reste que le rapport entretenu par les présidents de la République avec la culture littéraire en général, le théâtre en particulier, peut servir de partiel révélateur de leur culture, de leur personnalité, et de leur posture politique. Sur la base d’archives du service du protocole de l’Élysée consultées aux Archives nationales, jamais exploitées à ce jour sous cet angle, l’article s’emploie, dans une perspective d’histoire culturelle, à examiner l’usage qu’ont fait de l’art dramatique les deux premiers présidents de la Ve République, Charles de Gaulle et Georges Pompidou (1959-1974). Dans un contexte historique où le théâtre occupait un rôle public relativement marqué, attesté par l’attention que lui accordaient la presse et la télévision, l’interrogation centrale porte sur la signification politique du style de gouvernance qu’il est possible de prêter à cet usage, nettement différencié d’un mandat à l’autre.

While the general assumption cannot be made that the more a ruler frequents the theater and theatrical works (in the sense of Brecht's “intense revelry”), the better he will govern, the fact remains that the relationship maintained by the Presidents of the French Republic with literary culture in general, and the theater in particular, can serve as a partial indicator of their culture, personality and political stance. Based on the archives of the Elysée protocol department consulted at the French National Archives, never before exploited from this angle, this article examines, from a cultural history perspective, the use made of the dramatic arts by the first two presidents of the French Fifth Republic, Charles de Gaulle and Georges Pompidou (1959-1974). In a historical context in which theater played a relatively prominent public role, as evidenced by the attention it received from the press and the TV media, the central question concerns the political significance of the style of governance that it is possible to lend to this use, clearly differentiated from one mandate to the next.

Outline

Text

Dans les débuts de la présidence d’Emmanuel Macron, sa relation au théâtre a été particulièrement mise en valeur par ses biographes et par la presse, à plusieurs titres : à titre privé, puisqu’il est avéré que la rencontre déterminante avec sa future épouse Brigitte s’est faite alors que celle-ci prodiguait des cours de théâtre au collège La providence d’Amiens et que tous deux participèrent, elle comme scénographe, lui comme acteur (voire co-auteur), à plusieurs spectacles1 ; à titre public, dans la mesure où, d’une part, a été souligné l’apport de l’art théâtral dans la mise en scène de son personnage, notamment au cours des campagnes électorales et cérémonies d’intronisation (spécialement la première), puis dans diverses autres circonstances, et, d’autre part, en ce sens que le jeune président a intentionnellement affiché ses sorties de fin de semaine, en couple, au théâtre (jusqu’à ce qu’une manifestation de « gilets jaunes » bouscule cette habitude prise en début de quinquennat et que la crise du covid y mette apparemment terme). L’affection portée à un grand acteur, à qui fut rendu hommage dans la cour des Invalides après son décès, participe encore de cette admiration pour le théâtre2. Pour autant, même sur la base de ces indices, noyés dans le flux médiatique incessant, il ne semble pas possible d’avancer la thèse selon laquelle l’art dramatique aurait occupé, dans l’activité présidentielle de ce début de xxie siècle, un rôle revêtant une signification politique de portée autre que celle montrant le couple présidentiel en « sortie »de week-end, comme tout le monde. Cela tend à se limiter à révéler, d’un côté, une utilisation tactique de la théâtralité politique (après tout assez banale dans l’histoire car généralisable à la plupart des personnages soucieux d’afficher ou d’affermir leur pouvoir) et, de l’autre, un goût personnel particulier du président pour un genre spécifique de théâtre3.

Délaissant cette actualité, forte de la découverte de sources archivistiques inexploitées à ce jour sous cet angle particulier4, la présente contribution entend s’inscrire dans le courant de l’histoire culturelle, se situant dans « la continuité du processus d’élargissement du terrain de l’historien »5 et pouvant être définie comme « histoire sociale des représentations »6 dans toute l’étendue de leur spectre. Jouant avec la polysémie de la notion de représentation, cet article se propose d’interroger, sur la base d’archives, la place conférée à l’art dramatique dans les activités des deux premiers occupants de la présidence sous le régime de la Ve République, Charles de Gaulle (1959-1969) et Georges Pompidou (1969-1974). Sous l’angle particulier choisi, ces activités en lien avec le théâtre se montrent-t-elles seulement passibles d’une analyse en surface, telle que celle évoquée à propos du président Macron, ou bien méritent-t-elles de faire l’objet d’une investigation approfondie, porteuse de significations plus robustes ? J’opte ici pour le deuxième terme de l’alternative et je me risque à livrer les résultats de mes investigations dans une perspective plus spécialement politique.

L’hypothèse générale ne saurait être affirmée que plus un président fréquenterait le théâtre et ses diverses manifestations, mieux il gouvernerait, car elle ne pourrait pas être étayée avec des arguments probants jusqu’au bout, et tant la notion de buon governo s’avère surdéterminée. L’intérêt porté au sujet dont traite cet article repose toutefois sur l’idée que, parmi les nombreuses composantes qui forment la culture d’un individu appelé aux plus hautes fonctions, celles relatives à la littérature en général, au théâtre en particulier, à ce que Bertolt Brecht nomme les « réjouissances intenses »7, ne sont pas complètement indifférentes. Celles-ci font en effet fortement signe – même s’il existe d’autres voies d’accès – vers des éléments de compréhension incarnée des ressorts sociaux et humains, en jouant de la relation entre intelligibilité et sensibilité en la présence directe de spectateurs. Dans la représentation publique des grandes œuvres (non évidemment restreintes à celles du seul répertoire consacré), c’est bien l’essence politique, au sens originaire, du théâtre qui se révèle : « le théâtre reste, dans sa forme même8, l’art qui nous renvoie le plus directement à ce qui nous rassemble ou nous sépare, en tant que communauté ou en tant que public. Contrairement aux médias audiovisuels ou au cinéma, le théâtre implique la présence concrète du public et des acteurs réunis en chair et en os, au même moment et en un même lieu (…) Or cette rencontre contingente, d’abord matérielle, liée à une attente à la fois forte et indéterminée, mais souvent déçue et exposée à toutes les corruptions9, n’entretient-elle pas malgré tout quelque rapport avec les ressorts les plus profonds d’une communauté ? »10.

Dix ans de mise en majesté du théâtre, au service de la grandeur nationale (1959-1969)

Une politique culturelle en profond renouvellement

Dès la mise en place du premier gouvernement de la Ve République au début de 1959, le président innove en incitant son premier ministre à créer pour la première fois en France un ministère autonome des Affaires culturelles. Si le Front populaire s’était montré particulièrement dynamique dans le domaine culturel, principalement à travers le mandat de Jean Zay, et si la IVe République commençante lui avait emboîté le pas, notamment dans le secteur du théâtre, grâce au travail pionnier de Jeanne Laurent en faveur de la décentralisation, à chaque fois cela s’était produit dans le cadre inchangé du ministère de l’Éducation nationale. Cela eut lieu, de 1936 à 1938, sous l’autorité du ministre lui-même (Jean Zay plaidait certes pour la création d’un ministère de la Vie culturelle, mais ne fut pas suivi par la chambre des députés) ; de 1946 à 1952, c’est l’action d’une sous-directrice aux spectacles et à la musique à la direction générale des arts et des lettres du même ministère, Jeanne Laurent précisément, qui marqua particulièrement l’histoire. Avec la création de ce tout nouveau portefeuille, la France gaullienne se plaçait au rang des nations innovantes en matière culturelle.

