Le rôle de la littérature dans l’enseignement supérieur des langues étrangères en Suède – enseigner le français avec Le Tour de Gaule d’Astérix au niveau A2

DOI : 10.57086/dfles.1791

p. 99-119

Abstracts

Dans l’enseignement supérieur des langues étrangères en Suède, les cursus poursuivent une double ambition : développer la maîtrise pratique de la langue tout en initiant les étudiants à une approche scientifique de la littérature. À partir de trois enquêtes menées entre 2021 et 2024 auprès d’apprenants de niveaux A1 à C1 à l’université de Stockholm, cette étude examine les opinions des étudiants concernant le rôle de la littérature dans les cours de langue, ainsi que la réception de la bande dessinée comme support didactique au niveau A2. Les enquêtes montrent un décalage marqué entre les préférences des étudiants – qui, jusqu’au niveau B1 inclus, privilégient nettement l’usage traditionnel de la littérature au service de l’apprentissage linguistique – et la tendance récente, en Suède, à introduire l’analyse littéraire dès les premiers niveaux universitaires. L’enquête 3 révèle aussi l’appréciation positive de l’album Le Tour de Gaule d’Astérix dans un cours de niveau A2. Les étudiants trouvent propices à la compréhension du récit la relation texte-image, la brièveté des répliques et les temps verbaux utilisés. Ils jugent légitime l’étude d’une bande dessinée à l’université et trouvent la lecture d’Astérix plus motivante et plus formatrice sur le plan linguistique que celle de L’Étranger de Camus. Ces données suggèrent que la bande dessinée pourrait jouer un rôle de passerelle entre une approche traditionnelle de la littérature comme outil d’apprentissage linguistique et une approche scientifique centrée sur l’analyse des œuvres.

In Swedish higher education, modern language programs pursue a dual objective: fostering practical language proficiency while introducing students to the scientific study of literature. Drawing on three surveys conducted between 2021 and 2024 among learners from A1 to C1 levels at Stockholm University, this study examines students’ opinions regarding the role of literature in language courses, as well as the reception of a comic book as pedagogical material at the A2 level. The results reveal a significant gap between students’ preferences—who, up to the B1 level, strongly favour the traditional use of literature as a tool for linguistic development—and the recent Swedish trend to introduce literary analysis already in early university courses. Survey 3 also shows that Le Tour de Gaule d’Astérix is highly appreciated in an A2 French course. The learners find that the text–image relation, the short utterances, and the verb tenses all highly support the comprehension of the narrative. They consider comic books a legitimate study material at the university and perceive the Asterix book as more engaging and more effective for language learning than Camus’s L’Étranger. These results suggest that comic books can efficiently meet beginner learners’ expectations and may serve as a bridge between traditional language-oriented uses of literature and more scientific approaches.

Outline

Text

Introduction

L’étude du rôle de la littérature dans l’enseignement supérieur des langues étrangères en Suède s’inscrit dans un contexte particulier. Les modules littéraires y ont longtemps été dispensés par des généralistes sans formation en analyse littéraire. Or, ces dernières décennies, l’étude scientifique de la littérature est peu à peu apparue dans les programmes universitaires. Un recensement réalisé en 2021 portant sur l’enseignement du français, de l’allemand et de l’espagnol (les langues modernes les plus fréquemment enseignées en Suède) montre que les plus grandes universités de Suède (Stockholm, Uppsala, Lund, Umeå et Göteborg) proposent désormais, au sein de l’apprentissage de la langue, des modules qui visent des compétences davantage littéraires que langagières et ce dès le niveau B1. On peut ainsi identifier une approche récente, centrée sur l’étude de la littérature pour elle-même, et une approche plus traditionnelle, qui fait usage du texte littéraire pour enrichir les connaissances de la culture cible (histoire, société, politique, etc.) et améliorer l’expression dans la langue cible (par la traduction, l’apprentissage de vocabulaire, la discussion, etc.).

L’approche récente témoigne donc d’une ambition scientifique alors que l’approche traditionnelle utilise les textes littéraires avant tout comme support d’apprentissage. Ces deux approches se défendent, car l’enseignement supérieur des langues en Suède poursuit depuis quelques décennies un double objectif : fournir des connaissances langagières pratiques aux apprenants tout en les dotant des compétences nécessaires pour éventuellement poursuivre leurs études jusqu’à un doctorat (normalement dans l’un de ces domaines : littérature, linguistique, histoire de la langue, acquisition des langues secondes ou sciences culturelles). Pour le domaine littéraire, qui est au centre de la présente étude, cette circonstance soulève des questions didactiques majeures : à quel stade de l’apprentissage doit-on introduire l’étude scientifique de la littérature ? Quels supports littéraires se prêtent le mieux à l’apprentissage de la langue à chaque niveau ?

Afin d’apporter une réponse partielle à ces questions, la présente étude a eu recours à trois enquêtes par questionnaires adressées à des étudiants en langues étrangères à l’université de Stockholm entre 2021 et 2024. Respectant l’anonymat, les enquêtes soulèvent uniquement des questions didactiques. Elles sont précédées par un texte qui explique leur objectif : recenser les avis des étudiants afin d’améliorer la configuration des modules littéraires. La participation a été facultative : les répondants ont rempli un questionnaire en ligne qu’ils ont pu consulter en dehors des cours. Les enquêtes 1 et 2 portaient seulement sur la pratique de la littérature dans l’enseignement des langues. L’enquête 3 ajoutait des questions sur l’emploi du Tour de Gaule d’Astérix dans un cours de français au niveau A2. En effet, la bande dessinée se présente comme un support particulièrement intéressant à examiner dans le contexte des études supérieures. Sa légitimation pourrait y être jugée inappropriée selon une double logique : (1) l’âge adulte des étudiants dissuaderait l’emploi de textes que l’on associe habituellement aux jeunes lecteurs et (2) l’enseignement universitaire appellerait l’enseignement d’une littérature non populaire. Comme le résume Badrinathan (2021, p. 250), « [l]a bande dessinée a longtemps été considérée comme parent pauvre de la vraie littérature, critiquée comme étant infantile et non adapté aux adultes et à l’éducation. »

Nous ne connaissons pas de travaux semblables qui portent sur le rôle de la littérature dans l’enseignement supérieur suédois. Les didactiens suédois privilégient l’enseignement du suédois (Degerman, 2012) ou de l’anglais (Blå & Pettersen, 2014). Les études de l’enseignement de la littérature en cours de langues s’y centrent davantage sur le collège et le lycée (Marx Åberg, 2010 et Ulfgard, 2015). Les quelques études qui portent sur l’enseignement supérieur s’interrogent de préférence sur des questions d’ordre sociologique, comme la présence ou l’absence de certaines littératures dans les programmes (Lindberg et al., 2020) ou encore le partage entre auteurs français et francophones dans les manuels de FLE (Aronsson, 2019). Ainsi, la présente étude se veut une tentative d’établir un fondement empirique pour développer une réflexion sur la didactique des langues étrangères dans les études supérieures suédoises. Nous espérons cependant que nos observations ont une certaine portée générale. Dans ce dessein, nous tenterons de relier nos résultats aux travaux récents sur la didactique de la bande dessinée.