Alors directeur de cabinet de Charles de Gaulle, dernier président du conseil de la IVe République de mai à décembre 1958, Georges Pompidou aurait confié à André Malraux : « André, le général a prévu pour vous quelque chose de grandiose… Il voudrait que vous donniez du panache au rayonnement et au génie français »11. De Gaulle lui-même se serait adressé en ces termes à Michel Debré, premier ministre pressenti, lors de la phase préparatoire de composition du premier gouvernement suivant le vote de la nouvelle constitution : « Il vous sera utile de garder Malraux. Taillez pour lui un ministère, par exemple, un regroupement de services que vous pourrez appeler “Affaires culturelles”. Malraux donnera du relief à votre gouvernement »12

Ce ministère, qui revint ainsi en quelque sorte de droit à André Malraux, et fut effectivement installé le 3 février 1959, se vit d’emblée hissé au rang de ministère d’État, attestant l’importance majeure qui lui était conférée par le fondateur de la Ve République. Officialisées par un décret du 24 juillet 1959, que Malraux a sans doute lui-même rédigé13, les Affaires culturelles reçoivent la mission de « rendre accessibles les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de Français, assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel et favoriser la création des œuvres d’art et de l’esprit qui l’enrichissent ». Le ministre s’exprimera dans une même perspective le 17 novembre 1959 à l’Assemblée nationale en formant le projet « que n’importe quel enfant de seize ans, si pauvre soit-il, puisse avoir contact avec son patrimoine national et avec la gloire de l’esprit de l’humanité ». En matière de budget, si l’abondement des premières années a juste permis la mise en œuvre de cette politique tournée vers l’exaltation du patrimoine français et sa continuation créatrice dans le même esprit, c’est surtout à partir de 1966 que des moyens plus substantiels arriveront, vite percutés par la crise de mai-juin 1968, la démission du général en avril 1969 et le départ de Malraux qui s’ensuivra.

De Gaulle et le théâtre avant la Présidence de la République

Enfant et adolescent, Charles de Gaulle fut élevé par son père, Henri, « dans le respect des écrivains et de la vie de l’esprit »14. Ce père introduisit ses enfants (trois garçons et une fille) à la littérature classique, aux oraisons funèbres, au théâtre du xviie siècle. Corneille marqua particulièrement le jeune Charles au point que « toute sa vie, (il) fut capable de citer de mémoire de longs passages de ses pièces les plus obscures »15 et porta en lui la problématique cornélienne de la tension entre bonheur individuel et devoir héroïque. Plus généralement, Henri de Gaulle entendait inculquer à ses enfants le sentiment patriotique. À cet égard, l’œuvre d’Edmond Rostand (L’Aiglon, Cyrano de Bergerac) tint une place particulière dans le panthéon familial. Ainsi, en 1900, pour son dixième anniversaire, Charles fut accompagné à une représentation de L’Aiglon au théâtre de la Porte Saint-Martin, où il eut le privilège d’applaudir Sarah Bernhardt dans le rôle-titre de Franz, duc de Reichstadt, et Lucien Guitry, dans le rôle de Flambeau. Selon sa sœur Marie-Agnès, il sut aussi par cœur, jusqu’à sa mort, des passages entiers de ces pièces, au premier rang desquelles Cyrano. D’ailleurs, à l’école militaire de Saint-Cyr, dans la 94e promotion baptisée « Fez » (1909-1912), l’un des nombreux surnoms attribués à Charles, à côté de la « grande asperge », « double mètre » ou « sot-en-hauteur », fut précisément « Cyrano »16.

Cette influence de Rostand, combinée à celle du Ruy Blas de Victor Hugo, s’était fait sentir dans de premiers essais d’écriture de l’adolescent. Il rédigea ainsi en alexandrins, à l’âge de 15 ans, une saynète intitulée Une mauvaise rencontre, dans laquelle un brigand, muni de deux pistolets (en partie inspiré du personnage hugolien de Don César de Bazan, mais en moins sympathique), obtient tout de ce qu’il veut d’un voyageur égaré17. Avec un cousin, le jeune Charles représenta cette piécette devant sa famille. À Saint-Cyr, on retrouve le nom de l’élève Charles de Gaulle, comme simple acteur cette fois, et dans un rôle mineur, mentionné sur l’affiche18 annonçant la représentation de la pochade « En voyant l’astique »19. Mais, restant de l’ordre de l’anecdote propre à la tradition d’une grande école, cela ne saurait être porté au titre d’une dilection théâtrale particulière du futur général.

Plus significatif, il est intéressant de relever que, lors de conférences prononcées en 1927 devant de jeunes officiers à Trèves en Rhénanie, où il commande un bataillon d’occupation, Charles de Gaulle parsème son propos de références théâtrales, notamment à Shakespeare (citations d’Hamlet) ou à Ibsen, au point que ses auditeurs se moquent de ses « ibsénités »20. Par ailleurs, et sans que notre recension prétende à l’exhaustivité, nous repérons l’homme du 18 juin dans des salles de spectacle en qualité de chef du gouvernement provisoire, c’est-à-dire dans des situations où la relation avec un spectacle théâtral prend une coloration plus nettement politique. C’est le cas le 27 octobre 1944 où, dans la salle Richelieu de la Comédie-Française, il a assisté à une soirée consacrée aux poètes de la Résistance. A été notamment lu devant lui, à plusieurs voix, Le Veilleur du Pont-au-Change de Robert Desnos21, appel à et exaltation de la lutte générale, très applaudi. Puis, le 21 décembre 1945, de Gaulle se rend à la première de La Folle de Chaillot de Jean Giraudoux22, au théâtre de l’Athénée, spectacle qu’il a, à son poste de premier responsable gouvernemental, contribué à subventionner, attestant par là un goût pour la « magie incantatoire du verbe dramatique » – y compris le plus contemporain – selon la formule de Louis Jouvet23, le metteur en scène de la pièce24.

Place réservée au théâtre dans une politique culturelle de grandeur

D’après les archives du service du protocole de l’Élysée, pendant les dix ans de sa présidence (1959-1965 puis 1965-1969), Charles de Gaulle a « donné » en son nom propre, en sa qualité de président de la République, un total de 44 représentations officielles à l’intention de chefs d’État étrangers, partagées entre opéra, ballet, théâtre25. Sur ce total, onze pièces de théâtre peuvent être recensées, toutes jouées dans la salle Richelieu de la Comédie-Française, au cours de douze soirées de gala26. À ce total il convient cependant d’adjoindre une autre représentation, entourée de nettement moins d’éclat, puisque ayant eu lieu dans la salle de spectacles du Palais de l’Élysée, devant un public restreint, à l’intention d’un vice-premier ministre québécois27.

Le service du protocole étant impliqué au titre de l’organisation et de la sécurité, les archives qui en procèdent recèlent tous les documents relatifs aux spectacles officiellement vus par le général (notamment courriers de détermination des choix, plans de salles et d’éventuels réaménagements de la loge présidentielle28, cartons d’invitation, programmes, etc.) entre 1959 et 1969. En plus des documents relatifs aux onze pièces présentées par le président à des hôtes de marque à l’occasion des soirées de prestige29, les cartons consultés aux Archives nationales contiennent deux mentions de représentations à statut différent. Il s’agit de deux premières soirées, également « de gala », dues à l’initiative du ministre André Malraux, alors puissance invitante, inaugurales de la nouvelle politique culturelle, et organisées en l’honneur du président lui-même.

Évoquons d’abord – en conformité avec la chronologie – ces deux soirées dont l’une se tint à l’« Odéon-Théâtre de France », salle désormais confiée par décision du ministre à la direction de Jean-Louis Barrault et Madeleine Renault, alors que, pendant les treize années précédentes, elle avait été la « salle Luxembourg » de la Comédie-Française. Il s’agissait, pour Malraux, de dédier un autre théâtre national, rendu indépendant de l’institution ancestrale fondée en 1680, au répertoire contemporain. Et c’est par une pièce de Paul Claudel, jamais représentée jusque-là, écrite en 1889, remaniée en 1894, mais ressortissant bien au théâtre moderne, que le ministre fait débuter la nouvelle geste culturelle marquée du sceau du gaullisme : Tête d’or. Il a placé la barre très haut avec cette œuvre-fleuve, baroque, mêlée de thèmes païens et chrétiens, voire sulpiciens, contenant des longueurs et des trivialités, mais parcourue de vraies fulgurances poétiques, traitant du problème de la volonté de pouvoir absolu et des fins de l’existence. L’exigence créatrice de très haut niveau a été voulue au rendez-vous : outre la mise en scène naturellement confiée au nouveau co-directeur de l’Odéon, Jean-Louis Barrault, ont été invités André Masson pour les décors, Arthur Honegger pour la musique, Pierre Boulez pour l’adaptation musicale scénique. Dans une distribution pléthorique conforme au nombre imposant de personnages de la pièce, les rôles-titres sont tenus par Alain Cuny (Simon Agnel, Tête d’Or), Laurent Terzieff (Cébès), Catherine Sellers (la Princesse), Jean-Louis Barrault (le roi). Même si le Tout-Paris de la politique, des arts et des lettres (mille personnes) a été convié pour cet événement inaugural à intention grandiose, sans doute la fameuse barre a-t-elle été placée trop haut en matière dramaturgique, comme en attestent les réactions négatives de nombreux spectateurs30. De Gaulle, lui, d’esprit claudélien31, ne participa point de la curée ; « vivement intéressé » par « l’aspect insolite des talents de l’auteur », il confia : « Ce Claudel, tout de même, il a du ragoût ! », rejoignant en quelque sorte la critique d’André Alter dans Témoignage chrétien : « Les incompréhensions du public en habit et en robe du soir… n’y changeront rien : un chef-d’œuvre dramatique qui s’apparente à ceux d’Eschyle et de Shakespeare vient d’accomplir son destin »32.

Le deuxième événement fort de cette nouvelle politique de grandeur culturelle eut lieu, une semaine plus tard, toujours à l’initiative de Malraux et en présence du général, à la Comédie-Française, avec une représentation d’Électre de Jean Giraudoux, relevant certes de la grande qualité d’écriture à la française mais se situant presque en opposition à la veine claudélienne, avec son lot de fulgurances et de scories, comme le critique Jean Vigneron en fait l’analyse dans La Croix du 13 novembre 1959 : Malraux, écrit-il, « a mis en lumière les deux pôles essentiels, les deux lignes de force de notre génie national : la grandeur et le brio, la force et la grâce, la gravité et la virtuosité ». La réception de cette version modernisée de la tragédie antique interprétée par les comédiens français (dont François Chaumette, Georges Chamarat, Robert Hirsch, Annie Ducaux, Pierre Dux) fut alors d’une tout autre nature33. Cette soirée du 29 octobre 1959 voit le retour de Charles de Gaulle dans la salle Richelieu, où sa dernière apparition officielle datait des lendemains de la Libération34. Gérald Gohier note dans Paris-Jour : « Comme au Grand siècle, les regards de la salle cherchent celui du général de Gaulle. Très droit, très immobile, à peine hoche-t-il la tête de temps en temps, à peine approuve-t-il à cette réplique qui, visiblement, l’amuse : “Beaucoup d’hommes meurent pour des bœufs, des chèvres, des cochons, mais trouvez-moi donc un homme qui meurt pour les hommes… c’est rare35 !” »

Représentations théâtrales de gala au service du soft power français

Les soirées de gala consacrées au théâtre ont toutes eu lieu à la Comédie-Française avec les seuls comédiens de la troupe, sauf en une exception notable ayant défrayé la chronique36 ; supposant la compréhension fine d’une langue élaborée, elles étaient destinées à des chefs d’État francophones (le ballet et l’opéra étant réservés aux autres, tels John Kennedy ou Nikita Khrouchtchev) et relevaient toutes du répertoire classique français, conformément à ce qui était encore la vocation de la Maison de Molière. Le service du protocole, supervisé par le directeur de cabinet et les conseillers de la présidence, avait en charge l’organisation de ces soirées, dont le déroulement était anticipé à la minute près (secrétant une imposante paperasse).

À chacune des représentations, le rituel est bien rodé (des retransmissions en direct au journal télévisé, conservées dans les archives de l’INA, en donnent une idée37) : arrivée solennelle du président et de son hôte, montée de l’escalier central à travers une haie d’honneur composée de gardes républicains (et même parfois de figurants en perruques et costumes du xviiie siècle), installation dans la loge présidentielle, rencontre immuable, lors de l’entracte, avec les comédiens (présentés, au cours de cette période, par l’administrateur général en poste à partir de 1960, Maurice Escande38), départ à une heure très précise (ce qui limite étroitement le temps laissé aux applaudissements et éventuels rappels). Sous la mention « Soirée donnée à la Comédie-Française par le général de Gaulle en l’honneur de… », les cartons d’invitation précisent : tenues de soirée, robes longues, uniformes, décorations ; ils contiennent le titre de la pièce et la place attribuée aux invités selon leur rang, ils sont parfois agrémentés d’insignes (par exemple dessin des armes du Grand-Duché du Luxembourg, « cordonnet » aux couleurs de la République centrafricaine…) ; un texte accompagnant le programme est souvent demandé à un auteur célèbre (par exemple le philosophe catholique Jean Guitton pour Polyeucte).

Des échanges s’organisent, sous forme de courriers et d’appels téléphoniques, entre le palais de l’Élysée et l’administration de la rue de Richelieu, en vue de sélectionner la pièce adéquate pour telle ou telle occasion, telle ou telle personnalité. Sont généralement choisies, sans poser de problème particulier, des créations ou des reprises inscrites au programme de l’année en cours : sur les dix années en question, sont mobilisées des œuvres de Racine (2), Corneille (2), Molière (2), Musset (1), Marivaux (2), Rostand (1, vue à deux reprises), Hugo (1, vue également deux fois)39.