Le rôle des modules littéraires dans l’enseignement supérieur des langues

L’enquête 1

L’enquête 1 a été administrée en 2021 aux étudiants de français, espagnol et allemand à l’université de Stockholm. Le choix des langues s’explique par la spécialisation de trois collègues qui formaient avec nous un groupe de recherche travaillant sur la didactique de la littérature. L’enquête a ainsi été effectuée avec l’aide de Markus Huss (professeur d’allemand), Jasmin Belmar Shagulian (doctorante en espagnol) et Ken Benson (professeur d’espagnol). Comme elle date de la fin du semestre, seuls les étudiants ayant poursuivi leurs cours ont répondu. Elle compte 49 répondants, répartis entre les niveaux B1 et C1. Ces niveaux correspondent approximativement aux cours de Français/Espagnol/Allemand I, II, III et IV. Nous disons bien « approximativement », car ces cours transmettent des compétences générales et scientifiques qui dépassent largement la faculté communicative mise en avant par le CECRL. Couvrant chacun 30 ECTS, les cours forment la progression traditionnelle au niveau universitaire pour aboutir à la rédaction d’un mémoire de licence1. Afin de stimuler la réflexion personnelle des étudiants, le questionnaire comportait des affirmations sur lesquelles les étudiants devaient se positionner. Les options de réponse étaient : « pas du tout d’accord », « un peu d’accord », « ni l’un ni l’autre », « assez d’accord », « tout à fait d’accord » ou « je ne sais pas ».

Concernant l’affirmation « Les cours de littérature doivent avant tout être un moyen d’améliorer les compétences linguistiques » (Enquête 1, question 72), 53 % ont répondu « tout à fait d’accord » et 20 % « assez d’accord ». On remarque donc une tendance nette chez les étudiants à préférer l’approche traditionnelle de l’enseignement de la littérature dans leurs cours de langue. Quant à l’affirmation « Mise à part le fait qu’ils donnent des connaissances langagières, les cours de littérature doivent aussi fournir des connaissances en analyse littéraire » (Enquête 1, question 7), 41 % ont estimé ce propos assez juste, alors que 20 % ont été « tout à fait d’accord ».

L’adhésion à l’approche récente de la littérature apparaît donc nettement plus faible que celle à l’approche traditionnelle. Cela reste également vrai pour les étudiants qui avaient fait au moins deux semestres d’étude, et qui avaient alors suivi des modules littéraires plus scientifiques aux niveaux supérieurs. Selon eux, les modules littéraires devraient privilégier l’apprentissage de la langue et la discussion approfondie des phénomènes culturels plutôt que l’analyse littéraire. En même temps, les répondants sont assez ouverts à l’idée de suivre un enseignement plus scientifique de la littérature. En effet, seuls 6 % ont déclaré n’avoir aucune attente en matière d’acquisition de compétences littéraires avant d’entamer leurs études universitaires. 72 % ont estimé que les modules littéraires comportant des éléments d’analyse littéraire répondaient « assez bien » (33 %) ou « très bien » (39 %) à leurs attentes (Enquête 1, question 8). Ces données suggèrent que l’approche scientifique de la littérature est jugée légitime, mais qu’elle ne doit pas supplanter l’usage traditionnel de la littérature comme support d’apprentissage de la langue.

L’enquête 2

La deuxième enquête, menée avant le début des cours en janvier 2023, a inclus des répondants de l’université de Stockholm du niveau A1 jusqu’au niveau C1. Précisons qu’en Suède, un cours de langue s’étend sur un semestre, et non sur une année complète. L’étudiant peut donc entamer un cours, ou un programme, soit pendant le semestre d’automne soit pendant celui de printemps. Cela signifie que certains étudiants ayant participé à l’étude s’apprêtaient à suivre leur premier cours de langue (voire leur premier cours à l’université), tandis que d’autres avaient déjà achevé un ou plusieurs semestres d’études. Parmi les 113 réponses, 99 provenaient d’étudiants inscrits dans le département des études romanes et classiques (le français, l’italien, l’espagnol, le portugais, le latin et le grec), dont 80 appartenaient à la section de français. Parmi les 14 autres réponses, 10 concernaient l’allemand, tandis que 4 répondants n’ont pas spécifié leur langue étudiée.

Outre d’embrasser plus de langues, l’enquête 2 complétait la première en s’appuyant davantage sur l’expérience des étudiants. L’ambition était aussi de mieux préciser leurs attentes et leurs préférences. En utilisant une échelle de 1 à 5, où « 5 » indiquait la valeur maximale et « 1 » la valeur minimale, ils devaient estimer le degré d’importance que les modules devaient attacher à différents aspects de l’apprentissage. Les questions étaient formulées de manière à les inciter à indiquer leurs préférences personnelles plutôt que leurs attentes vis-à-vis du contenu supposé d’un cours universitaire.

Pour ce qui est de l’enseignement en général, 88 % des répondants ont attribué aux compétences langagières une valeur de 4 ou 5 (Enquête 2, question 8). Ce résultat montre l’importance accordée à la pratique de la langue dans l’enseignement au détriment des connaissances théoriques (non seulement de la littérature, mais aussi de la linguistique ou des sciences culturelles). De plus, pour bien évaluer ce chiffre, il faut savoir que certains étudiants inscrits dans ces cours de langue « étrangère » sont en réalité des locuteurs natifs. Ces étudiants n’ont probablement pas les mêmes besoins ni les mêmes attentes quant à l’étude de la langue elle-même. Malheureusement, le matériau empirique ne permet pas d’identifier les locuteurs natifs parmi les répondants. On peut toutefois supposer que les 88 % correspondent entièrement ou dans un très haut degré aux apprenants pour lesquels la langue étudiée est réellement une étude de langue étrangère.

En ce qui concerne les modules littéraires, 86 % des répondants se sont déclarés favorables à l’idée qu’ils doivent, eux aussi, se concentrer sur l’apprentissage de la langue, attribuant aux compétences langagières une valeur de 4 ou 5 (Enquête 2, question 9). Ce chiffre est à deux points près des 88 % observés pour les modules de phonétique, de prononciation et de grammaire. En d’autres termes, selon les apprenants, les modules littéraires devraient accorder presque autant d’importance aux éléments langagiers que ces autres modules. En revanche, seuls 40 % attribuent une valeur élevée (4 ou 5) à l’analyse littéraire.

Cela dit, l’intérêt pour les études littéraires augmente à mesure que les étudiants avancent dans leur parcours. Au niveau A1-A2, la valeur moyenne attribuée aux modules littéraires est de 2,7 sur 5 contre 4,1 sur 5 au niveau B2-C1. Cette évolution s’explique sans doute par l’amélioration de la capacité linguistique des étudiants, qui leur permet d’aborder des lectures et organiser des réflexions plus approfondies. Aux niveaux élémentaires, les étudiants déchiffrent bien plus difficilement le contenu du texte et ont par conséquent du mal à analyser le texte en profondeur. On peut donc supposer qu’ils ne perçoivent pas encore pleinement l’intérêt d’étudier l’analyse ou la théorie littéraires à ce stade de leur formation.