Un problème, surprenant, survient cependant en octobre 1963 lorsque l’administrateur Maurice Escande propose Les Fourberies de Scapin (dans une mise en scène de Jacques Charon et des décors et costumes de Robert Hirsch) pour la soirée en l’honneur de la grande duchesse Charlotte de Luxembourg. Informé, le directeur de cabinet Georges Galichon (1961-1967) écrit une note à M. Coury, préfet, chargé de mission au cabinet de la Présidence, dans laquelle il indique : « J’ai dit à M. Labelle40 que le général de Gaulle jugeait peu opportun la présentation à la Grande-duchesse de Luxembourg des “Fourberies de Scapin” le jeudi 3 octobre prochain. Il conviendrait de faire rapidement des propositions convenables à l’ambassadeur de Luxembourg et s’assurer auparavant qu’elles recueillent l’agrément du général de Gaulle »41. On n’épiloguera pas ici sur les raisons ayant pu pousser le général à récuser Les Fourberies, pour seulement constater que furent finalement représentées devant la grande duchesse Charlotte et son mari Le legs de Marivaux et Un caprice d’Alfred de Musset, deux pièces courtes plus aseptisées.

Comme on l’a vu, c’est exclusivement la Comédie-Française qui est mise à l’honneur lors des soirées de gala théâtrales organisées à l’intention des hôtes étrangers francophones. Toutefois, au cours de la période, ont pu surgir quelques dérogations à la règle consistant à tout confier aux membres de la Maison de Molière, dans une volonté de renchérir sur les effets de grandeur et de magnificence. Ce fut ainsi le cas pour Ruy Blas, dont la mise en scène échappa à un metteur en scène maison au bénéfice d’un « extérieur », Raymond Rouleau, qui avait réussi à l’opéra Garnier une grandiose Carmen et était donc réputé avoir le sens du « grand spectacle ». Last but not least, le rôle de Don Salluste revint à Gérard Oury, qui avait été pensionnaire jadis, mais était depuis longtemps passé au secteur privé (spécialement celui du cinéma). Plusieurs incidents sérieux – notamment une rixe suivie d’une démission42 – émaillèrent d’ailleurs la préparation de ce spectacle au cours de l’automne 1960, avant que le président – dont on a noté le goût personnel pour le drame hugolien – n’y assiste, après plusieurs reports, d’abord à titre privé le 17 février 1961, puis n’en offre la teneur au président de la République du Gabon le 24 mars suivant. Le comédien Jacques Charon s’était ainsi plaint dans le quotidien L’Aurore du 4 octobre 1960 :

Nous trouvons simplement insensé que, dans un théâtre d’État, un animateur de passage embauche, pour six mois, un metteur en scène de cinéma pour être Don Salluste, quand au moins dix acteurs de la troupe se tournent les doigts de désespoir et pourraient incarner le personnage à merveille…

La même « folie des grandeurs » (selon le titre du film que réalisera précisément G. Oury en 1971, d’après Ruy Blas !) s’empare du Théâtre français en 1964 à l’occasion de la recréation de Cyrano de Bergerac promise à constituer une sorte d’acmé d’un théâtre national, voire nationaliste, paré de tous les atours de l’excellence, ce dont la presse tint une chronique régulière à grand renfort de reportages effectués pendant les répétitions rue de Richelieu43. Mais cette fois nul appel ne fut fait à des talents dramatiques extérieurs. Dans une mise en scène de Jacques Charon, sur une scénographie de Jacques Dupont et une musique de Marcel Landowski, pas moins de cent personnages et deux chevaux en chair et en os apparaissaient sur scène ; Cyrano était incarné par Jean Piat, qui connut alors une célébrité nationale et même internationale (le spectacle fut exporté notamment en URSS), et Roxane par Geneviève Casile. Le spectacle (41 rappels lors de la première le 8 février 1964) fut un immense succès populaire. Pour les raisons que l’on a déjà dites – à un an de l’élection présidentielle au suffrage universel prévu par la nouvelle constitution – il ne pouvait que combler le sentiment patriotique et d’exaltation d’une grandeur nationale retrouvée de l’homme du 18 juin, qui se voulait depuis sa jeunesse porteur d’« une certaine idée de la France »44. Salué par le président comme il se doit à l’entracte (le 6 mars), Jacques Charon aima ensuite à répéter : « J’aime bien de Gaulle, c’est le seul à m’appeler maître »45. Le général n’hésita pas à proposer deux fois cette représentation grandiose à des hôtes de marque, en 1964 puis en 1967.

Ainsi, le théâtre saisi par le politique (comme l’opéra et la danse, soumis au même régime protocolaire) apparaît-il, sous la présidence de Gaulle, comme une chose solennelle, aux contours esthétiques étroitement délimités (le répertoire classique consacré, exclusivement français), visant à la célébration de l’excellence (la troupe de la Comédie-Française étant censée la condenser en elle) et à l’exaltation plutôt guindée de la grandeur nationale. En termes contemporains, on peut dire que c’est un des éléments du soft power46 français en tout cas de l’aspect par lequel celui-ci, investissant spécialement sa composante culturelle, est dirigé vers les chefs d’État étrangers francophones, le plus souvent ex-membres de l’Empire, à un moment où celui-ci se défait et où la France cherche une autre forme d’hégémonie à leur endroit.

Un usage du théâtre presque à front renversé sous la présidence Pompidou (1969-1974)

Georges Pompidou et le théâtre avant l’accession au pouvoir

Georges Pompidou fut élève de l’École normale supérieure (ENS) de la rue d’Ulm de 1930 à 1933 ; à lui-même, qui affichait une décontraction absolue en face des épreuves de concours ou d’examens aussi bien qu’une absence apparente de travail acharné, peut être appliquée la formule par laquelle il définit le normalien dans la préface rédigée pour le livre d’Alain Peyrefitte Rue d’Ulm : « On ne devient pas normalien, on naît normalien comme on naissait chevalier »47. Pendant cette période, son biographe le dépeint sous les traits d’un dandy littéraire qui fréquente beaucoup les théâtres parisiens48. Après avoir écrit une lettre d’adolescent passionné à Valentine Tessier, vue dans Amphytrion 38 de Giraudoux en 1930, il serait même tombé amoureux un peu plus tard d’une autre grande actrice de l’époque, Renée Falconetti49, immortalisée par le cinéma avec le rôle de Jeanne d’Arc dans le film éponyme de Carl Dreyer (1928). Le jeune étudiant l’admira tant dans Les Caprices de Marianne, la pièce de Musset donnée au Théâtre de l’avenue50, qu’il vint à plusieurs reprises lui offrir un bouquet de fleurs. Parmi les auteurs qu’il affectionne alors, une place de choix est réservée aux contemporains, Anouilh, Cocteau, Giraudoux… Si des auteurs, comme le dernier cité, se retrouvent en partage avec celui dont il deviendra le conseiller, le directeur de cabinet puis le Premier ministre, il reste que leur relation au théâtre diffère d’emblée assez nettement : politisée, au sens de rapportée le plus souvent à une célébration de l’esprit national, pour Charles de Gaulle, plus délibérément esthétisante et « gratuite » chez l’agrégatif de lettres classiques.

Au terme de sa brève carrière de professeur (1933-1944), alors qu’il enseignait encore au lycée Henri IV, Georges Pompidou rédigea une présentation du Britannicus de Racine pour les classiques Hachette51. Celle-ci est trop prise dans les contraintes didactiques de la collection pour révéler quoi que ce soit de profond de la relation du futur homme politique au théâtre en général ou même à Racine en particulier. Premier ministre de 1962 à 1967, Pompidou continua à fréquenter les scènes, comme en atteste une photographie prise à la Comédie-Française à l’occasion de la première de Don Juan52 en février 1967, mise en scène par Antoine Bourseiller.

Une continuité ténue avec la période précédente

Sous les cinq ans de la présidence Pompidou, brutalement interrompue par son décès en cours de septennat le 2 avril 1974, la tradition des soirées de gala, avec la signification qui les accompagne, leur localisation dans la salle Richelieu de la Comédie-Française, et le cérémonial mis en œuvre sous de Gaulle, ne subsiste en matière de théâtre qu’en deux occasions. Selon les archives du service du protocole de l’Élysée, c’est le cas le 27 septembre 1971 : Georges Pompidou et son épouse président la représentation de gala de Becket ou l’honneur de Dieu, de Jean Anouilh, donnée au profit de l’Association des paralysés de France. Devant les caméras de la télévision, et en direct, le président répond à la journaliste Danièle Breem : « J’ai vu plusieurs de ses pièces (Anouilh), des roses et des noires53. Je ne dirais pas que c’est le plus grand de nos auteurs parce que je ferais des jaloux, mais c’est un des plus grands […] ça arrive (que j’aime les pièces d’avant-garde), pas forcément parce qu’elles sont d’avant-garde, j’aime les bonnes pièces, d’avant-garde ou autres… »

La deuxième occasion de soirée de gala a lieu le 6 avril 1973 pour la réouverture de la salle Richelieu après travaux. Est représenté le grand classique de la Maison de Molière, Le Bourgeois gentilhomme, dans une mise en scène contemporaine due à Jean-Louis Barrault, avec Jacques Charon dans le rôle de M. Jourdain. Après une rencontre avec le père Joseph Wresinski et Geneviève Anthonioz-de Gaulle, fondateurs du mouvement, le président tenait en effet à ce que la recette de cette soirée soit destinée à l’association Aide à toute détresse (ATD). En présence d’une centaine d’habitants du camp de Noisy-le-Grand, invités, et donc représentants du « quart-monde » à cet événement, les caméras du Journal télévisé étant à nouveau au rendez-vous, le célèbre journaliste de l’époque Léon Zitrone évoque en direct la présence du « Tout Paris charitable ». Par-delà le texte de Molière, par-delà la scénographie et la musique de la pièce nettement renouvelées54, le théâtre semble ici ne servir que de prétexte, comme le note Benoît Charlemagne dans ses Mémoires : « À l’entracte, une mère de douze enfants offre une gerbe de fleurs au président. Après la représentation, Valéry Giscard d’Estaing emmène les pauvres au ministère des Finances, sous les lambris dorés des salons du Louvre55, et leur offre un somptueux cocktail »56. On note encore une autre soirée de ce type, non théâtrale celle-là, au château de Versailles.

Sur un total de quinze pièces vues alors par le président à titre officiel, et concernant plus particulièrement les conditions de leur représentation, on relève peu d’éléments de continuité avec celles en vigueur sous la présidence de Gaulle. Hormis les deux ou trois exceptions signalées, l’usage fait du théâtre par Georges Pompidou se situe presque à front renversé de celui déployé par son prédécesseur : privatisation versus faste public. Peut-être encore plus significatif, de quel type de pièces s’agit-il ?

Des mutations dans les modes de représentation et dans le répertoire mobilisé

Les mêmes sources archivistiques (cartons du service du protocole présidentiel, aux Archives nationales) nous renseignent sur les conditions de représentation, le nombre et la nature des pièces jouées en présence de Georges Pompidou. La première surprise vient de ce que, hors celles mentionnées ci-dessus, toutes ont été représentées dans la salle de spectacles du palais de l’Élysée, nécessitant des adaptations scéniques dictées par l’étroitesse du plateau. Des raisons techniques pourraient être la cause de ce choix, du moins concernant les seuls comédiens français : les grèves puis les travaux entrepris dans la maison de la place Colette à l’automne 1972, entraînant des représentations sous un chapiteau du cirque Jean Richard dans le jardin des Tuileries. Or, à y regarder de plus près, l’habitude d’inviter les troupes du théâtre national et celles des théâtres privés à se produire au palais présidentiel, plutôt que de se déplacer, se prend dès l’année 1970. On peut alors parler de privatisation ou d’embourgeoisement de la représentation, donnée devant le couple Pompidou et un nombre forcément très limité d’invités. L’habitude se prend aussi, attestée par les plans de table soigneusement élaborés contenus dans les archives, d’organiser des dîners en concomitance avec le spectacle, toujours à l’Élysée, incluant principalement les acteurs et directeurs de théâtre, et quelques politiques triés sur le volet. La privatisation en question reste cependant relative, puisque la majorité de ces représentations est dédiée à une catégorie de personnel politique ou diplomatique57.

L’autre surprise tient à l’entrée de pièces dites de boulevard et d’un théâtre du rire pour lequel le président et son épouse semblent avoir eu un goût prononcé, ce qui n’eût pas été envisageable pour le général de Gaulle, du moins en matière d’art dramatique58. À ce fait se voient reliées la fin de l’exclusivité donnée à la Comédie-Française et l’invitation de troupes privées. Ainsi, sur les quatre pièces de boulevard ou vaudevilles représentés à l’Élysée, une seule, feu la mère de Madame, de Feydeau, est jouée (le 18 février 1971) par des membres du Français (Micheline Boudet, Denise Gence, André Reybaz, Jacques Charon, également metteur en scène). Pour les autres spectacles, ce sont des théâtres privés qui font venir auprès de la Présidence leurs vedettes du rire, toutes couronnées d’immenses succès auprès du grand public : Poiret et Serrault pour Le Vison voyageur de Ray Cooney et John Chapman (théâtre du Gymnase-Marie Bell) ; Jean Poiret à nouveau pour Le canard à l’orange de William Douglas-Home, adapté par Marc-Gilbert Sauvajon et Poiret lui-même (théâtre du Gymnase également) ; enfin Louis de Funès, au faîte de sa gloire, pour Oscar, de Claude Magnier (théâtre du Palais Royal). À ces occasions, le président Pompidou n’hésite pas à laisser rapporter publiquement, par exemple à propos du Vison voyageur : « Il y a longtemps que je n’ai autant ri »59 ou à laisser filtrer ses échanges avec de Funès, lui déclarant : « Vous êtes plus connu que moi ! »60 ou lui demandant s’il avait rajouté « Auvergne » dans une des répliques « pour lui faire plaisir »61. De son côté, le directeur du Théâtre du Palais Royal Jean-Michel Rouzière tient à témoigner dans une lettre au président que lui et la troupe ont été « particulièrement touchés et confiants quand nous avons senti Madame la Présidente et vous-même réagir avec la plus souriante bonhomie à un divertissement qui n’avait d’autre ambition que de vous amuser »62.