L’enquête 3

La troisième enquête a été distribuée en deux vagues : en novembre 2023 (semestre d’automne) et en avril 2024 (semestre de printemps). L’objectif était de déterminer les priorités des étudiants en matière de compétences à acquérir ainsi que d’évaluer la compatibilité de l’étude d’un album d’Astérix avec ces compétences. 26 étudiants inscrits à un cours de 15 ECTS au niveau A2, dispensé à l’université de Stockholm, ont répondu à l’enquête. Ce cours vise à préparer les étudiants au cours Français I. Ce dernier cours a longtemps constitué le premier niveau universitaire. L’étudiant devait avoir déjà acquis des compétences correspondant approximativement au niveau B1. En raison du déclin de l’enseignement de la langue française dans le système éducatif suédois, les universités proposent depuis une vingtaine d’années des cours de français pour débutants, dont ce cours, qui comprend 40 heures d’enseignement.

La population des étudiants s’inscrivant à ce type de cours est hétérogène. Certains viennent du cours préparatoire A1, offert par l’université de Stockholm ou une autre université, d’autres du lycée (avec parfois quelques années de décalage entre le baccalauréat et l’inscription à l’université). Il y a également des adultes qui reprennent leurs études de langue, certains d’entre eux travaillant ou vivant dans un contexte francophone, de même que des étudiants retraités. Non seulement l’âge, mais aussi le parcours universitaire, les connaissances générales et le niveau de français chez les participants varient fortement.

Les étudiants ont d’abord estimé l’importance qu’ils attribuaient à différents domaines abordés dans les cours universitaires de langue française (Enquête 3, question 1), sur une échelle de 1 à 5. « 5 » indiquait qu’ils accordaient une valeur maximale au domaine en question et « 1 » une valeur minimale. Les scores ont été convertis ci-dessous sur une échelle de 0 à 100. Ainsi, le résultat « 100 » correspondrait au cas hypothétique où les 26 répondants auraient choisi « 5 » pour tel domaine, donc lui accordant une valeur maximale3. Inversement, le résultat « 0 » correspondrait à 26 réponses de valeur « 1 » pour tel domaine. Ce procédé permet donc de synthétiser l’importance accordée à un certain domaine. Voici les résultats présentés par ordre décroissant4 :

Domaine Valeur
expression écrite 92
expression orale 90
phonétique et prononciation 85
linguistique et grammaire 82
connaissances sur la France 52
sciences culturelles 44
sciences littéraires 41

Il ressort clairement que les étudiants privilégient la maîtrise pratique de la langue cible (expression écrite et orale), entreprise soutenue en premier lieu par des connaissances langagières (phonétique, linguistique, grammaire). Les connaissances générales sur la France, ainsi que l’initiation à la culture et à la littérature françaises obtiennent des scores plus modestes, mais demeurent perçues comme des composantes acceptables du cours.

Apprendre le français au niveau A2 avec Astérix

Les modalités d’enseignement

Le Tour de Gaule d’Astérix raconte l’histoire où le héros éponyme, accompagné d’Obélix, collectionne des spécialités culinaires de diverses parties de la Gaule dans le but de braver les Romains, qui ont imposé un siège au village gaulois (l’objectif étant d’apporter les denrées comme preuve d’avoir pu voyager à leur aise). L’étude de l’album a été répartie sur cinq séances de deux heures. Or, comme l’étude littéraire n’occupe qu’environ une demi-heure par séance, l’enseignement consacré à l’album correspond à environ deux heures et demie au total. Pour chacune des cinq séances, les étudiants ont parcouru une dizaine de planches en avance. Leur première lecture s’est appuyée sur une batterie de questions de grammaire et de vocabulaire portant sur les premières pages de l’album, accompagnée d’un corrigé. Ils ont ensuite eu à réfléchir, pour chaque séance, à des questions générales sur les pages parcourues.

Le professeur a donné la primauté aux exercices pratiques, à l’étude de la grammaire et du vocabulaire, à la compréhension écrite et à la prononciation. On peut comparer cette pratique avec les cinq angles d’attaque principaux qu’offrent les albums d’Astérix selon Mutta (2018) : évènements historiques (pour la connaissance culturelle), expressions en latin, noms propres, connaissances interculturelles (notamment à partir de la notion de stéréotype), jeux de mots et intertextualité (pour la compétence interculturelle et intertextuelle). Aucun de ces domaines ne se rapporte à des compétences pratiques (par exemple décrire une image ou rendre compte d’une suite d’évènements). Ils ne se centrent pas non plus sur la langue comme système (par exemple l’apprentissage des temps verbaux ou l’étude des pronoms). Or ce sont justement ces types de compétences que le cours vise à aborder (et que les étudiants s’attendent à pratiquer). Encore une fois, le contexte éducatif s’avère décisif pour l’appréhension de la bande dessinée comme support (ou objet) d’apprentissage.

Les entrées énumérées par Mutta apparaissent donc secondaires dans le cadre de ce cours. Toutefois, elles ont été présentes. L’intrigue de l’album invite à une découverte de la civilisation française. Des explications ponctuelles de l’enseignant ont enrichi les échanges sans pour autant occuper une place centrale, conformément à l’idée qu’il faut d’abord comprendre le texte avant d’en analyser les implications. Pour en donner quelques exemples, on peut mentionner l’allusion à la fameuse partie de cartes (page 31), qui a donné lieu à l’exposition d’un clip bref tiré du film Fanny de Marcel Pagnol. Dans le même épisode, le professeur a expliqué le sens du lexème provençal fada ainsi que certaines « orthographes dialectales », comme Romaings au lieu de Romains. Par ailleurs, Astérix et Obélix arrivent à Marseille par la mer (page 30). Astérix remercie alors le propriétaire du bateau de les avoir « menés en bateau », ce qui a nécessité une explication du jeu de mots sur le sens propre et le sens figuré de l’expression « mener quelqu’un en bateau ».

Les modes d’évaluation de ce cours sont variés : test de compréhension orale, exposé, discussion, devoir écrit et examen final de grammaire et de vocabulaire. Les exposés ont été présentés par les étudiants au cours des séances. Ils devaient choisir une région antérieure à la réforme territoriale de 2016 ou bien un département ou une région d’outre-mer. Certains exposés portaient donc sur les différentes régions que parcourent Astérix et Obélix : la Bretagne, la Normandie, l’Île-de-France, la Picardie, la Champagne, la Lorraine, la Provence-Alpes-Côte d’Azur et l’Aquitaine. Dans la planification du cours, le professeur a harmonisé ces exposés avec le parcours des protagonistes. Ainsi, le groupe a pu écouter l’exposé sur la Normandie durant la séance pour laquelle ils avaient lu le passage en Normandie des héros de l’aventure. L’album servait également de support au devoir écrit : les étudiants devaient y présenter un évènement tiré de l’album sous la forme d’un fait divers, présenter quelques thèmes importants de l’album et décrire le contenu d’une case choisie par l’enseignant. Chaque réponse devait compter entre 100 et 150 mots.