Une autre catégorie de pièces fait son entrée : celle du théâtre contemporain, réservée – dans l’usage – à des œuvres sérieuses ne relevant pas du boulevard. Cette catégorie ne fut pas ignorée par le président de Gaulle, comme on l’a vu, mais délibérément laissée de côté lorsqu’il s’agissait, sous sa mandature, de s’adresser à des hôtes francophones auprès de qui devait être exaltée la grande tradition française, éprouvée de longue date. Sous Pompidou, outre Becket ou l’honneur de Dieu d’Anouilh (soirée de gala à la Comédie-Française), déjà évoqué, on recense : Architruc, de Robert Pinget (à l’Élysée, le 11 mai 1971), par la Comédie-Française (dans le cadre de ses repérages de textes contemporains, qui ne valent pas automatiquement entrée au répertoire) et Deux femmes pour un fantôme, de René de Obaldia, par le théâtre de l’Œuvre. Si, pour ce dernier, la notion d’avant-garde ne peut être avancée, elle peut l’être pour la pièce de Pinget, proche dans sa thématique de l’absurde de certaines pièces de Samuel Beckett (pour autant ce ne furent ni ce dernier ni Ionesco, alors les plus célèbres, qui furent mobilisés par l’Élysée). Et, nature du public – même restreint – peu préparé aidant, il est à noter qu’Architruc fut représenté dans le même programme que L’impromptu de Versailles de Molière. On peut donc parler d’une certaine frilosité, compréhensible dans les circonstances, vis-à-vis du théâtre dit d’avant-garde, même très sage.

Il est au passage piquant de relever, dans la comparaison public-privé, que, là où l’administration de la Comédie-Française facture très précisément ses prestations auprès de la Présidence, une troupe privée comme celle du Théâtre de l’Œuvre met un point d’honneur à offrir gratuitement son intervention. Ainsi ses directeurs Georges Herbert et Pierre Franck écrivent-ils à M. Rody, chef du service financier de l’Élysée : « nos comédiens ne demandent aucun cachet pour la représentation du 29 mai… nous sommes particulièrement heureux de mettre gratuitement à la disposition de l’Élysée nos décors et l’ensemble de notre matériel… Nous prendrons également à notre charge les salaires de nos techniciens »63.

Les classiques ne sauraient être absents de ce répertoire élyséen. On retrouve alors nécessairement des auteurs joués en présence du général de Gaulle : Molière (2)64, Marivaux (2)65, Musset (2)66. Le propre beau-frère du président, lui aussi agrégé de lettres, Henri Domerg, conseiller technique à l’Élysée (affaires culturelles), intervient particulièrement à ce niveau. Par exemple, pour L’âne et le ruisseau de Musset, c’est lui qui reçoit une proposition de représentation, écrite en ces termes par le secrétariat général de la Comédie-Française, Claude Bénédick : « Voici un exemplaire du Théâtre de Musset dans lequel vous trouverez L’âne et le ruisseau (p. 279). J’ai retenu, provisoirement, la date du 29 janvier… J’attends vos instructions et vous prie d’agréer… »67. À son tour, quinze jours plus tard, Domerg donne son aval par courrier interne devant passer par M. Suel, lui-même conseiller technique68, premier destinataire (Note pour M. le président de la République), et comportant son appréciation personnelle : « J’ai lu – ou relu – L’âne et le ruisseau, cette pièce, qui est un marivaudage, qui vous a été proposée…, est assez agréable et sans prétention ; on y trouve, un peu pâli, le talent de Musset… Au total, cette œuvre me paraît convenir »69. Le conseiller Domerg a apposé en haut à gauche une mention rajoutée et signée de sa main « sous observation du Président, donc approuvé ». Comme précédemment, mais avec beaucoup moins de faste, des bristols sont alors fabriqués pour présenter sobrement les spectacles (titre et distribution) aux invités.

Enfin, un dernier type de représentation a les faveurs du président : celui des montages et des lectures poétiques. Ainsi, lui sont représentés par les comédiens Français, alors que la maladie a déjà beaucoup progressé en lui, La troupe du Roy, hommage à Molière à partir d’extraits de ses pièces, le 10 mai 1973, puis Promenade poétique parmi les grands auteurs français, le 13 novembre. Après l’écoute du premier de ces spectacles, qu’Henri Domerg lui avait préalablement présenté dans une note, le président a tenu à adresser personnellement une lettre à Pierre Dux, administrateur général70, dans laquelle il remercie chaleureusement tous les comédiens, et plus particulièrement Jacques Charon et Robert Hirsch, en regrettant que les circonstances ne lui aient pas permis sur le moment « de leur exprimer des félicitations autres que banales »71. Autrement dit, se remarque là une attitude d’admiration plus que formelle pour les actrices et acteurs, et d’attention à leur sensibilité. Concernant le second spectacle, on sait que Georges Pompidou, avant de devenir premier ministre, avait dirigé en 1961 la publication d’une Anthologie de la poésie française72. Seuls trois des poèmes dits ce soir-là par les « vedettes » de la Comédie-Française (dont la toute jeune Isabelle Adjani) ne figuraient pas dans cette Anthologie. Ce fut l’ultime spectacle, officiellement répertorié, vu par le président Pompidou avant sa mort au printemps suivant.

Quelques remarques conclusives

Pour Georges Pompidou, le théâtre n’apparaît pas essentiellement utilisé comme un élément de représentation du pouvoir, encore moins de représentation de la grandeur nationale, ainsi qu’il en fut sous la présidence de Gaulle. Il est plutôt une occasion de plaisir de tous ordres, de célébration de la beauté et de l’intérêt de textes classiques ou contemporains, d’émotions diverses, et assez souvent – ne l’oublions pas – de rire franc, toutes réactions que le président et son épouse peuvent faire partager à un public politiquement sélectionné, mais en nombre très restreint, au palais de l’Élysée, dans un cadre proche de l’espace privé. Entre le général et son successeur, l’on tend à retrouver le fossé existant entre le rapport entretenu avec la culture littéraire et théâtrale par le militaire et celui entretenu par le normalien. Là où le premier, par son éducation et sa formation, par son histoire politique axée autour du moment fondateur du 18 juin 1940, cherche à choisir dans les œuvres théâtrales et leur mise en scène celles qui peuvent illustrer la grandeur de l’esprit national, le second affiche une relation beaucoup plus détendue à la culture dramatique, car – pour parler dans les termes de Bourdieu – celle-ci lui est en quelque sorte, dans la variété de ses formes, « incorporée », consubstantielle, inhérente à ses habitus, comme le révèle sa fréquentation des théâtres parisiens pendant ses années d’étudiant à l’ENS. C’est d’ailleurs sans doute la raison pour laquelle il ne s’interdit nullement le plaisir de pièces de boulevard à seule intention de rire au premier degré. Tout se passe pour lui comme si, une fois faite la part des contraintes liées à la fonction présidentielle exigeant un minimum de concessions à la « représentation », Georges Pompidou, normalien, agrégé de lettres classiques, ainsi détenteur des titres parmi les plus prisés dans la République d’alors, se libérait de tout éventuel complexe vis-à-vis de l’intelligentsia guindée et volontiers inhibitrice pour s’adonner au plaisir du rire sans arrière-pensée et à la détente par le théâtre – ce que celui-ci peut être aussi, quoique pas seulement, le sérieux des « réjouissances intenses » n’ayant pas manqué non plus au cours des cinq ans de gouvernance pompidolienne.

Pour avoir très étroitement associé représentation(s), notamment théâtrales, et célébration patriotique, Charles de Gaulle n’en avait pas moins un répertoire de références personnelles plus large que ce qu’il en laissa paraître officiellement au cours de ses dix ans de présidence, comme cela a été entr’aperçu plus haut. Ainsi, outre Claudel, auteur difficile, Giraudoux et Anouilh, il incluait dans son panthéon Shakespeare, Ibsen, et même Alfred Jarry73. On peut donc bien parler à son endroit d’un usage politique délibéré du théâtre français et de sa mise en scène par la troupe nationale historique, tandis qu’avec Georges Pompidou s’amorce, sensible entre autres dans un nouveau rapport à l’art dramatique, une nouvelle manière de gouverner, moins solennelle et empesée, plus directement en prise avec des comportements ordinaires. Au fond, chacun illustre, à travers cet exemple du théâtre, bénéficiant alors – grâce à la place importante que lui accordait la presse écrite – d’une aura publique aujourd’hui disparue, un versant du comportement du Prince selon Machiavel : il « montrera toujours de l’humanité et de la magnificence », l’un (de Gaulle) étant nettement plus proche de la magnificence, l’autre (Pompidou) de l’humanité, sans que jamais chacun n’ait compromis « néanmoins la majesté de son rang »74.

Bibliography

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Notes

1 Adaptation de Jacques et son maître (Milan Kundera, d’après Diderot) ; L’épouvantail, joué en mai 1993, adapté de La comédie du langage (Jean Tardieu) ; L’Art de la comédie, joué le 11/05/1994 (réécrit d’après Eduardo de Filipo). Return to text

2 Il s’agit de Michel Bouquet (1925-2022). Le nouveau président se fait photographier avec lui dans sa loge au théâtre de la Porte Saint-Martin, à l’issue d’une représentation de Tartuffe (14/10/2017). Il lui rend un hommage national dans la Cour des Invalides le 22/04/2022. Return to text

3 À regarder la fréquentation des théâtres parisiens par le président et son épouse (particulièrement le théâtre Antoine) ainsi que les titres des pièces vues au début du premier quinquennat, ce genre pourrait être défini comme celui du « boulevard de qualité ». Return to text

4 Il s’agit des Archives du service du protocole de l’Élysée contenant les détails relatifs aux « sorties spectacles » des deux premiers présidents de la Ve république au cours de leurs mandats. Cf. Archives nationales (désormais AN) : pour le président de Gaulle, AN : cotes AG/5(1)/483 à AG/5(1)/493 ; pour le président Pompidou, AN : cotes AG/5 (2)/ 748 et AG/5 (2)/ 749. Service du protocole de la Présidence. Return to text

5 Philippe Poirrier. (2008). L’histoire culturelle en France. Une histoire sociale des représentations. Dans Poirrier, P. L’histoire culturelle, un « tournant mondial » dans l’historiographie ? Éditions universitaires de Dijon, p. 27-39. Return to text

6 Pascal Ory (2000), Qu’est-ce que l’histoire culturelle, Université de tous les savoirs, https://www.canal-u.tv/chaines/utls/la-connaissance-de-l-histoire/qu-est-ce-que-l-histoire-culturelle. Return to text

7 Dans Petit organon pour le théâtre, Bertolt Brecht cherche, au sein de la forme théâtre traitée comme « lieu de divertissement », « quel divertissement nous convient », et distingue « réjouissances faibles » et « réjouissances intenses », ces dernières seules correspondant aux « grandes œuvres ». Petit organon pour le théâtre (1970). Éds de L'Arche. Return to text

8 C’est nous qui soulignons. Return to text

9 Selon l’auteur : la mauvaise qualité de la pièce, de la mise en scène et/ou de l’interprétation, etc., pouvant générer l’ennui et autres formes de rejet, comme éléments consubstantiels à l’expérience théâtrale prise dans sa globalité (évidemment non exclusive du bonheur intellectuel et sensible ressenti à certaines occasions). Return to text

10 Mathieu Haumesser (2018). L’Autre Scène. Philosophie du théâtre. Vrin, p. 123 (chapitre 5, La scène politique). Return to text

11 Témoignage d’Alain Peyrefitte, dans Jean-Claude Groshens et Jean-François Sirinelli (2000). Culture et action chez Georges Pompidou, Actes du colloque, Paris : 3 et 4 décembre 1998. PUF, p. 75. Return to text

12 Charles-Louis Foulon (1990). Des beaux-arts aux affaires culturelles (1959-1969). Vingtième siècle, no 28, octobre-décembre, p. 29-40. Return to text

13 Olivier Todd (2002). André Malraux, une vie. Gallimard,, coll. Folio. Return to text

14 Julian Jackson. (2024). De Gaulle. Une certaine idée de la France. Seuil, p. 54. Return to text

15 Jackson, op. cit., p. 62. Return to text

16 Jules Maurin. (2001). « De Gaulle, Saint-Cyrien » dans Charles de Gaulle, la jeunesse et la guerre 1890- 1920, colloque international : Lille, 5-6 novembre 1999. Paris, Plon, Fondation Charles de Gaulle. Return to text

17 Charles de Gaulle (1906). Une mauvaise rencontre, saynète comique. La Chapelle Montligeon, Imprimerie de La Chapelle Montligeon. Return to text

18 Évoqué dans le documentaire TV de Raphaëlle Baillot et Jérôme Bermyn (2020). L'artiste de Gaulle (durée : 91 minutes). Return to text

19 « Astiquage, nettoyage, nettoyage des effets d'habillement, d'armement et d'équipement ; planche pour l'astiquage ; veste et pantalon de toile grise que l'on met pendant l'astique, ainsi que pour les exercices physiques, gymnastique et escrime », d’après Lorédan Larchey, note de lecture sur l’argot de Saint-Cyr, 1893 (languefrancaise.net). Return to text

20 Jackson, op. cit., p. 127. Return to text

21 Robert Desnos, poète surréaliste (1900-1945), résistant du réseau Agir arrêté par la Gestapo le 22/02/1944, mort en déportation le 08/06/1945 au camp de Theresienstadt. Return to text

22 Celui-ci était décédé le 31 janvier 1944. Return to text

23 Louis Jouvet. (1938). Réflexions du comédien. Éds de la Nouvelle revue critique, p. 37. Return to text

24 Avec Marguerite Moreno dans le rôle-titre. Return to text

25 Voir André D. Robert. (2023). Le théâtre des présidents. Présidents de la Ve République et représentations théâtrales (1959-2002), Colombe-sur-Gand, La Rumeur libre. Return to text