La case constitue un format convenable pour la pratique descriptive au niveau A2. Elle invite à identifier des objets concrets comme vêtements, objets ou bâtiments, à décrire des scènes ou des paysages, de même qu’à situer les éléments dessinés spatialement. Dans cet exercice précis, les consignes stipulaient l’inclusion d’au moins une comparaison (d’où la présence de la phrase ci-dessous : « La maison à droite est plus haute que la maison à gauche ») de même que la présence de caractéristiques descriptives (d’où le syntagme « prisonnier aux cheveux blonds »). En voici un exemple représentatif, où l’on peut reconnaître la scène finale de l’album (nous donnons la réponse dans sa version non corrigée) :

Le soir est tombé, et les gaulois ont allumé un feu. La lune brille sur le beau paysage. Il y a deux maisons, entre lesquelles se trouve le feu. La maison à droite est construite dans l’arbre, qui pose une vue magnifique du ciel et de la forêt. Les toits des maisons sont en paille. La maison à droite est plus haute que la maison à gauche de l’image. Le prisonnier aux cheveux blonds est assis sur le balcon de cette maison dans l’arbre. Son visage est couvert d’un bandeau rouge. Les autres romains capturés sont situés sous l’arbre de l’autre côté de l’image. Le chien d’Obélix court avec un os dans la bouche. Le chien bouge plus vite que les romains, qui restent sur place. Le romain à la robe blanche est allongé sur le sol.

La rédaction du fait divers, qui était censé stimuler la créativité des étudiants tout en leur obligeant de pratiquer l’opposition entre l’imparfait et le passé composé, a donné des résultats très satisfaisants. En voici un exemple créatif :

Fête empêchée

Un couple romain étaient en train de fêter l’anniversaire de son mariage dimanche dernière en bateau pas loin de Rouen quand ils ont été interrompus par deux jeunes hommes. Les hommes, qui ont embarquées directement de la Seine, n’ont fait aucun effort de se déguiser. « Au début je croyais qu’ils étaient les pauvres, et j’ai demandé à mon mari de leur laisse voyager avec nous », dit Flavia, 45. L’ambiance a changé quand un des hommes a sauté à l’eau et a commencé de pousser le bateau très fort et l’autre a pris le commandement du gouvernail. Le voyage n’a pas fini jusqu’au Paris, où les hommes ont quitté le bateau et ont disparus dans la foule. « Apres Rouen, la croisière n’était pas romantique du tout » était le seul commentaire de Faimoiducuscus, 50.

L’étudiant.e a parfaitement saisi l’intention de l’exercice en transformant la page 12 dans l’album en nouvelle journalistique, imaginant des commentaires des personnages et leur attribuant un âge imaginaire (ce dernier trait de style, « Faimoiducuscus, 50 », est emblématique de certains tabloïds suédois). Dans un autre exemple, l’étudiant.e a intitulé son journal imaginaire Le Romonde, créant un mot-valise par la combinaison astucieuse de Rome et du Monde, opération impressionnante au niveau A2 et également indicatrice d’une certaine connaissance des médias français !

La valeur didactique du Tour de Gaule d’Astérix

Toujours dans l’enquête 3, les étudiants ont évalué l’utilité de l’album pour la pratique des compétences clés susmentionnées : expressions écrite et orale, phonétique et prononciation, linguistique et grammaire, connaissances sur la France, sciences culturelles, sciences littéraires (Enquête 3, question 2). Ce questionnaire ne proposait que quatre options : « pas bien », « assez bien », « très bien » ou « parfaitement bien ». On note ici l’omission de l’option « bien », qui aurait trouvé sa place au milieu de l’échelle entre « assez bien » et « très bien ». Ce choix visait à rendre plus manifeste une éventuelle appréciation positive chez l’étudiant selon l’idée qu’il fallait être vraiment favorable à l’emploi de l’album pour marquer une réponse positive. Cependant il est difficile de dire si cette stratégie a été fructueuse : l’étudiant a tout aussi bien pu être induit à mettre « très bien » alors qu’il trouvait l’appréciation seulement « bien ».

Comme pour l’enquête 2, toutes les réponses ont été recalculées sur une échelle de 0 à 100. Les options correspondent aux valeurs moyennes suivantes : « pas bien » (0), « assez bien » (33,3), « très bien » (66,6) et « parfaitement bien » (100). Afin de fournir un point de comparaison, nous ajoutons entre parenthèses les valeurs qu’aurait données l’enquête si nous avions inclus l’option « bien ». L’échelle aurait alors été la suivante : « pas bien » (0), « assez bien » (25), « bien » (50), « très bien » (75) et « parfaitement bien » (100). En voici les résultats collectifs, par ordre décroissant :

Domaine Valeur
expression orale 74 (75)
linguistique et grammaire 74 (77)
connaissances générales sur la France 74 (75)
expression écrite 72 (71)
sciences culturelles 68 (70)
sciences littéraires 62 (66)
phonétique et prononciation 49 (49)

Comme on peut le voir, le résultat a été positif. La moyenne de tous les résultats, ou la « valeur pédagogique » du Tour de Gaule d’Astérix, tous les domaines mis ensemble, est de 67,6 sur 100. Cela dépasse de justesse la valeur correspondant à « très bien » (66,6) d’après l’échelle utilisée. Cette moyenne masque toutefois d’importantes variations entre les différents aspects étudiés. Pour les compétences linguistiques et culturelles, la moyenne est plus élevée (de 68 à 74). Un public universitaire estime donc « très bien » pouvoir développer ses compétences communicatives et culturelles en travaillant avec Astérix. La moyenne est plus faible pour l’étude littéraire (62), mais cette valeur demeure pourtant proche de celle correspondant à « très bien ». Ces résultats demeurent positifs, mais légèrement plus faibles, si l’on inclut la réponse hypothétique « bien ». Quant à la valeur moyenne pour la phonétique et la prononciation (49), elle se situe entre les appréciations « assez bien » (33,3) et « très bien » (66,6). Elle correspond donc parfaitement à la réponse hypothétique « bien ».

L’attitude générale des répondants envers l’album d’Astérix corrobore leur appréciation positive de son efficacité pour l’apprentissage. Ils devaient indiquer leur accord ou désaccord sur cinq affirmations (Enquête 3, question 3), disposant de cinq options : « pas du tout d’accord », « plutôt pas d’accord », « ni l’un ni l’autre », « plutôt d’accord » ou « tout à fait d’accord ». Ici aussi, les réponses ont été converties sur l’échelle 0-100, ce qui donne le barème suivant : « pas du tout d’accord » (0), « plutôt pas d’accord » (25), « ni l’un ni l’autre » (50), « plutôt d’accord » (75) et « tout à fait d’accord » (100).

Les deux premières affirmations reprenaient des arguments fréquemment employés pour justifier le rejet de l’emploi de la bande dessinée dans l’enseignement supérieur, et même dans l’enseignement en général : (1) il n’est pas sérieux d’étudier Astérix à l’université ; (2) les jeux de mots et les allusions posent trop d’obstacles pour employer Astérix dans l’enseignement aux niveaux élémentaires. Or, les étudiants ne soutiennent pas ces affirmations. La première affirmation a reçu la valeur 1 sur 100, ce qui veut dire que tous les étudiants sauf un.e seul.e rejettent l’idée qu’il ne serait pas sérieux d’étudier Astérix au niveau universitaire. On peut ainsi tirer la conclusion que c’est un objet d’étude adéquat à leurs yeux. Quant aux difficultés que poserait l’emploi particulier de la langue dans l’album, l’affirmation a atteint seulement 11 sur 100. En d’autres termes, les étudiants ne perçoivent guère d’obstacles majeurs d’ordre linguistique quant à l’étude des albums d’Astérix au niveau A2.

Les trois autres affirmations étaient conçues pour examiner si certaines caractéristiques de la bande dessinée facilitaient l’apprentissage de la langue : (1) l’emploi fréquent des temps du discours, par opposition à ceux du récit (Benveniste), (2) la relation entre texte et image et (3) les unités discursives brèves. Pour la première caractéristique, on peut noter que le langage parlé recourt abondamment aux formes verbales pratiquée au niveau A2 (le présent, le futur, le passé composé, l’impératif et le conditionnel). La moyenne pour les trois propositions a été très élevée : 88 sur 100 pour les temps du discours ; 90 sur 100 pour la relation entre texte et image ; 91 sur 100 pour les unités discursives brèves. Ce résultat indique clairement que les étudiants ont trouvé facilitatrices ces trois caractéristiques.

Astérix vs Meursault

Il peut enfin être intéressant de relever les résultats concernant la mise en comparaison que l’enquête a encouragé les étudiants à opérer entre leur expérience d’avoir étudié Le Tour de Gaule d’Astérix et la première partie de L’Étranger. Le roman de Camus est depuis longtemps enseigné dans les études supérieures en Suède, pour plusieurs raisons. C’est un classique qui offre une entrée dans la pensée de l’absurde et de l’existentialisme. Le texte est accessible grâce à sa syntaxe simple, sa narration dépourvue d’ambiguïté (une seule perspective et un seul narrateur) et l’absence de passé simple (à quelques exceptions près).

Comme pour la lecture d’Astérix, les étudiants avaient accès à des questions auxquelles répondre au fil de la lecture, travail suivi par des activités en classe. Or, les étudiants ont seulement lu la première partie de L’Étranger (donc jusqu’au meurtre commis par Meursault). Ils n’ont donc pas eu une image d’ensemble de l’œuvre (même si certains avaient certainement déjà lu ce roman classique en suédois). Ils ont également bénéficié d’un glossaire bilingue, ce qui faisait défaut pour l’étude d’Astérix. Dans l’évaluation finale, consistant en un examen en salle de grammaire et de vocabulaire, tout le vocabulaire était basé sur celui du roman (modalité indiquée aux étudiants au début du semestre).

Les apprenants estiment avoir consacré un temps de travail comparable pour étudier les deux ouvrages, mais affirment avoir appris un peu plus de français grâce à l’étude d’Astérix (Enquête 3, question 4). Ils ont trouvé la bande dessinée plus facile à lire que le roman de Camus (donc malgré son glossaire), avec l’avantage non négligeable de provoquer chez eux un plus grand enthousiasme tout en les amusant. Fait étonnant, Le Tour de Gaule d’Astérix apparaît également, à leurs yeux, comme un texte plus intéressant que L’Étranger. Les étudiants ont donc préféré la lecture du Tour de Gaule d’Astérix à celle de L’Étranger, tant pour l’expérience de la lecture que pour l’apprentissage de la langue.

On peut cependant s’interroger sur la validité de ce résultat. Comme on vient de la voir, les conditions de l’apprentissage différaient sur plusieurs points. Le nombre de répondants était assez bas. Nous ne savons pas non plus ce qu’aurait été le résultat si l’on avait mené l’enquête dans le sens inverse, en partant de leur appréciation de L’Étranger. Ainsi, le propos de Mutta (2018, p. 96) sur la valeur didactique de la bande dessinée décrit bien notre expérience de travailler avec l’album d’Astérix, mais il n’est sans doute pas pour autant valable pour le genre en tant que tel :

[…] l’enseignant peut faciliter l’apprentissage en classe scolaire en offrant aux apprenants des moyens d’apprentissage comme la lecture des BD pour les raisons suivantes : elles sont faciles à aborder, divertissantes, aident à améliorer plusieurs compétences, représentent un matériel réel et significatif, augmentent la créativité et l’imagination, et, par conséquent, la motivation d’apprendre.

Discussion

Comme la problématique étudiée s’inscrit dans le contexte particulier de l’enseignement supérieur des langues en Suède, ce n’est tâche aisée de confronter les résultats à la recherche sur la didactique de la littérature dans la scolarisation française ou francophone. Chaque système impose ses conditions particulières ; chaque cours est conçu pour atteindre ses objectifs d’apprentissage visés ; le public adulte se distingue bien évidemment du public scolaire, collégien ou lycéen ; la question de la littératie ne pose pas les mêmes défis au niveau universitaire que dans un système scolaire ; les conditions d’apprentissage diffèrent fondamentalement pour un étudiant en FLE et un élève qui étudie sa langue maternelle, etc. Et, même si le cadre du FLE et l’étude de la bande dessinée rétrécissent le champ d’investigation, les contextes éducatifs sont parfois loin d’être comparables. Comme le montre Blancher (2012), la relation historique franco-allemande peut influer sur la réception d’une lecture d’Astérix dans un lycée suisse allemand (alors que la Suède est restée neutre durant les deux guerres mondiales) ; le fait que la Suisse compte le français parmi ses langues officielles donne un autre statut du FLE qu’en Suède. C’est donc en étant attentif à toutes sortes de différences qui conditionnent ou influencent la pratique que l’on entrera prudemment en dialogue avec la recherche récente sur l’emploi didactique de la bande dessinée dans l’enseignement francophone.