26 Une pièce, Cyrano de Bergerac, a été présentée deux fois, à deux présidents (Nicolas Grunitzky, président togolais, le 06/03/1964, puis Christophe Soglo, président du Dahomey, le 23/11/1967, alors dans une version réduite aux actes I, III et V). Return to text

27 La Commère, comédie en un acte de Marivaux, mise en scène par Jean-Paul Roussillon, a alors été donnée à voir à Jean-Guy Cardinal le 22/01/1969. Return to text

28 Comme c’est le cas le 24 mars 1961 pour la représentation de Ruy Blas (AN, AG/5(1)/483. Return to text

29 Ruy Blas a été vu deux fois par le président, une fois à titre privé (le 17/02/1961), une autre fois en l’honneur de Léon M’Ba, président du Gabon (le 24/03/1961). Return to text

30 Voir Le Figaro, 22/10/1959. Return to text

31 Après la mort de l’écrivain, il avait écrit à sa veuve : « En retirant de ce monde le génie de Paul Claudel, Dieu y a laissé son œuvre et je crois bien que c’est pour toujours », dans Yannick Dehée et Catherine Trouiller (dirs).(2020). De Gaulle inattendu, Paris, éds du Nouveau Monde & Ministère des Armées, p. 127. Return to text

32 Témoignage Chrétien, 22/10/1959. Return to text

33 Le même Jean Vigneron écrit : « Les spectateurs du gala d'Electre n’ont point fait montre de cette mauvaise humeur qui les prit devant Tête d’Or », ibid. Return to text

34 Voir supra. Return to text

35 Paris-Jour, 30/10/1959. Return to text

36 Voir infra. Return to text

37 Par exemple, https://ina.fr/video/CAF94074852. Return to text

38 Maurice Escande (1892-1973), administrateur général de la Comédie-Française de 1960 à 1970. Return to text

39 Andromaque et Britannicus, Polyeucte et Le Cid, L’Avare et Le Malade imaginaire, Un caprice, Le legs et Le Prince travesti, Cyrano, Ruy Blas. Return to text

40 Chargé de mission aux Affaires culturelles à la présidence de la République. Return to text

41 AN, AG/5(1) 487. Return to text

42 Robert Hirsch renonce, une semaine avant la première, à tenir son rôle de Don César de Bazan en présence de Gérard Oury, maintenu en Don Salluste. Il est remplacé par Jean Piat. Return to text

43 Phénomène qu’on a du mal à s’imaginer aujourd’hui concernant le théâtre. Return to text

44 «Toute ma vie, je me suis fait une certaine idée de la France », incipit du tome 1 (1954) des Mémoires de guerre. L'Appel, 1940-1942. Plon. Return to text

45 Selon Jean Piat, dans Patrice Duhamel et Jacques Santamaria (2020). De Gaulle. L’album inattendu. éds de l’Observatoire. Return to text

46 Joseph S. Nye Jr, inventeur de la notion (2004). Soft Power: The Means to Success in World Politics. New York: Public Affairs. Nye Jr définit le « soft power » par trois modes opératoires : des conduites (« attraction », « agenda setting »), des outils (les valeurs, la culture, les institutions) et des politiques publiques et diplomatiques. Return to text

47 Alain Peyrefitte (1963). Rue d’Ulm : chroniques de la vie normalienne. Flammarion (introduction de Georges Pompidou) Return to text

48 Voir Éric Roussel. (1984). Georges Pompidou. J.-C. Lattès Return to text

49 1892-1946. Return to text

50 Situé 5 rue du Colisée à Paris 8e, ce théâtre n'existe plus en tant que tel. Fondé en 1912 sous le nom de Théâtre Impérial, il devint le Théâtre de l'Avenue en 1919 sous la direction de Maurice Dupont. Transformé en music-hall vers 1940, il devint ensuite le Cinéma de l'Avenue. Return to text

51 Georges Pompidou (1944). Présentation de Britannicus. Hachette, collection Classiques France. Return to text

52 Photo de Robert Girardin (fonds France-Soir, Bibliothèque historique de la Ville de Paris) montrant G. Pompidou et son épouse en conversation avec les comédiens Georges Descrières (Don Juan) et Ludmila Mikaël (Elvire). Return to text

53 Catégorisation de ses différentes pièces, due à Jean Anouilh lui-même. Return to text

54 Michel Colombier a procédé aux arrangements de la musique de Lully. Return to text

55 Alors siège du ministère des Finances, dont le titulaire est Giscard d'Estaing. Return to text

56 Benoît Charlemagne. (1980). Un chameau dans le trou d'une aiguille. Les aventures d'un capucin à travers le monde. Fayard/Mame. Return to text

57 À l'intention du corps diplomatique, du gouvernement ou encore des membres du bureau du Parlement, des rapporteurs et présidents de commission. Return to text

58 De Gaulle, dit-on, apprécia des films avec Louis de Funès. Return to text

59 France-Soir, 09/04/1970, « Les potins de la commère ». Return to text

60 Rapporté dans Le Nouvel Observateur du 20/12/1971, article de Guy Dumur. Return to text

61 France-Soir, 02/03/1972. Return to text

62 Lettre en date du 1.03. 972, AN, AG/5 (2)/ 749. Return to text

63 Lettre en date du 02/05/1972, AN, AG/5 (2)/748. Return to text

64 Outre L'Impromptu mentionné ci-dessus, Le bourgeois gentilhomme. Return to text

65 Les sincères et L'île des esclaves. Return to text

66 L'âne et le ruisseau et On ne saurait penser à tout. Return to text

67 Lettre en date du 07/11/1969, AN, AG/5 (2)/749. Return to text

68 Jacques Suel (1918-2000), conseiller technique aux affaires étrangères avant d'être nommé à la défense nationale le 01/05/1970 (J.O. du 05/06/1970, p. 5230). Sa présence dans le processus s'explique par le fait que la soirée du 29 janvier est donnée à l'intention du corps diplomatique. Return to text

69 Courrier interne en date du 20/11/1969, AN, AG/5 (2)/749. Return to text

70 Pierre Dux (1908-1990), administrateur général de la Comédie-Française de 1970 à 1979. Return to text

71 Lettre du 11/05/1973, AN, AG/5 (2)/ 749. Return to text

72 Georges Pompidou (1961). Hachette. Return to text

73 Voir Jackson, op. cit., p. 137. Return to text

74 Machiavel (1962). Le Prince et autres textes. (Trad. J.V. Périès). UGE, coll. 10/18, p. 72, chap. XXI : « Comment doit se conduire un prince pour acquérir de la réputation ». Return to text

References

Electronic reference

André D. Robert, « Usage comparé du théâtre par les présidents de Gaulle et Pompidou (1959-1974) », La Pensée d’Ailleurs [Online], 7 | 2025, Online since 22 octobre 2025, connection on 03 décembre 2025. URL : https://www.ouvroir.fr/lpa/index.php?id=1265

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André D. Robert

Professeur des universités, émérite, en sciences de l’éducation, Université Lyon 2.

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