On peut alors noter que la question du statut de la bande dessinée dans le champ littéraire universitaire en Suède montre une certaine affinité avec la situation décrite par Blancher (2012, p. 288), qui mentionne « les nombreuses réticences que [lui] a values en Allemagne, de la part du corps enseignant, le fait d’avoir proposé un cours sur Astérix à l’université. » L’auteur de cette étude peut témoigner d’une expérience semblable. L’emploi de la bande dessinée dans le milieu universitaire suédois reste très rare, tout comme en France, où elle est « quasiment absente des cursus universitaires », à en croire Blanchard et Raux (2019, par. 4). De même, « sa place au sein des programmes scolaires reste malgré tout fragile », constatent Baroni et Turin (2021, par. 1). Cette place est encore plus réduite si l’on suit la distinction utile de Giroud (2021), entre les bandes dessinées fabriquées pour l’enseignement et les bandes dessinées authentiques : cette dernière variante reste bien plus rare dans les manuels de FLE. Baroni et Turin (2021, par. 1) notent cependant « la reconnaissance de la valeur culturelle de la bande dessinée, durement conquise au cours des dernières décennies », tendance également visible auprès des enseignants dans les écoles, les collèges et les lycées, où la bande dessinée « gagne en légitimité », selon Depaire (2019, p. 11). Il semble alors que le statut de la bande dessinée dans le champ littéraire soit plus élevé dans au moins certaines parties de la francophonie qu’en Suède.

Liée à celle du statut littéraire, la question de l’appartenance générique de la bande dessinée – genre littéraire ou paralittéraire ? – revient avec insistance dans les travaux francophones. Déjà en 2010, Missiou et Anagnostopoulou (p. 214), en se référant à une étude de Versaci datant de 2007, estime qu’il est « largement accepté » de considérer la bande dessinée comme une « œuvre littéraire ». Pour Boutin (2012), la bande dessinée est une part essentielle de la littératie et ne saurait être catégorisée comme de la paralittérature. En 2019, Rouvière classe la bande dessinée comme une forme de littérature (Rouvière & Raux, 2019, par. 1). Pourtant, en 2021, Baroni et Turin (par. 9) reposent toujours la question de savoir si l’on peut « considérer la bande dessinée comme une forme de littérature ». Et Béguin (2021, par. 68) de constater : « le problème de sa classification disciplinaire reste irrésolu ». Le problème est de taille, puisque la désignation de la bande dessinée comme de la littérature lui donnerait une tout autre « légitimation littéraire » (Rouvière & Raux, 2019, par. 1) et, par conséquent, une autre place dans le système éducatif.

Selon Rouvière (2012, p. 103), la précision de sa nature ouvrirait aussi la voie à une théorisation nécessaire qui fait encore défaut : « L’étude de la bande dessinée en classe demeure encore aujourd’hui marginale […]. Parmi les facteurs d’explication, force est de constater qu’il manque en amont une théorisation didactique pour accompagner et précadrer l’étude littéraire des œuvres de BD. » Cette théorisation guiderait alors les enseignants à élaborer une didactique comme il faut : « lorsqu’elle n’est pas ignorée, la bande dessinée est souvent sous-utilisée, voire mal utilisée », disent Blanchard et Raux (2019, par. 4). Selon ces chercheures, le mauvais emploi se définit en particulier par une « instrumentalisation réductrice du médium » (par. 22), donc par l’utilisation de la bande dessinée comme support d’apprentissage au lieu d’objet d’apprentissage.

Encore faudrait-il décider ce qui constitue cet objet : uniquement sa multimodalité ou encore la culture qu’elle exprime ? Langhans et al. (2019, par. 1) incluent les deux paramètres, estimant que les albums « peuvent […] devenir objet d’enseignement lorsque la mise en œuvre pédagogique met l’accent sur la dimension culturelle et esthétique des œuvres étudiées. » En tout cas, trouver la didactique correcte de la bande dessinée étudiée pour elle-même, grâce à la théorisation de l’objet, semble être un défi majeur aux didacticiens en littérature, de Rouvière (2012, 2021) à Hamez (2022).

Dans le contexte éducatif suédois, l’emploi de la bande dessinée n’a pas tant besoin d’une reconnaissance institutionnalisée, d’une conceptualisation générique ou d’une théorisation « précadrante ». Certes, le professeur de littérature travaillant dans un département de langue est lui aussi confronté aux problèmes didactiques liés à la nature de l’objet étudié : faut-il utiliser le texte littéraire comme support ou objet d’apprentissage ? Or, l’introduction dans l’enseignement du neuvième art s’y fera suivant les initiatives des professeurs, et sa destinée universitaire dépendra avant tout de son effet pédagogique, sa compatibilité avec les objets d’apprentissage visés et la réponse qu’il provoque chez les apprenants. Pour le dire de façon très simple, si l’emploi de la bande dessinée fonctionne bien par rapport aux paramètres du cours, on l’utilisera.

Enfin, il peut être intéressant de mettre en perspective les réactions positives des apprenants dans l’enquête 3 en ce qui concerne la lisibilité de la bande dessinée. Nombreuses sont les études qui affirment le contraire, insistant sur les obstacles didactiques que pose ce genre multimodal. Dans son bilan de la bande dessinée à l’école, au collège et au lycée, Depaire (2019, p. 29) énumère au moins une bonne dizaine de facteurs épineux pour l’élève (la mise en page, l’ordre de lecture, la prolifération des détails dans l’image, le nombre élevé de cases, la reprise d’un personnage dans les différentes cases, les rapports d’association entre le texte et les images, les effets de disjonction ou d’humour, la typographie manuscrite, les polices fantaisistes, l’écart entre les mots et la ponctuation). Raux (2021) souligne les difficultés de lecture au collège ; Polo et Rouvière (2019), tout comme Langhans et al. (2019), le font pour le lycée. Dans un cours de FLE pour lycéens, Blancher (2012, p. 301) témoigne même de la difficulté d’expliquer des éléments du récit : « nombre d’allusions, clins d’œil ou références culturelles échappent fatalement aux germanophones, en dépit des efforts d’explicitation du professeur ». À l’instar de Rouvière et Raux (2019, par. 3), ces études concordent pour dénoncer « le préjugé tenace selon lequel la bande dessinée serait une lecture “facile” ».

Cependant plusieurs études, dont la nôtre, soutiennent ce « préjugé ». Prenant le contrepied de Blancher (2012), Mutta (2018, p. 94) estime que les jeux de mots et les références dans Astérix offrent au professeur l’occasion de « bien travailler en classe avec les élèves pour leur faire enseigner/apprendre des faits interculturels qu’offre la source multimodale. » D’autres études s’appuient sur la réaction positive de la part des apprenants concernant la relation texte-image de la bande dessinée. Les deux enquêtes menées par Badrinathan (2021) dans un cours universitaire au niveau A2+ montrent que 90 % et 98 % des apprenants estiment que la compréhension est facilitée par le rôle des images. Il est rejoint par Boudechiche (2021), pour qui la bande dessinée « représente un moyen non négligeable pour la compréhension » au niveau universitaire grâce à la relation texte-image. Yağlı (2022) arrive à la même conclusion dans son étude sur l’emploi de la bande dessinée à l’école ; Aydoğu (2015) le fait pour un cours scolaire du niveau B1 ; Missiou et Anagnostopoulou (2010) le font pour un cours au collège. Sur le plan théorique, Blanco-Cordon (2012) et Hamez (2021) soulignent que la multimodalité de la bande dessinée devrait en faciliter la compréhension.

Ces résultats divers montrent jusqu’à quel point la didactique de la bande dessinée demeure complexe. En revenant au fil conducteur de notre discussion tâtonnante, nous voudrions clore cette section en insistant encore sur la nécessité de contextualisation, qu’il s’agisse de la difficulté (ou non) d’aborder le neuvième art comme support (ou objet) d’apprentissage, son statut dans tel champ littéraire ou sa place dans tel système éducatif. Les quelques observations que nous avons pu faire dans cette section sont alors à prendre comme des suggestions à développer et à examiner dans des futures études.

Conclusion

Les enquêtes présentées dans cette étude révèlent un décalage entre les préférences des étudiants en langue étrangères à l’université de Stockholm et la place qu’occupe souvent la littérature dans les cursus. Jusqu’au niveau B1 inclus, les apprenants privilégient l’approche traditionnelle : la littérature doit en premier lieu demeurer un moyen pour maîtriser la langue française et s’initier à la culture française. Cette tendance s’applique aussi bien aux cours de langue dans leur ensemble qu’aux modules littéraires qui en font partie. Ce n’est qu’à partir du niveau B2 qu’une proportion croissante d’apprenants manifeste un intérêt pour l’analyse des œuvres en tant qu’objet d’étude scientifique, rejoignant la tendance récente à enseigner la littérature. En fournissant des données empiriques encore rares dans le contexte suédois, marqué depuis quelques décennies par l’essor de l’analyse littéraire dans les cursus universitaires, cette étude précise que les attentes évoluent selon le niveau CECRL et qu’un enseignement trop tôt orienté vers l’analyse littéraire risque de créer des tensions avec les attentes des apprenants.

Les résultats concernant l’utilisation du Tour de Gaule d’Astérix reposent sur une base empirique limitée, et la comparaison avec L’Étranger n’est pas sans montrer quelques faiblesses méthodologiques. Toutefois, les tendances sont trop saillantes pour être ignorées. Les étudiants reconnaissent la valeur didactique de l’album comme support d’apprentissage au niveau A2 : la relation entre texte et image, les brèves séquences discursives et l’emploi fréquent des temps verbaux du discours facilitent la compréhension du récit. La confrontation entre la bande dessinée et L’Étranger a également joué en faveur d’Astérix. Enfin, le fait que 25 répondants sur 26 jugent tout à fait légitime l’étude du neuvième art à l’université semble s’inscrire dans un changement de paradigme qui n’est pas limité à la Suède : la bande dessinée est désormais reconnue comme une matière sérieuse, digne de figurer dans les cursus de langues étrangères, y compris pour un public adulte.

Des enquêtes complémentaires, couvrant l’ensemble des niveaux de FLE et tenant compte de variables non considérées dans la présente étude (par exemple : âge, parcours universitaire antérieur, séjour en pays francophone, langue maternelle, connaissances préalables, objectif des études entreprises) permettraient de préciser ces tendances et d’examiner leur lien avec des indicateurs comme le taux de réussite ou la distribution des notes. À ce propos, il serait particulièrement intéressant d’examiner si la bande dessinée pourrait, au niveau intermédiaire, soutenir à la fois le développement linguistique et l’initiation à une approche scientifique du texte multimodal. Le neuvième art se présenterait alors comme un genre adéquat pour servir de passerelle entre ce que nous avons appelé l’approche traditionnelle (la littérature comme support d’apprentissage) et l’approche récente (la littérature comme objet d’apprentissage).

Bibliography

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Rouvière, N. (2021). Quelle didactique pour la bande dessinée ? Retour sur trois tournants théoriques de la décennie 2010-2020. Transpositio, 4, Enseigner la bande dessinée comme (de la) littérature. https://www.transpositio.org/articles/view/quelle-didactique-pour-la-bande-dessinee-retour-sur-trois-tournants-theoriques-de-la-decennie-2010-2020.

Rouvière N. & Raux, H. (2019). Quelles perspectives pour une didactique de la BD en classe de littérature ? Tréma, 51. https://doi.org/10.4000/trema.5209.

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Yağlı, A. (2022). Utilisation de la bande dessinée dans l’enseignement de langue étrangère aux enfants : l’exemple du « Petit prince » d’Antoine de Saint-Exupéry. Atatürk Üniversitesi Edebiyat Fakültesi Dergisi, 1(68), 43-50. https://doi.org/10.5152/AUJFL.2022.987609.

Appendix

Enquêtes

Enquête 1 : Le rôle de la littérature dans les cours de langues

Novembre-décembre 2021. 49 répondants.

 

1. À quel niveau étudiez-vous ou avez-vous étudié les langues étrangères ce semestre ?

2. Avez-vous l’intention de continuer vos études de langue après ce semestre ?

3. Si vous aviez déjà suivi des cours de littérature, indiquez-en le nombre de crédits.

4. Quels cours aviez-vous suivis dans la langue que vous avez étudiée avant de commencer le niveau I ?

5. Pensez-vous avoir eu suffisamment de connaissances préalables de la langue en question pour suivre le cours ?

6. Avant vos études ce semestre, quelle importance accordiez-vous aux éléments suivants ?

  • Développer mes compétences linguistiques pratiques
  • Acquérir de solides connaissances de la langue étudiée sur le plan théorique
  • Acquérir une connaissance plus approfondie de la culture et de la société des pays où la langue est parlée
  • Apprendre à étudier la littérature de manière scientifique

7. Dans quelle mesure les affirmations suivantes sont-elles conformes à idée de la manière dont les études littéraires devraient être conçues dans le cadre de l’enseignement des langues étrangères ?

  • Elles devraient avant tout être un moyen d’améliorer vos compétences linguistiques.
  • Elles doivent avant tout fournir un aperçu plus approfondi de la culture liée à la langue que vous étudiez.
  • En plus des compétences linguistiques, elles devraient fournir des compétences en analyse littéraire

8. Dans quelle mesure le(s) cours de littérature ont-ils répondu à vos attentes ?

  • Améliorer vos compétences linguistiques

  • Acquérir une connaissance plus approfondie de la culture associée à la langue que vous étudiez
  • Acquérir des connaissances littéraires

9. Si vous repensez aux cours de littérature que vous avez suivis au niveau I, que pensez-vous de leur conception aujourd’hui ?

  • Ils auraient dû se concentrer davantage sur l’apprentissage des langues
  • Ils auraient dû se concentrer davantage sur la culture et la société
  • Ils auraient dû inclure davantage d’analyses littéraires.

10. En plus des connaissances en littérature, dans quelle mesure les cours de littérature ont-ils contribué aux connaissances et compétences générales suivantes ?

  • Étudier sur une base scientifique
  • Interpréter les informations de manière critique
  • Discuter des questions et des problèmes en dialogue avec les autres étudiants
  • Identifier et résoudre les problèmes de manière autonome

11. Selon vous, quelle serait la modification la plus importante pour améliorer les cours de littérature dans la langue que vous avez étudiée ?

12. Autres commentaires

Enquête 2 : Le rôle de la littérature dans les cours de langues

Janvier 2021. 113 répondants.

 

1. Genre

2. Âge

3. Est-ce votre premier semestre d’études universitaires 

4. Quelle langue étudiez-vous au semestre de printemps 2023 ?

5. À quel niveau étudiez-vous les langues ce semestre ?

6. Quel(s) cours avez-vous déjà suivi(s) dans la langue que vous allez étudier au niveau I ?

7. Inscrivez le nombre de crédits des cours d’études littéraires que vous avez déjà suivis avant ce semestre.

8. Dans la préparation de vos études ce semestre, quelle importance accordez-vous aux éléments suivants ? Veuillez indiquer votre estimation sur une échelle de 1 à 5, où 5 indique le poids le plus lourd et 1 indique un poids négligeable.

  • Améliorer vos compétences linguistiques, orales et écrites
  • Acquérir des connaissances linguistiques plus approfondies
  • Acquérir une connaissance plus approfondie de la culture associée à la langue que vous étudiez
  • Acquérir des connaissances littéraires
  • Améliorer les compétences générales (par exemple, la culture scientifique, la pensée critique, la capacité à rechercher et à comprendre des informations)

9. En utilisant cette même échelle, quelle importance pensez-vous que les cours de littérature dans la langue que vous étudiez devraient accorder aux aspects suivants ?

  • L’amélioration de la langue (par exemple par le biais de commentaires de textes, de discussions, de traductions, d'études de grammaire à partir de textes lus)
  • Offrir un aperçu plus approfondi de la culture contemporaine liée à la langue que vous étudiez (par exemple, une meilleure compréhension de la société grâce à la lecture d'ouvrages mettant en lumière des sujets d’actualité)
  • Fournir des connaissances sur le patrimoine culturel lié à la langue que vous étudiez (par exemple en lisant des œuvres célèbres, en étudiant l'histoire littéraire, l’art et le cinéma)
  • Fournir des compétences en analyse littéraire, méthode et théorie

10. Si vous repensez aux cours de littérature que vous avez suivis aux niveaux précédents dans la langue que vous étudiez actuellement, que pensez-vous de leur conception ?

  • Ils auraient dû se concentrer davantage sur l’apprentissage des langues
  • Ils auraient dû être plus orientés vers la culture et la société d’aujourd’hui
  • Ils auraient dû couvrir davantage la littérature classique
  • Ils auraient dû couvrir davantage l’analyse littéraire et la méthodologie littéraire

11. Dans un cours de langue de 30 crédits, combien de crédits pensez-vous qu'il faudrait consacrer aux études littéraires ?

12. Y a-t-il un problème particulier concernant l’enseignement de la littérature dans le cadre des études supérieures de langues que nous n’avons pas abordé dans cette enquête ? Veuillez écrire vos éventuelles suggestions de questions à inclure dans les futures enquêtes !

Enquête 3 : Astérix au niveau A2

Décembre 2023 et Avril 2024. 26 répondants.

 

1. Indiquez l’importance que vous accordez aux différents éléments du cours. « 5 » correspond au poids le plus élevé et « 1 » au poids le plus bas :

  • Compétences pratiques en rédaction
  • Compétences orales pratiques
  • Linguistique et grammaire
  • Phonétique et prononciation
  • Enseignement général sur la France
  • Études culturelles et patrimoine culturel
  • Études littéraires et analyse littéraire

2. Dans quelle mesure pensez-vous que l’album d’Astérix a fonctionné – ou pensez-vous qu’il pourrait fonctionner – pour pratiquer les différents éléments du cours suivants ?

  • Compétences pratiques de rédaction
  • Compétences orales pratiques
  • Linguistique et grammaire
  • Phonétique et prononciation
  • Enseignement général sur la France
  • Formation générale sur les pays francophones
  • Études culturelles et patrimoine culturel
  • Études littéraires et analyse littéraire

3. Prenez position sur les affirmations suivantes concernant les choix littéraires et les albums de dessins animés.

  • Il n’est pas sérieux d’avoir des albums de dessins animés sur la liste bibliographique d’un cours universitaire.
  • Les jeux de mots et les références implicites de l’album Astérix le rendent impropre à l’enseignement du français langue étrangère.
  • Le texte limité des albums de bandes dessinées (lignes courtes et encadrés explicatifs) est favorable à l’apprentissage des langues à des niveaux élémentaires.
  • La relation entre texte et image est favorable à l’apprentissage des langues à des niveaux élémentaires.
  • Les réponses « au présent » (souvent au présent, à l’impératif et au futur périphrastique) au lieu d’un texte narratif au passé (souvent à l'imparfait, au passé composé, au plus-que-parfait et au conditionnel) sont favorables à l’apprentissage du français à des niveaux élémentaires.

4. Comparez vos études de l'album Astérix avec celles que vous avez consacrées à L'Étranger.

  • J'ai passé plus de temps sur Astérix.
  • C'était plus amusant de lire Astérix.
  • C'était plus facile de lire Astérix.
  • C'était plus intéressant de lire Astérix.
  • C'était plus linguistique de lire Astérix.

5. Autres commentaires.

Notes

1 Le français et l’espagnol placent le mémoire de licence le quatrième semestre, l’allemand le troisième. Le cours « Allemand IV » n’existe donc pas. Return to text

2 Dans nos présentations des enquêtes, nous mentionnerons uniquement les questions qui sont pertinentes pour la présente étude. Dans l’annexe, on trouvera une liste de toutes les questions posées. Return to text

3 La somme totale des réponses pouvait donc aller de 26 à 130. 26 correspondent à 0 et 130 à 100 sur la nouvelle échelle. On convertit ainsi, par exemple, un score de 32 de la manière suivante : (32-26)/(130-26) = 6 % → valeur 6. Return to text

4 Par sciences (idem pour « sciences littéraires »), on entend ici une approche qui dépasse la connaissance générale de la culture ou de la littérature pour aborder la théorisation soit culturelle soit littéraire. Return to text

References

Bibliographical reference

Hans Färnlöf, « Le rôle de la littérature dans l’enseignement supérieur des langues étrangères en Suède – enseigner le français avec Le Tour de Gaule d’Astérix au niveau A2 », Didactique du FLES, 4:2 | 2025, 99-119.

Electronic reference

Hans Färnlöf, « Le rôle de la littérature dans l’enseignement supérieur des langues étrangères en Suède – enseigner le français avec Le Tour de Gaule d’Astérix au niveau A2 », Didactique du FLES [Online], 4:2 | 2025, Online since 18 décembre 2025, connection on 19 décembre 2025. URL : https://www.ouvroir.fr/dfles/index.php?id=1791

Author

Hans Färnlöf

Professeur des universités en littérature française au département des études romanes et classiques de l’Université de Stockholm en Suède, Hans Färnlöf compte presque trente années d’expérience d’enseignement à l’université, du niveau débutant jusqu’à la formation doctorale. Il a également enseigné en Espagne et au Portugal dans le programme Erasmus et à l’université de Brest comme professeur invité. Responsable pédagogique de programmes et de cours en littérature et langue françaises, il a participé à de nombreux projets pédagogiques.

hans.farnlof@su.se

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